Marcel Aymé

 

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Marcel Aymé est né le 29 mars 1902 à Joigny, dans l’Yonne, où son père, maître maréchal-ferrant dans un régiment de Dragons, était en garnison. Il était le benjamin de six enfants et ses parents étaient originaires de villages voisins du Jura.

A la mort de sa mère, en 1904, son père le confia, avec sa plus jeune sœur Suzanne, son aînée de deux ans, aux grands-parents maternels, Auguste Monamy et Françoise Curie, qui exploitaient une tuilerie, une ferme et un moulin à Villers-Robert, dans le Jura.

C’est là que Marcel connut le monde rural qui a inspiré ses romans de la campagne et ses contes. Il y vécut entouré d’affection mais découvrit, dans cette période de séparation de l’Eglise et de l’Etat, les luttes violentes entre républicains et cléricaux. Petit-fils d’un homme engagé dans le camp républicain, il eut à subir les moqueries de ses camarades, majoritairement de l’autre bord. Il conserva de cette expérience une aversion pour l’intolérance et l’injustice.

Le jeune garçon fréquenta l’école du village et, à la mort de ses grands-parents, fut accueilli à Dole par sa tante Léa Monamy, la plus jeune sœur de sa mère, qui n’avait pas d’enfants et tenait un commerce de mercerie. Elle habitait au dernier étage d’une maison avec une belle vue sur la ville et le Doubs.

Il poursuivit ses études au Collège de l’Arc et obtint le baccalauréat « math-élèm » en 1919. Sa scolarité fut très bonne, en tout cas différente de l’image de cancre qu’il a donnée de certains de ses personnages.

Entré en mathématiques supérieures au lycée Victor-Hugo de Besançon, il dut abandonner ses études en 1920, victime de la grippe espagnole.

Il revint à Dole se faire soigner chez sa tante, qui fut pour lui une seconde mère. Après un service militaire en Allemagne, il vécut à Paris où il commença des études de médecine, vite interrompues, et exerça plusieurs petits métiers avant de tomber à nouveau gravement malade.

Il se réfugia à Dole, où, pendant sa convalescence, sa sœur aînée Camille l’encouragea à écrire.

Ce sera Brûlebois, publié en 1926 aux «  Cahiers de France » à Poitiers, histoire d’un sous-préfet devenu porteur à la gare de Dole et amateur de la dive bouteille. Ce premier roman fut un succès qui ouvrit à Marcel Aymé les portes de Gallimard. Les deux romans suivants, Aller retour et Les Jumeaux du diable, furent moins appréciés. Il connut la notoriété avec La Table-aux-Crevés, qui obtint le prix Renaudot en 1929.

En 1930 La Rue sans nom reçut un accueil favorable des critiques, mais Le Vaurien, en 1931, n’obtint pas un franc succès.

C’est avec La Jument verte, en 1933, qu’il devint un auteur célèbre et scandalisa les bien-pensants. En 1933 également commença sa carrière cinématographique avec l’adaptation de La Rue sans nom par Pierre Chenal. Ce fut le début d’une longue série de films et téléfilms inspirés de ses œuvres, plus d’une trentaine, dont le nombre augmente chaque année, le plus connu étant sans conteste La Traversée de Paris, réalisé par Claude Autant-Lara en 1956.

Cette période précédant la guerre lui fut favorable. Il publia successivement Maison basse (1935), Le Moulin de la Sourdine (1936), Gustalin (1937) et Le Bœuf clandestin (1939), alternant romans « parisiens » et romans « de la campagne ». La publication de trois recueils de nouvelles- Le Puits aux images, Le Nain, Derrière chez Martin – et des premiers Contes du chat perché entre 1932 et 1939 lui permit également de prendre une place importante dans le monde littéraire de l’époque.

Installé à Montmartre dès 1928, il habitera sur la Butte, après plusieurs changements d’adresse, jusqu’à sa mort.

Pendant la guerre, Marcel Aymé a beaucoup écrit, et publié la plupart de ses œuvres en feuilletons dans les journaux : des nouvelles (Le Passe-muraille), des Contes du chat perché, des romans (La Belle Image, Travelingue, La Vouivre). Il a poursuivi sa carrière de dialoguiste de cinéma avec le metteur en scène Louis Daquin (Nous les gosses, Madame et la mort, Le Voyageur de la Toussaint).

Après la guerre il publia  Le Chemin des écoliers en 1946 et Uranus en 1948. Avec Travelingue, paru en 1941, cette trilogie présente un tableau exceptionnel de la société française avant, pendant et après la guerre. La sortie de deux recueils - Le Vin de Paris en 1947 et En Arrière en 1950 - confirma son goût pour les nouvelles, dont il a écrit plus de cent.

C’est en 1948 que le metteur en scène Douking s’intéressa à une pièce écrite en 1932, Lucienne et le boucher, que Louis Jouvet avait refusé de faire jouer. Ce fut le début de la carrière théâtrale de Marcel Aymé qui obtint de grands succès avec Clérambard (1950), La Tête des autres (1952), Les Quatre Vérités (1954) ou Les Oiseaux de lune (1955).

Un dernier roman, Les Tiroirs de l’inconnu, paru en 1960, fut un clin d’œil réussi au nouveau roman.

Signalons enfin qu’il a écrit des centaines d’articles, de préfaces et plusieurs essais dont le plus remarquable est Le Confort intellectuel (1949).

Marcel Aymé est mort à Montmartre le 14 octobre 1967.

Considéré par une partie de l’intelligentsia française de l’après-guerre comme un écrivain populaire, voire régionaliste, justice a été rendue à la richesse psychologique et sociale de ses personnages et à la dimension philosophique de son œuvre par de très nombreux universitaires ou critiques, en France et hors de France.

Dans « La Comédie humaine de Marcel Aymé » La Manufacture 1985, Michel Lécureur, Maître de conférences à l’Université du Havre, qui a consacré vingt ans de travail à notre écrivain et à son œuvre, écrit : « Une telle analyse sociologique de la France de la première moitié du 20e siècle livre également un portrait de l’homme contemporain. En créant des héros qui ne parviennent jamais à maîtriser leur destin, Marcel Aymé admet le déterminisme social. Dans un monde dont la complexité lui échappe et le dépasse, le personnage ayméen paraît écrasé et seulement capable ou libre de vivre suivant une voie tracée par les sociétés du 20e siècle. S’il vient à se révolter contre son destin, il échoue et connaît l’amertume, la folie ou la mort… »

Le Professeur Spang-Hanssen, de l’Université de Copenhague (La Docte Ignorance de Marcel Aymé – Klincksieck, 1999) dit sensiblement la même chose:

« Partout, dans les œuvres de Marcel Aymé, on voit les hommes et les femmes s’efforcer de construire, avec leur gros bon sens et leur sensibilité, une réalité, c’est-à-dire une représentation cohérente du monde. Et cet effort est constamment contrecarré par un univers physique qui est discontinu, hétérogène, et dans lequel le hasard joue un rôle primordial. »

ses oeuvres

 

 

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Ses Romans

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La Jument verte

Marcel Aymé 
Œuvres romanesques complètes 
La Pléiade 

Marcel Aymé a probablement écrit La Jument verte durant l’année 1932 et au début de 1933. Le roman paraît au mois de juin 1933. Il remporte un vif succès et suscite de violentes réactions de la part des bien-pensants et des ligues de vertus scandalisés par la liberté de ton de ce livre. 

A Claquebue, village du Jura franc-comtois, nait une jument verte, couleur de jade, qui fera la fortune de son propriétaire, le maquignon Jules Haudouin. Cela se passe vers 1860 et l’action se déroule sur une trentaine d’années.
Le roman comporte 16 chapitres et des intermèdes constitués des propos de la jument qui se substitue au narrateur.
C’est l’histoire de la famille Haudouin et de ses rapports avec les autres familles du village de Claquebue, qui se déroule sous le regard et les commentaires de la jument verte immortalisée dans un tableau accroché au mur de la salle à manger.
On assiste aux ébats amoureux, aux luttes politiques, aux haines entre familles, aux rivalités entre frères, etc.
Mais avant tout : La Jument verte est un véritable hymne à la vie (M. Dzunic-Drinjakovic).

Les thèmes :

Chronique amoureuse et familiale : l’amour y est décliné sous toutes ses formes (l’érotisme sans complexe, l’amour familial, l’amour de la nature, l'amour de la vie).
L’opposition entre la vie au village ouverte sur la nature (Honoré à Claquebue) et la vie citadine repliée sur elle-même (Ferdinand à Saint-Magelon).
L’opposition entre l’insouciance, la spontanéité, la joie de vivre (Honoré) et l’hypocrisie, l’ambition et les calculs mesquins (son frère Ferdinand).
Le refus de se laisser manipuler par des discours idéologiques.
La description de la vie rurale en Franche-Comté sous le second Empire, la troisième République et le mouvement du général Boulanger.
L’affrontement des cléricaux et des anticléricaux dans la lutte pour la mairie du village.
Les vieilles haines entre familles qui se transmettent de génération en génération.

 

Les personnages :

Ce roman est particulièrement riche en personnages, une centaine, dont la plupart ne participent pas directement à l’action et sont simplement évoqués au cours de conversations. Parmi les noms cités, figurent ceux des familles de Claquebue et les prénoms des enfants des principales d’entre elles (Les Haudouin, Maloret, Messelon, etc.) Outre la jument verte, personnage principal, une dizaine d’animaux (chien, chevaux, vaches) sont également cités par leur nom.

 

La Jument verte naît dans la ferme des Haudouin (p.829)

Jules Haudouin : cultivateur et maquignon à Claquebue, chez qui nait la jument verte (p.829)

Les Maloret : famille ennemie des Haudouin (p.829)

28 centenaires dans le village où rien ne se passe (p.830)

Le vieux Rousselier : un des centenaires qui meurent comme des mouches lors de la naissance de la jument verte (p.830)

La femme de Jules Haudoin : mère d’Alphonse, Honoré et Ferdinand (p.831)

Le curé de Claquebue : qui assiste les moribonds (p.831)

Le vieux père de Jules Haudouin : décède vers la fin de soirée (p.831)

Un professeur du collège impérial, un savant (73 ans) illustre et décoré et un autre savant polémiquent sur la naissance de la jument (p.831)

 

L’Empereur Napoléon III, de passage à Saint-Margelon vient voir la jument verte (p.832)

Le Préfet qui accompagne l’Empereur à Claquebue (p.832)

La servante de Mme Haudouin (p.833)

Alphonse Haudouin : l’aîné des fils de Jules, a fait 7 ans de service militaire dans un régiment de chasseurs à cheval (p.833) – blessé en 1870, il sera surnommé le « Boiteux »

Honoré Haudoin (45 ans): le cadet, a épousé contre la volonté de son père, Adélaïde Mouchet (40 ans au moment de l’action), une fille mince aux yeux noirs (p.833)

Ferdinand Haudouin : le plus jeune qui a fait ses études au collège impérial de Saint-Margelon, surnommé « Cul d’oignon » - et qui deviendra vétérinaire (p.834)

Le jeune  peintre Murdoire: qui fera un portrait de La Jument verte, et qui sera chassé pour avoir séduit la servante (p.834) – il s’agit du célèbre Murdoire (p.837)

Le portrait de Canrobert : qui trône au dessus de la cheminée dans la salle à manger aux côtés de ceux de l’Empereur et de la Jument verte (p.835) – il s’agit de François Marcellin Certain de Canrobert (1809-1895), Maréchal du second empire.

La « Satinée » : fille de joie que Jules Haudouin visite régulièrement à Valbuisson (p.835)

Les portraits de Thiers, Mac-Mahon, puis Jules Grévy et Gambetta se succèdent aux côtés de celui de la Jument verte (p.836)

Jules Grévy (1807-1891) : portrait du Président de la République (1879-1887) que Jules Haudoin considère dans la salle à manger. Propos de la jument (p.839)

Les époux Brochard : les beaux-parents de Ferdinand Haudouin (p.844)

Hélène Brochard : épouse de Ferdinand Haudouin (p.844)

Les demoiselles Hermeline : directrices de la pension où Hélène Brochard a reçu une éducation soignée (p.844)

Frédéric (l’aîné), Antoine (le plus jeune) et Lucienne : enfants de Ferdinand & Hélène Haudouin (p.844)

Valtier : député radical de Saint-Margelon (p.844)

Tine Maloret : qui a eu deux fils naturels et passée la cinquantaine s’est fait coucher sur le testament d’un ancien huissier (p.845)

Rousselier : républicain recommandé par Jules Haudouin à son fils Honoré qui le considère comme une crapule (p.846)

Juliette Haudoin : fille, deuxième née des cinq enfants d’Honoré et petite-fille préférée de Jules Haudoin (p.847)

Une fille de belle jambe et de peu de principe : épousée par Alphonse dont elle acheva de dévorer le meuble et l’immeuble (p.848)

Casimir Delavigne (1793-1843) : poète dont Hélène Haudoin a étudié les œuvres chez les demoiselles Hermeline et dont elle lit les poèmes à ses enfants (p.849) 

Déodat : le facteur est prêt pour partir (p.853)

Clotilde et Gustave : les deux plus jeunes enfants d’Honoré Haudoin rentrant de l’école en flânant par les chemins (p.858)

Alexis : fils d’Honoré Haudoin garde les vaches sur les prés communaux (p.858)

Ernest : le fils aîné d’Honoré Haudoin, fait son service militaire à Epinal (p.858)

Philibert Messelon (72 ans) : le maire de Claquebue (p.859)

Zèphe (Joseph) Maloret : du parti des cléricaux, candidat à la mairie de Claquebue, proposé par Valtier et Ferdinand Haudoin (p.860)

Le général Georges Boulanger (1837-1891) : évoqué par Ferdinand Haudoin (p.860)

Marguerite Maloret : fille de Zèphe évoquée par Honoré Haudouin. Amie de Valtier qui pour lui plaire tente de pousser Zéphe à la mairie de Claquebue (p.861)

Toucheur : jeune franc-tireur, compagnon d’Honoré Haudouin pendant la guerre de 1870 (p.862)

Le chef bavarois : qui viole la mère d’Honoré Haudouin, alors que ce dernier est caché sous le lit en compagnie de Toucheur (p.864)

Un vagabond d’une quarantaine d’année : avec lequel Adelaïde trompera son mari, une seule fois. Propos de la jument (p.872) 

Tintin Maloret (14 ans) : qui a déchiré les vêtements d’Alexis Haudouin en se battant avec lui (p.878)

Isabelle Dur : que Tintin Maloret entraine derrière la haie du Desclos pour lui retrousser les jupons (p.878)

Anaïs Maloret (la quarantaine) : épouse de Zéphe Maloret, à laquelle Adélaïde veut demander raison de la chemise déchirée par son garçon (p.879)

Léon Dur, Baptiste Rugnon et Noël Maloret : trois soupirants de Juliette Haudouin (p.880)

Les Messelon : dix à dîner autour d’une longue table et la vieille qui mange debout comme c’est l’usage (p.881)

Mainehal : qui doit de l’argent à Ferdinand Haudouin, conduit la famille de ce dernier à Claquebue. Cité dans la lettre de Ferdinand à son frère Honoré (p.887)

Les Alboches : nom couramment utilisé en langue familière pour désigner les Allemands entre 1870 et 1914. Mentionnés dans la lettre de Ferdinand à son frère Honoré (p.887)

Maxime Trousquet : républicain modéré cité dans la lettre de Ferdinand à son frère Honoré (p.888)

Louise Bœuf : qui eut à subir l’assaut de onze bavarois en 1870. Citée dans la lettre de Ferdinand à Honoré (p.888)

La Veuve Justine Dominé : qui habite la troisième maison de Claquebue sur le chemin du facteur Déodat (p.891). C’est le facteur Déodat qui lit la lettre  (p.891)

Les écoliers qui se chamaillent en rentrant de l’école : Gustave et Clotilde Haudouin, les trois Messelon, le tintin Maloret, Narcisse Rugnon, Alaine Dur et d’autres (p.892)

Jude, l’aîné des Messelon : qui se moque de Tintin Maloret (p.893)

Léon Bœuf et Nestor Rousselier, parmi d’autres prennent fait et cause pour Jude Messelon,  (p.893)

Léon Corenpot : cité par une paroissienne de Claquebue, qui confesse au curé avoir trompé son homme avec lui (p.902)

Le pion de la petite étude : Antoine, fils de Ferdinand, dit à son frère Frédéric que le pion a vu ses notes et qu’il n’aura qu’un accessit de gymnastique (p.904)

La petite Jasmin : Antoine dit à son frère Frédéric qu’elle est jolie (p.904)

La nièce du curé de Claquebue : elle tenait l’harmonium, mais depuis qu’elle est mariée les paroissiens ne l’entendent qu’n dimanche sur cinq (p.905)

La comtesse de Bombrion : tient l’harmonium quand elle vient à la messe à Claquebue (p.905)

Mademoiselle Bertrande : la cadette des sœurs Hermeline, professeur d’examen de conscience dans la classe de première année (p.907)

De Burgard de Montesson : officiers de cavalerie qui jouaient du piano à queue quand ce n’était pas de la harpe (p.910)

Colonel de Prébord de la Chastelaine : colonel de hussard assis à côté de Ferdinand sur l’estrade lors de la distribution des prix du collège (p.911)

Lieutenant Galais : avec qui Ferdinand, appelé en consultation au quartier des hussards, a une controverse sur la castration des poulains (p.911)

Les Berthier : cités dans les propos de la jument à propos de leur façon de caresser leurs femmes de quatre à cinq manières différentes (p.923)

Le garde champêtre : gardien de la propriété et des bonnes mœurs, surgissait parfois au milieu des jeux sexuels des jeunes bergers (p.925)

La femme de Déodat, le facteur, décédée depuis Dix ans  et qui est au cimetière de Claquebue (p.930)

Les Puget : mentionnés par Honoré lors de la dispute avec Ferdinand (p.935)

Les Rouquet et les Viard : habitants de Claquebue, mentionnés par Déodat le facteur (p.936)

L’homme à la mère Dominé : qui était mort après s’être purgé de trois cuillerées d’huile de ricin un 14 juillet – selon les souvenirs d’Adelaïde (p.944)

Un agent de police et sa femme : voisins du vétérinaire Ferdinand Haudouin à Saint-Margelon (p.949)

La femme du général Meuble (53 ans) : Ernest, le fils d’Honoré, annonce à son père le décès de celle-ci survenu la veille dans la matinée (p.958)

Les Vinard : habitants de Claquebue, leur fille Germaine correspond avec Ernest Haudouin (p.959)

Berthier, Corenpot, Dur, Rousselier : rencontrés par Honoré et son fils Ernest (p.961)

Les époux Journier : devenus si pauvres pour avoir abusé du plaisir de la chair, selon le curé, qu’ils n’osaient plus paraître à la messe (p.967)

Les Rossigneux, les Bonbol : parmi d’autres accourus à l’annonce de la mort du maire, Philibert Messelon (p.971)

Guste Berthier : un républicain de Claquebue (p.974)

Un garçon de Zèphe : décédé dans sa cinquième année – sa tombe au cimetière (p.976)

Les Coutant : qui, avec quelques autres, ont été rencontrés au Paradis par Philibert Messelon (p.978)

Prosper Messelon : un des bergers (p.981)

Les Quatre-vingt-quinze familles de Claquebue évoquées dans les propos de la jument (p.987)

La fille cadette des Dur (14 ans) : donne des rendez-vous au vieux Berthier (septuagénaire) qui n’entreprenait rien de profond (p.988)

L’homme de la Léonie Bardon : enterré du printemps, qui criait qu’il en avait assez d’être à côté de son frère Maxime (p.1015)

La Marie Dur : devant les clameurs et protestations des morts du cimetière, la Marie Dur coure chercher le curé qui s’entêtait à ne pas entendre (p.1016)

Les Rugeart, les Coutant, les Bœufs, les Trousquets, les Pignon, les Caroche, les Clergeron, les Dubuclar, parmi d’autres déjà cités, accouraient pour entendre Jules Haudoin d’en dessous dire du mal de la Tine Maloret (p.1017)

Clovis Berthier : rapporte à Honoré et Ferdinand l’algarade entre l’Adélaïde et les Maloret (p.1020)

Sans oublier les animaux :

L’alezan brûlé de Ferdinand, trop lourd au gré d’Honoré pour être attelé à un cabriolet (p.858)

« Noiraud » : le chien noir des Haudouin, qui entre dans la cuisine et se couche sous la table (p.874)

« Bismark » : les deux chiens prédécesseurs de Noiraud, ainsi baptisés en souvenir de la guerre de 1870 (p.874)

« La Rougette » : une des vaches d’Honoré qui est allée dans les luzernes pendant qu’Alexis était occupé à jouer (p.879)

Le cheval noir : qui a été pris de coliques au commencement de la semaine. Lettre de Ferdinand à Honoré Haudouin (p.886)

« La Fidèle » : une des vaches d’Honoré à qui son frère Ferdinand, le vétérinaire, annonce qu’elle est chaude (p.922)

Les bœufs qu’Honoré est en train d’atteler (p.963)

Etendard : le taureau occupé à saillir une vache dans la cour des Haudouin, entouré par tous les enfants (p.966)

La chienne de Zèphe Maloret : qui portait d’au moins six semaines après s’être fait couvrir par un corniaud (p.974)

Les lieux :

Le roman se déroule dans le périmètre limité de la commune de Claquebue et la plupart des lieux cités sont des lieux dits désignant des champs, des bois ou des collines.

 

Le village de Claquebue : représente Villers-Robert dans le département du Jura, village où Marcel Aymé passa son enfance (p.829) 

Saint-Margelon : chef lieu du canton – il pourrait s’agir d’une transposition de Chaussin, chef lieu du canton dont Villers-Robert est une des 17 communes (p.831)

Le Champ-Brûlé : lieu où la population de Claquebue jeta ses derniers centenaires dans un feu de joie – depuis le blé y pousse bien (p.833 et 852)

Valbuisson : où Jules Haudouin va régulièrement rend hommage à « La Satinée » pour cinquante-cinq sous (p.835) – probablement inspiré du nom de Malbuisson, village franc-comtois situé à 80 Km de Villers-Robert.

Lyon : où vont s’installer Alphonse Haudouin et sa femme après avoir dilapidé l’héritage des Haudoin (p.849)

Le bois du Raicart : près duquel Honoré Haudoin fauche par un après-midi de grand soleil (p.852)

Le 17 de la rue des Oiseaux, à Saint-Margelon : maison de tolérance où Honoré se rendait deux à trois fois l’an du temps où il était maquignon (p.855)

L’auberge de Rouilleux : où Honoré raconte s’être soulé lors de l’invasion prussienne en 1870 (p.862)

Les hauteurs de Bellechaume : où se tenaient les « lignards » soldats de l’infanterie de ligne (p.862)

La Montée-Rouge : au-dessus de laquelle débouchent les casques à pointe (p.862)

Le coin des Trois-Vernes : où Alexis Haudouin jouait à la gaille enterrée (p.877)

La haie du Desclos : derrière laquelle Tintin Maloret entraîne Isabelle Dur (p.878)

Les près à Rugnon : où la « Rougette » s’est échappée pendant qu’Alexis se battait avec Tintin Maloret (p.879)

Les près de la Flize : où Honoré et sa fille Juliette sont en train de faner (p.899)

Au coin de la rue de l’Ogre : où la famille de Ferdinand croise la petite Jasmin (p.904)

L’étang du Char-Bleu : évoqué dans une rêverie de Gustave Haudoin (p.938)

Le Champ-Dieu : où Zéphe Maloret moissonne avec ses fils (p.955)

La caserne d’Epinal : où Ernest Haudoin effectue son service militaire (p.960)

Chassenay : où selon Zèphe Maloret, les franc-tireurs de 1870 avaient passé trois jours à mener la vie dans l’église avec des garces de Saint-Margelon (p.995)

Chez Rusillon : maison sur le chemin de la tournée du facteur Déodat (p.999)

Citations :

« Il y eut un commencement de bagarre, le maire reçut un coup de pied dans les reins qui lui fit monter un discours à la gorge. Les jeunes femmes se plaignaient d’être pincées, les vieilles de n’être pas pincées, et les gamins hurlaient sous les gifles. » (p.830)

«Mais j’ai vu que les belles familles ont des traditions érotiques qu’elles se transmettent d’une génération à l’autre tout comme des règles de bien-vivre et des recettes de cuisine » » Propos de la jument (p.838) 

« Il n’y a que les riches qui font l’amour au milieu de la journée. » Honoré Haudoin (p.856)

« Quand Honoré caressait sa femme, il invitait les blés de la plaine, la rivière, et les bois du Raicart » Propos de la jument (p.867)

« Il (Honoré) sifflait sur la plaine en poussant sa charrue, puis s’arrêtait pour pisser, reprenait, crachait à gauche, chantait, parlait à ses bœufs, les caressait à lisse et à contre-poil, riait tout haut, taillait dans le bois vert un quinet pour ses garçons, dans l’écorce un sifflet, riait encore, tirait droit son sillon et s’émerveillait qu’il fît aussi bon vivre. » (p.869)

« Au fond, les gens de Claquebue ne craignaient guère que les vicissitudes de ce bas monde ; la peur de l’enfer ne les gardait pas du péché, mais ils fussent demeurés chastes une année entière si la prospérité de la récolte en avait dépendu, et c’était justement ce genre d’équivalences que leur proposait le curé. Pour maintenir les âmes en puissance de béatitude éternelle, il fallait d’abord qu’elles craignissent pour le bétail et la récolte. C’était humiliant, mais s’était ainsi, et après tout, le résultat comptait seul. » Propos de la jument (p.869)

« Il (Honoré Haudouin) avait observé que les mâles sont surtout hardis avec les filles pauvres » (p.876)

« Dans l’esprit d’Honoré, un mâle généreux ne pouvait être calotin, non plus royaliste ou bonapartiste ; il fallait bien peu de tempéraent pour rester insensible à une République large du bassin et si bien en chair. » (p.879)

« Sur ses épaules, il (Déodat le facteur) porte sa grosse tête ronde qui lui est bien utile pour son métier. A vrai dire, il ne pourrait pas s’en passer, justement parce qu’il est facteur. Et puis, s’il n’avait pas sa tête, qu’est-ce qu’il ferait de son képi. » (p.892)

« Honoré aimait encore sa femme à cause des enfants qu’elle lui donnait. Quand il la voyait enceinte, il s’émerveillait déjà que son plaisir fît autant de volume. Il regardait ses enfants comme des désirs anciens qu’il se réjouissait de retrouver si chauds, avec des yeux vifs et des peaux colorées. » (p.897-898)

« … pour la majorité des hommes de Claquebue ; à l’âge de l’adolescence poussée, ils se séparaient de leurs habitude d’amours ingénues, turbulentes, impudiques, et prenaient le chemin de choisir une femme et de se limiter en toutes façons. » Les propos de la jument (p.924)

« Il n’y a de mauvaises mœurs que celles qui attentent à la propriété ou la déprécient. » (p.925) 

« Les enfants jouent, pensait-il (le curé), quand ils seront grands, ils ne joueront plus ; ils mêleront les plaisirs de la chair à la peine de vivre et alors seulement, on pourra utilement leur en faire un épouvantail. » (p.928)

« On travaille pour gagner sa vie, oui, et puis on travaille pour travailler, parce que c’est tout ce qu’on sait faire. Moi, je ne me plains pas. J’aime de travailler et je suis servi pour longtemps. » Honoré (p.946)

« Les périls qui menaçaient des enfants bien élevés étaient innombrables sur cette plaine tendre comme une femme en attente ; et au bord de la plaine, dans ces grands bois qui bordaient tout un côté de l’horizon : denses et sans fond, recélant des ténèbres humides, il y tiédissait des rêves lascifs dont la brise apportait le murmure sur les champs. »  (p.965)

« Un mort qui ressuscite déçoit toujours un peu son monde. » (p.972-973)

« Les romanciers sont des gens à la tête légère, ils racontent des histoires, et la morale y va comme elle peut. Je le dis sans orgueil : il est bien heureux qu’une jument verte se soit trouvée là pour tirer de ce roman un robuste et honnête enseignement, à savoir qu’il n’y a point d’amour durable, partant point de bonheur, en dehors de la famille. Les propos de la jument (p.1013).

« Une histoire qui court sous le manteau n’est qu’une légende, et les opinions qu’on tait sont du vent » (p.1019)

 

 

Lorem Ipsum

 

Marcel Aymé 
Œuvres romanesques complètes 
La Pléiade

 

C’est à Dole, au début de 1925 ou même dès la fin de l’année précédente, que Marcel Aymé entreprend l’écriture de son premier roman Brûlebois, après y avoir été encouragé par sa sœur aînée Camille, professeur de lettres et elle-même écrivain. Le travail achevé, il en soumet le manuscrit à la critique de sa sœur Camille et de son frère Georges.


Dole où se déroule l’action du roman Brûlebois – La Collégiale vue de la Place aux Fleurs

Le livre, signé le 29 avril 1926, est publié en septembre de la même année, à Poitiers par Les Cahiers de France. Il obtient le prix Corrard de la Société des gens de lettres, ce qui rapporte à son auteur 3.000 francs. Une nouvelle version corrigée et écourtée est publiée par Gallimard en 1930 et constitue la version définitive.

Ce roman est inspiré par un personnage réel, Marcel Eugène Brûlebois, un porteur à la gare de Dole. C’est dans cette ville, qu’après la mort de leurs grands-parents, Marcel Aymé et sa sœur Suzanne ont été recueillis en 1911, par leur tante Léa Monamy, récemment veuve d’Albert Cretin.


Hôtel de Genève et Rue Dusillet (actuellement Rue Marcel Aymé) 
dans laquelle habitait la tante Léa Cretin-Monamy et où l’auteur écrivit Brûlebois.

Les thèmes :

La haine et les affrontements au sein d’un couple de bourgeois aisés.

L’amitié et la solidarité entre deux êtres pauvres et déclassés.

La folie et ses conséquences sociales.

La mort, le deuil et la notion de Dieu.

La confrontation des idées cléricales et anticléricales, au cours de l’entre-deux-guerres.

Les clivages sociaux dans une petite ville de province.

Les « planqués » de la Grande Guerre.

Synopsis :

Le roman se situe dans une petite ville de province non dénommée, mais qui est manifestement Dole en Franche-Comté, où l’auteur a passé son adolescence et où il a fait ses études secondaires. 

L’action se déroule au cours de la période de l’entre-deux-guerres, portant les traces encore fraîches de la séparation de l’Église et de l’État et de la Grande Guerre (l’action du roman débute le 11 novembre 1918).

Le roman met en scène une multitude de personnages tout en se focalisant sur les destinées de trois groupes d’entre eux.

- les époux Reboudin, bourgeois aisés qui se vouent une haine réciproque jusqu’à leur dernier soupir et leur fils Charles qui sert de lien entre les autres personnages, pour la suite de l’action.
- le héros principal, le clochard Brûlebois, introduit dans le roman pas son protecteur et ami, « La Lune », un marginal qui lui sera fidèle et le soutiendra jusqu’à sa mort.

- Rodolphe, le cousin des Reboudin, un original aux idées baroques qui le conduisent invariablement à l’échec, et qui s’enfonce progressivement dans la folie jusqu’à son internement.

On peut ajouter à cette liste :

- le cousin Léonard Beudot, ancien capitaine de gendarmerie, jovial amateur de gaillardises, dont la truculence fait contrepoids à la haine sourde et à la morne ambiance du couple Reboudin.

- Coralie Cheval, une jeune veuve fortunée, au tempérament particulièrement fougueux, habitant en face de chez les Reboudin, et avec laquelle Charles a une liaison.

- les autres personnages apparaissent un fil du récit pour peupler un lieu où évolue le personnage principal ou pour alimenter une de ses méditations.

La singularité des principaux personnages est due au fait que l’auteur en a surtout retenu le côté dérisoire. Ceci leur donne leur véritable dimension tandis que leurs faiblesses les rendent particulièrement attachants et dignes de tendresse.

Les personnages

Par ordre d’entrée dans le roman :

Hector Reboudin (40 ans) : bourgeois élégant et cossu, propriétaire d’immeubles, athée et royaliste, amateur de belles lettres (p.3) ;
Le Commandant Gondrelet, du train des équipages (p.3).
Le Dr Mouillet : médecin des Reboudin (p.4).
Mme Reboudin (née Julie Travotet) : sans charme, bigote et asthmatique, épouse d’Hector (p.4).
« La Lune » (35 ans) : un marginal, frère de Léonie et de Cacane, vivant de la pêche, qui héberge et veille sur Brûlebois (p.5). 
Le Père Bouille : un pêcheur juste entrevu (p.6).
Brûlebois (57 ans) : personnage central, doux pochard, plein de fantaisie, commissionnaire, porteur de valises à la gare – ancien sous-préfet sous Jules Ferry (p.8). 
Charles Reboudin (16 ans) : fils des époux Reboudin (p.8).
Solange : maîtresse hebdomadaire de M Reboudin, au chef-lieu de département (p.10).
Mr Ragondet : grand-oncle de Mme Reboudin, seulement cité (p.10).
Léonard Beudot : ancien capitaine de gendarmerie, cousin maternel de Mr Reboudin (p.10).
Thérèse : la servante des Reboudin (p.10)
Rodolphe : cousin des Reboudin et de Beudot, expérimentateur d’idées baroques (sur des thèmes sociaux, politiques, scientifiques ou philosophiques), qui sombre dans la folie (p.12).
Maître Gendot : un notaire, ancien camarade de collège de Brûlebois (p.16).
Basquin : un avoué, ancien camarade de collège de Brûlebois (p.16).
Mme Derouet : une bonne cliente de Brûlebois (p.19)
Pilleron : cafetier, gendre de Vouriet (p.20)
Joseph : de l’hôtel de Gênes (analogie avec l’hôtel de Genève situé dans la rue Dusillet, où vit l’auteur) (p.20).
Coralie Cheval (24 ans) : jeune veuve fortunée habitant en face des Reboudin (p.25).
Pou : le chien bouledogue de Coralie Cheval (p.25).
Les Jeandot : riches bourgeois de la ville évoqués par Brûlebois (p.31)
Mr Borget : un industriel qui fréquente le café du Lion (p.34).
Maître Jeandot : le notaire d’Hector Reboudin qui fréquente le café du Lion (p.34.)
Maître Ducru : un autre notaire qui fréquente le café du Lion (p.34.)
Mr Perceperce : receveur des finances qui fréquente le café du Lion (p.35.)
Mr Jorot : propriétaire des Grandes-Galeries (situées sur la Place de l’Ancienne Poste à Dole) qui fréquente le café du Lion (p.35.)
Mr Prune : l’épicier qui fréquente le café du Lion (p.35.)
Mr Verjus : le charcutier qui fréquente le café du Lion (p.35.)
La Valérie au Polyte : que Brûlebois prétend avoir enceintée (p.44).
Butillot : le marchand de fourrage de la rue des Rondins (p.44).
« La Bougette » : qui habite sur le Champ de Foire et que Brûlebois souhaite épouser (p.45).
Les Travotet, Berignot, Chausson, Gorgeret, Pascabian : parents de Mme Reboudin (p.50)
« La Marjolle » (30 ans) : solide paysanne, serveuse au Modern’Bar (p.63).
« Jojotte » (22 ans) et « Claquette » (24 ans) : deux sœurs poitrinaires, également serveuses au Modern’Bar (p.63).
« Le Chauffeur » (40 ans) : ouvrier français fréquentant le Modern’Bar (p.64).
Madame Pilleron : patronne du bar pleine de clémence pour Brûlebois (p.70).
Sousski : un ouvrier polonais fréquentant le Modern’Bar (p.73).
Le Dr Gorgerin : médecin de l’hôpital (p.86).
Sœur Euphrasie : sœur hospitalière, sévère, responsable du service à l’hôpital (p.97).
Sœur Toussainte : jeune religieuse novice de l’hôpital, particulièrement humaine (p.97).
L’abbé Pastoron (72 ans) : l’aumônier de l’hôpital (p.98).
Monsieur Clarochet des pains d’épices qui doit épouser Coralie Cheval (p.96). 
L’abbé Derlo : remplaçant de l’aumônier (p.101).
Le père Thuin : qui va tirer de l’eau avec ses arrosoirs (p.103).

Les lieux :

La ville de Dole (non nommée dans le roman) et sa gare.

Dole : la gare où Brûlebois exerce ses activités de porteur de bagages

Rue des Nèfles : où habitent les Reboudin et La Lune (p.3).
L’épicerie au coin de la rue des Nèfles et de la rue Jean-Jaurès (p.5).
Le Place du Jet-d’Eau : place authentique située à proximité de la gare de Dole (p.7)


Dole – La place du Jet d’eau en 1911 
Où « La Lune » rencontre Brûlebois pour le première fois.Le Café National et son billard, situé Rue Grande (p.8).

Le canal Charles Quint (reliant le canal du Rhône-au-Rhin au Doubs, à Dole) (p.9).
Chez Pilleron : café sur la place de la gare, dont le vin blanc avait parfois le goût de bouchon (p.17).
Le Modern’Bar : et son piano mécanique. Café pour étrangers pauvres, sur la place de la gare (p.18).
La Rue Grande (probablement la Grand’Rue à Dole) (p.20).


La Grand’Rue à Dole au début du XXème siècle – Rue Grande dans Brûlebois.

« La Morte-aux-canons » : meilleur lieu pour pêcher pour la tanche (p.23).
Le barrage Bailly : lieu de promenade en barque (p.27)
Le bois des Huppes : analogie avec le bois des Ruppes près de Dole (p.27)
« Le Creux-des-Nonnes » : lieu de pêche (braconnage : pêche au tramail - filet) (p.31).
Le Café du Lion : sur la Rue Grande, où se réunissent les sommités de la ville – l’auteur a pu s’inspirer du Bar de l’Ancienne Poste, situé au n°41 de la Grande Rue.


Les deux rangées de tables du Bar de l’Ancienne Poste (Le Café du Lion, Rue Grande)

Le Champ de Foire : situé derrière le théâtre de Dole. Quartier où habite « La Bougette » (p.45)


Le Champ de foire de Dole, en 1908

La rue du Toton (p.39).
« Le Creux Billet » : lieu de pêche, de l’autre côté du bois des Huppes (p.43).
« Les Trois Peupliers » : lieu de pêche pour poser des cordes (braconnage : lignes de fond laissées en place durant la nuit) (p.45).
La Fenotte : un faubourg de Dole (à droite de la RN5 en direction de Genève), où habite le cousin Beudot (p.92).
Place Casimir-Périer : (p.50).
Villages d’Archelange, Vriange, Mortange, Bertange : à l’ouest de la ville, où habitent les collatéraux de madame Reboudin. (seuls les deux premiers noms sont authentiques). (p.50).
L’église et l’orgue : la basilique N.D. de Dole (16ème siècle) et son orgue (18ème siècle) (p.53).


L’orgue de Ch. J. Riepp (1750-1754), dont le souffle puissant fit fondre en larmes Brûlebois.

Les Grandes Galeries : où l’amant de la Marjolle est employé (p.63).
La Rue du Prieuré : qui mène à la Place du Jet-d’Eau (p.84).
L’hôpital : l’ancien Hôtel Dieu de Dole, du 17ème siècle (p.85)


Hôtel Dieu et rue Bauzonnet, en 1912 – L’hôpital où Brûlebois termine ses jours

Le Café Central : proche de chez les Reboudin (p.94)

 

Citations :

« Il y avait dans sa personne quelque chose de candide qui faisait espérer en Dieu. » (Brûlebois)
La Pléiade vol.I, page 16

« Il avait conscience de vivre, lui, Brûlebois, dans un monde où l’action était la sœur du rêve ».
La Pléiade vol.I, page 21

« Si ses qualités de bon sens, de décision et d’indépendance s’étaient exercées en dehors de lui-même, il eut été un chef hors pair. Il l’avait montré pendant la guerre. Malheureusement son imagination tourmentée lui forgeait des chimères qui ruinaient toutes ces possibilités de vie saine et créatrice ». (Rodolphe)
La Pléiade vol.I, page 22

« … que peut-on trouver pour des hommes qui viennent au monde avec des sourires de vieux, des brutes raisonnables, des cochons de saint Thomas qui s’éprennent des seules réalités tombant sous le compas et le microscope ? » (Rodolphe)
La Pléiade vol.I, page 24

« On dirait toujours que tu marches avec des semelles de feutre ; tu manques de brutalité, vois-tu. Moi, quand je m’installe à la terrasse d’un café, je gueule comme un sourd après le garçon, je crache jusqu’au milieu de la rue. C’est un peu ça, la vie, la vraie. » (Beudot)
La Pléiade vol.I, page 39

« Il était orphelin, et dans ce mot qui contenait deux faits : disparition de ses parents d’une part et sa propre solitude de l’autre, son esprit ne s’attachait qu’au second. Ce ne fut que petit à petit qu’il réussit à fondre ces deux réalités ». (Charles)
La Pléiade vol.I, page 54

« Ce n’était pas une musique, mais une plainte éraillée, un rire de pauvre, ou plutôt le dur sanglot des filles qui refoulent les larmes parce qu’il faut être belle, sourire ». (le piano mécanique du Modern’ Bar)
La Pléiade vol.I, page 64

« Comme les forts, la Marjolle savait disputer avec une mauvaise foi consciente pour assurer le triomphe de ce qu’elle croyait être la vérité ». (La Marjolle)
La Pléiade vol.I, page 66

« … il comprit que la part de Dieu dans les cœurs des hommes est faite de toutes les vertus comme de tous les vices ». 
« … il lui parut que la méchanceté de ses frères humains était le revers d’une médaille qui pendait au cou du Très-Haut par la chaîne mystique des causes ; revers aussi précieux que l’avers où s’inscrivent les vertus majeures ». (Brûlebois)
La Pléiade vol.I, page 67

 « L’avenir tient dans ces lits numérotés où des malades remplaceront des malades, toujours. L’avenir n’est qu’un présent indéfiniment prolongé. Le souvenir, seul, peut vivre et faire vivre, dans cette atmosphère empesée uniforme ». (Brûlebois à l’hôpital)
La Pléiade vol.I, page 86

 

 

Lorem Ipsum

Marcel Aymé 
Œuvres romanesques complètes 
La Pléiade

 

Marcel Aymé écrit son troisième roman entre août – septembre 1927 et mars 1928 (avec une interruption en octobre – novembre pour écrire la nouvelle Le Puits aux images).

Alors que le cadre des deux premiers romans se situe en un seul lieu, à Dole pour Brûlebois, et à Paris pour Aller retour, l’action des Jumeaux du diable se déroule entre Cherbourg et Paris. Pourquoi Cherbourg ?

Marcel Aymé a passé des vacances à Cherbourg pendant la période 1914-1918, chez sa tante Cécile Monamy, épouse de Jean Girardon. C’était celle de ses tantes qui avait « les yeux bleu marine » (« Confidences et propos littéraires » p.224. 1996 Les Belles Lettres).

L’auteur rencontre quelques difficultés à faire éditer ce troisième roman : La Revue de Paris le refuse. Puis Gallimard, malgré les promesses de Jean Paulhan, le refuse dans un premier temps avant de le publier enfin, en septembre 1928.

Synopsis :

L’action de roman qui se situe dans les années vingt. Elle se déroule sur une période de deux ans, entre l’apparition des deux personnages principaux, à l’âge de 25 ans et leurs morts violentes au cours du mois de juin. L’histoire commence dans la mer, près de Cherbourg, se déroule dans une banlieue de Paris et s’achève tragiquement, pratiquement là où elle avait débuté.

Satan crée deux êtres identiques pour prouver qu’un petit grain de sable peut enrayer la belle mécanique de la destinée et faire qu’une créature de Dieu, ainsi libérée aille même jusqu’à le renier.

C’est ainsi que deux frères jumeaux (ou plutôt des clones) naissent de la mer, à l’âge de 25 ans, à la suite d’un naufrage. Malgré leur identité parfaite, l’un (Norbert) prend du retard sur son double (Louis) après avoir avalé une gorgée d’eau de mer. Son frère le devance dans l’amour d’une femme idéalisée (Marie du Môle). Leurs chemins se séparent et seul les relie un sentiment ambigu d’amour-haine, Louis devenant une véritable obsession pour Norbert. Par un jeu de balance, lorsque l’un prospère l’autre dépérit, comme s’ils puisaient dans une même source de vie.

Norbert se libère de son obsession en poussant Louis du haut d’une falaise et trouve lui-même la mort en tentant d’empêcher Marie du Môle de rejoindre son amant dans la mer. Les deux frères nés le même jour de la mer y achèvent leur existence au cours de la même nuit. Pour sa part, le personnage de Marie du Môle qui incarne le destin que Louis a saisit en devançant Norbert, entretient des rapports particuliers avec cette mer qui l’a épargnée avec son père alors qu’elle était enfant et qui, plus tard, la reprend avec son amant.

Les thèmes :

Deux personnages identiques, de vrais jumeaux (véritables clones) illustrent le thème du double fréquemment abordé par Marcel Aymé, en incarnant ici une version moderne du mythe d’Abel et Caïn.
Ce roman est également une réflexion sur la part de liberté dont dispose l’homme, à côté de ce qui prédétermine ses actions (son hérédité, sa culture, ses souvenirs, etc.) et que certains nomment sa destinée.
Un troisième thème cher à Marcel Aymé : le cours du destin peut être fortement modifié par un petit détail en apparence sans importance. (ici : une gorgée d’eau de mer avalée par Norbert).

 Les personnages :

Par ordre d’entrée dans le roman.

Satan, le Malin : créateur des deux Louis Ducourtil (p.1104)
Saint Pierre, Céphas : auquel Satan expose son projet (p.1104)
Louis Ducourtil (25 ans) : flottant avec son double sur la mer (p.1105)
Le capitaine du chalutier qui les recueille (p.1106)

Chalutier à quai à Cherbourg

Tante Josette : tante à laquelle font allusion les deux Louis Ducourtil (p.1106)
Poultu : un des matelots du chalutier qui marque Norbert avec une tondeuse (p.1109)
Norbert Ducourtil (25 ans) : baptisé ainsi par le capitaine du chalutier (p.1111)
Nimbu (35 ans) : louchant avec un nez pointu, travaillant aux chemins de fer, témoin puis messager entre les deux frères (p.1112)
Juliette : serveuse de l’auberge où Louis et Norbert passent la nuit (p.1112)
Le Tristan : mentionné par Juliette (p.1112)
Les Bassets : auxquels la patronne de l’auberge lit les lignes de la main (p.1115)
La patronne de l’auberge : une vieille femme, maigre, avec du ventre (p.1115)

L’auberge près de Cherbourg – Ici à Auderville

Marie du Môle : belle, mince comme il faut, avec un visage fin et mat, des yeux noirs très grands, le grand amour de Louis … et de Norbert (p.1115)
Lampon : qui a une moto selon Nimbu (p.1116)
Léonie Couchard, dite Leïlé (18 ans) : jolie servante au service de Louis et Marie du Môle (p.1124)
Le chef de gare : évoqué par Nimbu, qui l’a cocufié et a été congédié à la suite de cela (p.1131)
Portier : un employé de gare, évoqué par Nimbu (p. 1131)

La gare de Cherbourg

Le patron de Norbert : qui considère la littérature et la poésie comme des choses peu sérieuses chez un collaborateur (p.1138)
Mme Ton : la concierge de Louis, à laquelle Norbert dit chercher un appartement (p.1144)
Mr Jacques Sebon : faux nom sous lequel Norbert se présente à Marie du Môle (p.1146)
Le père de Norbert : évoqué dans les souvenirs de Norbert (p.1149)
Le médecin de quartier : consulté par Norbert (p.1151)
Un oncle de Nimbu : évoqué par ce dernier (p.1154)
Amélie Cartot : voisine de table de l’oncle de Nimbu, évoquée par celui-ci (p.1154)
Mr Eugène : qui a bousculé Louis au « Travailleur’s bar » (p.1168)
M. Dedron : nom évoqué par Louis qui travaille dans son usine comme ingénieur (p.1184)
Leberger : collègue du Louis après l’avoir été de Norbert, aux usines Dedron (p.1184)
Mr et Mme Couchard : parents de Léonie Couchard, dite Leïlé (p.1190)
Monsieur Jules : l’un des invités au mariage de Nimbu et Leïlé (p.1191)
Une dame dactylographe-comptable dans une fabrique de bouchon : cavalière de Louis au mariage de Nimbu (p.1192)
Madame Lebai : évoquée dans une conversation le jour de la noce (p.1195)
Juliette : invitée interpellée par Nimbu durant le repas de noce (p.1196)

Les lieux :

L’auberge misérable dans un petit village du côté de Cherbourg où arrivent les deux jumeaux (p.1112)
La terrasse d’un café à Cherbourg : où Norbert aperçoit Louis et Marie du Môle (p.1120)

Cherbourg – Terrasse de café dans la rue du Bassin

Le dernier étage d’une maison en proche banlieue parisienne avec vue sur la quartier de La Villette : où habitent Louis et Marie du Môle (p.1124)
Un café du quartier de la Villette, proche de la maison de Louis et de Marie du Môle, où Norbert entraîne Nimbu (p.1142)

Café au 212 boulevard de La Villette – Maison Jean Bonhomme

L’appartement au rez-de-chaussée de la maison de Louis et Marie du Môle, où Norbert s’installe (p.1144)
Le Travailleur’s bar : où Louis donne une correction à Mr Eugène après avoir été bousculé par lui (p.1168)
Une maison face à la mer du côté de Cherbourg : où Louis et Marie du Môle se réfugient (p.1198)
La falaise à pic au dessus de la mer : où Louis, Marie du Môle et Norbert trouvent la mort (p.1200)

Falaises d’Etretat – mars 2007
© Jean Michel NESA

Presse & travaux :

Selon une lettre adressée par Marcel Aymé à son frère Georges, le 31 octobre 1928, les critiques sont plutôt favorables mais semblent gênés par l’absence d’une intention philosophique.

Citations :

« Toutes les femmes fatales viennent de la nuit et mesurent à peu près un mètre soixante-dix. » (selon Norbert)
La Pléiade vol. I, page 1117.

« De cette cité où la vie battait son rythme de la force suée, il semblait que l’âme fût en quarantaine. » 
La Pléiade vol. I, page 1124.

« Ils vivaient l’un pour l’autre, c’est-à-dire chacun pour soi avec l’autre, car dans le tas de leurs égoïsmes mis en commun, ils savaient où reprendre leur bien respectif quand viendrait l’heure. » (Louis et Marie)
La Pléiade vol. I, page 1124.

« Elle avait, dans son choix, la sûreté de ceux qui ne s’appliquent pas à raisonner. » (Marie)
La Pléiade vol. I, page 1126.

« J’aime à imaginer que notre cas n’est pas unique, mais particulier ; qu’il existe pour tout être un être complémentaire et qu’ils possèdent à eux deux la somme de bonheur complet. » (Louis)
La Pléiade vol. I, page 1165.

 

 

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