Etrusques Sarcophage des Époux,
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Les Étrusques vivent en Italie centrale et dans la plaine du Pô entre le VIIIeet le Ier siècle avant J.-C. Ils sont à l’origine de la première et de la plus importante civilisation de la péninsule italique. Leurs tombes, édifiées en dehors des villes et décorées de sculptures ou de peintures, permettent de mieux connaître et de cerner leurs mœurs et leur mode de vie. Ce sarcophage a été réalisé à l’apogée de leur culture, soit au VIIe ou au VIesiècle avant J.-C. Après le Ier siècle avant J.-C., les Étrusques deviennent des citoyens romains et, comme pour beaucoup d’autres peuples, leur culture spécifique se fond dans une civilisation qui englobera toutes les rives de la Méditerranée.
URNE OU SARCOPHAGE ?
Retrouvé brisé en plusieurs fragments, le sarcophage reposait dans une tombe à tumulus creusée dans le rocher et surmontée d'un grand amas de terre. Ce type de tombe était l’apanage des riches familles étrusques de l'époque. Comme les Étrusques pratiquaient aussi bien l’inhumation que l’incinération, il n’est pas impossible que l’œuvre exhumée ait fait officed’urne cinéraire monumentale. Néanmoins, en raison de ses dimensions exceptionnelles, les historiens de l’art songent, dès sa découverte, à un sarcophage.
ÉPOUX POUR L’ÉTERNITÉ
Tendrement blottis l’un contre l’autre, les époux évoquent les défunts, leur relation conjugale, sans les représenter de manière réaliste [ détail b ]. Les proportions et l’attitude de l’épouse, similaires à celles de l’homme, indiquent l’importance de la femme et de son rôle dans la cité étrusque. À demi allongés l’un contre l’autre sur un lit à pieds sculptés que couvre un épais matelas, les époux s’appuient sur des outres à vin en guise de coussins.
Ils sont représentés comme s’ils prenaient part à un banquet couché. Cette coutume aristocratique vient de Grèce et du Proche-Orient et sera reprise par les Romains. Mais contrairement aux Grecques, les femmes étrusques participent au banquet aux côtés de leur mari. L’épouse tenait sans doute, à l’origine, un vase à parfum [ image 3 ], dont elle s’apprêtait à verser quelques gouttes dans la main de son époux. Se parfumer, comme boire du vin, fait partie du rituel qui encadre le banquet donné à l’occasion des funérailles.
Les Étrusques plaçaient aussi des vases à vin et à parfum dans les tombes pour aider les défunts à survivre dans l'au-delà. L’originalité de l’artiste étrusque a été de transposer cette image – connue surtout par les peintures de vases grecs [ image 1 ] – dans la sculpture monumentale.
UNE IMAGE PLEINE DE VIE
Le sculpteur concentre son attention sur les bustes, les visages et les mains, et délaisse les jambes, représentées de manière assez sommaire, comme aplaties. Ce désintérêt pour une recherche formelle homogène est typique de l’art étrusque. L’homme, torse nu, en retrait, enlace sa femme qui porte une tunique à manches mi-longues. Le sourire énigmatique, dit « étrusque », est caractéristique de l’art de cette civilisation. Ce traitement stylistique de la bouche témoigne néanmoins de l’influence de l’art grec contemporain [ image 2 ].
Les yeux sont étirés en amande et soulignés par les courbes des sourcils ; la femme [ détail c ] porte un bonnet à rebord, typiquement étrusque, un large collier ; elle portait des boucles d’oreilles aujourd’hui disparues, et ses longs cheveux sont tressés ; son mari a la particularité d’être blond avec une barbe et une moustache noire, peut-être un signe d’héroïsation du défunt.
LA TECHNIQUE
La ville étrusque de Caere ne disposait pas dans ses environs de carrière de pierre. À l’époque archaïque, les sculpteurs qui y travaillaient se tournèrent donc vers le matériau qu’ils avaient à leur disposition, la terre argileuse de leur sol. Ils se firent une réputation dans ce domaine. Le sarcophage, modelé en terre et peint avant d’être cuit, est réalisé en quatre parties : deux pour les époux qui en forment le couvercle, deux pour la cuve en forme de lit – sans doute pour faciliter la cuisson et sa manipulation. Les sculpteurs fabriquaient les mains à part avant de les fixer, ils incrustaient iris et pupilles. Les couleurs, fort bien conservées, suivent les conventions de l’Antiquité, la peau de l’homme est peinte en ocre rouge, celle de sa femme en ocre jaune. Cuve et couvercle étaient rehaussés d'une vive polychromie, aujourd'hui en partie effacée, qui ajoute au raffinement des parures de la femme, aux détails des tissus et des chevelures. Si certains traits s’inspirent de l’art grec, d’autres sont propres à l'art étrusque, comme la stylisation des volumes, surtout sensible dans le traitement des jambes, et l’attitude donnée aux défunts.
À l’instar des antiquités égyptiennes, l’art étrusque suscite l’engouement de la société cultivée des XVIIIe et XIXe siècles. L’Europe redécouvre alors une civilisation et des formes qu’elle revisite. La culture antique fascine, et le mobilier de « goût étrusque » fleurit.
Sous la direction de Cécile Maisonneuve
sources http://www.panoramadelart.com/