Victor Hugo
Où naît la falaise,
la dune meurt.
Lien avec le territoire :
Dans cette lettre écrite à son épouse, Adèle, le 8 septembre 1837, Hugo décrit sa promenade sur la plage qui relie les falaises d’Ault à Saint-Valéry-sur-Somme. Il traverse une zone marécageuse et désertique appelée le hâble d’Ault. Cette réserve protégée correspond à l’ancienne embouchure de la Baie de Somme comblée depuis par des dépôts alluvionnaires. En effet la Baie s’étendait à l’époque gallo-romaine de Quend au Nord jusqu’à Ault au sud et était composée d’îlots qui auraient permis l’implantation de quelques foyers notamment à Cayeux et au Crotoy.
Victor Hugo,
En voyage
Où naît la falaise, la dune meurt. La dune meurt dignement dans une grande plaine de sable de huit lieues de tour qu’on appelle le désert et qui sépare le Bourg d’Ault, où la falaise commence, de Cayeux, village presque enfoui dans les sables, où finit la dune.
Il m’a fallu traverser ce désert à pied. Le nom n’est, en vérité, pas trop grand pour la chose. Figure-toi, chère amie, une immense solitude bornée à l’horizon par de vagues collines. Pas un homme, pas une cabane, pas un arbre.
On marche ainsi trois grandes heures. La mer se rue souvent sur ces plaines et jette sur le sommet de toutes les basses ondulations de sable dont elle est formée comme une lèpre de galets. Dans les petites vallées que ces ondulations laissent entre elles, il pousse du gazon maigre et court. Rien dans ces landes ne rappelle la vie dont nous vivons et le monde auquel nous tenons, si ce n’est une batterie qu’on rencontre de distance en distance au bord de la mer avec quelques canons qui font ce qu’ils peuvent pour avoir un air de force et de puissance, mais à chaque marée l’océan crache dessus.
À six heures, j’entrais à Cayeux. J’étais vraiment las. Depuis midi je marchais au soleil dans les sables et dans les galets. À Cayeux, j’ai quitté mon guide, je l’ai payé et je lui ai indiqué son chemin pour s’en revenir.
J’ai eu là un bonheur. Il me restait deux lieues à faire à pied pour gagner Saint-Valéry-sur-Somme, et j’en étais effrayé. Je rêvais assez mélancoliquement à cette route, tout en suivant la trace de petites croix que les pattes d’un pigeon avaient laissées sur le sable. En ce moment-là un bon gros fermier passait dans sa carriole, il m’a aperçu au milieu des monticules de poussière impalpable où s’enlisent les masures de Cayeux; il paraît que je lui ai plu, et il m’a offert l’hospitalité dans sa carriole. Il allait comme moi à Saint-Valery. J’ai accepté vivement, et puis il s’est trouvé que c’était de la vraie hospitalité, plante fort rare; car lorsque j’ai voulu offrir un prix quelconque à ce brave homme, il s’est presque offensé. J’ai’ dû me résigner à voyager gratis. Cela ne m’était pas encore arrivé.
Le cheval trottait rapidement, la route était redevenue bonne, avant sept heures nous descendions à St-Valery. Là j’ai quitté mon excellent fermier. J’arrivais à temps pour prendre la patache qui va à Abbeville.
L’aspect du littoral qu’a connu Hugo ce 8 septembre 1837 a peu changé aujourd’hui. En effet, une digue de galets avait été réalisée au XVIIIe par les agriculteurs, contenant ainsi les marées et fermant l’accès au hâble d’Ault où Guillaume le Conquérant s’était réfugié avec sa flotte de 3000 nefs pendant une tempête peu avant son assaut de l’Angleterre.
1890, Librairie Ollendorff, pp.141-142.
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Victor Hugo,
En voyage
Dieppe, 8 septembre, 9 heures du soir.
Le port de St-Valery était charmant au crépuscule. On distinguait au loin les dunes du Crotoy et, comme une nébulosité blanchâtre, les vieilles tours arrachées et démolies au pied desquelles j’avais dessiné deux jours auparavant. Au premier plan, à ma droite, j’avais le réseau noir et inextricable des mâts et des cordages. La lune, qui se couchait hier une heure après le soleil, descendait lentement vers la mer, le ciel était blanc, la terre brune, et des morceaux de lune sautaient de vague en vague comme des boules d’or dans les mains d’un jongleur.
Un quart d’heure après j’étais en route pour Abbeville. J’ai toujours aimé ces voyages à l’heure crépusculaire.
C’est le moment où la nature se déforme et devient fantastique. Les maisons ont des yeux lumineux, les ormes ont des profils sinistres ou se renversent en éclatant de rire, la plaine n’est plus qu’une grande ligne sombre où le croissant de la lune s’enfonce par la pointe et disparaît lentement, les javelles et les gerbes debout dans les champs au bord du chemin vous font l’effet de fantômes assemblés qui se parlent à voix basse, par moments on rencontre un troupeau de moutons dont le berger, tout droit sur l’angle d’un fossé, vous regarde passer d’un air étrange
, la voiture se plaint doucement de la fatigue de la route, les vis et les écrous, la roue et le brancard poussent chacun leur petit soupir aigu ou grave, de temps en temps on entend au loin le bruit d’une grappe de sonnettes secouée en cadence, ce bruit s’accroît, puis diminue et s’éteint, c’est une autre voiture qui passe sur quelque chemin éloigné. Où va-t-elle ? d’où vient-elle? la nuit est sur tout. A la lueur des constellations qui font cent dessins magnifiques dans le ciel, vous voyez autour de vous des figures qui dorment et il vous semble que vous sentez la voiture pleine de rêves.
Pardon, chère amie, je t’écris toutes mes impressions. Comme elles viennent à moi, elles s’en vont vers toi. Toutes mes sensations comme tous mes sentiments sont à toi.
A onze heures du soir j’étais à Abbeville.
1890 Librairie Ollendorff, pp.141-142.
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Du nord-est au nord-ouest, la côte s’arrondissait comme le crâne aplati d’un fauve…
Jules Verne,
L’île mystérieuse,
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La Maison de Jules Verne,
Amiens
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Bienvenue dans la demeure où vécut Jules Verne, de 1882 à 1900 ! La bâtisse abrite désormais un musée qui retrace la vie de l'écrivain au travers de nombreux documents. Avant de vous engouffrer dans la maison, levez la tête et admirez son étrange tourelle, qui évoque un observatoire astronomique...
De l’Océan, les regards se reportèrent sur l’île qu’ils dominaient tout entière, et la première question qui fut posée le fut par Gédéon Spilett, en ces termes :
« Quelle peut être la grandeur de cette île ? »
Véritablement, elle ne paraissait pas considérable au milieu de cet immense Océan.
Cyrus Smith réfléchit pendant quelques instants ; il observa attentivement le périmètre de l’île, en tenant compte de la hauteur à laquelle il se trouvait placé ; puis :
« Mes amis, dit-il, je ne crois pas me tromper en donnant au littoral de l’île un développement de plus de cent milles.
– Et conséquemment, sa superficie ?…
– Il est difficile de l’apprécier, répondit l’ingénieur, car elle est trop capricieusement découpée. »
Si Cyrus Smith ne se trompait pas dans son évaluation, l’île avait, à peu de chose près, l’étendue de Malte ou Zante, dans la Méditerranée ; mais elle était, à la fois, beaucoup plus irrégulière, et moins riche en caps, promontoires, pointes, baies, anses ou criques. Sa forme, véritablement étrange, surprenait le regard, et quand Gédéon Spilett, sur le conseil de l’ingénieur, en eut dessiné les contours, on trouva qu’elle ressemblait à quelque fantastique animal, une sorte de ptéropode monstrueux, qui eût été endormi à la surface du Pacifique.
Voici, en effet, la configuration exacte de cette île, qu’il importe de faire connaître, et dont la carte fut immédiatement dressée par le reporter avec une précision suffisante.
La portion est du littoral, c’est-à-dire celle sur laquelle les naufragés avaient atterri, s’échancrait largement et bordait une vaste baie terminée au sud-est par un cap aigu, qu’une pointe avait caché à Pencroff, lors de sa première exploration. Au nord-est, deux autres caps fermaient la baie, et entre eux se creusait un étroit golfe qui ressemblait à la mâchoire entrouverte de quelque formidable squale.
Du nord-est au nord-ouest, la côte s’arrondissait comme le crâne aplati d’un fauve, pour se relever en formant une sorte de gibbosité qui n’assignait pas un dessin très déterminé à cette partie de l’île, dont le centre était occupé par la montagne volcanique.
De ce point, le littoral courait assez régulièrement nord et sud, creusé, aux deux tiers de son périmètre, par une étroite crique, à partir de laquelle il finissait en une longue queue, semblable à l’appendice caudal d’un gigantesque alligator.
Cette queue formait une véritable presqu’île qui s’allongeait de plus de trente milles en mer, à compter du cap sud-est de l’île, déjà mentionné, et elle s’arrondissait en décrivant une rade foraine, largement ouverte, que dessinait le littoral inférieur de cette terre si étrangement découpée.
Dans sa plus petite largeur, c’est-à-dire entre les Cheminées et la crique observée sur la côte occidentale qui lui correspondait en latitude, l’île mesurait dix milles seulement ; mais sa plus grande longueur, de la mâchoire du nord-est à l’extrémité de la queue du sud-ouest, ne comptait pas moins de trente milles.
Quant à l’intérieur de l’île, son aspect général était celui-ci : très boisée dans toute sa portion méridionale depuis la montagne jusqu’au littoral, elle était aride et sablonneuse dans sa partie septentrionale. Entre le volcan et la côte est, Cyrus Smith et ses compagnons furent assez surpris de voir un lac, encadré dans sa bordure d’arbres verts, dont ils ne soupçonnaient pas l’existence. Vu de cette hauteur, le lac semblait être au même niveau que la mer, mais, réflexion faite, l’ingénieur expliqua à ses compagnons que l’altitude de cette petite nappe d’eau devait être de trois cents pieds, car le plateau qui lui servait de bassin n’était que le prolongement de celui de la côte.
« C’est donc un lac d’eau douce ? demanda Pencroff.
– Nécessairement, répondit l’ingénieur, car il doit être alimenté par les eaux qui s’écoulent de la montagne.
J’aperçois une petite rivière qui s’y jette, dit Harbert, en montrant un étroit ruisseau, dont la source devait s’épancher dans les contreforts de l’ouest.
– En effet, répondit Cyrus Smith, et puisque ce ruisseau alimente le lac il est probable que du côté de la mer il existe un déversoir par lequel s’échappe le trop-plein des eaux. Nous verrons cela à notre retour. »
Ce petit cours d’eau, assez sinueux, et la rivière déjà reconnue, tel était le système hydrographique, du moins tel il se développait aux yeux des explorateurs.
Hetzel, 1875, pp. 94-95
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Gustave Flaubert,
L’éducation sentimentale
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Folio,
2005
Avec la publication
de Salammbô
en 1862,
Flaubert achève un cycle de travail
où il s’était voué depuis …
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À droite et à gauche des plaines vertes s’étendaient ; le convoi roulait ; les maisonnettes des stations glissaient comme des décors, et la fumée de la locomotive versait toujours du même côté ses gros flocons qui dansaient sur l’herbe quelque temps, puis se dispersaient.
Frédéric, seul sur sa banquette, regardait cela, par ennui, perdu dans cette langueur que donne l’excès même de l’impatience.
Des grues, des magasins, parurent. C’était Creil.
La ville, construite au versant de deux collines basses (dont la première est nue et la seconde couronnée par un bois), avec la tour de son église, ses maisons inégales et son pont de pierre, lui semblait avoir quelque chose de gai, de discret et de bon.
Un grand bateau plat descendait au fil de l’eau, qui clapotait fouettée par le vent ; des poules, au pied du calvaire, picoraient dans la paille ; une femme passa, portant du linge mouillé sur la tête.
Après le pont, il se trouva dans une île, où l’on voit sur la droite les ruines d’une abbaye. Un moulin tournait, barrant dans toute sa largeur le second bras de l’Oise, que surplombe la manufacture. L’importance de cette construction étonna grandement Frédéric. Il en conçut plus de respect pour Arnoux. Trois pas plus loin, il prit une ruelle, terminée au fond par une grille.
Il était entré. La concierge le rappela en lui criant :
– Avez-vous une permission ?
– Pourquoi ?
– Pour visiter l’établissement !
Frédéric d’un ton brutal, dit qu’il venait voir M. Arnoux.
Qu’est-ce que c’est que M. Arnoux ?
– Le chef, le maître, le propriétaire, enfin !
Non, monsieur, c’est ici la fabrique de MM. Lebœuf et Milliet !
La bonne femme plaisantait sans doute. Des ouvriers arrivaient ; il en aborda deux ou trois ; leur réponse fut la même.
Frédéric sortit de la cour, en chancelant comme un homme ivre ; et il avait l’air tellement ahuri que, sur le pont de la Boucherie, un bourgeois en train de fumer sa pipe demanda s’il cherchait quelque chose. Celui-là connaissait la manufacture d’Arnoux. Elle était située à Montataire.
Folio, pp. 215-216
Gustave Flaubert et ses liens avec le territoire
Lors de la préparation de ses romans, Flaubert effectuait de nombreuses recherches et cumulait les documents lui servant pour la rédaction finale du texte. Le 13 mai 1867, il se rend donc dans l’Oise pour visiter les faïences de Creil et de Montataire, il écrit à sa nièce : « J’arrive à l’instant de Creil et de Montataire où j’ai pris des notes sous la pluie pendant 2 heures, c’est la troisième fois que je fais ce voyage ! ». Cette faïencerie a été fondée en 1797 et a connu plusieurs faillites avant de s’implanter durablement vers 1840 lors de la fusion des manufactures de Creil et de Montereau. Lorsque Flaubert visita la faïencerie, elle comptait près de 600 employés logés dans des cités ouvrières. La production estampillée « Creil et Montereau » se poursuit jusqu’en 1895, date à laquelle un incendie ravage la manufacture.
Aujourd’hui, la médiathèque Antoine Chanut de Creil a été construite sur le site de l’ancienne manufacture.
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Philéas Lebesgue,
La Corbeille du soir
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Imp., J. Brard, 1937
La corbeille du soir
ou Le Livre des zéjels
est un ouvrage original.
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La maison
Non, vous ne prendrez point cette maison qui tremble :
J’y suis né, j’y vécus et nous mourrons ensemble !
L’ombre de tous les miens s’y promène la nuit ;
Ses murs sont imprégnés d’haleines comme un fruit ;
Le deuil s’y est fondu dans le rêve et l’ennui ;
L’amour y a saigné sous le vent de Novembre.
Quand je suis seul au coin du foyer mort, des voix
Me parlent à travers le lointain cri des bois ;
Ce refuge ne peut appartenir qu’à moi ;
Cette vieille maison me tient à chaque membre…
Méru (Oise) imp. Brard, 1937, p. 74.
Philéas Lebesgue et ses liens avec le territoire
Philéas Lebesgue est né et mort à la Neuville-Vault dans sa ferme familiale. La maison de Philéas Lebesgue est une ancienne ferme seigneuriale des XVIIe et XVIIIe siècles achetée par ses parents en 1861. Ceux-ci, un couple de cultivateurs, étaient alors jeunes mariés. Un mégalithe, installé à La Neuville-Vault en 1997, rappelle : « Ici a vécu Philéas Lebesgue (1869-1958) ». Elle est maintenant habitée par sa petite-fille.
Plusieurs pièces contiennent les livres et les archives de l’écrivain.
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Parcours Hector
Malot,
En famille
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Hector Malot, En famille Encrage, 2006
En famille paraît en 1893,
Hector Malot a décidé de faire un roman
sur l’industrie textile …
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Etape 3 :
Le Château
Entre le double rideau de grands arbres qui de chaque côté encadre la route, depuis déjà quelques instants se montraient pour disparaître aussitôt, à droite sur la pente de la colline, un clocher en ardoises, à gauche des grands combles dentelés d’ouvrages en plomb, et un peu plus loin plusieurs hautes cheminées en briques.
«Nous approchons de Maraucourt, dit Rosalie, bientôt vous allez apercevoir le château de M. Vulfran, puis ensuite les usines; les maisons du village sont cachées dans les arbres, nous ne les verrons que quand nous serons dessus; vis-à-vis de l’autre côté de la rivière, se trouve l’église avec le cimetière.»
En effet, en arrivant à un endroit où les saules avaient été coupés en têtards, le château surgit tout entier dans son ordonnance grandiose avec ses trois corps de bâtiment aux façades de pierres blanches et de briques rouges, ses hauts toits, ses cheminées élancées au milieu de vastes pelouses plantées de bouquets d’arbres, qui descendaient jusqu’aux prairies où elles se prolongeaient au loin avec des accidents de terrain selon les mouvements de la colline.
Perrine surprise avait ralenti sa marche, tandis que Rosalie continuait la sienne, cela produisit un heurt qui leur fit poser le panier à terre.
«Vous le trouvez beau hein! dit Rosalie.
— Très beau.
— Eh bien M. Vulfran demeure tout seul là dedans avec une douzaine de domestiques pour le servir, sans compter les jardiniers, et les gens de l’écurie qui sont dans les communs que vous apercevez là-bas à l’extrémité du parc, à l’entrée du village où il y a deux cheminées moins hautes et moins grosses que celles des usines; ce sont celles des machines électriques pour éclairer le château, et des chaudières à vapeur pour le chauffer ainsi que les serres. Et ce que c’est beau là dedans; il y a de l’or partout.
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Parcours
Hector Malot,
En famille
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Etape 2 :
Les usines de Flixecourt
Droit devant elle, de l’autre côté du village, sur la pente opposée à celle où elle était assise, se dressaient les bâtiments de l’usine, et à la couleur de leurs toits elle pouvait suivre l’histoire de leur développement comme si un habitant du pays la lui racontait.
Au centre et au bord de la rivière, une vieille construction en briques, et en tuiles noircies, que flanquait une haute et grêle cheminée rongée par le vent de mer, les pluies et la fumée était l’ancienne filature de lin, longtemps abandonnée, que trente-cinq ans auparavant le petit fabricant de toiles Vulfran Paindavoine avait louée pour s’y ruiner, disaient les fortes têtes de la contrée, pleines de mépris pour sa folie. Mais au lieu de la ruine, la fortune était arrivée petite d’abord, sou à sou, bientôt millions à millions. Rapidement, autour de cette mère Gigogne les enfants avaient pullulé.
Les aînés mal bâtis, mal habillés, chétifs comme leur mère, ainsi qu’il arrive souvent à ceux qui ont souffert de la misère. Les autres, au contraire, et surtout les plus jeunes, superbes, forts, plus forts qu’il n’est besoin, parés avec des revêtements de décorations polychromes qui n’avaient rien du misérable hourdis de mortier ou d’argile des grands frères usés avant l’âge, semblaient, avec leurs fermes en fer et leurs façades rosés ou blanches en briques vernies, défier les fatigues du travail et des années.
Alors que les premiers bâtiments se tassaient sur un terrain étroitement mesuré autour de la vieille fabrique, les nouveaux s’étaient largement espacés dans les prairies environnantes, reliés entre eux par des rails de chemin de fer, des arbres de transmission et tout un réseau de fils, électriques, qui couvraient l’usine entière d’un immense filet.
Longtemps elle resta perdue dans le dédale de ces rues, allant des puissantes cheminées, hautes et larges, aux paratonnerres qui hérissaient les toits, aux mâts électriques, aux wagons de chemin
de fer, aux dépôts de charbon, tâchant de se représenter par l’imagination ce que pouvait être la vie de cette petite ville morte en ce moment, lorsque tout cela chauffait, fumait, marchait, tournait, ronflait avec ces bruits formidables qu’elle avait entendus dans la plaine Saint-Denis, en quittant Paris.
Puis ses yeux descendant au village, elle vit qu’il avait suivi le même développement que l’usine: les vieux toits couverts de sedum en fleurs qui leur faisaient des chapes d’or, s’étaient tassés autour de l’église; les nouveaux qui gardaient encore la teinte rouge de la tuile sortie depuis peu du four, s’étaient éparpillés dans la vallée au milieu des prairies et des arbres en suivant le cours de la rivière; mais, contrairement à ce qui se voyait dans l’usine, c’était les vieilles maisons qui faisaient bonne figure, avec l’apparence de la solidité, et les neuves qui paraissaient misérables, comme si les paysans qui habitaient autrefois le village agricole de Maraucourt, étaient alors plus à leur aise que ne l’étaient maintenant ceux de l’industrie.
Parmi ces anciennes maisons une dominait les autres par son importance, et s’en distinguait encore par le jardin planté de grands arbres qui l’entourait, descendant en deux terrasses garnies d’espaliers jusqu’à la rivière où il aboutissait à un lavoir. Celle-là, elle la reconnut: c’était celle que M. Vulfran avait occupée en s’établissant à Maraucourt, et qu’il n’avait quittée que pour habiter son château.
Que d’heures son père, enfant, avait passées sous ce lavoir aux jours des lessives, et dont il avait gardé le souvenir pour avoir entendu là, dans le caquetage des lavandières, les longs récits des légendes du pays, qu’il avait plus tard racontés à sa fille: la Fée des tourbières, l’Enlisage des Anglais, le Leuwarou d’Hangest, et dix autres qu’elle se rappelait comme si elle les avait entendus la veille.
Le soleil, en tournant, l’obligea à changer de place, mais elle n’eut que quelques pas à faire pour en trouver une valant celle qu’elle abandonnait, où l’herbe était aussi douce, aussi parfumée, avec une aussi belle vue sur le village et toute la vallée, si bien que, jusqu’au soir, elle put rester là dans un état de béatitude tel qu’elle n’en avait pas goûté depuis longtemps.
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Parcours
Hector Malot,
En famille
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Etape 1 : La voie ferrée – Flixecourt
À la sortie de la gare, elle avait passé sur le pont d’une écluse, et maintenant elle marchait allègre, à travers de vertes prairies plantées de peupliers et de saules qu’interrompaient de temps en temps des marais, dans lesquels on apercevait à chaque pas des pêcheurs à la ligne penchés sur leur bouchon et entourés d’un attirail qui les faisait reconnaître tout de suite pour des amateurs endimanchés échappés de la ville. Aux marais succédaient des tourbières, et sur l’herbe roussie, s’alignaient des rangées de petits cubes noirs entassés géométriquement et marqués de lettres blanches ou de numéros qui étaient des tas de tourbe disposés pour sécher.
Que de fois son père lui avait-il parlé de ces tourbières et de leurs entailles, c’est-à-dire des grands étangs que l’eau a remplis après que la tourbe a été enlevée, qui sont l’originalité de la vallée de la Somme. De même, elle connaissait ces pêcheurs enragés que rien ne rebute, ni le chaud, ni le froid, si bien que ce n’était pas un pays nouveau qu’elle traversait, mais au contraire connu et aimé, bien que ses yeux ne l’eussent pas encore vu: connues ces collines nues et écrasées qui bordent la vallée; connus les moulins à vent qui les couronnent et tournent même par les temps calmes, sous l’impulsion de la brise de mer qui se fait sentir jusque-là.
Le premier village, aux tuiles rouges, où elle arriva, elle le reconnut aussi, c’était Saint-Pipoy, où se trouvaient les tissages et les corderies dépendant des usines de Maraucourt, et avant de l’atteindre, elle traversa par un passage à niveau un chemin de fer qui, après avoir réuni les différents villages, Hercheux, Bacourt, Flexelles, Saint-Pipoy et Maraucourt qui sont les centres des fabriques de Vulfran Paindavoine, va se souder à la grande ligne de Boulogne: au hasard des vues qu’offraient ou cachaient les peupliers de la vallée, elle voyait les clochers en ardoise de ces villages et les hautes cheminées en brique des usines, en cette journée du dimanche, sans leur panache de fumée.
Quand elle passa devant l’église on sortait de la grand’messe, et en écoutant les propos des gens qu’elle croisait, elle reconnut encore le lent parler picard aux mots traînés et chantés que son père imitait pour l’amuser.
De Saint-Pipoy à Maraucourt le chemin bordé de saules se contourne au milieu des tourbières, cherchant pour passer un sol qui ne soit pas trop mouvant plutôt que la ligne droite. Ceux qui le suivent ne voient donc qu’à quelques pas, en avant comme en arrière. Ce fut ainsi qu’elle arriva sur une jeune fille qui marchait lentement, écrasée par un lourd panier passé à son bras.
Enhardie par la confiance qui lui était revenue, Perrine osa lui adresser la parole.
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Parcours
Hector Malot,
En famille
Etape 4 : Une rue du village
D’ailleurs elles atteignaient les premières maisons éparses dans des cours plantées de pommiers malingres et l’attention de Perrine était sollicitée par ce qu’elle voyait autour d’elle: ce village dont elle avait si souvent entendu parler.
Ce qui la frappa surtout, ce fut le grouillement des gens: hommes, femmes, enfants endimanchés autour de chaque maison, ou dans des salles basses dont les fenêtres ouvertes laissaient voir ce qui se passait à l’intérieur: dans une ville l’agglomération n’eût pas été plus tassée; dehors on causait les bras ballants, d’un air vide, désorienté; dedans on buvait des boissons variées qu’à la couleur on reconnaissait pour du cidre, du café ou de l’eau-de-vie, et l’on tapait les verres ou les tasses sur les tables avec des éclats de voix qui ressemblaient à des disputes.
«Que de gens qui boivent! dit Perrine.
— Ce serait bien autre chose si nous étions un dimanche qui suit la paye de quinzaine; vous verriez combien il y en a qui, dès midi, ne peuvent plus boire.»
Ce qu’il y avait de caractéristique dans la plupart des maisons devant lesquelles elles passaient, c’était que presque toutes si vieilles, si usées, si mal construites qu’elles fussent, en terre ou en bois hourdé d’argile, affectaient un aspect de coquetterie au moins dans la peinture des portes et des fenêtres qui tirait l’œil comme une enseigne. Et en effet c’en était une; dans ces maisons on louait des chambres aux ouvriers, et cette peinture, à défaut d’autres réparations, donnait des promesses de propreté, qu’un simple regard jeté dans les intérieurs démentait aussitôt.
«Nous arrivons, dit Rosalie en montrant de sa main libre une petite maison en briques qui barrait le chemin dont une haie tondue aux ciseaux la séparait; au fond de la cour et derrière se trouvent les bâtiments qu’on loue aux ouvriers: la maison, c’est pour le débit, la mercerie; et au premier étage sont les chambres des pensionnaires.»
Dans la haie, une barrière en bois s’ouvrait sur une petite cour, plantée de pommiers, au milieu de laquelle une allée empierrée d’un gravier grossier conduisait à la maison. À peine avaient-elles fait quelques pas dans cette allée, qu’une femme, jeune encore, parut sur le seuil et cria:
«Dépêche té donc, caleuse, en v’la eine affaire pour aller à Picquigny, tu t’auras assez câliné.
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Parcours Hector Malot, En famille
Etape 5 : Les maisons ouvrières
Au centre du village se dressent d’autres toits rouges beaucoup plus hauts, plus longs, plus imposants: ce sont ceux d’un groupe de bâtiments à peine achevés dans lesquels sont établis des logements séparés, des réfectoires, des restaurants, des cantines, des magasins d’approvisionnement pour les ouvriers célibataires, hommes et femmes; et pour ces bâtiments M. Vulfran a employé le même procédé d’expropriation que pour la crèche.
Précédemment se trouvaient là plusieurs vieilles maisons appropriées tant bien que mal, en réalité aussi mal que possible, au logement en chambrées des ouvriers et en cabinets. Il a fait appeler les propriétaires de ces maisons, et leur a tenu un langage à peu près analogue à celui dont il s’est déjà servi:
«Depuis longtemps on se plaint violemment des chambrées dans lesquelles vous couchez mes ouvriers, et c’est aux mauvaises conditions dans lesquelles sont établis ces logements qu’on attribue les maladies de poitrine et la fièvre typhoïde qui tuent tant de monde. Je ne peux pas tolérer cela plus longtemps. J’ai donc résolu de faire construire deux hôtels dans lesquels j’offrirai aux ouvriers célibataires, hommes et femmes, une chambre séparée et exclusive pour trois francs par mois.
En même temps j’aménagerai les rez-de-chaussée en réfectoires et en restaurants où je donnerai un dîner composé de soupe, de ragoût ou de rôti, de pain et de cidre pour soixante-dix centimes. Si vous voulez me vendre vos maisons, j’élèverai mes hôtels sur leur emplacement. Si vous ne voulez pas, gardez-les. Ma combinaison est dans votre intérêt, car j’ai ailleurs des terrains où mes constructions me coûteront beaucoup moins cher. Vous avez jusqu’à onze heures demain pour réfléchir; à midi il serait trop tard.
Sur ces terrains éparpillés un peu partout, on aperçoit d’autres toits en tuiles neuves, tout petits ceux-là, et qui par leur propreté et leur éclat rouge contrastent avec les anciennes toitures couvertes de mousses et de sedum: ce sont ceux des maisons ouvrières dont la construction est commencée depuis peu, et qui toutes sont ou seront isolées au milieu d’un jardinet, dans lequel pourront se récolter les légumes nécessaires à l’alimentation de la famille, qui, pour cent francs par an de loyer, aura le bien-être matériel et la dignité du chez-soi.
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Alexandre Dumas Père,
Le Meneur de Loups
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Le trotteur ailé,
2008 (1857)
Le Meneur de loups
est un roman fantastique
écrit en 1857 …
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Musée Dumas,
Villers-Cotterêts
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Vous avez frémi à la lecture du trépidant roman Les Trois Mousquetaires ? Le musée Dumas, installé dans la ville natale d'Alexandre Dumas, vous fait découvrir l'histoire de ce célèbre romancier français à travers des manuscrits et des documents originaux. Bonus pour les fans de littérature : une salle est consacrée au fils d'Alexandre Dumas, auteur de La Dame aux Camélias...
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Le moulin de Coyolles est situé dans une position charmante au fond d’une fraîche vallée ; l’eau qui l’alimente, et qui forme un petit étang, est ombragée par des saules aux têtes monstrueuses et par des peupliers élancés ; les arbres nains et les arbres géants sont reliés entre eux par de magnifiques aunes et par d’immenses noyers au feuillage odoriférant. Après avoir fait tourner la roue du moulin, l’eau écumeuse s’écoule par un petit ruisseau qui chante son hymne éternel en bondissant sur les cailloux de son lit et en constellant, des diamants liquides qui jaillissent de ses cascatelles, les fleurs qui se penchent coquettement pour se mirer dans les eaux.
Quant au moulin, il est si bien perdu dans un bouquet de plantes, de sycomores et de saules pleureurs, qu’à cent pas de distance on n’en aperçoit que la cheminée, d’où sort la fumée en montant à travers les arbres comme une colonne d’albâtre azurée.
Le site, quoique bien connu de Thibault, lui causa cette fois un enchantement qu’il n’avait jamais éprouvé.
C’est que jamais il ne l’avait regardé dans les conditions où il se trouvait ; il avait déjà en lui cette satisfaction égoïste du propriétaire qui visite un domaine qu’il a acquis par procuration.
Mais sa joie fut bien autre quand il entra dans la cour et que le tableau s’anima.
Les pigeons au cou d’azur et de pourpre roucoulaient sur les toits, les canards criaient en faisant mille évolutions dans le ruisseau, les poules gloussaient sur le fumier, les dindons se rengorgeaient en faisant la roue près de leurs femelles, de belles vaches brunes et blanches revenaient des champs les mamelles gonflées de lait ; ici, on déchargeait une charrette ; là, on ôtait le harnais à deux beaux chevaux du Perche,
qui, en hennissant, tendaient vers leurs râteliers leurs bonnes têtes dégagées d’entraves ; un garçon montait un sac au grenier, une fille apportait un sac de croûtes et d’eau de vaisselle à un énorme porc qui se chauffait au soleil en attendant sa transformation en petit-salé, en saucisses, en boudin ; tous les animaux de l’arche, depuis l’âne brayant jusqu’au coq chantant, mêlaient leurs voix discordantes à ce concert champêtre, tandis que le tic-tac du moulin, en battant la mesure, semblait en régler le rythme.
Thibault en eut un éblouissement.
Il se vit d’avance le propriétaire de tout cela, et il se frotta si allègrement les mains, que bien certainement Landry eût remarqué cette joie que rien ne motivait, s’il n’eût pas été absorbé dans sa douleur, qui augmentait au fur et à mesure qu’il approchait du logis.
La veuve, de la salle à manger où elle se tenait, les apercevait au seuil de la porte.
Elle paraissait tout intriguée de savoir quel était l’étranger qui revenait avec son premier garçon.
Thibault traversa la cour, s’approcha des bâtiments d’habitation d’un air dégagé, se nomma, et expliqua à la meunière comment le désir de visiter Landry, son unique parent, l’avait décidé à se présenter chez elle.
La meunière se montra fort courtoise.
Elle engagea le nouveau venu à passer la journée au moulin, avec un sourire que celui-ci trouva du meilleur augure.
Le trotteur ailé, 2008, pp. 64-65
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Fernand Calmettes,
Brave fille
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Librairie d’éducation de la jeunesse
, 1890
Élise, l’héroïne orpheline de Brave fille
, a reçu en héritage l’âme des …
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Ils ne rentraient pas encore au bourg, les quatre du Bon-Pêcheur. Ils revenaient sur une goélette, à destination de Saint-Valery ; ils devaient donc espérer, jusqu’au petit jour, le reflux du matin, pour franchir à sec la baie et regagner leurs foyers. Mais, ce même soir, dès son arrivée au port, Silvère avait annoncé leur retour. Ce fut, pour les femmes, qui depuis longtemps les attendaient, une fête d’aller à leur rencontre.
Toutes s’étaient apprêtées pour le départ, en beaux habits, avec les bonnets clairs et les jupons, si francs de couleur, qu’ils luttaient avec la nuit. Le sable devait commencer à se découvrir vers deux heures du matin.
Tout était noir dans la baie. Seuls, les falots, allumés sur le quai de Saint-Valery, guidaient de leurs feux lointains le cortège, qui s’avançait à travers les inégalités du sable et les flaques d’eau, dans l’incertitude de l’ombre. [ …]
L’aube pointait, mais les lointains se perdaient encore dans une pesante obscurité. Une étrange atmosphère arrivait de la mer. On respirait à peine. En cette fin de nuit, on sentait une chaleur de plein jour. De longs en longs intervalles, tout à fait vers le Sud, par delà le clocher de Saint-Valery, des éclairs blafards sillonnaient le ciel.
Toutefois, l’orage semblait vouloir se maintenir au loin. Sous la lourdeur du temps, le cortège avait ralenti sa marche et, seulement aux premières lueurs du jour, il atteignit le milieu de la baie. Il s’arrêta devant un ruisseau large, sinon profond, qu’on ne pouvait espérer franchir sans avoir de l’eau jusqu’aux genoux. […]
À travers les blancheurs naissantes, l’église de Saint-Valery détachait son clocher de la masse sombre de roches, de maisons et d’arbres qu’elle domine, et, tout au pied de la ville, le chenal de la Somme marquait en clair, d’une ligne droite, son cours symétrique. Vainement les femmes en sondaient la direction. Elles ne voyaient rien, n’entendaient pas ces éclats de voix, qui annoncent d’ordinaire le retour joyeux des matelots au pays.
Elles se hâtaient et l’orage aussi. Par bonheur, lui n’approchait que lentement, tant il était alourdi par l’épaisseur de ses nuées.
On arrivait au barrage de la Somme, lorsque le premier éclair vint sillonner le ciel au-dessus de l’église de Saint-Valery, un éclair brutal, aveuglant, suivi d’un tel fracas de foudre que les enfants effarés se cachèrent le visage dans les jupes des filles.
D’un seul cri, tous appelèrent du secours. Le passeur n’était donc pas là. Encore un, payé par la commune à ne rien faire, à dormir au sec, tandis que les voyageurs sont noyé d’orage.
-C’est donc nouveau pour nous d’être mouillées, reprit de sa voix grêle la bonne maman Loirat, nous qui vivons trempées de marée. Vous avez trop de goût à la vie douce ; attendez, les filles ; elle vous fera compter des moments plus durs, à mesure que vous lui emprunterez des années.
Ces consolations n’étaient pas faites pour apaiser le bruit. L’orage enveloppait toute la baie. Sous les rafales de pluie, au bord de ce fleuve aux eaux profondes, qui le retenait à sa rive inhospitalière, ce troupeau de femmes clamantes et d’enfants gémissants ressemblait, par ses cris sauvages et ses attitudes effondrées, à des phoques naufragés.
Librairie d’éducation de la jeunesse, Paris, 1890, pp.176-181.
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Pierre Garnier,
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le poète de Saisseval,
fut poète, écrivain, et traducteur
. Né le 9 janvier 1928 à Amiens
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L’Alouette,
une litanie picarde
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à l’automne la Baie de Somme est un dessin
au printemps c’est une peinture
la vase est douce,
des coques et des couteaux y vivent et y
meurent tendrement
ils passent sans à-coup
de la vie à la mort, de la mort à la vie
dans la Baie on vit peu on meurt peu
c’est le même milieu que le poème :
depuis des millénaires la vase
a créé un monde doux et lumineux
la mer est un papillon,
elle volète sur le sable,
elle ne pose guère sur la Baie
le matin le soleil au levant est au fond de
la Baie
dans les flaques on voit la résurrection
le soir le soleil plein ouest
peint la crucifixion
parfois trois croix de voiliers
remontent vers le levant
ces inexplicables beauté et bonté du monde
le fond de la Baie est si rond
que du large on voit un anneau
le sable ou la vase ou la neige éternelle
on y vit à peine on y meurt à peine
les hirondelles ne trouvant plus à se nourrir
deviennent minuscules –
des oiseaux exotiques qui vont disparaître
dans la mer –
les yeux suivent le flux qui monte
et fait tourner la mer
jusqu’aux falaises de Douvres
nul n’a jamais su si c’était les voiles ou
les drapeaux
qui faisaient avancer le navire ?
comme Guillaume le conquérant
nous nous sommes engagés dans l’inconnu
nous ne regrettons pas de nous être engagés dans
l’inconnu
nous ne regrettons pas non plus de nous être
enfoncés
dans le neiges éternelles
la Baie est un papillon
-la mer plus loin est chenille et chrysalide
parfois les rideaux bougent dans mon bureau
-il n’y a pas de vent
Mais un papillon traverse le jardin du presbytère
la Baie de Somme est un ciel étoilé :
les coques se touchent presque
mais sont à des distances sidérales l’une de
l’autre
nul ne connaît la profondeur des coques
les années-lumière semblent être nées dans la Baie
Éditions ADN Dumerchez, 2002, 89-91
Lien avec le territoire
Pierre Garnier privilégie la figure de l’oiseau.
Ce choix illustre bien la rhétorique entre l’espace et le temps.
Le paysage de la Baie de Somme s’étend aux yeux de Pierre Garnier à l’infini jusqu’à l’horizon.
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Maurice Blanchard,
Danser sur la corde
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Maurice Blanchard,
Danser sur la corde,
Journal 1942-1946
L’Ether vague, 1994
Maurice Blanchard débute son journal
le 3 novembre 1942
. Il note ses souvenirs …
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Jeudi 15 avril 1943
Le plateau du Santerre commence à Montdidier d’une façon un peu abrupte. La ville fût construite sur l’éperon sud et domine la plaine faiblement accidentée. Du haut de la ville et par temps très clair, certains se vantaient d’avoir vu la tour Eiffel. Au bas de la falaise (car il me semble bien que la mer a dû venir jusque-là) se trouvent deux villages rattachés à la ville : Saint-Médard et Saint-Martin, qui furent de tous temps les ravitailleurs de la ville et de la plaine sèche du Santerre. Ces deux agglomérations de maraîchers cultivateurs avaient encore chacune leur église, et quand j’étais très jeune, j’assistais à la messe annuelle que le curé de la ville venait y célébrer. Saint-Médard et Saint-Martin formaient deux clans, mais il était fréquent que les mariages se fissent entre les tribus.
[…] Les paysans de ces deux pays allaient porter leurs légumes dans les bourgs moins favorisés par les eaux. Ma grand-mère allait à Ailly-sur-Noye le jeudi et à Pierrepont le dimanche, mon oncle allait à Ressons-sur-Matz et à Roye.
Le samedi, tout le bas pays montait au marché de la ville, en faisant un détour, ceux de Saint-Martin par le fond d’Amiens, ceux de Saint-Médard par la route de Rouen, car les montées directes étaient impraticables aux voitures chargées. C’était une région de rudes travailleurs, d’un métier très difficile et plein de secrets, car chaque ferme faisait ses graines de semence et avait sa façon de prévoir le temps, opération essentielle.
L’Ether vague, 1994, pp. 245-246.
Maurice Blanchard et ses liens avec le territoire
Maurice Blanchard rédigea son journal du 3 novembre 1942 jusqu’en octobre 1946. Sous l’Occupation, il dirigeait le bureau d’études des avions de guerre allemands Junkers pour le compte du réseau de Résistance « Brutus ». Le 14 avril 1943 il fêta ses 53 ans. Il retrouva chez lui deux fragments de poèmes datant de 1939. Un sentiment de nostalgie le submergea et lui inspira ce passage sur la ville de son enfance, Montdidier.
Plus précisément, la famille de Maurice Blanchard est originaire des quartiers de Saint-Martin et de Saint-Médard. Ces deux quartiers apparaissent comme un faubourg semi-rural avec des habitats modestes. Depuis Gratibus jusqu’à Ayencourt, la vallée était utilisée pour la culture maraîchère.
La terre divisée en parcelles, appelées parquets, était séparée des propriétés voisines par des canaux ou des fossés servant pour la culture ou l’arrosage. Les primeurs expédiaient leurs légumes dans les marchés voisins, ou en grosse quantité par voie ferrée.
Les souvenirs de Maurice Blanchard sont d’autant plus nostalgiques qu’au moment où il rédige son journal la ville a été complétement réhabilitée.
Après la Première Guerre mondiale, les bâtiments de la ville de Montdidier et les deux bourgs sont sévèrement touchés. L’église de Saint-Martin fût complétement détruite. Le service cultuel de Montdidier se partage entre l’église Saint-Pierre et l’église du Saint-Sépulcre.
Pendant la période de reconstruction comme ailleurs deux théories s’affronteront, reconstruire le patrimoine ante-bellum, ou reconstruire en tenant compte des nouveautés de confort, de style architectural et d’hygiène. À Montdidier se côtoient les bâtiments patrimoniaux et de style Art décoratif.
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Champfleury,
Né à Laon
Les souffrances du professeur Delteil
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Laon est une petite ville de six mille âmes qu’un rien agite. Le moindre événement, les comédiens qui viennent y passer un mois, un cirque, des marionnettes occupent démesurément les esprits de ce maigre chef-lieu, qui doit sans doute à sa position élevée l’honneur de primer les autres villes plus importantes du même département.
Bâtie sur le plateau d’une haute montagne, si la ville défie un siège redoutable, elle défie les voitures d’arriver dans ses murs : d’où le manque d’augmentation d’une population, qui ne saurait y appliquer son industrie ; aussi les fonctionnaires sont-ils les personnes notables qui tiennent le haut du pavé et commandent l’admiration. Enlevez de Laon le préfet, le receveur général, le directeur des contributions, six notaires, autant d’avoués, une demi-douzaine d’avocats, le curé, quelques nobles qu’on rencontre rarement , et vous trouverez une population de petits marchands, cinquante employés à quinze cents francs , deux cents bourgeois à deux mille francs de rente, enfin une population tranquille dans ses habitudes, sobre dans ses plaisirs, ne pratiquant ni vices ni vertus.
À dix heures les cafés sont fermés, et l’audacieux qu’on rencontre dans les rues passé cette heure risque d’être signalé comme un homme de mauvaises mœurs. L’étranger qui s’arrête à Laon se sent pris d’un violent ennui après qu’il a traversé en moins d’un quart d’heure, dans toute sa longueur, la grande rue qui coupe la ville en deux.
On recommande naturellement aux curieux « d’aller sur les promenades » qui entourent les vieilles murailles de la ville. Le pays est beau, la campagne riche, la vue étendue ; ce ne sont à l’horizon que vertes prairies, blonds champs de blés et jardinages plantureux ; et pourtant on se sent comme enchaîné sur cette montagne. Un homme d’intelligence, à moins d’une force puissante, s’y éteindrait en moins d’un an, à cause du manque de frottement et des duels inévitables d’une telle vie, qui ne peut être défendue qu’avec une épingle pour arme.
Les éditions du trotteur ailé, pp.5-6
Champfleury et ses liens avec le territoire
Laon est située sur un site exceptionnel, une butte surplombant la plaine environnante de 100 mètres, avec des versants abrupts et des remparts élevés.
Les fortifications ont résisté à des armes de sièges de plus en plus puissantes. Au VIe siècle, elle est surnommée par Grégoire de Tours Lugdunum clavatum, « Laon fermée à clé ». Elle est une place stratégique pour les rois carolingiens. La cité subit pourtant les affres de la guerre de Cent Ans et l’abbaye Saint-Vincent est incendiée en 1359.
Pendant la Renaissance plusieurs monuments sont construits. Cependant, la ville connaît un certain déclin. Au XVIe siècle, la ville attachée à la Ligue, opposée à l’avènement d’Henri IV, voit un des ses quartiers rasé et la construction d’une citadelle pour mieux surveiller les habitants.
Malgré les différents cycles de destruction. En 1857, la ville connaît une certaine modernisation avec la construction d’un chemin de fer. À nouveau Laon subit les ravages des guerres, celle de 1870, de la Grande Guerre (Laon se situe à une vingtaine de kilomètres du Chemin des Dames) et de la Seconde Guerre mondiale. Le cœur historique reste aujourd’hui relativement bien préservé.
Dans les souffrances du professeur Delteil, Champfleury porte un regard acerbe sur la bonne société de Laon au XIXème siècle. Mais il n’en reste pas moins attaché à la ville de son enfance et recommande « aux curieux d’aller sur les promenades » qui entourent les murailles de la ville admirer les paysages du plateau picard.
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Gilbert Desmée,
Lumière sur les Hortillonnages
Alfred Manessier et les Hortillons
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Lumière sur les Hortillonnages,
Alfred Manessier et les Hortillons
Editions Corps Puce
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Lumière sur les hortillonnages
Éclats irisés d’infimes infinies palpitations de l’eau au passage de mon regard sur la toile ici l’eau est élément de vie telle une sève qui alimente les îles tel un sang de lumière qui vivifie les organes de verdure toute une magie du lieu qu’exprime une méditation en ce hors temps qui me transporte où d’un marais principal la division se fait en plusieurs rieux qui contournent les îles Le regard s’immobilise sur une touffe de roseaux qui tremblent sous un léger vent plier pour ne pas rompre Alors toute la magie du lieu s’enivre d’une île perdue d’une île retrouvée d’une île d’aspect sauvage à une île paysagée
Tout oui tout ce qui est là est dû au travail des hortillons mon regard se vit dans les hortillonnages en regardant le tableau je m’y vois tel un hortillon qui du regard retrace terre et eau en leur circulation Alfred Manessier nous offre son regard de gentil ouvert sur un monde en perpétuelle déclinaison du temps qui passe du temps de paix de vie calme et tranquille de sérénité où l’être enfin se pose pour sentir et ressentir des joies simples loin du fracas du monde Il n’y a plus que soi en une limpide équivoque être hors et dans être loin de et près de être dans le réel et pourtant dans la pensée cette profondeur de vue imprime à la toile cette clé d’entrée…
Poème extrait du recueil Alfred manessier et les Hortillons, éditions Corps Puce, 2013, recueil poétique de Maria Desmée, Gilbert Desmée, pp. 16-18.
Il fut Président de l’Association des Écrivains en Picardie et pilote de la commission Vie Littéraire au Centre Régional du Livre et de la Lecture (CR2L) de Picardie.
Il était également critique de recueils de poésie pour le site de www.encres-vagabondes.com.
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2- Jean-Jacques Rousseau
Parc Rousseau, 1, rue René-de-Girardin, 60950 Ermenonville
Le marquis de Girardin, propriétaire des lieux, a fait réaliser les plans du parc à partir de la description du " jardin idéal " donnée dans le roman La Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau. Promeneur solitaire et passionné de botanique, le philosophe Jean-Jacques Rousseau aimait flâner dans les allées de ce jardin à l'anglaise. C'est également ici qu'il vécut les 6 dernières semaines de sa vie.
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Anatole France,
Pierre Nozière
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Saint-Valery-sur-Somme,
vendredi 13 août.
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De la chambre où j’écris, on découvre toute la baie de la Somme, dont le sable s’étend à l’horizon jusqu’aux lignes bleuâtres du Crotoy et du Hourdel. Le soleil, en s’inclinant, enflamme le bord des grands nuages sombres. La mer monte et déjà, du côté du large, les bateaux de pêche s’avancent avec le flot. Sous ma fenêtre, des barques amarrées au bord du chenal portent à leur mât, au lieu de voilure, des filets qui sèchent. Cinq ou six pêcheurs, plongés à mi-corps dans la maigre rivière, épient le poisson qu’autour d’eux des rabatteurs effrayent en frappant l’eau à grands coups de gaule. Ces pêcheurs sont armés d’une baguette pointue dont ils piquent adroitement leur proie. Chaque fois qu’ils lèvent hors de l’eau leur arme flexible, on voit briller à la pointe une sole transpercée.
Un vent sale fait voltiger les papiers sur ma table et m’apporte une âcre odeur de marée. Des troupes innombrables de canards nagent sur le bord du chenal et jettent à plein bec dans l’air leur coin coin satisfait. Leurs battements d’ailes, leurs plongeons dans la vase, leur dandinement quand ils vont de compagnie sur le sable, tout dit qu’ils sont contents. Un d’eux repose à l’écart, la tête sous l’aile. Il est heureux. À la vérité, on le mangera un de ces jours. Mais il faut bien finir ; la vie est enfermée dans le temps. Et puis le malheur n’est pas d’être mangé. Le malheur, c’est de savoir qu’on sera mangé ; et il ne s’en doute pas. Nous serons tous dévorés ; nous le savons, nous ; la sagesse est de l’oublier.
Suivons la digue, pendant que la mer, qui a déjà couvert les bancs de Cayeux et du Hourdel, entre dans la baie par de rapides courants et ramène la flottille des pêcheurs de crevettes. Nous avons à notre gauche les remparts, que la Somme et la mer baignaient naguère, et dont les vieux grès ont été couverts par l’embrun d’une rouille dorée. L’église élève sur ces remparts ses cinq pignons aigus, percés, au XVe siècle, de grandes baies à ogives, son toit d’ardoises en forme de carène renversée, et le coq de son clocher. Au XIe siècle, il y avait là une autre église qui avait aussi sa girouette.
Au mois de septembre 1066, Guillaume le Bâtard venait ici chaque matin consulter avec inquiétude le coq du clocher. Son ost, composé de soixante-sept mille combattants, sans compter les valets, les ouvriers et les pourvoyeurs, attendait proche la ville ; sa flotte, échappée à un premier naufrage, mouillait dans la baie.
Quinze jours durant, le vent, soufflant du nord, retint au port cette multitude d’hommes et de barques. Le Bâtard, impatient de conquérir l’Angleterre sur Harold et les Saxons, s’affligeait d’un retard pendant lequel ses navires pouvaient s’avarier et son armée se disperser. Pour obtenir un vent favorable, il ordonna des prières publiques et fit promener dans le camp la châsse de saint Valery. Ce bienheureux, sans doute, n’aimait pas les Saxons, car aussitôt le vent tourna et la flotte put appareiller.
Quatre cents navires à grandes voiles et plus d’un millier de bateaux de transport s’éloignèrent de la rive au même signal. Le vaisseau du duc marchait en tête, portant en haut de son mât la bannière envoyée par le pape et une croix sur son pavillon.
Ses voiles étaient de diverses couleurs, et l’on y avait peint en plusieurs endroits trois lions, enseigne de Normandie. À la proue était sculptée une tête d’enfant tenant un arc tendu avec la flèche prête à partir.
Ce départ eut lieu le 29 septembre. Huit jours après, Guillaume avait conquis l’Angleterre.
Une rampe monte en serpentant à une vieille porte de la ville qui reste debout, flanquée de ses deux tours décrénelées que fleurissent de petits œillets roses. Une de ces tours garde encore, sous les herbes folles et les fleurs sauvages, sa couronne de mâchicoulis. Une bonne femme plante des choux au pied de cette ruine.
L’hiver, il pleut de grosses pierres dans son jardin. Sa maisonnette, assise sur d’antiques souterrains, se fend et fait mine de s’abattre à chaque éboulement. Pourtant, la bonne créature admire la porte Guillaume ; elle l’aime. « Sûrement, elle me tuera un jour, me dit-elle, mais tout de même, elle est fière ! »
Calmann-Lévy, pp 202-206
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Gérard de Nerval,
La Bohême Galante
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Je quitte Senlis à regret ; — mais mon ami le veut pour me faire obéir à une pensée que j’avais manifestée imprudemment…
Je me plaisais tant dans cette ville, où la renaissance, le Moyen Age et l’époque romaine se retrouvent çà et là, — au détour d’une rue, dans une écurie, dans une cave. — Je vous parlais « de ces tours des Romains recouvertes de lierre » ! — L’éternelle verdure dont elles sont vêtues fait honte à la nature inconstante de nos pays froids. — En Orient, les bois sont toujours verts ; — chaque arbre a sa saison de mue ; mais cette saison varie selon la nature de l’arbre. C’est ainsi que j’ai vu au Caire les sycomores perdre leurs feuilles en été. En revanche, ils étaient verts au mois de janvier.
Les allées qui entourent Senlis et qui remplacent les antiques fortifications romaines, — restaurées plus tard, par suite du long séjour des rois carlovingiens, — n’offrent plus aux regards que des feuilles rouillées d’ormes, et de tilleuls. Cependant la vue est encore belle, aux alentours, par un beau coucher de soleil. — Les forêts de Chantilly, de Compiègne et d’Ermenonville ; — les bois de Chaalis et de Pont-Armé, se dessinent avec leurs masses rougeâtres sur le vert clair des prairies qui les séparent. Des châteaux lointains élèvent encore leurs tours, — solidement bâties en pierres de Senlis, et qui, généralement, ne servent plus que de pigeonniers.
Les clochers aigus, hérissés de saillies régulières, qu’on appelle dans le pays des ossements je ne sais pourquoi, retentissent encore de ce bruit de cloches qui portait une douce mélancolie dans l’âme de Rousseau…
Accomplissons le pèlerinage que nous nous sommes promis de faire, non pas près de ses cendres, qui reposent au Panthéon, — mais près de son tombeau, situé à Ermenonville, dans l’île dite des Peupliers.
La cathédrale de Senlis ; l’église Saint-Pierre, qui sert aujourd’hui de caserne aux cuirassiers ; le château de Henri IV, adossé aux vieilles fortifications de la ville ; les cloîtres byzantins de Charles le Gros et de ses successeurs, n’ont rien qui doive nous arrêter… C’est encore le moment de parcourir les bois, malgré la brume obstinée du matin.
Nous sommes partis de Senlis, à pied, à travers les bois, aspirant avec bonheur la brume d’automne.
Gallimard, 2005, pp. 173-174.
Gérard de Nerval et ses liens avec le territoire
Gérard de Nerval nous donne sa perception de ce pays qu’est le Valois. Il s’approprie la géographie des lieux pour leur donner un sens nouveau dans sa fiction romanesque. Il évoque les paysages historiques du territoire. En partant de Senlis il aperçoit les forêts de Chantilly, de Compiègne et d’Ermenonville. Le territoire semble figé dans le temps avec ses hameaux, ses châteaux médiévaux et le vallon de la l’Aunette accueillant l’abbaye royale de Chaalis.
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4- Jean Racine
Musée Jean-Racine, 2, rue des Bouchers, 02460 La Ferté-Milon
Vous êtes ici dans la maison d'enfance de l'auteur Jean Racine. La demeure, aujourd'hui transformée en musée, abrite une collection de lettres, de portraits et d'éditions originales qui vous permettent de retracer la vie et l'œuvre de l'auteur d'Athalie.
5- Jean de la Fontaine
Musée Jean-de-la-Fontaine, 12, rue Jean-de-La-Fontaine, 02400 Château-Thierry
Aménagé dans la maison natale de l'écrivain aux célèbres fables, ce musée évoque la vie de Jean de La Fontaine et son parcours littéraire. Admirez les différents espaces d'exposition avant de vous attarder dans le jardin et la charmante cour.