Jules Verne
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Jules Verne de Nantes
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Pierre Verne, originaire de Provins, acheta en 1826 une charge d'avoué à Nantes, et épousa l'année suivante Sophie Allotte de la Fuÿe. De cette union naquirent cinq enfants : Jules (le 8 février 1828), Paul, Anna, Mathilde et Marie.
L'île Feydeau, où se trouve la maison natale de Jules Verne, était alors vraiment une île, enserrée entre deux bras de Loire. L'immeuble du 2, quai Jean-Bart, où il passa les quatorze premières années de sa vie, dominait le confluent de la Loire et de l'Erdre. De la maison de campagne de Chantenay, on voyait l'activité du port se déployer jusqu'au cœur de la ville.
Jules Verne n'a vu la mer pour la première fois qu'à l'âge de douze ans, mais les îles, les ports et les bateaux, qui seront les thèmes favoris de tant de ses œuvres, étaient depuis longtemps déjà dans sa vie et dans ses rêves.
Un poète de quinze ans
Dans la famille Verne, on pratiquait volontiers la poésie de circonstance : naissances et mariages étaient l'occasion de célébrer en vers les joies de l'amour et de la famille. Jules Verne a commencé à versifier très jeune : "Dès l'âge de douze ou quatorze ans", devait-il déclarer en 1904 à un journaliste, "j'avais toujours un crayon sur moi et du temps où j'allais à l'école, je n'arrêtais pas d'écrire, travaillant surtout la poésie".
à l'adolescence, il commença de remplir les deux cahiers de poésies qui l'ont accompagné toute sa vie et qui, restés inédits à sa mort, ne furent publiés qu'en 1989. Poésie lyrique ou satirique, émois amoureux ou rimes de chansonnier, les genres les plus divers s'y côtoient. Plus tard, il fut aussi parolier, fournissant à son ami le compositeur Aristide Hignard des poèmes à mettre en musique. Ces chansons, réunies en recueil, parurent en 1857, sous le titre de Rimes et mélodies.
Les tribulations d'un Nantais à Paris
Au début des années 1850, Jules Verne, "monté" à Paris pour y terminer ses études de droit, ne sait pas encore qu'il sera romancier, mais il sait qu'il ne sera pas juriste. L'étude d'avoué de son père attendra vainement qu'il en prenne la succession. En attendant que ses œuvres lui apportent gloire et fortune, il dévore avec appétit les joies de la vie parisienne. dans la mesure où une modeste pension paternelle et quelques travaux alimentaires le lui permettent.
Les lettres qu'il envoie à ses parents témoignent de sa vie quotidienne et de ses difficultés : comment un jeune homme qui envisage une carrière littéraire peut-il fréquenter les salons avec des chemises en lambeaux ? Comment pourrait-il résister à la tentation d'acheter (à crédit) un piano ou une collection de livres en parfait état ?
Cependant, il commence à publier ses premiers textes dans le Musée des familles, que dirige son compatriote Pitre-Chevalier.
De Graslin au Châtelet
Jules Verne s'est toujours considéré comme un auteur dramatique. A 17 ans, il écrivait des drames romantiques imités de Victor Hugo, mais c'est plutôt avec le vaudeville et l'opérette qu'il obtint ses premiers succès. Grâce à Alexandre Dumas, il put faire jouer au Théâtre-Lyrique, dont il deviendra ensuite secrétaire, Les pailles rompues (pièce reprise ensuite à Nantes au Théâtre Graslin) et Le colin-maillard dont le fidèle Artistide Hignard écrivit la musique.
Bien des années plus tard, les modestes succès deviendront triomphes quand il adaptera pour la scène, en collaboration avec D'Ennery, Le tour du monde en quatre-vingt jours, Michel Strogoff et Les enfants du capitaine Grant. Le savoir-faire du dramaturge uni au faste des mises en scène à grand spectacle remplissent chaque soir, pendant des mois, les théâtres du Châtelet et de la Porte Saint-Martin. C'est donc bien au théâtre, sa première vocation, autant qu'à ses romans, que Jules Verne devra gloire et fortune.
31 janvier 1863
C'est la date de naissance d'un romancier. Le 31 janvier 1863, l'éditeur Jules Hetzel met en vente le premier roman d'un écrivain inconnu : Cinq semaines en ballon, par Jules Verne. Le premier tirage est de 2 000 exemplaires ; du vivant de l'auteur, il s'en vendra 76 000 (seul Le tour du monde en quatre-vingt jours fera mieux avec 108 000 exemplaires).
L'année suivante, Jules Verne signe avec Hetzel un contrat aux termes duquel il s'engage à fournir deux volumes par an. à partir de 1865 , ce sont trois volumes annuels qui naissent de leur collaboration. à la mort de Hetzel, en 1886, son fils prend sa succession et continue la publication des Voyages extraordinaires, qui représentent au total 62 titres regroupés en 47 volumes. Au sein de la maison d'édition, Jules Verne n'est pas seulement un auteur prolifique : il est également codirecteur du Magasin d'éducation et de récréation, périodique fondé par Hetzel et Jean Macé dans le but de proposer aux familles "un enseignement sérieux et attrayant à la fois, qui plaise aux parents et profite aux enfants".
18 rue Jacob
Avant d'installer sa maison d'édition au 18 rue Jacob, Hetzel connut une première vie d'éditeur et d'homme politique. Républicain convaincu, il participa à la révolution de février 1848 et servit le gouvernement provisoire comme chef de cabinet de Lamartine, ministre des Affaires étrangères. Il dut donc s'exiler en Belgique sous Napoléon III et ne put rentrer en France qu'en 1859.
En 1844, il avait lancé Le diable à Paris, revue à laquelle collaboraient Balzac, Théophile Gautier, Alfred de Musset, Gérard de Nerval, Charles Nodier, Georges Sand, Stendhal et Eugène Sue, et qu'illustraient Gavarni, Grandville et Bertall. à cette "écurie" déjà prestigieuse se joignirent par la suite Erckmann-Chatrian, Victor Hugo et Jules Sandeau.
À son activité d'éditeur, Hetzel joignait celles de traducteur et d'écrivain. Sous le nom de P.-J. Stahl, il contribuait à remplir les colonnes du Magasin d'éducation et de récréation et se chargeait lui-même d'écrire les textes des albums pour enfants qu'il publiait.
Amiens (61 063 habitants)
La vie de Jules Verne, c'est vingt ans à Nantes, vingt-trois ans à Paris, et trente-quatre ans à Amiens, 61 063 habitants, comme il l'écrit dans sa Géographie de la France.
Marié en 1857 à l'amiénoise Honorine de Viane, il s'installe en 1871 dans la ville d'origine de sa femme, avec leur fils Michel et les deux filles nées du premier mariage d'Honorine. Il mène une vie de bourgeois bien rangé et reçoit la bonne société pour faire plaisir à sa femme, mais préfère aux mondanités du salon la solitude laborieuse de son cabinet de travail.
Couronnement de sa vie de notable, il est élu conseiller municipal en 1888. Il est chargé du théâtre, qu'il fréquente assidûment ; il prononce des discours pour la distribution des prix au lycée et inaugure le cirque, en 1889.
De la Coralie au Saint-Michel
La légende familiale des Verne rapporte que Jules, âgé de onze ans, fit une fugue et embarqua clandestinement à bord du trois-mâts La Coralie, en partance pour les Indes. L'authenticité de l'incident est loin d'être avéré, mais la passion de Jules Verne pour la mer et les bateaux est une réalité. Quant à l'autre légende, qui veut que les Voyages extraordinaires soient l'œuvre d'un sédentaire endurci, les nombreux romans inspirés des voyages réels de l'auteur suffisent à la démentir.
De son premier périple, qui le mena en Grande-Bretagne en 1859, il rapporta non seulement Voyage à reculons en Angleterre et en Ecosse (resté inédit jusqu'en 1989), mais encore Les Indes noires et Le Rayon-vert. Une ville flottante est le récit romancé de sa traversée de l'Atlantique à bord du Great-Eastern, le plus grand paquebot du monde.
Il fut propriétaire de trois bateaux successifs, tous trois baptisés Saint-Michel ; avec le troisième, il fit entre 1878 et 1885 plusieurs grandes croisières en Méditerranée, d'où naquirent Mathias Sandorf et Clovis Dardentor.
La bête d'une somme
Accablé de travail par Hetzel, Jules Verne, fraîchement installé en Picardie, signait plaisamment une lettre à son éditeur : "Votre bête de Somme". Comme Balzac avec La comédie humaine ou Zola, son contemporain, avec les Rougon-Macquart, il a conçu avec Les voyages extraordinaires, un vaste cycle romanesque qui ne représente toutefois, malgré ses dimensions impressionnantes, qu'une partie de sa production.
Les manuscrits de ses œuvres, dont la plus grande partie est conservée à la Bibliothèque municipale de Nantes, sont le témoignage de presque soixante ans de travail acharné. Des premiers essais de théâtre, écrits sur des cahiers de tous formats et corrigés dans tous les sens, aux romans de la maturité, à la présentation méthodique et immuable, l'examen des manuscrits montre bien que, si les thèmes et la méthode de travail ont évolué, c'est autant à l'inspiration fulgurante d'un visionnaire qu'au labeur quotidien d'un homme rivé à son bureau que nous devons De la terre à la lune et Le tour du monde en quatre-vingt jours.
Non content de corriger sans cesse et de récrire plusieurs fois chaque œuvre, Jules Verne correspondait plusieurs fois par semaine avec son éditeur et terminait souvent ses lettres en réclamant avec insistance de nouveaux jeux d'épreuves qui n'arrivaient jamais assez vite !
* Biographie extraite du fascicule Le monde
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Nantes, la Loire et ses îles, le port et les bateaux, l'agitation du quai de la Fosse, l'appel vers l'ailleurs, le jardin des Plantes et la richesse exotique du patrimoine végétal nantais. Tous ces éléments ont durablement marqué Jules Verne. Nantes a été la source du rêve et le creuset de l'inspiration des Voyages extraordinaires.
Extrait des Cahiers du musée Jules-Verne, n°10, Nantes, 1990.
[.] Je suis né à Nantes, où mon enfance, s'est tout entière écoulée. Fils d'un père à demi-parisien et d'une mère tout à fait bretonne, j'ai vécu dans le mouvement maritime d'une grande ville de commerce, point de départ et d'arrivée de nombreux voyages au long cours. Je revois cette Loire, dont une lieue de ponts relie les bras multiples, ses quais encombrés de cargaisons, sous l'ombrage de grands ormes, et que la double voie du chemin de fer, les lignes du tramway ne sillonnaient pas encore. Des navires sont à quai sur deux ou trois rangs ; d'autres remontent ou descendent le fleuve.
Pas de bateaux à vapeur, à cette époque, ou du moins très peu ; mais de ces voiliers dont les Américains ont si heureusement conservé et perfectionné le type avec leurs clippers et leurs trois-mâts goélettes. En ce temps-là, nous n'avions que les lourds bâtiments à voile de la marine marchande. Mais que de souvenirs ils me rappellent ! En imagination, je grimpais à leurs haubans, je me hissais à leurs hunes, je me cramponnais à la pomme de leurs mâts ! Mon plus grand désir eût été de franchir la planche tremblotante qui les rattachait au quai pour mettre le pied sur leur pont !
Mais avec ma timidité d'enfant, je n'osais ! Timide ? Oui, je l'étais, et pourtant, j'avais déjà vu faire une révolution, renverser un régime, fonder une royauté nouvelle, et bien que je n'eusse que 2 ans alors, j'entends encore les coups de fusil de 1830 dans les rues de Nantes où, comme à Paris, la population se battit contre les troupes royales. [.]
Sur les pas de Jules Verne
« Il y a cette circonstance que je suis né à Nantes, où mon enfance s’est tout entière écoulée (…) »
Jules Verne dans "Souvenirs d'enfance et de jeunesse"
Nantes, les îles et la Loire, premier miroir de ses rêves, sont le creuset de l’œuvre de Jules Verne.
Là est le secret d’un homme et d’un écrivain qui parle à l’imagination, au cœur et à l’intelligence. Partez sur ses pas, laissez-vous guider par ses souvenirs et par ceux que nous a transmis la tradition familiale, découvrez les lieux qu’il a fréquentés et qui l’ont inspiré.
Télécharger le dépliant Laissez-vous conter Nantes
Souvenirs d'enfance
Romancier parmi les plus imaginatifs et les plus populaires, Jules Verne est l'un des écrivains français les plus universellement connus. Son œuvre foisonnante est également l'une des plus traduites dans le monde. Esprit extraordinairement curieux, grand lecteur nourri de culture encyclopédique, il a su dire les rêves de son époque et ouvrir à de nouvelles visions du monde en conjuguant la rigueur d'une documentation scientifique impressionnante et l'imaginaire poétique. Le seul nom de Jules Verne évoque des images fantastiques et par ses Voyages extraordinaires, il est devenu un mythe universel.
Interrogé sur les origines de sa vocation littéraire, Jules Verne répondit : "il y a cette circonstance que je suis né à Nantes, où mon enfance s'est tout entière écoulée (.) dans le mouvement maritime d'une grande ville de commerce, point de départ et d'arrivée de nombreux voyages au long cours".
Sur les quais, où les navires de commerce déchargeaient ou embarquaient leur fret, les mémoires conservaient encore les souvenirs du départ de Bougainville appareillant pour son voyage autour du monde, ou du naufrage de la Méduse construite sur un chantier de la Basse-Loire. Les baleiniers rapportaient de leurs campagnes les merveilleuses légendes qu'on retrouvera dans Vingt mille lieues sous les mers et dans Les Histoires de Jean-Marie Cabidoulin. Au jardin des plantes le jeune Jules pouvait rêver sous les frondaisons exotiques rapportées par les navigateurs nantais : cyprès géants des Everglades qu'on retrouvera dans Nord contre Sud, déodars de l'Himalaya sous le couvert desquels hivernera La Maison à vapeur. "L'oil à l'oculaire d'un petit télescope [il observe] le virement des navires, larguant leurs focs et bordant leurs brigantines, changer derrière puis changer devant". La Loire en ce temps-là est la principale voie de communication nantaise. Lors de son premier voyage à Paris en 1847, Jules Verne emprunte le pyroscaphe jusqu'à Tours, terminus du chemin de fer qui n'atteint Nantes qu'en 1851. A ce moyen de locomotion, il devait déjà ses premières émotions : celles qu'il ressent à douze ans lorsqu'il descend le fleuve jusqu'à Saint-Nazaire pour voir la mer qu'il ne connaissait pas.
Nantes et la Loire, pour Jules Verne, ce sont aussi ses premières "îles mystérieuses" : l'île Feydeau, où il naît le 8 février 1828, immense Jangada de pierre, véritable Ville flottante au cœur de la ville ; les îlots en face de la maison de campagne de la famille Verne à Chantenay, où le jeune Jules vit ses premières robinsonnades ; l'île d'Indret dont l'inquiétante machinerie semble enfouie sous les eaux.
Autant de modèles pour L'Ile mystérieuse, Deux ans de vacances, L'Ile à hélice.
"Cette usine d'Indret, nos excursions sur la Loire et les vers que je griffonnais constituaient les trois principaux plaisirs et occupations de ma jeunesse" : quel creuset pour les rêves du futur écrivain que cette ville aventureuse, "point de départ" de toutes les navigations imaginables !
Aussi qu'il la quitte pour Paris en 1848 avec des sentiments mêlés de déception amoureuse et d'ambition littéraire, y achète et en fasse le port d'attache du Saint-Michel III, son dernier et plus beau bateau, sa ville natale ne sera jamais absente de la vie et de l'inspiration de Jules Verne. Inscrit dès 1910 dans la pierre du monument érigé au Jardin des plantes, son souvenir s'y est d'ailleurs toujours perpétré et participe de la construction de la mémoire nantaise : "Ce que nous devons aujourd'hui souligner, c'est la part que Nantes peut revendiquer dans la formation de son génie (.) Ces jeunes années, celles où l'imagination est le plus sensible à l'appel des choses extérieures se déroulent autour de ce port où les quais se chargeaient des produits des terres lointaines" - Paul Bellamy, maire de Nantes, à l'occasion du centenaire de la naissance de Jules Verne.
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Zeppelin-Fahrt [Périple en Zeppelin]
Jeu de société sur le thème de l'aérostation
Premier tirage
Allemagne, vers 1900
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En 1863 c’est un «voyage dans les airs», publié sous le titre de Cinq semaines en ballon, qui apporte à Jules Verne le succès, et lance la série des Voyages extraordinaires. A bord du ballon Victoria, le docteur Fergusson, accompagné des fidèles Dick Kennedy et Joe, traverse l’Afrique d’est en ouest. Suivront, pour ne citer qu'eux, L'île mystérieuse (1875), Hector Servadac (1877), sans oublier une nouvelle publiée en 1874 dans le recueil le Docteur Ox : Un drame dans les airs, où l'aérostier et son passager clandestin survolent l'Allemagne. En 1886, avec Robur le conquérant, Jules Verne met en scène la très sérieuse querelle entre le plus léger (les ballons ou aérostats) et le plus lourd (les avions et autres aéronefs) que l’air, querelle que Jules Verne et son héros concluent de manière parfaitement prémonitoire : «Quant à l’avenir de la locomotion aérienne, il appartient à l’aéronef, non à l’aérostat».
L' aérostation et l'aviation suscitent en effet à cette époque beaucoup de passions et d'interrogations, voire de querelles. Dans cette histoire le comte Ferdinand von Zeppelin (1838-1917), inventeur des ballons dirigeables qui portent son nom, occupe une place de choix auquel ce jeu de parcours allemand rend hommage. La boîte cartonnée est ornée d'une magnifique chromolithographie représentant un paysage aérien - au-dessus d'un fleuve un zeppelin survole la campagne – et un portrait du comte. Elle contient un plan de jeu chromolithographié plié en six, quatre zeppelins polychromes en plomb sur socles et un dé. La règle du jeu est collée sous le couvercle. Le jeu consiste en un parcours en trente-neuf cases, émaillé de «désagréments» et d'accidents, qui se déroule dans le ciel au dessus du territoire allemand, entre Karlsruhe, Stuttgart, Friedrichshafen, Konstanz, Basel et Strasburg.
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Paul d'Ivoi. Les dompteurs de l'or
Paris, Boivin et Cie, [1913]
.Ouvrage illustré de 80 gravures dans le texte et de 20 grandes compositions hors texte d'après les dessins de Henri Thiriet
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Paul Deleutre (1856-1915) fut journaliste au Figaro puis collabora au Journal des Voyages dont il sera l'un des piliers avec Louis Boussenard, et au Petit journal, sous le pseudonyme de Paul d'Ivoi. Il publie entre 1894 et 1914 les 21 volumes qui composent les Voyages excentriques. Dans cette série populaire, destinée à la jeunesse et publiée chez Boivin et Cie, Paul d’Ivoi exploite la veine des Voyages extraordinaires dont Jules Verne avait assuré le succès : instruire en distrayant, découvrir le monde à travers les aventures de leurs héros. Comme Jules Verne il ose des inventions extraordinaires et fait des extrapolations. Les similitudes entre les deux œuvres se lisent jusque dans l'aspect des ouvrages : collections spécifiques, richement illustrées et cartonnées.
Avant-dernier roman de la collection des Voyages excentriques, Les dompteurs de l'or reprend les thèmes de la modernité, de la science colorée et fantaisiste mais néanmoins mêlée d'angoisse (des aéronefs sèment la mort par des nuages réfrigérants) illustrés en couverture : un grand dirigeable survole une ville en bord de mer - San Francisco - où se côtoient des gratte-ciel.
Ses oeuvres
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La Bibliothèque de Nantes a numérisé son fonds Jules Verne. Depuis 2005, il est possible de feuilleter quelques belles pages en couleurs de ses manuscrits originaux.
Sont conservés à Nantes les manuscrits de 98 romans, nouvelles, pièces de théâtre et autres écrits de Jules Verne, corpus unique de 15.000 feuillets permettant de suivre l'élaboration de l'œuvre au fil même de la plume de son créateur.
Ces manuscrits, susceptibles de bien des lectures et exégèses, ouvrent un vaste champ d'exploration, entre contraintes de production et conscience créative / inconscient créateur. On y rencontre les termes du contrat éditorial passé avec Hetzel, et les modalités de sa mise en œuvre.
À travers les différentes phases du travail de rédaction - de mise en scène, se fait progressivement pour chaque roman la rencontre entre un pays, une action et un ton. D'écriture en réécritures le texte prend son autonomie, dans la nécessaire distance des versions successives : "Entre les manuscrits et la dernière épreuve de ce que je fais, vous ne pouvez pas savoir la différence littéraire qui existe".
Dans le même temps le savoir-faire pédagogique de l'auteur entremêle "l'instruction qui amuse, l'amusement qui instruit", et place le savoir sur le fil du voyage.
C'est l'écriture même, "source du seul bonheur véritable" pour Jules Verne, qui s'incarne dans ces manuscrits. C'est un jeune homme amoureux, tout imprégné de Victor Hugo et des Romantiques, qui a écrit ces poèmes et soigneusement calligraphié les titres des pièces de théâtre ; c'est un travailleur acharné qui, même pendant ses voyages en mer, prenait des notes, rédigeait une première fois au crayon, corrigeait en repassant ses textes à l'encre, corrigeait encore en refaisant des chapitres entiers dans les marges, et corrigeait enfin de multiples jeux d'épreuves ; c'est la main rhumatisante du vieillard à barbe blanche qui a écrit les dernières pages d'une écriture altérée, en dehors des lignes du papier que les yeux malades ne voyaient plus ; c'est enfin son fils Michel qui a porté ajouts, corrections et suppressions sur les derniers manuscrits quand il n'a pas mis au net ou composé le texte.
Au fil de la plume de Jules Verne et des interventions de l'éditeur Hetzel - ses "colères au crayon", prennent vie devant nous Michel Ardan, Phileas Fogg, Passepartout, Michel Strogoff et autres héros mythiques, et s'élaborent les Voyages extraordinaires. Nous vivons ligne à ligne cette extraordinaire aventure, "probablement sans autre exemple dans la littérature française" (Simone Verne).
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