pierre loti

 

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La famille de Pierre LOTI

Portrait de famille. Vers 1855. Rochefort.

Portrait de famille. Vers 1855. Rochefort. Tableau peint par Marie, la sœur aînée : c’est une composition qui rassemble les personnages à des époques différentes, peints probablement d’après photographies. Au premier rang, de gauche à droite : Clarisse Tessier (tante Claire), Nadine Viaud (la mère), Julien (le futur loti), Théodore Viaud (le père), Marie (la sœur, sans doute déjà mariée puisque son mari figure sur le tableau au deuxième rang à droite) ; et donc, au deuxième rang, de droite à gauche : Armand Bon (cousin et mari de Marie), Marie-Anne Viaud (grand-mère paternelle), Henriette Texier (grand-mère maternelle), Gustave (le frère), et tout en haut Jeanne Renaudin (grand-mère de Nadine). C’est davantage un arbre généalogique qu’un fidèle portrait de famille.

organigramme photo famille

A la fin de cet article, cliquez et découvrez les textes consacrés aux membres de la famille de Pierre Loti 

1850, 14 janvier : naissance à Rochefort, au 141 de la rue Saint Pierre (devenue rue Pierre Loti, de Louis, Marie, Julien Viaud, troisième enfant de Théodore Viaud et Nadine Texier, Famille protestante. Le père est secrétaire en chef de la mairie. La maison abrite aussi les deux grand-mères et des tantes. Une sœur aînée, Marie, dix-neuf ans de plus que lui, et un frère, Gustave, douze ans de plus que lui.

Théodore Viaud

Théodore Viaud (1804-1870) vers 1870 peint par Marie Bon (1831-1908)-Huile sur toile

 

Nadine Texier

Nadine Texier (1810-1896) vers 1870 peint par Marie Bon (1831-1908)-Huile sur toile

 

Marie Bon

Autoportrait vers 1870-Marie Bon (1831-1908)-Huile sur toile

 

1858, départ de Gustave le frère aîné, chirurgien de marine, pour Tahiti (Pacifique Sud). Il revient en 1862 avant de repartir pour la Cochinchine. Il persuade Julien de prendre des leçons d’équitation.

Gustave Viaud

Gustave Viaud (1836-1865) vers 1875 peint par Marie Bon (1831-1908)-Huile sur toile

 

1864, mariage de Marie avec un de ses cousins Armand Bon. Julien aura une grande affection pour leur fille Nadine (Ninet).

1865mort de Gustave des suites d’une anémie tropicale à bord de l’Alphée le 12 avril à l’âge de 28 ans ; il est immergé dans l’Océan Indien. Mort de Lucette Duplais, une grande amie d’enfance.

Limoise

Eugénie Duplais, possède le domaine de la Limoise. Ses quartiers d’hiver sont à Rochefort, mais dès le mois de mai elle part s’installer dans sa maison de campagne, préférant l’air des bois centenaires aux senteurs lourdes des marais rochefortais. Sa fille Lucie, nommée aussi Lucette ou Pusson dans le « Roman d’un enfant » est plus âgée que Julien d’une huitaine d’années. C’est pour lui une autre sœur, affectueuse et très gaie. Ils s’adorent et trouvent à la Limoise, dans le jardin abandonné comme au bois de chênes-verts, toutes les occasions de jouer ensemble. Plus tard, ayant épousé un chirurgien de Marine, Lucie devra suivre son mari en Guyane. Là, le climat tropical ne convient guère à sa santé délicate. Malade, épuisée, elle reviendra en France en juin 1865, décédant le lendemain même de son retour à Rochefort. Ainsi, dans sa quinzième année, Julien a subit deux épreuves très douloureuses : la disparition de son frère et celle de sa meilleure amie.

 

1866, la famille Viaud connaît de graves difficul­tés financières. Le père est accusé de vol et emprisonné quelques jours. On doit louer une partie de la maison. Il sera acquitté en février 1868.

1870, 8 juin : mort de Théodore Viaud, son père.

1871, en avril, Julien rachète la maison familiale à sa mère avec l’aide de Joseph Bernard, aspirant comme lui et son grand ami de l’époque.

1872, 29 janvier-3 mars, Tahiti. Il retrouve les traces du séjour de son frère (sa compagne, sa case).

1886, 21 octobre, mariage avec Blanche Franc de Ferrière.

Avis mariage Blanche-Julien

1889, 17 mars, naissance de son fils Samuel.

1893, novembre, rencontre d’une jeune femme basque Crucita Gainza qui lui donnera trois fils, dont deux survivront.

1896, 12 novembre, mort de Nadine Viaud, sa mère.

1899, février, il rachète à Saint-Pierre-d’Oléron la maison de ses ancêtres maternels Texier (qu’il nomme la « maison des aïeules » et où il voudra être enterré).

1908, 21 septembre, mort de sa sœur, Marie Bon.

1923, 10 juin, mort de Pierre Loti à Hendaye. 16 juin, funérailles nationales à Rochefort. Son corps est transporté à Oléron, enterré dans le jardin de la « maison des aïeules ».

 

portrait de Julien à quatre ou cinq ans. Peinture à l'huile exécutée par Marie Viaud vers 1854

Portrait de Julien à quatre ou cinq ans. Peinture à l’huile exécutée par Marie Viaud vers 1854

 

Dans la maison loti-maisonde la rue Saint Pierre, le petit Julien grandit au milieu d’adultes. Il est le dernier enfant, le benjamin enveloppé de tendresse maternelle, gâté par ses grand’mères et ses tantes. Toutes ces femmes protectrices l’admirent et lui trouvent un air très éveillé.

Grand'tante Lalie (Rosalie texier) et Pierre Loti enfant - Rochefort vers 1855 - 2
Grand’tante Lalie (Rosalie texier) et Pierre Loti enfant – Rochefort vers 1855

Il est vrai que le cher enfant provoque l’étonnement de son entourage tant ses réflexions paraissent justes et profondes pour son jeune âge. Ses parents en tirent une certaine fierté, sa sœur Marie le croit d’ailleurs destiné à un avenir brillant. A huit ans, Julien manifeste aussi un goût d’artiste. Il aime dessiner et tout ce « qui sort de ses petits doigts a un certain cachet (1). Décidée à encourager ces heureuses aspirations, Marie sera pour lui un professeur très compétent. C’est encore elle qui lui fait partager son goût de la musique et lui apprend les rudiments de piano (2).

La cité rochefortaise apparaît peu dans l’enfance de Julien. Les rues de son quartier lui semblent immenses, et il sait qu’il ne faut pas s’aventurer seul dans ces lieux où les petits enfants peuvent se perdre. Ses parents le gardent jalousement dans la vieille demeure, l’élevant avec précaution comme une plante délicate. Toutefois, il y a dans la maison un endroit de plein air où il peut aller jouer librement, un coin familier auquel sont attachés ses plus tendres souvenirs. C’est la petite cour étroite et allongée, une allée fleurie et ensoleillée « fuyant sous des berceaux de vigne et de jasmin ». Là se tiennent souvent ses grands-mères et ses tantes, les jours d’été. Avec elles, il apprend à reconnaître les variétés de fleurs qui poussent le long du petit mur de clôture. Il se grise de tous les parfums et s’émerveille des tons les plus chatoyants. Ainsi Julien prend l’habitude de communier avec la nature, recevant dans cette vieille cour familiale les premiers enseignements de forme et de couleurs. Dans toute son œuvre littéraire, Pierre Loti cultivera ce goût profond de la nature, s’appliquant à tirer une image poétique des choses les plus banales.

Portrait de Loti enfant. 1858. Rochefort.
Portrait de Loti enfant. 1858. Rochefort.

Autour de Julien gravitent surtout de vieilles personnes qui veillent sévèrement sur son éducation. Mais de temps à autre une petite fille vient partager les jeux de l’enfant chéri. Jeanne est l’une de ses camarades admises régulièrement à la maison familiale. Avec elle Julien a construit un théâtre miniature dénommé « Théâtre de Peau-d’Ane », l’une des « choses capitales de son enfance ». Les deux petits amis ont imaginé et peint eux-mêmes les décors fantastiques, se servant de petites poupées de porcelaine pour la mise en scène de leurs rêves d’enfant. Plus tard, Pierre Loti devait dire que tous ses projets « d’habitations enchantées », décors étranges et merveilleux réalisés surtout à Rochefort, « ont pris forme pour la première fois sur ce petit théâtre » conçu dans sa dizième année (3).

 

Loti enfant avec le manteau de son frère. Vers 1858-2

Loti enfant avec le manteau de son frère. Vers 1858

  1. Lettre de Théodore Viaud à sa fille Marie, 17 décembre 1857.
  2. Durant l’été 1863, Julien a 13 ans, ses parents lui achètent un piano neuf pour remplacer celui du salon Rouge.
  3. Julien a travaillé jusqu’à l’âge de quatorze ou quinze ans aux décors de ce théâtre miniature, concevant toujours de nouveaux décors et des « légions de petits personnages, nymphes, fées et génies » habillés par ses mains.

 

Julien Viaud à 13 ou 14 ans
Julien Viaud à 13 ou 14 ans

Un jour, le petit Julien se met à fureter dans une vieille bibliothèque de la Limoise. Parmi les livres reliés, un cahier ordinaire retient son attention. Il l’ouvre et apprend « que de midi à quatre heures du soir, le 20 juin 1813, par 110 degrés de longitude et 15 degrés de latitude australe, il faisait beau temps, belle mer, jolie brise, et qu’il y avait dans le ciel plusieurs de ces petits nuages blancs nommés queues de chat ». C’est un journal de bord d’un marin d’autrefois. Journal de bord-La Limoise-Extrait du Roman Enfant. Cette rencontre fortuite montre que Julien ne peut échapper à l’attraction de la mer et des pays lointains. D’ailleurs, sa famille compte quelques anciens marins. Gustave est lui-même médecin de marine à Tahiti. De là, ce grand frère écrit des lettres pleines de tendresse, donne aussi des descriptions merveilleuses des pays exotiques. Cela réjouit l’enfant et le fait rêver.

 Et puis il y a le musée que Julien continue d’aménager dans son « galetas », Musée Galetasencouragé par l’oncle Tayeau. Peu à peu les vitrines s’enrichissent de papillons multicolores, de nids d’oiseaux cueillis dans les bois de la Limoise, mais aussi de coquillages des colonies trouvés dans les vieux coffres du grenier. Gustave complètera les collections de son petit frère avec d’autres objets rapportés de Polynésie. Dans son musée merveilleux, Julien passe de longues heures tout seul, « en contemplation devant des nacres exotiques, rêvant aux pays d’où elles sont venues, imaginant d’étranges rivages ». A mesure qu’il grandit, l’appel des « ailleurs » se fait ainsi plus pressant. L’idée de devenir marin commence à lui traverser l’esprit.

Au collège de Rochefort, Julien aperçoit souvent les élèves du cours de préparation à l’Ecole navale. Ceux-là « portent des ceintures rouges pour se donner des airs de matelots et dessinent sur leurs cahiers des ancres ou des navires ». Lui est en classe de lettres pour « faire d’abord ses humanités ». Ainsi a décidé son père qui le destine à l’Ecole polytechnique. Mais en lui-même, Julien sent se développer le désir de parcourir le monde entier, comme son frère. L’idée le gagne. Un jour, il décide de sceller un pacte avec la Marine et de faire l’aveu de sa vocation. C’est à Gustave qu’il se confie, lui exposant par lettre les raisons profondes de son choix.

Réticente au début, la famille Viaud donnera finalement son accord à Julien. Mais ce consentement tardif est dû surtout à des revers de fortune et l’impossibilité d’entretenir l’enfance dans des études longues et coûteuses. (article-revue-tresor-nov-2016). Au cours de l’année 1866, Julien fait donc son entrée dans le cours de Marine du collège de Rochefort. Insuffisamment préparé, il échoue la première fois au concours de l’Ecole navale. Mais décidé à réussir, il poursuivra ses études à Paris, obtenant alors avec succès son admission sur le Borda,le célèbre vaisseau-école ancré en rade de Brest (1).

  1. Cette analyse de la vocation de marin de Pierre Loti s’appuie sur ses souvenirs publiés dans « Le Roman d’un enfant » et « Prime jeunesse », deux récits sur la période de sa vie qui précède l’entrée au Borda .
Julien Viaud à 17 ans
Julien Viaud à 17 ans

 

Julien va quitter Rochefort pour Paris dès octobre 1866. Durant une année scolaire, il lui faudra vivre loin de ses parents et des chères vieilles têtes qu’il aime tant. Son cœur se serre aussi à l’idée de ne plus revoir, avant neuf ou dix mois, les lieux familiers de son enfance ; la cour et le lac-miniature, les bois centenaires de la Limoise et le ravin d’ombre de la Roche-Courbon. A ces collections de coquillage et de papillons, il a jeté un dernier regard de passion, puis s’est mis à « répandre un peu partout du camphre et des paquets d’herbes aromatiques » pour éloigner les insectes déprédateurs. En garçon à précautions et puisqu’il faut conserver à l’intérieur du musée les senteurs protectrices, la porte a été soigneusement fermée, les joints recouverts de bandes de papier collées.

Quelques heures avant le départ du train, Julien vérifie encore le contenu de ses malles. Il y a rangé deux objets précieux qu’il considère comme des talismans ; la dernière lettre de Gustave à sa famille, et surtout la bible de ce frère aîné dont la dépouille mortelle se trouve quelque part au fond du golfe du Bengale. Sur le livre saint remis à Julien, maman Nadine a tracé de sa main quelques phrases pleines de gravité, témoignages à la fois de tendresse maternelle et de piété huguenote : « Sois, mon enfant chéri, le fidèle dépositaire de ce si précieux souvenir et n’oublie pas un instant le rendez-vous que nous a donné notre bienheureux Gustave en laissant cette vie. Veuille, ô mon Dieu, qu’aucun de mes biens-aimés n’y manque et que je m’y trouve aussi avec eux (1). »

A Paris, Julien ne côtoie guère les étudiants qui fréquentent les boulevards et les brasseries du quartier Latin. Il est pauvre et se doit d’économiser de maigres ressources. Loin de Rochefort et de ses têtes chéries, attristé par les malheurs de sa famille (2), il passe des jours sombres dans la grande ville détestée. Seul dans sa chambre sous les toits, parfois le courage lui manque pour étudier. Alors il se met à ressasser les mêmes souvenirs mélancoliques, écrivant de longues lettres nostalgiques à ses parents. Un petit cahier reçoit aussi ses confidences. Serait-ce les premières pages de ce journal intime que Loti a composé toute sa vie ? Il est vrai qu’à cette époque, Julien entreprend « d’écrire quelque chose comme des mémoires ». Pour « échapper au présent morose », il se plonge dans le passé. Le style en est assuré, la forme claire. Une partie de ce manuscrit sera reprise d’ailleurs plus tard dans « Prime Jeunesse ». A 17 ans Julien possède déjà une certaine maîtrise de l’écriture, ayant trouvé le ton qui convient pour exprimer sa solitude et sa tristesse (3).

  1. Sur cette même bible, au moment du départ de Gustave pour Tahiti, Nadine avait porté quelques annotations dont voici un court extrait : « Que ce livre, je t’en supplie, ne soit pas un livre fermé ! Médites-en chaque jour quelques passages pour t’en instruire et te fortifier… »
  2. Nous avons déjà dit qu’en 1866, Théodore Viaud a été accusé d’un vol de titres appartenant à la ville de Rochefort : mis en devoir de rembourser cette somme malgré l’acquittement prononcé par le tribunal de Saintes, la famille Viaud se trouve plongée dans une profonde détresse. Pour obtenir un petit profit, elle a dû céder en location une partie de la maison, se réservant seulement quelques pièces au fond de la cour.
  3. Dans les n°s 23 à 27 des Cahiers de Pierre Loti, Robert Guéneau a donné une analyse de ce petit cahier. Julien aurait commencé ce manuscrit à Rochefort et non à Paris, écrivant parfois ses pensées secrètes en utilisant un alphabet de son invention. D’autre part, ce petit cahier a été précédé, comme l’indique Loti dans Prime Jeunesse, d’un autre manuscrit entièrement rédigé en cryptographie et actuellement disparu.     

couverture Pierre Loti l'enchanteur

Source : Pierre LOTI l’enchanteur,

Christian Genet et Daniel Hervé

La Caillerie, Gémozac

 

 

 

Extrait du discours de M. Albert BESNARD, ayant été élu par l’Académie française à la place vacante par la mort de M. Pierre LOTI, y est venu prendre séance le 10 juin 1926.

À son arrivée au monde, le petit Julien Viaud trouva groupée autour de lui une famille qui se composait de son père et de sa mère, d’une sœur charmante de dix-neuf ans, puis d’un frère de quatorze ans, enfin de deux aïeules et de deux autres parentes toutes les quatre fort âgées déjà.

Marie Viaud - autoportrait vers 1851

Marie Viaud – autoportrait vers 1851

Certes, vous entendrez avec plaisir citer ici quelques passages de Prime jeunesse où Pierre Loti nous dit lui-même, quelle influence bienfaisante eut sur sa première éducation la grande sœur tant aimée. Le mariage de celle-ci, alors qu’il avait quatorze ans, fut un des événements principaux de sa vie sentimentale.

« Elle m’adorait, écrit-il, et je l’admirais sans réserve, ce qui lui donnait sur mon imagination d’enfant un ascendant suprême. Elle voyait tout, ou elle devinait tout, et, dans ma petite enfance, elle m’avait persuadé sans peine qu’elle était un peu sorcière. Elle a été une des influences qui ont le plus contribué à m’éloigner jusque dans les moindres détails de la vie, je ne dirai pas de tout ce qui était vulgaire, mais même de ce qui était inélégant. »

 

Portrait Théodore Viaud

 Théodore Viaud

On sait, d’autre part, que la sœur de Pierre Loti était jolie, intelligente et fine, qu’élève de Léon Cogniet, elle se consacrait à la peinture et au dessin dont elle enseigna les premiers éléments à son frère. Qu’en outre, elle écrivait d’une façon délicieuse, et que c’est sous son impulsion que Pierre Loti se mit à rédiger, très jeune, des sortes de mémoires où il notait ses impressions journalières ; ce qu’il est bon de retenir. Il paraît que ces notes formeraient la matière de deux cents volumes si on devait les imprimer. Pierre Loti avouait lui-même qu’il avait fort peu lu, et si cette assertion était exacte, ce dont je doute, l’explication n’en serait-elle pas dans cette habitude contractée dès l’enfance d’écrire sans cesse ?

Nadine Viaud vers 1862 - JXMJ

Nadine Viaud vers 1862

À côté de cette sœur si vibrante, du père fonctionnaire écrivain occasionnel, artiste amateur, la mère très tendre, mais huguenote fervente, se dressait la Bible à la main. La Bible est un objet extrêmement vivant dans un intérieur protestant. Ce livre relié en peau de chagrin noire, préservé des contacts impurs par un étui d’étoffe de même couleur, occupe une place à part en un coin du logis que chacun connaît, et où il sait le retrouver pour y chercher un conseil, une consolation, un exemple :-il est le vieil ami qui ne fait pas d’avances, mais sur lequel on peut compter.

Gustave Viaud (1838-1865)

Gustave Viaud (1838-1865)

Le frère aîné, lui aussi, eut sa part d’influence sur Loti ; c’est lui qui plus tard suscita chez l’enfant la passion des voyages et de cet exotisme dont son œuvre est partout embaumée. Sa mort, qui fut un grand chagrin pour son jeune frère, décida peut-être de la carrière future de celui-ci. Il est intéressant de rappeler les paroles de Loti dans le Roman d’un Enfant, à l’occasion du départ de ce frère pour sa première campagne maritime.

« Il allait en Polynésie, à Tahiti, juste au bout du monde et la veille de son départ me fit cadeau d’un grand livre doré, qui était précisément un voyage en Polynésie à de nombreuses images ; et c’est le seul livre que j’ai aimé dans mon enfance. Je le feuilletai tout de suite avec une curiosité empressée. En tête, une grande gravure représentait une femme brune, assez jolie, couronnée de roseaux et nonchalamment assise sous un palmier ; on lisait au-dessous : Portrait de Sa M. Pomaré IV, reine de Tahiti.

« Plus loin, c’étaient deux belles créatures au bord de la mer couronnées de fleurs et la poitrine nue, avec cette légende : Jeunes filles tahitiennes sur une plage. » Presque un tableau de Gauguin. Déjà !

Il me semble que l’on peut voir, si confusément que ce soit, dans ce qui précède, l’origine de la vocation de Pierre Loti et les éléments du roman délicieux qu’il fera plus tard sous le titre de Mariage de Loti.

C’est au milieu de ces affections de famille très étroites, bien qu’un peu austères, que s’écoule sa première enfance ; enfance heureuse après tout puisque, comme il le dit lui-même, il appréhendait de grandir. « Il me semble que je m’ennuierai tant quand je serai grand.. » disait-il.

Julien Viaud était heureux, certainement, mais si on l’en croit, d’une nature particulièrement mélancolique.

Certains de ses biographes en attribuent la cause à sa ville natale.

Doit-on penser qu’en ce temps-là on s’ennuyait plus à Rochefort que partout ailleurs ? Quelque triste que fût la ville, le soleil l’y venait visiter quelquefois en compagnie de tous les êtres qui sont les hôtes de la rue : chiens faméliques, oiseaux piailleurs, enfin mendiants en quête d’un seuil où se reposer de leur éternelle solitude. Toutes ces choses méritent d’être vues à leur heure, à leur moment, enfin sous la lumière qui leur convient le mieux. Partout le bruit des rues éveille des échos dans l’âme de l’enfant, auquel répondent les mouvements et les gestes de la foule. Et ces gestes et ces échos c’est le langage des choses qu’il importe de lui traduire, parce qu’à notre insu même, elles ordonnent notre vie. N’est-ce pas souvent à des échos, à des souvenirs, si affaiblis qu’ils soient, que nous devons d’être des poètes, des romanciers, des artistes ?

Précisément à propos des moments précieux de sa toute enfance, Pierre Loti écrit, ceci « J’étais en ce temps-là un peu comme serait une hirondelle, nie d’hier très haut à l’angle d’un toit, qui commencerait à ouvrir de temps à autre au bord du nid son petit œil d’oiseau et s’imaginerait de là, en regardant simplement une cour ou une rue, voir les profondeurs du Monde et de l’espace, les grandes étendues de l’air que plus tard il lui faudra parcourir. » C’est le paysagiste qui parle. Mais écoutons le poète. Il s’agit de l’enfant qui s’éveille dans son berceau : « Ainsi, durant ces minutes de clairvoyance, j’apercevais furtivement toutes sortes d’infinis, dont je possédais déjà sans doute, dans ma tête, antérieurement à ma propre existence, les conceptions latentes, puis refermant malgré moi l’œil encore trouble de mon esprit, je retombais pour des jours entiers dans ma tranquille nuit initiale. »

Comme c’était à prévoir dans un pareil milieu, l’enfant grandit frêle et impressionnable, sensible exagérément au moindre choc, avec un penchant à extraire des choses plus de tristesse que de joie. Tout lui est matière à frissonner : jusqu’au triangle de soleil qui se découpe sur un mur. Jusqu’à ces vieilles aïeules qu’avec une tendresse étrangement funèbre, il considère déjà sous un jour blafard qui en fait des fantômes !

De cette époque datent ses terreurs des soirs d’hiver. Hé ! quoi ? l’hiver même l’épouvante ? Pourtant qui de nous n’a goûté durant l’enfance la poésie de ses jours sombres ; avec leurs lourds crépuscules qui abolissent les lointains et vêtent de mystère les gens qui passent sur les grandes routes ? D’ordinaire, les cœurs nouveaux chérissent l’hiver pour les surprises qu’il leur ménage.

D’ailleurs l’hiver n’est pas éternel, il passe ; sous le cadavre des choses bientôt pointe la résurrection ; et comme chaque année les saisons aux bras chargés de symboles recommencent à défiler.

Quoi qu’on en dise, en dépit des larmes qu’on a versées, il faut reconnaître qu’il y a plus de place ici-bas pour la joie que pour la tristesse, malgré cette sorte de coquetterie qui porte les hommes à favoriser celle-ci.

C’est au poète de choisir ; et nul n’a le droit de blâmer son choix. Pour Loti, je crois que son choix était fait en arrivant au monde, et qu’on risquerait de se montrer injuste envers les siens en les rendant responsables de sa sensibilité exagérée.

Tout imbus des chaudes illusions de leur tendresse, les parents de l’enfant résolurent, le moment venu, de commencer son éducation en famille ; pensant de la sorte lui éviter le danger des mauvaises fréquentations. Mais bientôt, ce qui devait arriver se produisit. L’enseignement pécha par la méthode et le manque d’énergie. Aussi fit-il peu de progrès, si peu même que l’on décida qu’il serait mis en pension au Collège de Rochefort.

Depuis son jeune âge jusqu’à ce moment, l’intelligence de l’enfant s’était beaucoup développée au point de vue du sentiment et de l’imagination. C’est une époque de sa vie que Loti parait chérir. Il a des conceptions de Théâtre de marionnettes ; il confectionne lui-même ses acteurs, il peint ses décors et s’inspire, pour les libretti, des contes familiers à la jeunesse. Cette besogne le passionne. Il étudie, perfectionne ses idées, et il en a beaucoup. Dès ce moment, il est facile de prévoir qu’il ne sera ni un mathématicien, ni un ingénieur, pas davantage un fonctionnaire ; car, sans aucun doute, cette entrée dans la fiction présage pour plus tard une autre entrée, mais, définitive celle-là, dans le domaine littéraire.

Sur ces entrefaites, ce frère de quatorze ans plus âgé que lui, devenu médecin de la marine, revient de son voyage aux tropiques, rapportant des pierres de là-bas, des plantes, des coquillages inconnus chez nous, et surtout quelques-uns de ces papillons merveilleux, aux ailes d’azur ; cadeaux qu’il fait valoir admirablement, en les accompagnant de récits, ce grand frère qui l’adore et qui s’en est fait aimer au point que ni la distance, ni la mort, ne pourront desserrer le lien qui les unit l’un à l’autre. Enfin, dans son ingéniosité à instruire l’enfant, il creuse dans le jardin de la maison un bassin autour duquel il plante des arbres à l’image d’un de ces lacs entrevus au pays des palmiers. Ce lac en miniature et Implantes qui l’entourent, ont frappé l’imagination de Julien Viaud. Cette révélation d’un pays aussi dissemblable du nôtre, amène un rêve nouveau. Il lui faut aussitôt des détails sur les hommes de ces pays, sur leurs habitudes, leurs mœurs. Si bien que sourdement une âme de marin s’installe en lui, d’abord discrètement comme portée par un flot lent ; puis cela déborde, et encore quelques mois sa destinée s’accomplira.

Pour le moment, élevé par des femmes dans une réserve toute féminine, cela va de soi, détestant chez ses camarades leur affectation de rudesse, il n’entretenait avec eux aucun échange de confidences, aucun de ces élans d’amitié qui sont un des charmes du printemps de la vie.

Peu enclin à la moquerie et même à l’ironie, par dédain sans doute, il redoutait celle des autres. Tout cela faisait de lui, parmi ses camarades, un petit solitaire : celui qui, correct et propret, déambule en silence sous les maigres arbres du préau.

Cela est désormais pour l’enfant de peu d’importance, car depuis le dernier voyage du grand frère, il s’était juré qu’il serait marin. Tout le conviait à cette décision à laquelle, seule, s’opposait la volonté de la mère qui, ayant déjà un fils au loin, dont elle regrettait sans cesse la présence, pressentant sans doute que le sort le lui enlèverait bientôt, se refusait absolument à laisser partir son petit Julien. Mais voilà que tout à coup, en tempête, le malheur s’abat sur la famille Viaud. C’est d’abord le grand-père qui meurt, puis la ruine qui l’oblige à vendre ses champs, ses demeures de ville et de campagne, la réduisant à la plus réelle pauvreté.

Mme Viaud comprit alors que dans l’intérêt de tous elle devait consentir le sacrifice de le laisser suivre la carrière qu’il ambitionnait. On devine quelle violence elle dut se faire… Quant au futur marin, tous ceux qui comprennent la jeunesse imagineront facilement que bien qu’affligé du malheur des siens, son cœur bondit de joie à la nouvelle que son plus cher désir allait être réalisé. Les larmes, le doux regard d’une mère ! Qu’est-ce que cela, auprès de l’ardeur qui s’allume dans l’âme de quiconque a le sentiment de sa destinée ? Songez donc, il a seize ans et la féerie du monde lui sera bientôt révélée.

Dans quelques mois, il naviguera sur les vastes océans, sur toutes les mers dont il prononcera ardemment les beaux noms-ainsi que ceux des villes pour lui mystérieuses et combien lointaines, joyaux du monde ! dont plus lard il fera la matière de son œuvre littéraire et le poème de sa vie.

Pour préparer son examen en vue de son entrée au Borda, il dut venir à Paris.

Paris ne lui plut pas, ni ses églises, ni ses palais, pas davantage ses musées. L’existence des étudiants le choque. Il est peu disposé à s’égayer à la lecture du livre de Mürger ; somme toute, le séjour de Paris fut pour lui sans attraits ni profit.

En 1867, il passe enfin l’examen qui lui ouvre les portes du Borda, revient à Rochefort prendre congé de sa famille, puis définitivement se dirige sur Brest où sa place est marquée sur le vaisseau-école qu’il baptise lui-même le Cloître flottant. Il fut là comme partout un isolé. Se tenant loin de ses camarades trop riches, attentif pourtant à se préserver des amitiés basses ou faciles, il estimait que « la liberté individuelle est une condition indispensable de la vie ». Ce sont ses propres paroles.

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Carte des principaux voyages de Pierre LOTI

 

carte voyages de LOTI

Par Jean-Philippe Guillerme. PIERRE LOTI Fantômes d’Orient, ouvrage publié par PARIS MUSEES pour le musée de la Vie romantique.

 Cliquez sur « articles précédents » situés tout en bas de cette page pour consulter  le texte « Voyager… » de Bruno Vercier.

 

Les paquebots utilisés par Pierre Loti lors de ses différents voyages

D’après l’article de Jean Nonin dans le bulletin n° 2 de juin 2000

Pierre Loti a utilisé parfois des paquebots pour rejoindre ou revenir de ses affectations, et aussi pour ses voyages personnels, de 1876 à 1913. Chaque paquebot est présenté dans l’ordre chronologique des voyages, avec la raison, les dates, les lieux de départ et d’arrivée. Vous trouverez également les caractéristiques, l’histoire et un cliché de chaque navire en question. De plus, certaines photographies et fac-similés accompagnent le texte. 

1876 – Paquebot « EUXENE »

Pierre Loti écrit dans son journal intime, le 29 juillet 1876,

« Je reçois un matin à 10 heures cet ordre inattendu à quitter brusquement « La Couronne » (frégate cuirassée de l’escadre d’évolution en Méditerranée) et Salonique prendre passage sur le paquebot « Euxène » qui appareille demain matin pour les Dardanelles (…) pour traverser Marmara et rejoindre « Le Gladiateur » (Canonnière de flottille, stationnaire à Constantinople) (…) ».

 

La traversée dure 3 jours et 3 nuits. Pierre Loti arrive le 3 août à Constantinople.

C’est pendant ce séjour à Salonique qu’il rencontre Aziyadé qu’il retrouvera à Constantinople.

Ce paquebot « Euxène », construit en 1865, par Caird and Co Greenock, est acheté en mars 1865 par la Compagnie Fraissinet afin d’effectuer la ligne Constantinople, la Mer Noire, Smyrne et la Syrie.

Au mois d’août 1895, il est vendu à la démolition. Sa longueur est de 80 mètres, sa largeur de 9 mètres et sa puissance de 550 CV.

Faute de photographie de ce petit paquebot, voici une photo de Pierre Loti à Salonique en 1876.

Pierre Loti à Salonique-juin 1876-collection Maison Pierre Loti

Pierre Loti à Salonique-juin 1876-collection Maison Pierre Loti

 

1885 – Paquebot « CHATEAU-YQUEM »

Afin de rejoindre La Triomphante pour la campagne de Chine, Julien Viaud voyage sur le paquebot « Château-Yquem », du 27 avril 1885 (Saïgon) au 5 mai 1885 (Hong-Kong).

Le 1er mai 1885, Pierre Loti écrit à Madame Adam :

Madame,
Je vous écris ce petit mot en mer, je le mettrai à la poste de Hong-Kong où nous arriverons demain matin. En ce moment, je traverse la mer de Chine pour me rendre à Formose ; c’est sur un mauvais petit bateau encombré de zouaves et de « joyeux » ; on y vit en sauvage, presque nu, et dormant à la belle étoile (…)
J’embrasse vos mains avec tendre respect.
Loti

 

Ce mauvais petit bateau est le paquebot « Château-Yquem » construit par les Forges et Chantiers de la Gironde à Bordeaux et lancé le 17 novembre 1883. Armé par la Compagnie Bordelaise de Navigation à Vapeur, société anonyme travaillant pour le compte de la Chambre de Commerce de Bordeaux, le « Château Yquem » est un steamer pour le transport des passagers, avec salons et cabines à l’avant des machines.

Sa coque en fer est d’une longueur de 117,76 m et d’une largeur de 12,5 m, son tirant d’eau est de 6,3 m. Gréé en trois mâts (hauteur de 36 mètres) avec une surface de voilure de 10752 m2 comme beaucoup de navires (car nous sommes à la fin de l’époque où l’on passait de la navigation à voile à celle de la vapeur).Sa vitesse est de 14 nœuds, il jauge 3 109 tonneaux et, est doté de machines d’une puissance de 625 chevaux.

Ce paquebot n’a fait que quelques voyages de Bordeaux à New-York dans le courant de l’année 1884. Le 25 octobre 1884, il aborde et coule le vapeur « Le Gaulois ».

Il est loué par la Marine le 28 janvier 1885, pour 2000 fr par jour. Armé (canons de 14 cm et 6 mitrailleuses Hotchkiss) en croiseur auxiliaire à Toulon, il se rend de Toulon à Saigon avec l’escadre de l’amiral Courbet, comme transport entre le 2 mars et 14 août 1885 pour les opérations en Chine et Indochine.

Restitué à son armateur en 1885, ce navire fut d’abord affrété en 1888 par la Compagnie Nationale de Navigation pour ses lignes d’Amérique du Sud, puis en juillet 1888 affrété par la Compagnie Transatlantique pour cinq ans.

Abordé à la Havane par le paquebot espagnol « Christobal-Colon » le 28 janvier 1889, il est mis en vente en 1891 sans trouver d’acquéreur. Acheté par H. Bordes et Cie en mars 1895, à la liquidation de la société, il est affecté à la ligne Marseille-Majunga, pendant l’expédition de Madagascar en 1896, puis vendu à Fabre (Cyprien Fabre à Marseille) pour la ligne Marseille-New-York. Échoué devant les chantiers navals de la Seyne-sur-Mer le 31 décembre 1897, il est renfloué et reconditionné en 1897, il s’appellera « Le Gallia ».

Après de grosses avaries dans l’Atlantique en 1903, on le répare à New-York et il est vendu pour être démoli en 1910.

Le Château-Yquem

Le Château-Yquem

 

1889 – Paquebot « LOU CETTORI (Le SETOIS) »

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Jules Patenôtre des Noyers

Le nouveau ministre plénipotentiaire de France à Tanger, Jules Patrenôtre, cherche un écrivain pour l’accompagner dans sa mission à Fez, afin de présenter ses lettres de créances. Après le refus de Guy de Maupassant retenu par ses obligations, Jules Patrenôtre sollicite Pierre Loti, qui accepte, malgré la récente naissance de son fils Samuel.

Il rejoint rapidement Port-Vendres où il embarque sur le paquebot « Lou Cettori ». Le 20 mars à 7 heures du soir, ce navire quitte la France. Le voyage jusqu’à Tanger va durer du 20 au 25 mars 1889 avec escales à Oran, Nermours, Mélilla (Maroc), Malaga et Gibraltar.

Le paquebot « Lou Cettori », construit par Scott Co à Greenock en 1873 est exploité par la Compagnie Valery. Acquis en 1880, par la Compagnie Générale Transatlantique, il est affecté aux lignes méditerranéennes. Il est vendu à la démolition en 1906.

Il mesurait 75 mètres de long et 9,10 mètres de large, sa puissance était de 637 CV.

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Fac similé lettre Patrenôtre-Maroc

1894 – Paquebot « L’OXUS »

Le 7 janvier 1894, le lieutenant de vaisseau Julien Viaud demande par la voie hiérarchique un congé de 6 mois pour affaires personnelles, (voyage en Terre Sainte), ainsi que l’autorisation de revenir par Constantinople, Moscou, Eisenach (Saxe) et Hendaye.

Cette demande est acceptée par dépêche ministérielle du 11 janvier, confirmée par lettre du commandant en chef, Préfet maritime de Rochefort, datée du 1er février 1894 (fac-similés des deux lettres).

Dans son journal intime, Pierre Loti note :

« le 4 février, Marseille, déjeuné avec les de Ferrocel, avec Léo (Léopold Thémèze). Il y a Madame Adam et le duc de Talleyrand.
A trois heures, ils viennent nous conduire à bord de l’Oxus qui doit nous emmener (…)
Appareillage à quatre heures et en route pour l’Orient et le soleil.
Vendredi 9 février : arrivée à Alexandrie ; (…) ».

 

« L’Oxus » est le dernier des neuf bâtiments construits entre 1872 et 1879 à La Ciotat. Avec 125 m de long et 12.07 m de large, il dispose d’une puissance de 2900 CV et peut atteindre une vitesse de 14 nœuds. Il est lancé le 27 avril 1879 avec un état-major de 11 officiers, un équipage de 170 hommes ; il transporte 81 passagers de 1ère classe, 46 en 2ème classe et 36 en 3ème classe et éventuellement 1200 en entrepont. Il est affecté aux lignes de Chine (1er départ le 19 octobre 1879) au début de sa carrière.

Transformé en 1887, on change ses chaudières et on lui met l’électricité. Le 11 juillet 1889, en rade d’Aden, il aborde et coule « l’Anadyr », un de ses sisterships. De 1896 à 1897, il assure la ligne du Levant. En 1897, il est placé sur la ligne de Madagascar jusqu’en 1914. De 1895 à 1905, il est peint en blanc. En novembre 1898, il reste 6 jours échoué sur l’île Musha au large de Djibouti. En 1908, il effectue une rotation sur l’Amérique du Sud en remplacement de « l’Esmeralda ».

l'Oxus à La Joliette à Marseille entre 1895 et 1905-Photo Collection P.Ramona

L’Oxus à La Joliette à Marseille entre 1895 et 1905-Photo Collection P.Ramona

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En octobre 1914, bloqué en mer noire au cours d’un voyage par suite de l’entrée en guerre de la Turquie ; il est offert au gouvernement russe afin de servir de navire hôpital. En avril 1916, redevenu transport, il participe au débarquement de troupes et de matériel sur la plage de Laristankos en Turquie-d’Asie. A cette occasion, le commandant, le chef mécanicien, le maître d’équipage, le chef de bordée et le premier chauffeur reçoivent la médaille de Saint Georges de 4ème classe.

Au moment de l’avance des allemands en Ukraine et en Crimée, en juin 1918, « L’Oxus » se trouve à Sébastopol, afin qu’il ne tombe pas entre les mains des allemands. « L’Oxus » se réfugie à Novorossisk. Les représentants de l’Entente décident de le couler le 21 du même mois. A noter que l’équipage français avait été remplacé par un équipage russe, sauf le commandant et le chef mécanicien qui étaient français.

L’épave sera démolie en 1919.

Fac similé correspondance voyage en terre sainte

 

Fac similé correspondance voyage en terre sainte-2

1899-1900 – Paquebot « CALEDONIEN » 

Pour la Marine, le commandant Julien Viaud est en mission auprès du département des affaires étrangères, du 10 juin 1899 au 25 juillet 1900.

Ceci est écrit par le vice-amiral, chef d’état-major général de la Marine, dans le bulletin individuel de notes de l’année 1900 (voir fac-similé du 4ème arrondissement maritime, Collection Maison de Pierre Loti).

Pierre Loti, réintégré dans la Marine, par décision du Conseil d’état du 24 février 1899, a peur des vengeances de ces messieurs de la rue Royale. Ses amis, dont Madame Juliette Adam, sont intervenus auprès des hommes politiques afin d’obtenir cette mission ; de plus l’Académie française le charge de remettre au Maharadjah de Travancore, les Palmes académiques et enfin le ministre des affaires étrangères, Théodore Delcassé, signe des lettres de recommandations aux diplomates et consulaires de France à Téhéran et aux Indes.

Pierre Loti peut donc entreprendre son voyage de l’hiver 1899-1900 aux Indes et en Perse.

Le 19 novembre 1899, à Marseille, Pierre Loti embarque sur le paquebot « Calédonien » qui le conduira à Colombo (Ceylan) où il arrivera le soir du 6 décembre 1899. Ce sera le départ de son voyage qu’il nous contera dans « L’Inde sans les Anglais et Vers Ispahan ».

Le paquebot « Calédonien » a été construit aux chantiers de la Ciotat. Mis sur cale le 1er octobre 1871, il est lancé le 18 juin 1882 ; il effectue son premier voyage sous le pavillon de la Compagnie des Messageries Maritimes, le 21 décembre 1882, vers l’Australie.

D’une longueur de 130 mètres, sa largeur est de 12,68 mètres. Sa puissance de 4000 CV lui permet d’atteindre la vitesse de 16,8 nœuds. Son état-major est de 11 officiers et son équipage de 185 hommes. Il peut transporter 90 passagers en 1re classe, 44 en seconde et 75 en troisième, plus éventuellement 1200 en entrepont.

Il a été affecté à la ligne d’Australie via Aden, Les Seychelles, Maurice, Nouméa, jusqu’en 1890, ensuite il est utilisé sur les lignes postales de Chine et de l’Océan Indien.

Il transporte en septembre 1895 Camille St Saëns, de retour de Saïgon.

Modifié en 1895 (changement des machines, rehaussement des cheminées et rallongement du roof arrière).

En 1900, il est affrété comme transport de troupes pour la campagne de Chine (guerre des boxers). Après 1901, il est essentiellement employé sur la ligne de Madagascar jusqu’en 1914.

Le 26 mai 1916, il embarque à Diego Suarez le 3ème Bataillon de Tirailleurs Indochinois. Il arrive à Marseille le 20 juin.

Le 30 juin 1917, se rendant à Madagascar, le « Calédonien » est détruit par deux explosions à une trentaine de milles de Port-Saïd ; il coule en quelques minutes. Dans cette catastrophe, provoquée par des mines mouillées par un sous-marin allemand (UC 34), 51 personnes périssent. Les survivants sont repêchés par les contre-torpilleurs français LANSQUENET et grec THYELLA.

Le « Calédonien » était en convoi et fut l’objet d’un témoignage officiel de satisfaction pour l’attitude disciplinée et le dévouement de son équipage lors de l’évacuation de ce paquebot.

Le Calédonien à Marseille entre 1895 et 1903-Photo Collection P.Ramona

Le Calédonien à Marseille entre 1895 et 1903-Photo Collection P.Ramona

 

Fac similé lettre 4ème arrondissement maritime

1902 – Paquebot « LE SYDNEY »

Nommé capitaine de frégate, Julien Viaud est réintégré le 1er mars 1899 dans le cadre de l’activité. Il est désigné pour rejoindre « Le Redoutable » à Cherbourg. Le vice-amiral Pottier le choisit comme aide de camp.

Le 2 août « Le Redoutable » appareille pour la Chine afin de protéger les ressortissants, les représentants diplomatiques et consulaires français.

Pierre Loti, dans son Journal Intime, écrit le 2 août :

« c’est le départ, huit du matin…A 10 heures et demie, « Le Redoutable » se met en marche… ».

 

Maintenant Pierre Loti est en campagne pour 1 an, 7 mois et 13 jours, en Chine, au Japon, en Indochine et au Cambodge.

Le 13 mars 1902, l’amiral amène son pavillon, c’est la fin de cette campagne ; Pierre Loti quitte « Le Redoutable ».

Le 14 mars, le paquebot « Sydney » part à 3 heures du matin pour la France avec à son bord Pierre Loti très malade. « Le Sydney » arrive à Marseille, le 7 avril 1902. Pierre Loti obtient un congé de convalescence de 6 mois pour dysenterie avec fièvre et anémie. Le journal « La Petite Gironde » avait fait paraître un article annonçant que Pierre Loti était gravement malade, ce qui inquiéta sa famille qui demanda confirmation par télégramme au Ministre de la Marine.

De cette campagne en Extrême-Orient, Pierre Loti écrira : Les derniers jours de Pékin. (Dédicace à l’amiral Pottier), 1902 ; et La Troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.

Le Sydney dans le port de Marseille-Photo Collection P.Ramona

Le Sydney dans le port de Marseille-Photo Collection P.Ramona

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« Le Sydney » est de la même catégorie que « Le Calédonien ». Lancé le 12 novembre 1882 aux chantiers de la Ciotat, il est affecté à la Compagnie des Messageries Maritimes. Sa longueur est de 130,75 m et sa largeur de 12,66 m ; il développe une puissance de 4000 CV pour une vitesse de 16 nœuds. Il peut accueillir 90 passagers en première, 44 en seconde, et 75 en troisième.

Son premier voyage, le 15 mars 1883, sera pour l’Australie. Il assure la ligne Marseille-Nouvelle Calédonie par l’Océan Indien et l’Australie. De 1890 à 1906, il assure la ligne d’Extrême Orient, puis, alterne Australie et Levant.

Le transport maritime s’améliore et devient plus confortable, ce navire est pourvu d’un salon de musique en 1885-1886 et de l’éclairage électrique à incandescence en 1886-1887.

En 1891, se rendant de Shanghai à Saigon, « Le Sydney » est abordé à Woosung par un croiseur chinois ; coulé par petit fond, il est renfloué et réparé à Shanghai. En décembre 1898, il échoue par temps de brume sur le petit Caroubier ; renfloué, les avaries légères sont réparées à la Ciotat.

Le 17 octobre 1903, « Le Sydney » arrive à Aden à la remorque de la « Ville de Tamatave » après rupture de l’arbre porte-hélice. Il est remorqué ensuite par « L’Adour » jusqu’à Bombay où il passe en cale sèche après déchargement.

Le 13 février 1909, il subit une grave avarie (rupture de l’arbre de couche) au milieu de l’Océan Indien, et doit être remorqué par le CLAN FRASER, jusqu’à Pointe de Galles, relais pris par le remorqueur GOLIATH, de la Compagnie des Messageries Maritimes jusqu’à Colombo.

En 1913, il remplace « Le Salazie » perdu dans un cyclone, sur la ligne de l’Océan Indien.

Il arrive à passer sans encombre la grande guerre puis en février 1922, il est vendu pour démolition à Gênes.

Fac similé dépêche ministérielle

1903 – Paquebot « LE CONGO »

Par décision d’Emile Loubet, président de la République, sur proposition de Camille Pelletan, ministre de la Marine, le capitaine de frégate Julien Viaud, est nommé au commandement du contre-torpilleur « Le Vautour ». Cette décision a paru au Journal officiel, le 7 juillet 1903 page 4141 (voir fac-similé d’une lettre adressée au capitaine de frégate Viaud (Louis, Marie, Julien) signée du contre-amiral Fauque de Jonquières (Marie, Pierre, Eugène), commandant des services de la flotte armée). Ce contre-amiral a été de la même promotion que Pierre Loti sur le « Borda ».

Le Congo dans le port de La Joliette à Marseille-Photo collection Xavier Escallier

Le Congo dans le port de La Joliette à Marseille-Photo collection Xavier Escallier

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Afin de se rendre à son poste de commandement sur « Le Vautour » à Constantinople, le 3 septembre 1903, Pierre Loti embarque à Marseille sur « Le Congo ». Vers 4 heures, il est en mer. Il arrive le soir du 9 septembre 1903 à Constantinople.

Le 10 septembre à 2 heures, a lieu à Beïcos où stationne « Le Vautour », la cérémonie de prise de commandement.

Le paquebot « Le Congo » est construit par les Chantiers de la Ciotat, il est le dernier de quatre bâtiments du même type. Lancé le 17 mars 1878, d’une longueur de 125 mètres et d’une largeur de 12 mètres pour une puissance de 2900 CV.

Conçu à l’origine pour la ligne d’Amérique du Sud, l’aménagement intérieur comprend une dunette avec un grand et riche salon bien décoré, et une table de 120 couverts. Son état-major est constitué de 11 officiers pour un équipage de 113 hommes, afin de permettre le transport de 96 passagers en 1ère classe, 84 en seconde et 515 dans l’entrepont.

En août 1889, « Le Congo » est affecté à la ligne d’Extrême-Orient pour remplacer « L’Anadyr » perdu le mois précédent.

Ce navire à eu une carrière heureuse puisqu’au cours de trente-quatre ans de service, il ne fut l’objet d’aucun incident fâcheux. Un fait marquant : le 5 août 1888, il appareille de Bordeaux avec à son bord l’Empereur Dom Pedro du Brésil, l’Impératrice et le Prince Dom Pedro, Augusto.

Des installations particulières avaient été préparées pour de si augustes passagers.

A partir de 1896, il assure les lignes du Levant.

En janvier 1913, il est vendu 257 500 FR en Italie à Gênes pour la démolition.

Fac similé lettre adressée à Pierre Loti

1905 – Paquebot « L’EQUATEUR »

Pierre Loti termine son service de commandement à bord du « Vautour », premier stationnaire de l’ambassade de France à Constantinople. Il a tenu ce poste – qui est autant du domaine politique et diplomatique que de la Marine – pendant un an et sept mois. C’est pendant cette période qu’il rencontre l’enseigne de vaisseau Charles Bargone, qui deviendra Claude Farrère en littérature, et trois jeunes femmes (Les désenchantées).

Le service sur « Le Vautour » est son dernier embarquement d’officier de marine. Il revient en France très fatigué et obtient un congé de convalescence de trois mois. Au terme de ce congé, il reprend du service à terre.

A Constantinople, le 30 mars 1905, il prend place sur « L’Equateur » qui appareille pour Marseille où il arrive le 6 avril 1905.

l'Equateur dans le port de Marseille-Photo Collection F.Subercaze

L’Equateur dans le port de Marseille-Photo Collection F. Subercaze

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Le paquebot « Equateur » fut construit par les chantiers de la Ciotat. D’une longueur de 125 mètres pour une largeur de 12 mètres, il est lancé le 20 juin 1875. Sa puissance est de 2400 CV et sa vitesse de 15 nœuds. Il peut transporter 124 passagers en 1ière classe, 66 en seconde, 54 en troisième et 500 émigrants en entrepont.

Affecté à la ligne d’Amérique du Sud (Bordeaux-Montevideo), premier départ de Bordeaux le 5 janvier 1876. Assure le service de La Plata jusqu’en 1896.

Contrairement au « Congo », paquebot de la même série, il subit quelques déboires. A Pauillac, le 17 janvier 1894, une forte explosion dans la soute à vapeur fait trois morts et deux blessés. Cette explosion fut provoquée par de la dynamite placée dans des colis piégés.

De 1896 à 1898, « L’Equateur » assure la ligne sud-Méditerranée (Egypte-Syrie), puis jusqu’en 1914 la ligne Nord Méditerranée (Grèce-Turquie-Syrie).

En 1914, au mois de septembre, retenu en mer Noire par la fermeture des détroits, il est mis à disposition du gouvernement russe, il est transformé en navire-hôpital en mars 1915.

A cette occasion, il sera visité par l’Empereur Nicolas II et par le Tzarevitch.

Seul rescapé des trois navires de la mer Noire, il arrive à s’enfuir et reviendra en France en 1919 reprendre du service pendant trois ans.

En juillet 1922, il est à Marseille pour la démolition.

1907 – Paquebot « LE SYDNEY »

Le voyage en Egypte de Pierre Loti – accompagné d’Osman Daney – commence le 16 janvier 1907 à Marseille où il embarque sur le paquebot « Le Sydney » qui l’a déjà rapatrié d’Extrême-Orient en 1902.

Dans son Journal intime, Pierre Loti nous dit :

« Mercredi 16 janvier (…) vers 11 heures, appareillage par beau temps lumineux, et la côte de France disparaît ».
« Lundi 21 – Mauvaise mer la veille. Ce matin à 2 heures arrivée à Port-Saïd (…) ». 

 

Pour le retour de ce voyage, Pierre Loti embarque à Alexandrie le 3 mai 1907 à 4 heures. Le 8 mai, il arrive de grand matin à Marseille.

De son séjour en Egypte, Pierre Loti nous donnera l’année suivante « La Mort de Philae ».

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Osman Daney

 

1910 – Paquebot « PHRYGIE »

Voyage en Turquie du 10 août au 27 octobre 1910.

Le 14 janvier 1910, Pierre loti est admis à la retraite et désire revoir en toute liberté son cher Constantinople.

Le 10 août 1910, il embarque à Marseille sur le paquebot « Phrygie » qui le conduira vers la fugitive ombre de son amour de jeunesse, Aziyadé.

Il arrive le 15 août. Son amie le comtesse Ostrorog l’installe chez elle dans l’attente d’habiter dans le vieux quartier d’Istanbul. Il tombe malade (maladie contractée en Extrême-Orient). Il est obligé de faire plusieurs séjours à l’hôpital et de s’installer dans la demeure du Consul général de France.

Malgré tout, il est reçu en privé par le sultan Mohamed V et se rendra à Brousse avec Paul et Jules Cambon sur invitation du Vice-consul de France.

Le 21 octobre, il embarque sur le paquebot « Phrygie » qui le conduira en France ; le 27 octobre, il arrive à Marseille.

Dans son Journal intime, à la date du 21 octobre, il écrit : 

« Avant 10 heures, il faut rentrer à bord pour l’appareillage. Sans doute, c’est fini à jamais la Turquie ».

 

Il se trompait, car début décembre, il commence sa campagne en faveur de la Turquie, ce qui lui vaut une invitation des milieux gouvernementaux.

Paquebot Phrygie

Le paquebot « Phrygie », de la Compagnie de Navigation Paquet, est lancé en 1898. D’une longueur de 113.70 mètres, d’une largeur de 13.41 mètres, sa vitesse est de 11 nœuds donnés par sa puissance de 2690 CV.

Son aménagement en transport civil est de 19 cabines et de 92 couchettes. Equipé en transport de troupe, il peut embarquer 587 hommes et 300 chevaux.

1912 – Paquebot « LA SAVOIE »

En juin 1911, parait la pièce de théâtre « La Fille du Ciel », drame chinois en 4 actes en collaboration avec Judith Gautier.

Le Century Théâtre de New York décide de présenter cette pièce avec d’énormes moyens, beaucoup de figurants et des décors somptueux.

La Première étant prévue, le 22 octobre 1912, Pierre Loti part en Amérique quelques jours avant afin d’assister aux répétitions.

Parti de Paris le 14 septembre 1912 par le train transatlantique, il embraque sur le paquebot « La Savoie » et arrive le 21 septembre à New York où il restera six semaines.

Le récit de son séjour en Amérique a paru dans « l’Illustration » des 31 mai et 7 juin 1913. Il sera repris dans « quelques aspects du vertige mondial » (1917) au chapitre « New York entrevu par un Oriental très vieux jeu ».

La Savoie-2

« La Savoie », ce paquebot transatlantique de 177 mètres de long et 12.80 mètres de large est équipé de 2 machines à quadruple expansion, 18 chaudières à tirage forcé, d’une force de 22 000 CV. Il consomme 12 à 15 tonnes de charbon à l’heure pour une vitesse de 22 nœuds (40 km/h). Construit par les Chantiers de Penhoët de Saint Nazaire, il est lancé le 31 mars 1900 et mis en service le 31 août 1901 par la Compagnie générale transatlantique sur la ligne Le Havre New York.

Ce paquebot possède tout le luxe et le confort nécessaire pour ses 1400 passagers dans ses différentes classes. Il est équipé de la télégraphie sans fil. Il franchit les 6000 kilomètres qui séparent Le Havre de New York en six jours. L’équipage de ce paquebot moderne pour l’époque est de 420 hommes.Haut du formulaire

En août 1914, il est mobilisé et armé en croiseur auxiliaire et rattaché à la 2ème escadre. Il participe au transport des troupes vers les Dardanelles jusqu’en 1917 où il prend part à l’acheminement des soldats américains qui combattront sur le sol français. Il est rendu au service de la ligne de l’Atlantique Nord en 1919.

« La Savoie » sera démolie en 1927 à Dunkerque après 117 ans de service.

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Une cabine de luxe de 1ère classe à bord du paquebot La Savoie

Le salon des dames à bord de La Savoie

Le salon des dames à bord de La Savoie

Viola Allen (1869-1948), comédienne américaine, dans le spectacle dramatique par Pierre Loti et Judith Gautier, LA FILLE DU CIEL

Viola Allen (1869-1948), comédienne américaine, dans le spectacle dramatique par Pierre Loti et Judith Gautier, LA FILLE DU CIEL

 

1912 – Paquebot « LA PROVENCE »

Le 17 octobre 1912 à New York, Pierre Loti embarque sur le paquebot « La Provence » et le 24 octobre au matin, il arrive au Havre.

Ouf ! délivrance écrivait-il dans son journal intime à la date du 17 octobre. Ce voyage ne semble pas lui avoir donné satisfaction.

Paquebot La Provence-

« La Provence » est le paquebot le plus grand de tous les transatlantiques français. Il mesure 190.67 mètres de long pour 19.78 mètres de large. Il est équipé de 2 machines à quadruple expansion, de 21 chaudières d’une force de 30 000 CV lui conférant une vitesse de 21.50 nœuds et consommant plus de 20 tonnes de charbon à l’heure.

Armé par la Compagnie Générale Transatlantique, son équipage de 450 hommes dont 200 chauffeurs, lui permet de transporter en trois classes 1500 passagers, mais ses performances et confort sont les mêmes que « La Savoie ».

Construit à Saint Nazaire (Chantiers Penhoët), il est lancé en 1905. Il effectue son premier voyage, Le Havre – New York, le 21 avril 1906.

« La Provence » fut également le premier paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique équipé de la télégraphie sans fil (TSF) et c’est à son bord que fut imprimé le premier exemplaire de L’Atlantique, le journal destiné aux passagers qui sera ensuite imprimé et diffusé sur tous les paquebots transatlantiques jusqu’à l’arrêt du « France » en 1974.

Au retour de son deuxième voyage, il effectue une course mémorable avec le paquebot allemand « Deutschland I », qu’il bat finalement de 4 heures, les passagers américains ayant engagé des paris importants à bord des deux rivaux.

Le 2 août 1914, il est réquisitionné et converti en croiseur auxiliaire.

Il est rebaptisé « La Provence II », un cuirassé français portant déjà le même nom. Il est armé de 5 canons de 140 mm, 2 de 57 mm et de 4 de 47 mm

À partir de janvier 1915, il est utilisé pour le transport de troupes vers les Dardanelles.

Le 23 février 1916 au soir, « La Provence II » part de Toulon pour Salonique avec 1 700 hommes encore inexpérimentés du 3ème régiment d’infanterie colonial. Le 26 février 1916, « La Provence II » est torpillée au large du cap Matapan, en Méditerranée, par le sous-marin allemand U35. Le navire sombre en 17 minutes, faisant officiellement 912 victimes, dont le commandant, le capitaine de frégate savoyard Henri Vasco, qui avait demandé qu’on débarque 1 100 personnes en raison du manque de brassières de sauvetage.

Au moment du naufrage, le commandant Henri Vasco tout en dirigeant l’évacuation, resta à la passerelle jusqu’au dernier instant du navire qui s’enfonçait rapidement par l’arrière, d’où il s’adressa une dernière fois par-dessus le tumulte aux malheureux hommes n’ayant pu évacuer et qui s’étaient regroupés sur le pont avant, en leur criant « adieu mes enfants ! ». Ce à quoi ces derniers lui répondirent en criant « Vive la France », avant d’être tous emportés par les flots où le navire s’enfonça à la verticale comme une flèche. À leur tour, les survivants des canots et des radeaux lancèrent en retour « Vive la France ».

Les rescapés secourus par des navires des marines de guerre française et britanniques sont débarqués à Milo en Sicile et à Malte.

Voici comment le médecin de bord (Clunet) décrit la fin du croiseur auxiliaire :

« L’affolement commence environ 5 minutes après le torpillage alors que le bateau est à peine enfoncé à l’arrière et semble immobile et paraît devoir supporter son avarie. Cet affolement demeure silencieux : pas de cris, seulement quelques râles de gens étouffés et étranglés dans la presse des escaliers. Des hommes, frappés de stupeur, immobiles sur le pont, ou la plupart très agités, se livrent à des actes déraisonnables. Certains s’entassent sur les embarcations, sur le pont, sans essayer de les mettre à la mer, d’autres montent dans les haubans de la mâture ; d’autres encore tirent des coups de revolvers et des coups de fusils en l’air. »

 

Paquebot La Provence

1913 – Paquebots « PHRYGIE et IONIE »

Le 6 août 1913, à bord du paquebot « La Phrygie » sur lequel il a déjà voyagé en août-octobre 1910, Pierre Loti quitte Marseille pour Constantinople où il est reçu en ami autant par le Sultan que par les autorités civiles, militaires et le peuple Turc.

La presse turque et française relate les visites et festivités de ce dernier séjour (ce sera réellement le dernier) qui se termine le 17 septembre au départ du paquebot « Ionie » de Constantinople et arrive le 23 septembre à Marseille.

Pierre Loti, dans son journal intime à la même date, note :

« une fois de plus, quand le paquebot se détache du quai comme en glissant, j’ai l’illusion que c’est Constantinople qui bouge, s’éloigne et va s’évanouir…Maintenant Stamboul n’est plus qu’une silhouette qui s’efface…pour jamais peut-être.

 

En effet, Pierre Loti ne reviendra plus en Turquie.

De cet ultime séjour, il rapporte des chardons bleus pieusement cueillis au cimetière d’Eyüp où repose Aziyadé (Hatidje)…de son douloureux amour dont il se souviendra encore à l’approche de la Grande épouvante…

Paquebot Ionie

Le paquebot « Ionie », lancé en 1898, a appartenu à la Compagnie de Navigation Paquet. Il mesure 120 mètres de long et 14 mètres de large ; sa puissance est de 3200 CV et il embarque 700 tonnes de charbon ; sa vitesse est de 13 nœuds. Equipé de 29 cabines en 1ère classe et 2ème classe, soit de 100 passagers et de 86 couchettes.

Il est réquisitionné par la Royale le 12 décembre 1916 à Constantinople et assure des transports de troupes à Salonique et d’Arkangelsk vers la métropole. Sa capacité est de 1800 hommes et 560 chevaux. Il est désarmé le 17 juillet 1918.

La Turquie ne fut pas ingrate envers Loti, puisque le 27 décembre 1921 une délégation vint à Rochefort lui remettre une lettre d’hommage du président de la Grande Assemblée Nationale, Mustafa Kemal (Atatürk) et un tapis tissé par des orphelins dont les pères sont morts dans la lutte pour l’indépendance.

Loti descendant du paquebot Phrygie-1913-2

Pierre Loti a effectué d’autres voyages en paquebot, en mai 1889, au retour de son voyage au Maroc, en 1894, en revenant de Terre Sainte puis en 1900 (voyage de Bombay à Bandar-Bushehr) et enfin en 1907 au retour de son voyage en Egypte.

Son Journal Intime ne mentionne pas les noms des paquebots, et malgré des recherches effectuées auprès des Compagnies de navigation ou dans différentes archives navales, nos recherches sont restées vaines.

Carrière du capitaine de vaisseau Julien VIAUD

1863 :

Julien écrit à son frère aîné qu’il a décidé d’être marin. (Louis Gustave Viaud, médecin de la marine qui devait décéder en mer à bord de l’Alphée dans le golfe du Bengale le 12 avril 1865 à l’âge de 28 ans des suites d’une anémie tropicale).

1866 :

Julien part à Paris pour préparer l’Ecole Navale.

1867 :

En juillet, Julien est reçu 40e sur 70 à l’Ecole Navale ; élève à l’Ecole navale dès le 1er octobre ;

Rade de Brest sur le Borda, vaisseau-école (du 1er octobre 1867-1er août 1869).

vers 1868. Brest. avec un groupe d'élèves du Borda. Julien est debout à gauche, au dessus de l'élève qui ressemble un peu à Oscar Wilde.

Vers 1868. Brest. avec un groupe d’élèves du Borda. Julien est debout à gauche, au dessus de l’élève qui ressemble un peu à Oscar Wilde.

1868 :

Premier voyage en mer à bord du Bougainville, aviso à hélice, annexe du Borda(4-29 août 1868). Stage d’acclimatation physique des élèves. Croisière sur les côtes de France. (côtes bretonnes et normandes).

1869-1870 :

Nommé aspirant de 2ième classe le 1er août 1869.

Du 5 octobre 1869 (Brest) au 8 août 1870 (Cherbourg), campagne d’instruction à bord du vaisseau-école à hélice Jean Bart (Méditerranée, Afrique du Nord, Atlantique, Brésil, Etats-Unis, Canada).

1870 :

Nommé aspirant de 1ière classe le 15 août 1870.

Sur le Decrès, corvette à hélice (8 août 1970 – Cherbourg – 15 mars 1871 – Lorient) (Manche, Mer du Nord, Baltique). Campagne de guerre 1870-1871 ; Il participe au blocus de la Jade, en Mer du Nord, pendant la guerre franco-prussienne. Cliquez:  1870, les espoirs déçus de l’aspirant Julien Viaud

1870. En grande tenue d'aspirant de 1re classe.

1870. En grande tenue d’aspirant de 1re classe.

1871 :

Embarquement sur le Vaudreuil aviso à hélice 25 mars 1871 (Lorient) – 1er novembre 1871 (Valparaiso). Croisière vers l’Amérique du Sud et le Pacifique, Sénégal, Cayenne, Brésil, Uruguay, détroit de Magellan, Chili.

1er novembre, à Valparaiso, embarquement sur la Flore frégate mixte, croisière dans le Pacifique.

Contre-Amiral Juin-La Flore

vers 1871.

Vers 1871

1872 :

3-7 janvier, Île de Pâques. 

De l’Ahu Vaipu au Quai Branly, tribulations d’une tête de Moaï

 

29 janvier-3 mars puis fin juin-début juillet, Tahiti, San Francisco, Montevideo, Rio de Janeiro.

A Brest, le 4 décembre, Julien quitte la Flore pour le Bretagne (vaisseau-école des novices et apprentis marins) jusqu’au 9 janvier 1873. Stationnaire en rade de Toulon.

1873 :

Evolutions en Méditerranée sur la Savoie frégate cuirassée à vapeur (9 janvier 1873 Toulon – 20 mars 1873 Golfe Juan .

Congé de 5 mois, mars à août 1873.

Promu enseigne de vaisseau le 26 juin.

Du 1er au 21 septembre, sur l’Entreprenante (frégate), Toulon à Dakar.

Pierre Loti en tenue de matelot - Frégate l'Entreprenante

Pierre Loti en tenue de matelot sur la frégate l’Entreprenante

 

21 septembre 1873 (Dakar) au 25 mai 1874 (Saint-Louis du Sénégal), rejoint Dakar sur le Pétrel aviso à roues unité de surveillance de la côte sénégalaise.

vers 1873. En grande tenue d'enseigne.

Vers 1873. En grande tenue d’enseigne.

1874 :

Saint-Louis du Sénégal. Muté le 25 mai sur l’Espadon aviso à roues jusqu’au 12 septembre 1874 (Rochefort). L’Espadon quitte Saint-Louis le 19 juillet 1874 pour le retour en France.

1875 :

Mise en congés et stage du 25 janvier au 21 juillet 1875 à l’Ecole de gymnastique de Joinville-le-Pont.

1875. Joinville.

1875. Joinville.

1876 :

Du 17 février au 1er mars 1876 (Toulon) – Mer Méditerranée.

Sur la frégate cuirassée Couronne du 1er mars (Toulon) au 1er août 1876 (Salonique) en qualité d’instructeur de sport. Escadre d’évolutions en Méditerranée et au Levant.

3 mai, départ pour le Levant. Le Pirée, puis Salonique, en Turquie après l’assassinat des consuls de France et d’Allemagne en mai 1876. (16 mai-fin juillet).

Le 1ier août (Salonique), muté sur le Gladiateur canonnière de flotille. Stationnaire à Constantinople. 

1877 :

17 mars, quitte Constantinople.

8 mai, retour à Toulon.

Sur le Bouvet aviso à hélices du 5 juin au 10 août 1877. Essais à Rochefort. 

20 septembre (Lorient) au 17 juin 1877 (Brest), embarquement sur le Tonnerre garde-côtes sur les côtes de Bretagne.

1878 :

Sur la Moselle (transport) du 18 septembre 1878 (Rochefort) au 26 septembre 1879 (Brest). Service des ports du Nord et de Bretagne :  Lorient, Cherbourg, Saint-Nazaire, Brest, Le Havre.

1879 :

Service à la caserne Saint Maurice à Rochefort du 4 novembre 1879 au 28 mars 1880.

1880 :

Sur le cuirassé d’escadre Friedland (Cdt Jean Le Cardinal) du 1er avril 1880 (Toulon) au 25 février 1881 (Toulon). Escadre d’évolutions de la Méditerranée. Algérie, Rochefort, Brest, Cherbourg, Toulon et Adriatique : Raguse, Monténégro, Gravora, Cattare.

1881 :

24 février, nommé lieutenant de vaisseau de 2ème classe.

Secrétaire de la Majorité générale à Rochefort de mars 1881 à juin 1882.

1882. En lieutenant de vaisseau

1882. En lieutenant de vaisseau

1882 :

du 3 juillet (Brest) au 17 décembre 1882 (Cherbourg), sur la Surveillante, frégate cuirasséeescadre de réserve, côtes de la Manche.

Officier de service à la Direction du port militaire de Rochefort : 17 décembre 1882-19 mai 1883.

1883 :

22 Mai (Brest) – 16 décembre 1983 (Tourane), sur l’Atalante, corvette cuirassée campagne du Tonkin.

sur le Corrèze (transport) 16 décembre 1883 (Tourane) – 2 février 1884 (Toulon). Rappelé en France après ses articles publiés dans Le Figaro sur la guerre coloniale en Annam et affecté à Rochefort au bureau du port.

1884 :

Service à la Majorité générale de Rochefort de février 1884 à mars 1885. Aide-Major à Rochefort.

1885 :

Sur le Mytho (transport) 20 mars 1885 (Toulon) – 27 avril 1885 (Saigon). Loti est embarqué comme passager ayant reçu l’ordre de rejoindre l’escadre de l’amiral Courbet dans les mers de Chine.

Puis sur le Château-Yquem (paquebot). 27 avril (Saigon) – 5 mai 1885 (Hong-Kong). Traversée de la mer de Chine.

Sur la Triomphante, cuirassé, 5 mai 1885 (Makung, îles Pesacadores) – 6 mars 1886 (Toulon) fin de la campagne de Chine. Escadre de Courbet en mer de Chine, il participe aux combats des Pescadores, puis séjourne au Japon.

8 Juillet-12 août, escale à Nagasaki.

1886 :

3 mai, médaille du Tonkin, de la Chine et de l’Annam.

16 juin, nommé lieutenant de vaisseau de 1ère classe.

Commande le Magicien en essais à Rochefort du 1er avril au 16 juin 1886.

Service dans les bureaux de port de Rochefort : 16 juin 1886 - 6 septembre 1888. Durant cette période, Loti a obtenu un congé en septembre-octobre 1887 pour accomplir un voyage personnel en Roumanie et à Constantinople. 

1887 :

5 juillet, Loti est fait chevalier de la Légion d’honneur.

1888 :

Adjudant-Major du port de Rochefort ;

Sur l’Ecureuil aviso à roues et les bâtiments de réserve (Rochefort) du 6 septembre 1888 au 19 mars 1889 et du 19 mai au 28 juillet 1889. En réserve 2° catégorie à Rochefort.

1889 :

Commandement de l’Ecureuil entrecoupé du 19 mars au 19 mai 1889 par un voyage au Maroc.

Mars-avril : mission au Maroc pour accompagner Jules Patrenôtre le nouveau ministre de France à Tanger.

Quitte l’Ecureuil fin juillet.

1890 :

Congé en avril-mai 1890 pour un second voyage en Roumanie et à Constantinople.

1891. Sur le Formidable. Loti est au 3ème rang au centre.

1891. Sur le Formidable. Loti est au 3ème rang au centre.

1891 :

En Méditerranée sur le Formidable, cuirassé d’escadre, 23 janvier 1891(Golfe Juan) au 1er octobre 1891(Toulon). Escadre de Méditerranée, puis sur le Courbet, cuirassé de 1er rang, 1er octobre 1891 (Toulon) au 22 novembre 1891 (Villefranche). Côtes françaises de la Méditerranée.

16 décembre 1891-16 juin 1893, nommé commandant (1er commandement) de la chaloupe-canonnière Javelot et la station navale de la Bidassoa à Hendaye.

1892 Hendaye . à bord du Javelot

1892 Hendaye . à bord du Javelot

Hendaye. 1892. Loti commandant du Javelot, stationnaire de la Bidassoa. Il pose avec son fils Samuel qui a deux ans.

Hendaye. 1892. Loti commandant du Javelot, stationnaire de la Bidassoa. Il pose avec son fils Samuel qui a deux ans.

1893 :

16 juin, quitte le commandement du Javelot.

Service à la préfecture maritime de Rochefort du 16 juin 1893 au 16 mai 1896. Affecté au service général de l’Etat-Major du 4ème arrondissement maritime à Rochefort. Durant cette période, congé de six mois, de janvier à juin 1894, pour accomplir un voyage en Terre Sainte.

1896 :

16 mai 1896 - 1er janvier 1898, nommé de nouveau commandant (2ème commandement) de la canonnière Javelot à Hendaye.

Ordre mission Cdt Javelot 1896

1897 :

Commande le Javelot jusqu’à la fin de l’année.

1898 :

Mis à la retraite d’office le 15 avril 1898 en raison du rajeunissement des cadres ; se bat pour être réintégré. 

16 avril, Officier de la Légion d’honneur.

1899 :

Décision de mise à la retraite annulée le 24 février 1899 par le Conseil d’Etat.

31 mars, réintégré et promu capitaine de frégate le 1er mai 1899.

1ier mai, promu Officier de la Légion d’honneur.

Juin 1899 – juillet 1890, mis à la disposition du ministre des Affaires étrangères.

Entreprend un voyage aux Indes et en Perse le 18 novembre 1899 jusqu’à juin 1900 pour une mission du ministère des Affaires étrangères.

vers 1900 en capitaine de Frégate et en officier de la Légion d'honneur

Vers 1900 en capitaine de Frégate et en officier de la Légion d’honneur

Le Sabre de Marine

1900 :

Nommé sur le cuirassé Redoutable (Cherbourg 1ier août – 14 mars 1902 Saigon). Participe à sa deuxième campagne en Extrême Orient comme aide de camp du vice-amiral Pottier commandant la Division navale d’Extrême-Orient. Guerre des Boxers en Chine, séjour au Japon, visite des ruines d’Angkor.

1900. En chine.

1900. En chine.

1901 :

Il participe à la campagne relative à la guerre des Boxers, mission à Pékin.

1901 en capitaine de frégate- Au Japon probablement, ou en Extrême-Orient.

1901 en capitaine de frégate. Au Japon probablement, ou en Extrême-Orient.

1902 :

Retour en France le 7 avril.

Congé de sept mois, mars-octobre 1902.

15 octobre, médaille de l’expédition de Chine.

23 octobre 1902 – 31 août 1903 : aide de camp de l’amiral Boué de Lapeyrère, major général du 4ème arrondissement de Rochefort.

1903 :

Puis, en Turquie, du 1er septembre 1903 au 10 mars 1905, Loti prend le commandement du Vautour aviso-torpilleur, premier stationnaire de l’ambassade de France à Constantinople.

Congé de convalescence de 6 mois.

signature capitaine de frégate J. Viaud - journal de bord du Vautour

Journal de bord du Vautour

 

Le Vautour (sur le balcon appartement de Pierre Loti)

Pierre Loti sur le balcon de son appartement à bord du Vautour

1904. Istanbul

1904. Istanbul

1905 :

30 mars, Loti quitte la Turquie.

1er novembre 1905 au 13 septembre 1906, commande le 4ème Dépôt des Equipages de la Flotte à Rochefort.

carte d'identitédu début 1906 ---mais la photo est antérieure...elle donne droit au tarif militaire sur les réseaux de chemins de fer français.

Carte d’identité du début 1906 (mais la photo est antérieure). Elle donne droit au tarif militaire sur les réseaux de chemins de fer français.

 

1906 :

2 août, promu capitaine de vaisseau à 56 ans. Affecté au Dépôt maritime de Rochefort.

1910. Rochefort. En capitaine de vaisseau et Grand croix de la Légion d'honneur..jpeg

Rochefort. En capitaine de vaisseau.

1907 :

Voyage en Egypte de janvier à mai 1907.

Août, mise en résidence conditionnelle du 1er août 1907 au 14 janvier 1910, puis admis à la retraite le 14 janvier 1910.

1909 :

Juillet, bref voyage officiel à Londres.

1910 :

14 janvier, le commandant Viaud est mis à la retraite après 42 ans, 3 mois et 13 jours de service dont 19 ans, 11 mois et 8 jours en mer. Nommé dans les cadres de la réserve en qualité de capitaine de vaisseau.

Il est fait commandeur de la Légion d’honneur le 1er août.

journal mise à la retraite LOTI

1910. Rochefort. En capitaine de vaisseau.

1910. Rochefort. En capitaine de vaisseau.

 

Pierre Loti décoré sur le Patrie 5 nov 1910

Remise des insignes de commandeur de la Légion d’honneur le 5 novembre 1910

 

Le Patrie (cuirassé)

Remise des insignes de commandeur de la Légion d’honneur le 5 novembre 1910 sur le cuirassé le Patrie

Loti reçoit les insignes de commandeur de l'ordre de la Légion d'honneur à bord du Patrie 5 nov 1910

1912 :

10 octobre, médaille commémorative de la campagne de guerre 1870-1871.

1914 :

Fait grand Officier de la légion d’honneur le 16 janvier.

Mobilisé du 3 au 31 août à Rochefort.

Renvoyé dans ses foyers le 1er septembre, il est sur sa demande, affecté le 25 septembre comme officier de liaison sans solde auprès du Général Gallieni à Paris.

1914-1918 en uniforme de fantassin.

1914-1918. En uniforme de fantassin.

1915 :

A l’Etat-major des armées de Champagne puis à celui du Général Gallieni, Gouverneur militaire de paris, le 1er février.

Mis à disposition du Ministre de la Guerre et affecté à l’Etat-Major du Groupe des Armées du Centre, le 30 septembre.

1916 :

Affecté à l’Etat-Major du Groupe des Armées de l’Est fin mai, dirigé à Mirecourt par le général Franchet d’Esperey.

1917 :

9 mai, affecté à l’Etat-Major du Groupe des Armées du Nord à Vic-sur-Aisne.

29 juin, baptême de l’air sur le front à Pierrefonds.

8-20 août, mission du Grand-Quartier Général italien (les Dolomites, Venise).

1918 :

Remis à la disposition de la Marine, le 9 mars.

15 mars, Loti est démobilisé.

Il est autorisé à être présent auprès de Franchet d’Esperey au G.A.N. à Avize.

Le 31 mai, il est évacué pour raison de santé.

28 juin, Loti reçoit la croix de guerre 1914-1918.

Citation Pétain 1918

1919 :

Le 11 novembre, atteint par la limite d’âge, il est rayé des cadres de l’armée.

1921 :

20 décembre, Grand-Croix de la Légion d’honneur.

1922 :

26 avril, l’amiral Lacaze lui remet l’insigne de Grand-Croix de la Légion d’honneur au nom de l’Instruction publique et des Beaux-Arts.

Pierre LOTI Grand-Croix de la Légion d'GHonneur

 

Pierre Loti – Portraits – Les fantaisies changeantes par Bruno VERCIER.
ouvrage publié avec le concours de l’association Vent d’Ouest – Poitou-Charentes
Flammarion, 2002, Paris

 

Editions illustrées…un article de Richard M. BERRONG

Editions illustrées 1Editions illustrées 2Editions illustrées 3Editions illustrées 4Editions illustrées 5Editions illustrées 6Editions illustrées 7Editions illustrées 8Editions illustrées 9Editions illustrées 10Editions illustrées 11Editions illustrées 12

 

 

 

 

 

 

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Pierre Loti,

l’écrivain et son double

( Livre )
Tallandier
2004

20 euros

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Première édition :

1998
Auteur :

Alain Buisine -


Une biographie dont l’intention est de rendre tout son romanesque à la vie de Pierre Loti, en choisissant des moments hauts en couleurs de son existence. Le côté exotique et oriental est ici nettement privilégié. Son œuvre, très largement diffusée, et sa vie singulière sont revisitées par Alain Buisine, avec une grande liberté de ton.

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Réception de M. Pierre Loti

M. Pierre Loti, ayant été élu par l’Académie française à la place vacante par la mort de M. Octave Feuillet, y est venu prendre séance le jeudi 7 avril 1892, et a prononcé le discours suivant :

    ______________________

Messieurs,

     J’étais loin de France, naviguant sur un des cuirassés de l’escadre et arrivé de la veille au port d’Alger, le jour où votre compagnie, Messieurs, me fit le grand honneur inattendu de me donner ici la place vide qu’Octave Feuillet avait laissée.

     Ce fut pour moi un inoubliable soir que celui du 21 mai 1891. L’élection avait eu lieu dans le jour,– et moi, par incrédulité absolue de ce grand triomphe, peut-être aussi par je ne sais quel tranquille fatalisme d’Oriental qui me reste au fond de l’âme, j’avais passé mon temps, l’esprit distrait et presque sans pensée, à errer tout en haut du vieil Alger, dans ces quartiers morts et ensevelis de chaux blanche qui entourent une mosquée antique et très sainte : un des lieux du monde où j’ai toujours rencontré le sentiment le plus intime, et aussi le plus calmé du néant des choses terrestres...

     Le soleil baissant, je redescendis vers le port, pour regagner mon navire où m’appelait un service de nuit ; avant de rentrer cependant, je voulus aller au bureau de la marine, où l’on porte les dépêches qui nous sont destinées, pensant bien que quelque ami aurait pris soin de me dire quel était l’élu nouveau et combien de vos voix, Messieurs, s’étaient égarées sur le marin errant que j’étais. – Alors, pour me faire conduire à ce quartier solitaire du vieux port où le bureau de la marine est établi, je pris une barque sur le quai, une lilliputienne barque, la seule qui se trouvait là, menée par deux rameurs comiques, que je vois encore, et qui étaient de tout petits enfants. – Il était déjà fermé, ce bureau, quand j’arrivai ; un matelot, qui montait la garde aux environs, après avoir trouvé à grand-peine une clef pour l’ouvrir, chercha, dans l’étagère des lettres, la case réservée à mon navire : elle était remplie d’un monceau de petits papiers bleus qui, depuis deux heures, n’avaient cessé d’arriver à mon adresse, – et, au lieu d’une dépêche que j’attendais, ce matelot, très étonné, m’en remit de quoi remplir mes deux mains.

     J’avais compris, avant même d’avoir déchiré la première. Et une sorte d’éblouissement me vint, qui était plutôt mélancolique et ressemblait presque à de l’effroi...

     Je remontai sans mot dire dans ma très petite barque à équipage d’enfants, qui en vérité était maintenant bien modeste pour porter ma fortune nouvelle, et tant que dura le trajet jusqu’à mon navire, tout en glissant sur I’eau tranquille, je déchirai un à un les papiers bleus, lisant de près, aux dernières lueurs rouges du jour, dans le beau crépuscule commençant, ces félicitations qui m’arrivaient de toutes parts, et où les mots joie, bonheur, revenaient toujours à côté du mot gloire. Dans ce calme du jour de printemps qui finissait, cet instant me semblait solennel – comme chaque fois qu’un grand pas vient d’être franchi dans la vie ; je sentais même une sorte d’angoisse étrange, comme si un manteau trop magnifique – mais en même temps trop lourd, trop immobilisant – eût été tout à coup jeté sur mes épaules. Et puis, je songeais à celui dont le départ m’avait ouvert ces portes, et qui précisément avait été, dans le monde des lettres, le premier déclaré de tous mes amis intellectuels ; il me semblait qu’en prenant sa place, je le plongeais plus avant dans la grande nuit où nous allons tous.

     Il fallut mon arrivée à bord, la bonne et franche joie du très charmant amiral qui nous commandait, la fête que me firent mes chers camarades du carré, pour me donner enfin à entendre que cette gloire un peu effrayante était vraiment une chose heureuse ; – et j’avoue, par exemple, que je finis très gaiement la soirée au milieu d’eux.

     A beaucoup de gens superficiels, il doit sembler que nous représentions, Octave Feuillet et moi, deux extrêmes, ne pouvant être aucunement rapprochés. Je crois au contraire qu’au fond notre conformité de goût était complète.

     Il est vrai, nous avons peint des scènes et des figures essentiellement différentes ; mais cela ne suffit point pour établir que nous n’avons pas aimé les mêmes choses, les mêmes compagnies, – les mêmes femmes. Bien loin de là, je pense que nous étions faits tous deux pour nous laisser charmer par les mêmes simplicités sauvages autant que par les mêmes élégances ; un commun dégoût nous unissait d’ailleurs contre tout ce qui est grossier ou seulement vulgaire – et peut-être aussi, il faut l’avouer, un commun éloignement trop dédaigneux, pas assez tolérant, à peine justifiable, pour ce qui tient le milieu de l’échelle humaine, pour les demi-éducations et les banalités bourgeoises.

     Je garde précieusement, comme d’un peu étranges reliques, des lettres de ce mondain exquis, me disant à quel point le berçaient ces récits lointains où n’apparaissent que mes matelots rudes et mes très petites amies à peine plus compliquées de civilisation que des gazelles ou des oiseaux.

     Quant à ses femmes à lui, marquises ou duchesses, – grandes dames toujours, et non par le titre seul, mais par la haute fierté de cœur et par l’affinement extrême, – de ce que, jamais encore, on ne les a vues passer dans mes livres, il serait bien inexact de conclure que je les méconnais et que leur charme m’échappe.

     Non, les milieux de prédilection d’Octave Feuillet étaient au contraire les miens. Et j’incline fort à penser que, si les hasards de la mer l’avaient mis comme moi en contact habituel avec les rudes et les simples, qui ont leur haute noblesse, eux aussi, et ne sont presque jamais vulgaires, il les aurait aimés.

     En notant ainsi nos tendances communes, j’ai l’impression que je me rapproche un peu à vos yeux de celui dont le départ m’a ouvert la porte de votre compagnie, Messieurs, et dont je suis encore confus d’occuper la place.

     Des différentes légendes, que mon constant éloignement a laissées se former autour de moi, et qui sont en général pour faire sourire, celle-ci par hasard s’est trouvée fondée : je ne lis jamais. C’est vrai ; par paresse d’esprit, par frayeur inexpliquée de la pensée écrite, par je ne sais quelle lassitude avant d’avoir commencé, je ne lis pas. Ce qui n’empêche que, si par hasard j’ai ouvert un livre, je suis très capable de me passionner pour lui, quand il en vaut la peine.

     Qu’on me pardonne mon insistance sur ce point ; elle est pour m’excuser d’avouer qu’avant mon élection à l’Académie française je ne connaissais d’Octave Feuillet que deux livres, lus dans mon extrême jeunesse, il y a quelque vingt ans. – Lus avec passion, par exemple, dans le calme des soirs en mer, à bord du premier navire qui m’emporta vers ces pays de soleil, rêvés depuis mon enfance. Ils s’intitulaient Sibylle et Julia de Trécœur.

     Des années encore passèrent. Et enfin, arriva pour moi l’instant, si imprévu et si singulièrement amené, où je livrai au public, sans oser d’abord les signer d’aucun nom, ces fragments du journal de ma vie intime qui ont été mes premiers livres.

     Au lendemain de l’apparition de ces œuvres de début, remplies de maladresses et d’inexpérience, je passais à Paris, entre deux longs voyages. Déjà très étonné, et un peu charmé aussi, d’apprendre qu’on m’avait lu, j’éprouvai une vraie surprise joyeuse quand, chez mon éditeur, on me remit une carte d’Octave Feuillet me disant sa curiosité de me connaître et me priant d’aller le voir.

     Je n’eus garde d’y manquer, et me rendis à l’appartement de la rue de Tournon qu’il occupait alors... En traversant, à la suite du domestique qui m’introduisait, deux ou trois salons sombres remplis de choses anciennes, – je me rappelle combien je me sentais intimidé de ma qualité nouvelle et inattendue d’auteur, au moment de comparaître devant lui.

     En ce temps-là, Octave Feuillet était déjà presque un vieillard, pour mes yeux de vingt-huit ans ; – vieillard séduisant s’il en fut, avec sa jolie figure distinguée, son fin sourire. Et je ne puis assez dire la simplicité, l’adorable bienveillance, la familiarité d’exquise compagnie, avec lesquelles ce maître accueillit le marin si obscur.

... Et je trouve bien particulier, bien étrange, de venir précisément ici prendre la place de celui qui m’avait le premier tendu la main, à mon arrivée, un peu brusque et imprévue, dans le monde des lettres !...

     Maintenant je voudrais dire, en quelques mots, très simplement, la vie d’Octave Feuillet.

     Et puis j’essaierai de dire aussi ma profonde admiration pour ses œuvres, sans employer pour cet éloge la langue consacrée de la critique – que je ne possède guère et que j’avoue ne pas aimer... Mais je me sens là bien au-dessous de ma tâche ; je suis inquiet, – en même temps que charmé avec tristesse, – du grand honneur qui me revient de parler de lui.

     Sa vie, toute d’honneur pur, de délicatesse rare, elle a coulé comme une belle eau limpide, jamais troublée, jamais effleurée même d’une souillure de surface. Je ne crois pas, cependant, qu’elle ait été une vie heureuse : les gens heureux n’écrivent pas d’aussi beaux livres que lui.

     Il avait du reste hérité de famille une nervosité extrême. Enfant, il était une petite sensitive, souffrant vaguement de tout, inquiet de l’inconnu de la vie et attaché étrangement à la vieille maison paternelle. Vers sa dixième année, la mort de sa mère causa un ébranlement si terrible à sa santé qu’on eut peur de le perdre, lui aussi.

     La première partie de son existence d’homme, passée dans l’antique hôtel familial de Saint-Lô, fut sombre, presque séquestrée, docilement soumise à la volonté d’un père despotique et triste. Il avait pour appartement un pavillon mélancolique, et ses fenêtres donnaient sur un jardin à l’abandon, où des statues couvertes de mousse verdissaient à l’ombre. C’est là qu’il écrivit ses premières œuvres à grand succès, obsédé par la continuelle frayeur de déplaire au vieillard qui régnait en maître à son logis.

     Plus tard, après la mort de ce père, si redouté et si aimé pourtant, qui avait jeté sur toute sa jeunesse une ombre oppressante, il put enfin arranger sa vie à sa guise et réaliser son désir le plus cher, en venant habiter ce Paris qu’il adorait. – Mais il resta découragé devant ses rêves accomplis. Ni la faveur des souverains d’alors, ni la liberté, ni la gloire, ne lui donnaient ce qu’il en avait attendu. Cette disposition d’âme à souffrir de tout, même du bonheur, qu’il a portée en lui jusqu’à son dernier jour, s’augmentait maintenant de la nostalgie du toit héréditaire et du lourd remords de l’avoir vendu. Et puis, ce surchauffage de Paris, – qui est capable, il est vrai, de faire éclore, chez des gens quelconques, des demi-talents très acceptables, ou, pour mieux dire, de surprenantes habiletés, – est plutôt nuisible pour ceux qui ont quelque charmant rêve à traduire, quelque plainte d’âme à communiquer à leurs frères, – ou seulement un cri sincère à jeter. Il ne fut pas long à s’en apercevoir. Il sentit aussi que le travail, au milieu des agitations mondaines, lui devenait bien plus difficile que jadis, là-bas, dans le silence du jardin paternel aux statues couvertes de mousse.

     Donc, il repartit pour Saint-Lô, ne se réservant à Paris qu’un pied-à-terre, qu’un gîte de passage. Et cette troisième période de sa vie fut la plus heureuse de toutes, la plus calme, la mieux combinée à son gré, la plus favorable au développement de son talent. Chaque année, quittant sa retraite de Normandie, il apparaissait pour quelques jours au milieu des éblouissements de Compiègne ou de Fontainebleau. Tous les hivers, il passait aussi deux ou trois mois à Paris, dans les milieux d’élégance vraie, regardant et écoutant les grandes dames de son temps, dont il est le seul à nous avoir peint les allures, le ton familier, les causeries discrètes ou le hautain persiflage, les silencieux héroïsmes ou les passions affinées et sourdement terribles.

     J’ai dit que, dans ces conditions nouvelles d’existence, il travaillait avec moins d’inquiétude que jadis ; mais je n’entends point par là qu’il travaillait avec confiance en lui-même. Je crois du reste qu’il a été un vrai martyr des lettres ; on ne trouverait sans doute pas un autre écrivain qui ait aimé son art avec tant de passion et qui en ait souffert aussi continuellement que lui. Cela paraît très invraisemblable, mais tous ses livres, qui, malgré des dénouements plutôt cruels, respirent une sorte de haute sérénité, de suprême aisance, avec, de temps en temps, de la gaieté de bon aloi et de l’ironie légère, – tous ses livres ont été écrits dans l’angoisse et dans la fièvre. Il était poursuivi par cette crainte obsédante de déchoir, que ne connaissent point les médiocres, en général contents d’eux-mêmes ; il se croyait toujours au-dessous de l’œuvre précédente et il lui arrivait de détruire désespérément, le lendemain, ce qu’il avait achevé la veillé.

     La phase la plus pénible de son travail était celle de la composition. C’est ici que celui qui parle devient plus incapable encore de bien comprendre et de bien juger. Et c’est ici surtout que nos différences s’accentuent, – car si nous avons plusieurs points communs dont je suis fier, nous avons aussi d’extrêmes dissemblances. Je n’ai jamais composé un roman, moi ; je n’ai jamais écrit que quand j’avais l’esprit hanté d’une chose, le cœur serré d’une souffrance, – et il y a toujours beaucoup trop de moi-même dans mes livres.

     Lui, au contraire, était personnellement absent de son œuvre. Alors, il lui fallait trouver la donnée d’un livre, mettre sur pied les personnages ; placer, dans le vide originel, chacune des scènes avec ordre, depuis celle du début jusqu’à celle du dénouement. Et tout ce travail, dont l’idée seule m’épouvante, était pour lui un long supplice, redouté et adoré quand même. C’était seulement lorsque se dessinaient bien, à ses yeux, ces personnages, créés de toute pièce par lui et auxquels il avait le magique talent de donner une vie si intense, qu’il commençait à respirer un peu et à moins souffrir. Et bientôt, ces figures, nées de lui, lui semblaient existantes tout à fait. Avec Mme Octave Feuillet, toujours intimement associée à ses travaux, il causait de ces charmants fantômes comme s’ils eussent été en chair et en os. Puis, quand le livre était achevé, quand il avait mis au bas le mot : « Fin », il éprouvait une impression d’abandon et de solitude ; – une impression de désespoir même, si le dénouement avait été cruel ; il versait de vraies larmes sur ces femmes de rêve qui, depuis tant de mois, faisaient partie de sa vie. Et alors, il lui arrivait de demander à Mme Feuillet, très affectueusement, avec beaucoup de sérieux et avec tout juste l’imperceptible et fin sourire qu’il fallait pour enlever à la question ce qu’elle aurait eu d’enfantin : « Tu n’en es pas jalouse au moins ? »

     Ses inquiétudes, après, quand l’œuvre était lancée, devenaient terribles. Pour un article méchant, pour une injure que lui jetait un journal, il lui venait des nuits d’insomnie, de véritables accès de fièvre ; il n’avait pas vis-à-vis de ces choses, l’insouciance qu’il faut.

     Dans toute existence humaine qui est un peu longue, qui n’est pas tranchée, brusquement, en pleine jeunesse, il y a presque toujours un apogée, une heure plus lumineuse, – et ensuite un triste déclin.

     Son heure rayonnante, à lui, fut celle où il vint s’installer, comme bibliothécaire, dans le beau pavillon de Diane, au palais de Fontainebleau.

     Mais cette sorte d’enchantement d’apothéose, qui était venu couronner sa carrière, fut de courte durée. La grande guerre éclata, balayant tout ce qui avait été la brillante cour, mettant partout du chaos, de la détresse et de la nuit.

     Il n’avait plus l’âge où l’on prend un fusil et où l’on marche. Alors son vrai devoir d’honneur était la fidélité à ces souverains, si effroyablement tombés, qui toujours l’avaient traité en ami et lui avaient fait partager leur instable fortune. Son dévouement à leur malheur devint pour lui une sorte de religion douloureuse.

     Des rancunes jalouses le poursuivirent ; il eut des déceptions, des revers.

     Sa santé aussi s’altérait de plus en plus, minée par des excès de travail et des tristesses. De précoces infirmités lui venaient... C’était bien la triste période assombrie, la descente inévitable sur le versant noir.

     En 1889, la mort de son fils aîné vint porter le dernier coup à ses forces, déjà si ébranlées. Et il le suivit de près, brisé plus vite par cette immense douleur ; en décembre 1890, il s’en alla lui aussi... Il avait trouvé le courage d’achever, pendant ses derniers jours, ses dernières heures, ce beau livre : Honneur d’artiste, qu’il appelait son chant du cygne.

     Et, très près de mourir, il avait dit ceci, qui est d’une mélancolie sans bornes : « Je n’écrirais plus quand même je vivrais. Je ne serais plus compris. Le réalisme ne veut plus de mon idéal. » Il s’en est allé avec cette erreur, pour lui si douloureuse, que son œuvre avait fait son temps et ne serait plus lue.

     J’affirmerai tout à l’heure, avec la plus intime conviction, avec l’assurance la plus absolue, – à défaut du talent qu’il faudrait pour le prouver, – j’affirmerai qu’il se trompait et que son œuvre durera. Et je veux dès maintenant dire ici que son idéal même ne lui nuira point, dans cet inquiétant avenir où l’on nous juge tous à notre valeur vraie. Le réalisme, et le naturalisme qui en est l’excès, je suis loin de contester leurs droits ; mais, comme de grands feux de paille impure qui s’allument, ils ont jeté une épaisse fumée par trop envahissante. La condamnation du naturalisme est, d’ailleurs, en ceci, c’est qu’il prend ses sujets uniquement dans cette lie du peuple des grandes villes où ses auteurs se complaisent. N’ayant jamais regardé que cette flaque de boue, qui est très spéciale et très restreinte, ils généralisent, sans mesure, les observations qu’ils y ont faites, – et, alors, ils se trompent outrageusement. Ces gens du monde qu’ils essaient de nous peindre, ou bien ces paysans, ces laboureurs, pareils tous à des gens que l’on prendrait dans des bals de Belleville, sont faux. Cette grossièreté absolue, ce cynisme qui raille tout, sont des phénomènes morbides, particuliers aux barrières parisiennes ; j’en ai la certitude, moi qui arrive du grand air du dehors. Et voilà pourquoi le naturalisme, tel qu’on l’entend aujourd’hui, est destiné, – malgré le monstrueux talent de quelques écrivains de cette école, – à passer, quand la curiosité malsaine qui le soutient se sera lassée.

     L’idéal, au contraire, est éternel ; il ne peut qu’être voilé, ou bien sommeiller momentanément, – et déjà, sur la fin de notre siècle, il est certain qu’il reparaît, avec le mysticisme son frère ; ils se réveillent ensemble, ces deux berceurs très doux de nos âmes ; ils ne sont plus tout à fait tels qu’autrefois, ils sont plus troublés, pris de vertige et ne sachant guère où se rattacher dans le désarroi de tout ; mais ils vivent toujours et on recommence à plus nettement les voir, derrière ce nuage de fumée du réalisme, qui s’est levé sur eux, des bas-fonds effroyables Il y a de nouveau beaucoup de gens qui volontiers se reposent en lisant un livre honnête où les mots ne sont pas grossiers, un livre où les personnages, enveloppés de je ne sais quelle poésie transcendante, expriment avec distinction des pensées très nobles, – un livre d’Octave Feuillet par exemple

     Le lendemain de mon élection à l’Académie française, dès le réveil, dès le retour du souvenir, l’inquiétude me vint de cet « éloge » qu’il est traditionnel de prononcer – et qui devrait toujours être raisonné, motivé d’une façon solide et savante, éclatant, décisif, irréfutable, puisqu’il semble, hélas ! qu’un plus grand et plus morne silence se fasse, après, sur celui qui s’en est allé.

     J’avais, dès cette première heure, conscience de mon incapacité certaine devant cette tâche ; je sentais cela si en dehors de ce que je puis faire ! – Et, pour tout dire, je m’effrayais aussi de connaître si peu l’œuvre d’Octave Feuillet ; je m’effrayais surtout de constater que mon admiration pour lui, examinée de près, avait en somme des raisons à peine sérieuses : quoi, en effet ? l’attrait supérieur, la distinction suprême de sa conversation et de sa personne ; l’allure exquise de cinq ou six petites lettres à moi adressées, – et le souvenir persistant de deux livres, Julia et Sibylle, lus jadis avec enthousiasme, mais lus à vingt ans... Mon Dieu, si en le lisant et en l’étudiant aujourd’hui, j’allais ne plus l’aimer !... Et si, pour écrire cet éloge imposé, la sincérité allait me faire défaut, que me resterait-il, à moi qui n’ai ni l’habileté ni l’expérience ?...

     Quelques jours plus tard, à la fin de ce même mois de mai, tous ses livres, mandés en hâte à Paris, m’arrivèrent, – vingt ou trente volumes dont les titres mêmes m’étaient pour la plupart inconnus... Anxieusement, je cherchai d’abord mes deux grandes amies d’autrefois, Julia et Sibylle ; vivraient-elles, à mes yeux, autant que jadis ; garderaient-elles leur charme encore ou bien l’auraient-elles perdu ?... Et en tremblant je commençai de relire.

     Je fus rassuré très vite : elles vivaient toujours, et d’une vie aussi intense ; leurs figures, un peu oubliées, me réapparaissaient aussi attirantes. Et, pour Julia que j’avais voulu revoir la première, je me rappelle que, ayant pris le livre le soir, je continuai de lire, malgré l’heure avancée de la nuit, et suivis la charmeuse dans sa course à la mort, jusqu’à cette fin admirable, haletante de vertige ; « La bête, sentant l’abîme, se déroba brusquement, et marqua un demi-cercle. La jeune femme, les cheveux dénoués, l’œil étincelant, la narine ouverte, la retourna, la fit reculer... Et le cheval, fumant, cabré, se levait presque droit et se dessinait de toute sa hauteur sur le ciel gris du matin... À la fin, il fut vaincu : ses pieds de derrière quittèrent le sol et rencontrèrent l’espace. Il se renversa et ses jambes de devant battirent l’air convulsivement. – L’instant d’après, la falaise était vide. Aucun bruit ne s’était fait. Dans ce profond abîme, la chute et la mort avaient été silencieuses. »

     Oh ! j’étais tranquillisé complètement. L’éloge d’Octave Feuillet, j’étais donc sûr maintenant de pouvoir le faire, de cette seule façon qui fût à ma portée, – c’est-à-dire en toute sincérité d’admiration, avec mon instinct et avec mon cœur.

     Ce serait peut-être une bonne fortune, pour un critique digne de ce nom qui aurait à se prononcer sur un écrivain, que de le lire pour la première fois d’un bout à l’autre, comme je l’ai fait, dans l’ordre même où ses livres ont été écrits, et de pouvoir suivre ainsi le développement de son talent, le dégagement progressif de sa personnalité s’il en a une – et de voir s’affirmer dans l’œuvre cette unité sans laquelle il n’y a ni grandeur ni durée.

     Je vais dire une chose qui paraîtra peut-être une énormité barbare : pour moi, les écrivains qui peuvent, à un moment donné, ne pas se ressembler à eux-mêmes, ceux par exemple qui peuvent écrire une pièce mystique après un poème athée, n’ont pas d’âme, ne sont que des amuseurs à gages. Les vrais poètes – dans le sens le plus libre et le plus général de ce mot – naissent avec deux ou trois chansons, qu’il leur faut à tout prix chanter, mais qui sont toujours les mêmes ; qu’importe, du reste, si chaque fois ils les chantent avec tout leur cœur !... Ceux qui en savent chanter davantage, les ont trouvées ailleurs qu’au fond de leur âme ; et alors elles ne font plus ni sourire ni pleurer... Tant de livres, dont l’habileté pourtant me confondait, m’ont lassé tout de suite ; il y avait de tout là dedans ; tel passage me rappelait je ne sais quel auteur, – et tel passage après, je ne sais quel autre. Les vrais écrivains n’ont qu’au début de légères variations de ce genre, sous l’influence des lectures premières ; ensuite ils se retrouvent eux-mêmes ; ils le deviennent de plus en plus, et restent ce qu’ils sont, sans souci des critiques, ni des insultes, – ni des modes qui changent, car il y a des modes à l’usage des écrivains de pacotille et de leurs lecteurs.

     Dans l’œuvre d’Octave Feuillet, la personnalité et l’unité sont deux essentielles et bien rares choses que je veux constater d’abord. C’est toujours lui, c’est de plus en plus lui qui écrit, et dont on sent vibrer 1’âme délicatement noble. Derrière la multiplicité des personnages, sous l’infinie et charmante diversité de tant de drames, la thèse soutenue, – car je suis forcé de reconnaître que les livres de Feuillet soutiennent une thèse, – la thèse aussi demeure constante.

     Les hommes à théories, – surtout ceux des couches nouvelles qui viennent au monde déjà tout bardés d’érudition, – longuement discutent avec gravité si le roman doit être romanesque ou documentaire, ou psychologique, ou je ne sais quoi encore ; s’il doit se borner au rôle d’amusette pour gens du monde, ou bien s’il lui est permis de soutenir quelque haute thèse de morale ou de philosophie Je suis forcé d’avouer que la portée un peu profonde de ces discussions m’échappe ; je les trouve même passablement vaines et puériles. Dans mon ingénuité de barbare éduqué en courant la mer, peu m’importe d’abord qu’un livre s’appelle roman ou s’intitule de tel autre nom qu’on voudra, – et la seule chose que je lui demande, c’est d’avoir la vie et d’avoir le charme.

     La vie et le charme... Octave Feuillet possédait le secret magique de les donner aux fantômes de son imagination. Ce secret-là, on n’arrive jamais à le posséder si, en naissant, on ne l’a reçu de quelque fée ; ce secret-là, pour un écrivain, est tout, et suffit d’ailleurs pour assurer à ses œuvres cette durée un peu longue qu’on est convenu d’appeler l’immortalité.

     La vie et le charme d’un livre ! parmi les choses indéfinissables ces deux-là sont au premier rang ; où résident-elles ? on n’en sait rien : on les constate sans les expliquer, on en subit l’entraînant sortilège, – et voilà tout.

     Ah ! il le possédait pleinement, ce secret de donner le charme et de donner la vie, lui qui savait nous faire pleurer et nous faire sourire. J’ai dit qu’il se laissait prendre lui-même aux airs de réalité qu’avaient ses personnages, qu’il s’attachait à leurs quasi-existences, au point d’éprouver, après chaque livre achevé, un instant d’étrange et imaginaire douleur, comme si des êtres chéris se fussent effondrés tout à coup, dans ce vide où ne venaient de tomber que ses propres chimères. Eh bien ! nous, en le lisant, nous subissons, jusqu’à l’illusion douce ou cruelle, tous ces mirages créés par lui et auxquels il se trompait lui-même.

     Nous parcourons toujours jusqu’au bout ses livres à lui, avec un intérêt grandissant – et une hâte involontaire, malgré les ravissants détails qui nous arrêtent en chemin et auxquels nous aimons ensuite revenir ; nous suivons toujours, et quelquefois avec des larmes, ses personnages, jusqu’au point final qui brusquement nous les replonge dans la nuit. Peut-être même les suivons-nous avec un intérêt qui pourrait être dangereux pour des têtes jeunes, lorsque ce sont de perverses charmeuses comme l’amante de M. de Camors, – ou surtout comme cette Julia de Trécœur, que je me souviens d’avoir quelque peu aimée d’amour, vers mes vingt ans.

     Lorsqu’un écrivain met son talent, ses dons rares au service d’une thèse morale qui lui tient au cœur, si, en outre, cette thèse est excellente et s’il trouve moyen de la défendre dans vingt volumes sans cesser un instant de charmer, il me paraît que cela crée pour lui une supériorité sur ceux qui charment peut-être mais qui ne prouvent rien ; – une supériorité, par exemple, sur celui qui parle en ce moment et qui, sans jamais essayer de rien conclure, n’a su que chanter son admiration épouvantée devant l’immensité changeante du monde, ou jeter son cri de révolte et de détresse devant la mort

     Et, ce qui est encore plus à la gloire d’Octave Feuillet, c’est que, cette thèse à laquelle il a consacré sa vie, il réussit à la prouver, au moins dans une surprenante mesure et autant qu’une chose de morale peut être prouvée, à notre époque où tout chancelle. Son long plaidoyer en faveur de la femme du monde, contre l’homme du monde son mari, arrive à nous convaincre sans que nous en ayons eu conscience, attendris ou amusés que nous étions, en l’écoutant, par quelque conte toujours délicieux.

     Dans Un mariage dans le monde, Mme de Loris écrit à M. de Rias : « Le mariage est une entreprise qui promet d’inestimables bénéfices ; mais il y a un cahier des charges. L’aviez-vous lu, Monsieur ? Je crains que non, car vous y auriez vu qu’une grande part de l’éducation de la femme revient à son mari ; que c’est à lui de modeler à son gré, de former suivant ses vœux, d’élever à la dignité de ses sentiments et de ses pensées, ce jeune cœur et ce jeune esprit qui ne demandent qu’à lui plaire ; vous y auriez vu qu’il est à la fois sage et charmant d’ajouter aux liens qui unissent une femme à son mari, ceux qui unissent l’élève à son maître, à son instituteur, à son guide, à son ami... » C’est la seule fois, il me semble, que Feuillet nous ait présenté tout cela sous cette petite forme de sermon ; mais il l’a prêché, de la façon la plus merveilleusement enveloppée, dans tous ses livres. – Qu’il me soit permis de dire qu’il l’a prêché aussi de son exemple en associant à tous les élans de son esprit la femme d’élite qui était la sienne.

     La conséquence naturelle, qu’il déduit lui-même de cette thèse, est la responsabilité du mari mondain dans les fautes de la femme qu’il n’a traitée qu’en objet de luxe et de passagère fantaisie, et quelquefois enfin le pardon, le pardon accordé à plein cœur, avec tendresse et avec larmes, – par ce mari qui, dans le fond, aime encore celle qui est tombée et ne se sent pas vis-à-vis d’elle la conscience bien en paix. – Mais, qu’on ne s’y méprenne pas cependant, ce pardon, dans les romans de Feuillet, est toujours un pardon in extremis si la faute a été consommée ; il n’est jamais suivi d’une reprise de la vie commune qui, après une telle déchéance de la femme, eût révolté son chevaleresque honneur. Ainsi Marcelle de Targy, pardonnée avec amour, meurt dans les bras de son mari en recevant le premier baiser de miséricorde. Ainsi Jacques Fabrice, après avoir pardonné à sa femme, s’en va, seul, errer dans le jardin sombre, hésitant, troublé – et finalement prend un revolver

     Ce plaidoyer continuel en faveur des femmes est sans doute un des motifs pour lesquels son œuvre a été tant aimé d’elles ; mais je ne crois pas que ce soit le seul, ni même, quoi qu’on en ait prétendu, le principal.

     Et il faut vraiment qu’ils aient été bien sérieux, leurs motifs, – car il les a malmenées comme personne. D’abord les quelques monstres qu’il lui a plu de créer sont toujours féminins. On peut répondre, il est vrai, que ces monstres sont des exceptions ; mais je trouve intéressant de citer ici quelques phrases cueillies au hasard dans ses livres, et qui s’adressent à la femme en général ; celle-ci, par exemple : « Les femmes ont des malices subtiles et profondes dont elles gardent le secret », ou bien cette autre : « Les femmes sont à l’aise dans la perfidie comme le serpent dans les broussailles, et elles s’y meuvent avec une souplesse tranquille que l’homme n’atteint jamais » ; ou encore ce portrait de la Parisienne qui, du reste, ne nous est nullement présenté comme une charge : « Dans cette étrange serre chaude de Paris, l’enfant est déjà une jeune fille, la jeune fille est une femme et la femme est un monstre. Elle se conduit quelquefois bien, quelquefois mal, sans grand goût pour l’un ni pour l’autre, parce qu’elle rêve quelque chose de mieux que le bien et de pire que le mal. Cette innocente n’est souvent séparée de la débauche que par un caprice et du crime que par une occasion. » Des réquisitoires de cette violence, on en trouve partout dans son œuvre, et il est manifeste que, d’une façon absolue, il considère les femmes comme inférieures à nous, – excepté, bien entendu, dans ces admirables mouvements d’abnégation et d’héroïsme où elles nous dépassent, il est le premier à le reconnaître.

     Mais il-y a pis encore de sa part, et les femmes du monde sont trop fines pour ne l’avoir pas senti ; c’est qu’il connaît à fond leurs manèges, petits tours, futilités, mièvreries, comédies et singeries, et qu’il les dévoile – et les immortalise Voici, par exemple, la douairière de Vergnes, venue avec sa petite-fille Sibylle faire visite à une ancienne amie et apprenant du concierge que cette dernière est morte depuis six semaines : « Ah ! mon ami, s’écrie-t-elle, qu’est-ce que vous me dites !... C’est vraiment inouï, ces choses-là ! Voilà la vie, ma chère enfant ! Eh bien, mon pauvre Jean, chez le pâtissier qui fait le coin de la rue Castiglione, vous savez ? »

     Réellement il faut tout admirer, dans ce court passage, qui est une merveille de niaiserie féminine et mondaine, l’exclamation du début, la petite réflexion philosophique à l’usage de Sibylle sur la fragilité de la vie, et, pour comble, ce : « mon pauvre Jean », ce ton, endeuillé du deuil de l’amie, que prend la douairière pour prier son cocher de la conduire chez le pâtissier de son choix. – Et l’œuvre de Feuillet en est remplie, de ces coups d’épingle, parmi lesquels j’ai choisi les moins sanglants

     Je crois qu’une des principales raisons pour lesquelles Octave Feuillet s’est vu pardonner tout cela par les femmes, c’est que, malgré tout, il les a faites irrésistiblement charmantes et que, dans ses livres, leur grâce demeure toujours souveraine.

     Et enfin, il y a cette raison encore, c’est que les femmes ont en général du goût, beaucoup plus de goût que nous n’en avons nous-mêmes. Si l’on écrit un livre d’histoire, de science ou de morale, c’est le jugement des hommes qui compte ; mais, pour un romancier, il me semble que l’admiration des femmes est plus désirable, parce qu’elles conservent généralement plus de délicatesse que les hommes, et qu’elles n’en ont jamais la grossièreté.

     Le Roman psychologique – je suis vraiment consterné d’avoir à prononcer ce mot pédant – a, lui aussi, de nos jours, mené grand bruit autour de sa personne et décrété, absolument du reste comme le Roman naturaliste, qu’en dehors de lui-même, rien ne valait Et pourtant, après les remarquables maîtres de cette école, dans quel indigeste pathos sont tombés les médiocres qui les ont suivis !

     De ce que les romans d’Octave Feuillet ne rentrent pas dans la catégorie étiquetée psychologique, il serait aussi enfantin de dire qu’ils ne contiennent point de psychologie, que de conclure qu’il n’y en a pas non plus dans les œuvres de Racine ou de Shakespeare, parce que ces écrivains n’ont pas intercalé dans le dialogue tragique de longues dissertations sur les états d’âme de leurs personnages.

     Les romans d’Octave Feuillet sont au contraire essentiellement des romans d’âme, de puissants romans d’âme ; ils le sont même presque uniquement, puisque la description, la mise en scène, y jouent un rôle si effacé. Ses moyens sont autres que ceux des auteurs dits : Psychologues et voilà tout. Les états d’âme de ses personnages, c’est le lecteur qui les dégage lui-même, et sans peine, je le déclare, des actes commis, des conversations échangées, quelquefois rien que d’une réplique brève, où d’un haussement d’épaules ou d’un demi-sourire.

     C’est le procédé du théâtre, et il semble étonnant à première vue que ses pièces n’aient pas eu un succès aussi éclatant et aussi durable que ses romans ; mais cela tient sans doute à ce que, dans ses drames, il reste toujours trop fin, trop délicat, pas assez soucieux de l’optique théâtrale ; aussi, bien qu’il ait eu le sens dramatique à un degré rare, ses pièces ne sont-elles plus guère jouées que devant des auditoires restreints et choisis.

     Elles vivront quand même, parce qu’elles seront toujours exquises à lire.

     En vérité, dans tout ce qui précède, j’ai la frayeur d’avoir, pour ceux qui ne le connaîtraient pas, donné l’idée d’un Feuillet presque monotone ; car j’ai dit deux choses qu’il faudrait pouvoir atténuer comme il convient : d’abord, qu’il se ressemblait toujours à lui-même, ensuite qu’il soutenait toujours sa même thèse immuable.

     Ce Feuillet-là serait pourtant bien loin du vrai, qui était infiniment divers. Son unité, qui consiste en un certain triage très exclusif des milieux et des sentiments qu’il aimait à peindre, – et surtout en une certaine très haute conception invariable de l’honneur, de l’amour et de la vie, – son unité, il l’enveloppe et la dissimule, comme sa thèse, sous les plus changeantes histoires ; alors, nous la constatons sans qu’elle nous gêne ; nous en prenons juste assez conscience pour avoir une foi sympathique en lui. Et puis, de temps à autre, il effleure d’un mot, d’une phrase profonde, mille choses qui semblaient tout à fait à côté de sa route habituelle ; alors nous sentons qu’en dehors de ses sujets préférés, il était capable de tout voir et de tout comprendre. Ainsi ces quelques lignes charmantes consacrées à ces maisons familiales que l’on ne conserve guère qu’en province : « C’est le vieux nid héréditaire, que les générations successives réparent mais ne changent pas. Quand on rentre, fatigué de la vie et désenchanté des passions, dans ces chers asiles, avec quel sentiment de paix et de bien-être on y respire les odeurs d’autrefois, avec quelle douce mélancolie on écoute les bruits familiers de la maison, ces voix mystérieuses, ces murmures, ces plaintes, qu’ont entendues nos ancêtres et que nos fils entendront après nous ! Il vous semble, au milieu de ces traditions continuées, que votre propre existence se prolonge dans le passé et dans l’avenir avec une sorte d’éternité. »

     Tandis qu’il chemine, tout le long de son œuvre, en compagnie constante de gens du monde, s’amusant lui-même de tout le factice de leur vie, il garde l’œil ouvert sur les abîmes réels, sur tous les abîmes humains, et, par instants il nous en donne la vision inattendue et le vertige, en quelques mots sobres qui ont des dessous infinis. Pour ne citer qu’un exemple, n’est-il pas étrange qu’elle soit de lui, cette sombre malédiction lancée par Philippe de Boisvilliers contre la jeune parente de province qui est sa fiancée depuis l’enfance : « C’est elle qui a prononcé dès le berceau l’arrêt de ma destinée : Tu vivras là et pas ailleurs Tu tourneras toute ta vie dans ce cercle fatal, et tu y tourneras avec moi, tu n’auras d’autre amour que moi, d’autre épouse que moi, – et mes goûts seront tes goûts, et ma chambre sera ta chambre – et ma tombe sera ta tombe ! » Je ne crois pas qu’on ait jamais su parler avec un plus glacial effroi du mariage sans amour, de la vie à deux, enchaînée irrévocablement, au fond de quelque coin de province

     Son style, je voudrais n’en presque rien dire. À mesure qu’on avance dans son œuvre, on le trouve de plus en plus simple, clarifié, bref, incisif. Il n’emploie d’ailleurs, et il faut lui en savoir gré, que des mots français, ces vieux mots français qui suffisaient si bien à nos pères pour tout dire. Mais il semble qu’il ait dédaigné le style en lui-même, qu’il ne l’ait considéré que comme moyen et qu’alors il l’ait asservi comme tel. Et, I’asservir ainsi, c’était le comble de l’habileté, chez lui qui ne décrit jamais, qui jamais ne s’attarde à se bercer avec des musiques de mots ; chez lui qui fait jaillir tout le charme de son œuvre uniquement de la conversation de ses personnages, du froissement de leur caractère, du choc de leurs volontés et de leurs passions. Je pense qu’on pourrait comparer son style à la toilette de ces femmes, dont l’élégance, bien qu’excessive, est tellement discrète qu’on la remarque à peine.

     Je crois que si Octave Feuillet pouvait m’entendre, il me saurait gré de ne parler qu’en dernier lieu de son esprit ; il devait le considérer comme secondaire, dans son œuvre dont la portée morale l’inquiétait avant tout. Et cependant, qui a été plus spirituel que lui ! Il a de l’esprit même entre les lignes, et du plus fin, et du plus inattendu. Je sais deux ou trois de ses livres qu’un lecteur, désireux de s’amuser seulement, pourrait parcourir à cet unique point de vue sans perdre sa peine.

     De temps à autre, il a des personnages qui sont, à eux seuls, des petites merveilles de comique contenu, latent, presque inexplicable. Ainsi, dans Un mariage dans le monde, nous apparaît cette comtesse Jules, une vieille cousine de province qui n’arrive au milieu de la famille qu’aux grandes circonstances, fait du crochet sans rien dire répond d’un simple signe de tête aux questions qu’on lui pose, – et trouve le moyen d’être impayable avec si peu. Une seule fois elle ouvre la bouche, – et c’est alors pour dire l’énormité la plus impossible à prévoir et la plus charmante ; comme elle passe pour un dragon d’austérité, on lui a confié la garde de deux fiancés, qui se marient demain et auxquels il s’agit d’éviter toute occasion de tête-à-tête ; quand la mère, au collet très monté, lui demande si elle accepte bien les responsabilités de cette surveillance, elle fait : oui d’un signe de tête solennel, et ne souffle mot tant que s’entendent les pas de la dame qui s’éloigne ; puis gravement prend la parole : « Mes enfants, dit-elle, dans le mariage, il n’y a que la veille de bonne, et je ne veux pas vous en priver. Allez dans le bois, vous promener tous deux, mes chers petits »

     Et tant de sous-entendus légers, de demi-mots strictement corrects, qui sont irrésistibles !

     On en rencontrerait à chaque page, de ces choses extra-spirituelles, qui insinuent tout, sans quitter le ton le plus élégant.

     En ce moment, il est de mode, pour les superficiels et les médiocres, d’attaquer cruellement l’œuvre d’Octave Feuillet, parce qu’elle a été presque souveraine – hier ! Rien n’est si comique, même, que ce dédain avec lequel parlent de lui certains petits jeunes gens, qui se croient des auteurs pour avoir publié deux ou trois saugrenuités inintelligibles, dans ces feuilles éphémères consacrées aux déliquescences cérébrales du jour.

     Un des reproches qu’on lui adresse, entre mille autres plus accablants, est celui d’avoir vieilli. C’est, en soi, le plus inique de tous les reproches, puisque tout passe ; et cependant c’est le seul que j’admette, au moins dans une certaine mesure.

Eh bien, oui, il y a là du vrai ; peut-être a-t-il un peu vieilli, par endroits, bien qu’il se soit efforcé, avec une habileté surprenante, de se soustraire à cette loi dont il semble avoir eu la frayeur anticipée. Il a évité avec soin tout ce qui, d’une façon ou d’une autre, pouvait donner une date à ses livres ; il n’a jamais dit un mot des actualités de son époque, il a osé à peine esquisser la mise en scène de ses drames, et je ne sache pas surtout qu’il ait jamais risqué la description d’une crinoline ou d’un corsage à la zouave, comme en portaient, je crois, les belles de son temps. Il a fait tout ce qu’il fallait pour que ses romans ne fussent que de purs romans d’âme, de passion éternelle et toujours jeune.

Et cependant, il a un peu vieilli. En y regardant de près, il me semble que c’est le langage de ses personnages qui, comme on dit, marque, insensiblement ; ses jeunes femmes s’expriment comme parlent aujourd’hui leurs mères ; pour être dans le ton du jour, il faudrait ajouter aux dialogues de Feuillet quelque chose que je ne sais comment nommer ici ; peut-être quelque chose que l’on prendrait – oh ! à très petite dose – chez ce moqueur, extra-spirituel aussi, et en avance sur son siècle, qui s’appelle Gyp

     Mais cette concession hésitante est la seule que je fasse à ceux qui le dénigrent, et j’ajoute qu’elle n’inquiète en rien mon affectueuse et complète admiration pour lui : les plus belles choses d’hier tombent toujours dans une défaveur momentanée ; mais elles reprennent leur charme ensuite, dès que ce hier, qui fait si vite, commence un peu à devenir le passé

     Et maintenant j’ai dit de mon mieux ce que je pensais de son œuvre, et je m’effraie de l’avoir dit si imparfaitement.

     Et je songe avec mélancolie à ce plus grand silence qui va se faire inévitablement sur lui, à la fin de cette journée, jusqu’au jugement de l’avenir Oh ! je n’entends pas par ce mot l’avenir très lointain : qui ose y songer, à celui-là ; c’était bon aux œuvres antiques de traverser les immenses durées ; mais nos œuvres modernes seront toutes emportées vite

Non, j’entends seulement l’avenir très voisin, celui de demain qui arrive, le siècle prochain et voilà tout. Ce mystérieux XXe siècle va bientôt regarder dans le nôtre, pour y rechercher ce qu’il a eu d’un peu grand. Toute notre littérature, pour laquelle nous nous disputons si fort, va passer à ce crible des années, qui laisse tomber dans le vide sans fond les petites choses, la profusion des œuvres impersonnelles, banales, creuses, boursouflées d’habileté seule, pour ne retenir que celles qui valent

Eh bien, dans le crible, resteront ses œuvres à lui, parce qu’elles ont précisément cette profondeur que d’aucuns leur contestent ; parce qu’elles sont toutes vibrantes d’âme ; parce qu’elles sont pleines de vie, d’esprit et de charme ; peut-être aussi, je me plais à l’espérer, parce qu’elles sont pleines d’honnêteté et d’idéal

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Le dessinateur et le photographe

PIERRE LOTI DESSINATEUR, Chronologie

Par Solange Thierry, Commissaire invitée

PIERRE LOTI Fantômes d’Orient, ouvrage publié par PARIS MUSEES pour le Musée de la Vie romantique, Hôtel Scheffer-Renan, 16 rue Chaptal – 75009 Paris.

 

1861

dessin J.Viaud E 1861-p21

Julien Viaud – Figures fantastiques [vers 1861], plume, encre de Chine et aquarelle, 15 x 18 cm. Au verso : vignette : « HONNI SOIT QUI MAL Y PENSE », « DIEU EST MON DROIT » et « SUPERIOR COURT PLAISTER PATRONIZED BY HER MAJESTY THE QUEEN. LONDON », Figures et annotation : La vie. Collection, François Fabius. Paris.

Agé de 11 ans, Julien Viaud commence l’œuvre majeure de son enfance, son petit Théâtre de Peau d’Ane, composé de figurines miniatures. Il réalise plusieurs dessins représentant des diablotins et des personnages fantastiques.

5 octobre 1869

Embarque à Brest sur le Jean-Bart, vaisseau-école à hélice.

Méditerranée : Mers el-Kébir, Oran, Alger, Malaga, Syracuse, Smyrne (février 1870), Marmaris, Port-Saïd, l’île de Malte, Mers el-Kébir, Las Palmas ; traversée de l’Atlantique ; Brésil (Bahia) ; Newport ; Halifax (Nouvelle-Ecosse, Canada) (9-13 juillet) ; retour à Cherbourg le 8 août 1870.

JV-Wigwams Canada 1870-p161

Canada 1870 – Julien Viaud – Wigwams de Peaux-Rouges. Halifax, Nouvelle-Ecosse, crayon, 22,5 x 41 cm . Annoté en bas au centre : Wigwams Canada 12 juillet 1870/tribu des mics-macs. Bibliographie : Genet & Hervé, p. 89 ; Quella-Villéger, ill. 7. Collection particulière.

Caravansérail JV1870-Marmaris p117

Julien Viaud, Caravansérail, 1870. Probablement Marmaris où le Jean Bart fait escale du 28 février au 6 mars 1870. Crayon noir, 19,5 x 29,5 cm. Titré en bas au centre : Caravansérail de Marmar. Bibliographie : Genet & hervé, p. 87. Collection particulière.

 

15 mars 1871

Embarque à Lorient pour l’Amérique du Sud sur le Vaudreuil, aviso à hélice : Lisbonne, îles Canaries, Dakar, îles du Salut (Guyane), Bahia, Montevideo, détroit de Magellan, Terre de Feu, Valparaiso (11 octobre 1871).

JV Diop-Dakar 71-72-p116

Julien Viaud, Mahomed Diop roi de Dakar, 1871-1872. Aquarelle, gouache blanche et rehauts de crayon, 23,7 x 15,8 cm. Annoté sur le support, sans doute en 1873, en bas au centre : Mahommed Diop roi de Dakar, mort le 16 février 73 (102 ans) juillet 71. Bibliographie : Farrère, p. 21. Collection particulière.

JV-Sorciers-Dakar-1871-p121

Julien Viaud, Les Sorciers (Dakar), 1871.. Aquarelle, 22 x 30,5 cm. Annoté en bas sur le support : mardi 13 juin 1871 – 5h du soir – Dakar (sorciers). Bibliographie : Farrère, p. 19. Maison de Pierre Loti, Rochefort (Inv. 998.1.1).

 

JV-Mosquée-Dakar-1872-p121

Julien Viaud, La Mosquée de Dakar, 1872. Pierre noire, 22,8 x 29,1 cm. Signé en bas à droite : J. Viaud. Daté et titré en bas au centre : La mosquée de Dakar 1872. Annoté en bas à droite par une main étrangère (?) : ou 1871 dates erronées (73 – 74). Bibliographie Farrère, p. 97. Maison de Pierre Loti, Rochefort (Inv. MPL. D 88).

JV-Femmes-Gorée-1872-p122

Julien Viaud, Femmes, Île de Gorée, 1872. Aquarelle et gouache, 20,8 x 19,2 cm. Daté et titré sur le support en bas au centre : Femmes de Gorée (juillet 72). Probablement postdaté, car l’escale à Dakar se situe au printemps 1871 ; mais A. Quella-Villéger cite Gorée comme escale du Pétrel, navire sur lequel sert Julien Viaud lors de son séjour au Sénégal en 1873. Maison de Pierre Loti, Rochefort (inv. MPL. D 90).

JV-scène indigène-1871-p122

Julien Viaud, Scène indigène, Terre Guillaume IV, 1871. Aujourd’hui Isla Riesco faisant partie de la région Magallanes et Antarctique chilienne, la plus méridionale du pays, située en face du territoire de l’Antarctique. Crayon 31 x 22,2 cm. Annoté en bas au centre : Déjeuner d’indigènes/un matin d’hiver, sous-bois – 1871/(Terre Guillaume IV). Bibliographie : Farrère, p. 29. Collection particulière.

JV-Terre Feu-1871-p123

Julien Viaud, Terre de Feu, 1871. Crayon sur papier vergé, 21,5 x 16.5 cm. Titré en bas : Terre de feu. Collection particulière.

JV-Ile désolation-1871-p123

Julien Viaud, Île de la Désolation. 1871. Une des deux plus grandes îles à l’ouest de l’archipel de la Terre de Feu. Aujourd’hui Isla Desolacion faisant partie de la région Magallanes et Antarctique chilienne, la plus méridionale du pays, située en face du territoire de l’Antarctique. Crayon 18,2 x 31 cm. Daté et titré en bas au centre : Terre de la désolation Septembre 71. Bibliographie : Claude Farrère, p. 27. Collection particulière.

19 décembre 1871

Embarque à Valparaiso sur La Flore, frégate mixte : île de Pâques, îles Marquises (19 au 24 janvier 1872), Tahiti (29 janvier-23 mars 1872), île de Moorea (27-29 février 1872), Honolulu, San Francisco, Tahiti, Valparaiso, Montevideo, Rio de Janeiro, Brest (4 décembre 1872).

JV chambre Flore lit-1872-p120

La Flore, 1872. Julien Viaud. La chambre de bord de Julien Viaud sur la Flore, côté lit, mine de plomb, 20 x 26 cm. Annoté en bas à droite au recto : 217. Historique : achat en 1982. Bibliographie : Farrère, p. 52 ; Genet & Hervé, p. 100. Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse (Inv. MHNT ETH OC 981 1 1).

JV chambre Flore bureau-1872-p120

Julien Viaud – La Chambre de bord de Julien Viaud sur la Flore, côté bureau, mine de plomb, 20 x 25 cm. Annoté en bas à droite au recto : 218. Historique : achat en 1982. Bibliographie : Claude Farrère, p. 53. Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse (Inv. MHNTETH OC 981 12).

JV-Tatouage chefesse Pâques-1871-p111

Julien Viaud – Tatouage de cheffesse, encre de Chine, 19,5 x 11,2 cm. Annoté en bas à droite : tatouage de chefesse/Ile de Pâques. Bibliographie : Farrère, p. 49 ; Genet & Hervé, p. 105. Collection particulière.

Moai-1871-p117

Julien Viaud – Moai, encre de Chine, 20,2 x 21,5 cm. Signé en bas à gauche en biais le long du moai : Julien Viaud. Annoté en bas : Statue dont la Flore rapporte la tête. L’artiste a fait deux croquis, de face et de profil, en indiquant les dimensions : 4 m de haut, 1,50 m de large et 0,70 m de profondeur. Bibliographie : Farrère, p. 38. Collection particulière.

JV-Moai-Pâques-1871-p124

Julien Viaud – Moai, Ile de Pâques, Volcan Rano Raraku, crayon noir, 21 x 31,5 cm. Signé en bas au milieu : J. Viaud. Annoté en bas à droite : bustes placés sur/le versant S.E. du volcan Ronororaka/(Hutuiti – île de Pâques). Musée national de la marine, Paris(Inv. 31 OA 138).

JV-Volcan-Pâques-1871-p124

Julien Viaud – Ile de Pâques, volcan Rano Raraku, crayon , 27 x 37,9 cm. Signé en bas à droite : J. Viaud. Annoté en bas à droite : statues situées sur le versant du volcan Ronororaku (Hutuiti – île de Pâques) et en bas au centre : dimension de la statue A/Hauteur du sommet de la tête au-dessus du sol …5m 55/Du sol au menton – 1m 70/Longueur de la tête…1.85/Largeur du dos…2.10/(on n’a pas pu savoir à quelle profondeur la base de la statue est enfoncée). Bibliographie : Farrère, p. 40 ; Genet & Hervé, p. 106. Collection particulière.

JV-Idoles-Pâques-1872-p124

Julien Viaud – Ile de Pâques, idoles, lavis d’aquarelle et encre de Chine, 22,5 x 15,7 cm. Signé en bas à gauche : J.V. Annot en bas au centre : Ile de Pâques/Janvier 72 – (idoles). Bibliographie : Farrère, p. 43 ; Genet & Hervé, p. 107. Collection particulière.

JV-île Pâques 1872-p125

Ile de Pâques-Rapa Nui, 4-7 janvier 1871. Julien Viaud – Ile de Pâques (1872), crayon , aquarelle et encre, 35 x 22.5 cm. Dédicacé et signé en bas à droite : à Madame Sarah Bernhardt/Pierre (J. Viaud). Annoté en bas : L’île de Pâques 7 janvier 72, vers 5h du matin/(gens du pays me regardant arriver). Bibliographie : Farrère, p. 35 ; Genet & Hervé, p. 102. Collection particulière.

JV-transcription tablette-p162

Julien Viaud – Transcription d’une tablette. Encre de Chine, 22,2 x 14 cm. Annoté en haut sur le support : Imitation d’une tablette – écriture de l’Ile de Pâques. Constitue le premier feuillet du manuscrit du Journal de bord où Julien Viaud relate les évènements des quatre jours passés sur l’île. Collection particulière.

JV-chef Taïoa-1872-p111

Julien Viaud – Le Chef des Taïoa, baie Tchikakof, crayon 19,6 x 15 cm. Annoté en bas au centre : Le chef des Taïoa/la baie Tchichagov (îles marquises). Bibliographie : Genet& er Hervé, p. 81. Collection particulière.

Vaékéhu 1872 JV-p119

Julien Viaud – La Reine Vaékéhu et son fils, crayon, 20 x 32 cm. Monogrammé en bas à gauche : J. V. Annoté en bas au centre : La reine Vaékéhu et son fils/les suivantes Elisabeth et Atéria, devant/devant leur case (janv. 72)/Iles Marquises. Bibliographie : Farrère p. 67. Collection particulière.

JV-Nuku-Hiva-1872-p126

Julien Viaud – Nuku-Hiva [la plus grande île de l'archipel], crayon gras, 49 x 26 cm. Titré en bas au centre : Nuku-Hiva. Collection particulière.

JV-Cascade Fautana-1872-p160

Julien Viaud – Cascade de la Fautaua, aquarelle et gouache, 46 x 28,5 cm. Bibliographie : Farrère, p. 77 ; Genet & Hervé, p. 115, Quella-Villéger, ill. 9. Maison de Pierre Loti, Rochefort (Inv. MDL. D 87).

JV-route Faa-1872-p163

Julien Viaud – Route de Faa, crayon, 25 x 29,7 cm. Titré en bas à droite : Route de Faa/Tahiti. Dans une lettre datée de Tahiti, juillet 1872, Julien Viaud/Pierre Loti écrit : « je voudrais, avant de partir, revoir une dernière fois Foa, les hauts cocotiers et la plage de corail. » Bibliographie : Farrère, p. 58. Collection particulière.

 

JV-tahiti-Afareaitu-1872-p162

Tahiti, 29 janvier-23 mars1872. Julien Viaud – Vue d’Afareaitu [île de Moorea, 27-29 février], crayon et crayon gras, 18,9 x 30,4 cm. Titré et daté en bas au centre : District d’Afareahitu / île de Moorea – Polynésie / (février 72). Bibliographie : Farrère, p. 73. Maison de Pierre Loti, Rochefort (Inv. MPL. D 86).

JV-Geysers soufre-1872-p127

Californie 1872 – Julien Viaud – Geysers de soufre à Calistoga [Napa Valley], fusain à l’estompe et pierre noire, 20 x 15,5 cm. Annoté en bas : Calistoga (Californie) – mai 1872 / (Geysers de soufre. Montagnes rocheuses). Collection particulière.

 

1er au 21 septembre 1873

Rejoint Dakar sur L’Entreprenante, frégate.

21 septembre 1873

Embarque à Dakar sur le Pétrel, aviso à roues, Dakar, Gorée, Saint-Louis du Sénégal, côtes du Sénégal jusqu’en Guinée.

Marais-Cap-Vert JV 1873-p118

Côtes sénégalaises, 1873-1874 – Julien Viaud – Marais près du Cap-Vert, aquarelle 14,5 x 29 cm. Titré et daté en bas au centre : dans les marais aux environs du Cap Verd décembre 73. Bibliographie : Farrère, p. 103 ; Genet & Hervé, p. 137 ; Quella-Villéger, ill. 12. Collection particulière.

JV-pirogues Dakar-1874-p128

Julien Viaud – Pirogues au large de Dakar, crayon, 28,8 x 21,7 cm. Signé en bas à droite : J. Viaud. Annoté en bas au centre : Dakar avr.1874 / pirogues dans la baie. Bibliographie : Farrère, p. 91 ; Lussan, rep. ; Quella-Villéger ill. 13. Collection particulière.

JV-Boffa-1874-p128

Julien Viaud – Boffa [Guinée], crayon 21,2 x 29 cm. Daté et titré en bas au centre : Village de Boffa (rio congo) / 1874. Bibliographie : Farrère, p. 115. Collection particulière.

19 juillet 1874

Embarque à Saint-Louis du Sénégal sur L’Espadon, retour en France le 30 août 1874.

1er mars 1876

Embarque à Toulon sur La Couronne, frégate cuirassée. Arrive à Salonique après l’assassinat des consuls de France et d’Allemagne le 8 mai 1876.

Le 30 mai 1876, le sultan Abdul-Aziz est déposé et remplacé par Murad V. La guerre de la Turquie contre la Serbie et le Monténégro en juillet est suivie en août par la déposition de Murad V et l’avènement d’Abdul-Hamid II. En octobre, un armistice est signé avec la Serbie vaincue.

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Julien Viaud – Illumination de la grande place d’Istanbul, lavis avec rehauts de craie blanche, 26 x 46,5 cm. Titré en haut :  » 7-zi-il-hiddje 1293″. Annoté en bas : Illumination de la grande place de Stamboul (place du Siéraskérat) dans la nuit 7-zi-il-hiddje 1293 (23 déc. 76). Collection particulière.Dans une lettre adressée à sa sœur Marie Bon, datée du 29 août 1876, l’écrivain note : « [...] le Séraskiérat, il se passe en ce moment une mystérieuse comédie : les grands pachas y sont réunis pour déposer le sultan Mourad et lui substituer un autre bonhomme qui s’appelle Abdul-Hamid ».

1er août 1876

Julien Viaud quitte Salonique sur un paquebot des Messageries maritimes pour embarquer à Istanbul sur Le Gladiateur, canonnière de flottille qui effectue des navettes sur le Bosphore (détroit entre les côtes européenne et asiatique de la Turquie, reliant la mer Noire et la mer de Marmara). Il quitte la Turquie le 18 mars 1877.

1er avril 1880

Embarque à Toulon sur le cuirassé Friedland pour rejoindre, en mer Adriatique, l’escadre internationale des Puissances alliées (Angleterre, France, Italie, Russie, Autriche, Prusse) chargée d’intervenir dans le conflit opposant les Monténégrins aux turcs qui refusent, malgré les décisions du congrès de Berlin (juin-juillet 1878), de rendre la ville côtière d’Ulcinj sur la mer Adriatique. L’escadre française retourne en France le 3 décembre 1880 ; à la fin de cette même année, en rade de Toulon, un incendie se déclare sur le Richelieu.

 

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Monténégro, 1880 – Julien Viaud – L’Escadre internationale aux Bouches de Kotor [Cattaro en italien], crayon noir, 37,5 x 45,5 cm. Annoté en bas au centre : L’escadre internationale ayant pris ses quartiers d’hiver aux Bouches de Cattaro le 5 octobre. Dans un bandeau en bas du dessin, l’artiste a indiqué les noms des navires formant l’escadre internationale, de gauche à droite : Alexandre (amiral Seymour), Téméraire (anglais), Suffren (amiral français), Friedland (français), Palestro (italien), Roma (italien), le Svetlana (amiral russe), Tyemchouk (russe), Prince-Eugène (autrichien), Victoria (prussien). Musée national de la marine, Paris (Inv. 31 OA 137).

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Toulon, 1880 – Julien Viaud – La Catastrophe du Richelieu, crayon gras et rehauts d’encre de Chine, 27 x 36 cm. Titré en bas à gauche : La Catastrophe du Richelieu. Annoté en bas : Le vaisseau Richelieu couché sur le flanc droit (côté tribord). Collection particulière. Après la démonstration internationale dans l’Adriatique, l’escadre française revient à Toulon le 3 décembre 1880. A bord du Friedland, l’écrivain note dans son journal intime en date du 28 décembre : « cette nuit, grande lueur rouge dans le port, tocsin, coup de canon. C’est un incendie : armé les embarcations et les pompes [...] A trois heures, une immense gerbe de flammes s’élève dans le ciel, suivie d’un bruit lointain et sourd, de quelque chose comme un grand effondrement et puis cela paraît se calmer. » En date du mercredi 29 décembre, il poursuit : « C’était le Richelieu qui avait pris feu cette nuit [...] il était couché sur le flanc. Le vaisseau est perdu [...] Quand le Richelieu s’est affaissé d’un seul coup, ses énormes canons sont tombés à la mer, démolissant tout sur leur passage [...]. » Contrairement à ce que pensait l’auteur, le navire a été renfloué grâce à la procédure suivie par l’ingénieur Cousin et restera en service jusqu’en 1902.

 

 

3 juillet 1882

Embarque sur La Surveillante, frégate cuirassée, et navigue le long des côtes de la Manche jusqu’au 17 décembre 1882. Il fait à bord la connaissance des marins bretons Guillaume Floury et son cousin Sylvestre et le marin représenté ici dans différentes attitudes est Guillaume Floury. Il servira de modèle pour Yann, le personnage central de Pêcheur d’Islande (1886).

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Bretagne 1882 – Pierre Loti – Cinq Etudes de marin. Mine de plomb sur papier beige, 23 x 36 cm. Signé sur le support P.L. Annoté en bas sur le support : C’est le vrai « Yann » qui a posé tous ces bonshommes, du temps qu’il était canonnier / de la Flotte. Je n’avais pas du tout cherché la ressemblance. Mais le n° 2 est par hasard / d’une exactitude absolue. Cette tête n° 2 pourrait servir, posé ainsi, pour le dessin de la / demande en mariage – qui est une des scènes capitales du roman / P.L. Bibliographie : Farrère, p. 199 ; Genet & Hervé, p. 201. Maison de Pierre Loti, Rochefort (Inv. MPL. D 91).

22 mai 1883

Embarque pour l’Extrême-Orient à Brest sur L’Atalante, corvette cuirassée, via Port Saïd, le canal de Suez (inauguré en 1869), la mer Rouge, Aden, Ceylan, Singapour et l’Indochine. L’Atalante participe à l’expédition militaire, confiée au contre-amiral Courbet, contre l’empereur Tu-Duc, dont le palais est à Hué. Pierre Loti se rend à Tourane, non loin de Hué (aujourd’hui Da-Nang). En novembre 1883, Loti découvre la Montagne de Marbre et ses hautes cavernes aménagées en pagodes souterraines et décrit cette visite dans Pagodes souterraines in Propos d’exil (1887). Pour rentrer en France, il embarque à Tourane le 16 décembre 1883 sur La Corrèze pour arriver à Toulon le 2 février 1884.

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Extrême-Orient, 1883-1886. PIERRE LOTI – Pagode souterraine de la Montagne de Marbre près du Da Nang [ Centre Vietnam, proche de Hué, 1883 ], crayon avec rehauts de craie blanche, 31,4 x 17 cm. Annoté en bas au centre : Pagodes souterraines. Annoté en bas à droite par une main étrangère (?) : Annam. Bibliographie : Farrère, p. 179 ; Genet & Hervé, p. 225 ; Lussan , rep. Collection particulière.

20 mars 1885

Embarque à Toulon comme passager sur le Mytho, pour Saigon rejoindre l’escadre de l’amiral Courbet. Retrouve le 27 avril à Saigon le château Yquem pour traverser la mer de Chine jusqu’à Makung (îles Pescadores, dépendance de Taïwan). Embarque le 4 mai sur La Triomphante pour la campagne de Chine. Cette campagne le conduit au Japon, notamment au port de Nagasaki.

 

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PIERRE LOTI – Sur la Triomphante [ 1885-1886], crayon 21,2 x 29 cm. Annoté en bas à droite : Matelots de la Triomphante. Bibliographie : Genet & Hervé, p. 221. Collection particulière.

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PIERRE LOTI – Temple de Taki-no-Kannon près de Nagasaki [Japon, 1885], crayon avec rehauts d’encre de Chine, 33 x 21,6 cm. Annoté et daté en bas au centre sur le support : 9 août 85, 5 h du soir. Annoté en bas à droite par une main étrangère (?) : Japon. Bibliographie : Farrère, p. 183 ; Genet & Hervé, p. 225 ; Lussan, rep. Collection particulière.

 

16 mai 1891 – 16 juin 1893

Nommé commandant du Javelot, canonnière stationnant à l’embouchure de la Bidassoa à Hendaye.

16 mai 1896-1er janvier 1898

Nommé une deuxième fois commandant du Javelot à Hendaye. Pendant son séjour, il loue, avant de l’acheter en 1904, une maison située au fond de la Bidassoa, en face de Fontarabie : Bakhar Etchea [la Maison du Solitaire].

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Pays basque, vers 1891 – PIERRE LOTI – Fontarabie vue depuis la maison de l’artiste : Bakhar Etchea (la Maison du Solitaire), encre de Chine sur traits de crayon, 22 x 31,7 cm. Annoté en haut à gauche par une main étrangère (?) : Fontarabie. Bibliographie : Lussan, rep. Collection particulière.

 

Auteur : Solange Thierry, ancien rédacteur en chef du magazine L’OEIL, a été commissaire au musée de la Vie romantique des expositions André Malraux et de la modernité (2001) et La famille RouartAu cœur de l’Impressionnisme (2004).

 

 

 

 

 

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« J’ai une secrète méfiance à l’égard de ceux qui n’aiment pas Loti ; j’ai peur qu’ils ne soient pas complètement humains. »*

Ces textes sont extraits de l’ouvrage « Pierre LOTI – le pèlerin de la planète » d’Alain Quella-Villéger (éditions Aubéron – 1998).

En cliquant sur les liens, les auteurs vous seront présentés. 

 

* C’est en 1927 l’avis péremptoire de l’écrivain Edmond Jaloux. http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/edmond-jaloux

Auparavant, en 1892, Frédéric Mistral – https://fr.wikipedia.org/wiki/Frédéric_Mistral - s’émerveilla : « Cette fin de siècle a vu, sur les fumées de son matérialisme, passer une âme lumineuse. »

Marcel Proust récite par cœur des pages de Loti - https://fr.wikipedia.org/wiki/Marcel_Proust. L’éminent critique Jules Lemaître s’extasie : « Les plus grands chefs-d’œuvre de la littérature ne m’ont troublé ainsi. » http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/jules-lemaitre

Henry James, qui juge « parfait » Pêcheur d’Islande, préface avec délectation la traduction américaine de Figures et choses qui passaient. https://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_James

Anna de Noailles s’émeut : « Ce merveilleux poète […] n’a jamais cessé de m’enivrer par ses livres immortels.» https://fr.wikipedia.org/wiki/Anna_de_Noailles

Et le fantasque et moderne Raymond Roussel n’y va pas par quatre chemins : « Je suis pour les pages de Loti comme les morphinomanes pour la morphine, il me faut chaque jour ma ration de pages de Loti ! » https://fr.wikipedia.org/wiki/Raymond_Roussel

Julien Green s’est, pour sa part, étonné : « Il y a derrière ces livres le vide qu’il y a dans le ciel, mais c’est par là qu’il est unique. Il s’est mêlé aux éléments : c’est l’air, la pluie, c’est la terre qui parlent.» http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/julien-green

 …l’œuvre de Loti est aujourd’hui lue, appréciée. L’exotisme de Loti ne sent pas le renfermé ; ouvert au monde, aux idées, aux libertés : « C’est un auteur à la croisée des chemins, témoin d’un monde qui va finir, sentant cette fin par toutes ses fibres sensuelles, par toute son intelligence et le criant à un peuple de sourds et d’aveugles » (R-L. Léguillon). C’est un écrivain engagé, l’un des premiers grands écrivains du XXe siècle, annonciateur de Georges Duhamel, d’André Gide, de Jean-Paul Sartre.

On s’attarde aujourd’hui sans déplaisir et sans honte sur le Loti truculent, inattendu, désinvolte, révolté – révoltant aussi -, sur son horreur du bienséant et du tiède, sur son côté « facteur Cheval », androgyne universel que mille vies n’auraient point assouvi, sur sa solitude aussi, et sa pratique homéopathique de l’écriture. Et Jean-Marie Rouart de résumer : « vagabond salarié, c’était sa façon de jeter l’ancre et de faire un peu d’escale dans ce bref tête-à-tête avec lui-même. » http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/jean-marie-rouart

Lorsque Nathalie Sarraute - https://fr.wikipedia.org/wiki/Nathalie_Sarraute – évoque les lectures françaises de son enfance russe, elle avoue sans hésitation : « j’ai aimé lire les auteurs qu’on lisait alors, Pierre Loti, Boylesve. » Mais pour témoigner publiquement de son attachement, Jacques Serguine fait mieux : romancier, il écrit un roman : Istanbul Loti 1994). https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Serguine

A sa mort, son ami Avesnes avait évoqué ce héros d’une génération avide : « Oh ! ces livres de Loti, comme nous les attendions, comme nous les guettions aux vitrines […] les beaux songes qu’ils nous a donnés ! Creux et inutiles ? Non, puisque souvent ils inspiraient l’envie d’agir. » Et pas seulement des marins en mal de colonies : des nomades intrépides, errants peu conformistes, et jusqu’à des savants intrépides très contemporains comme l’explorateur polaire Jean-Louis Etienne. Ce même Avesnes avait titré son hommage « pèlerin de la planète »… https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_de_Blois_(homme_politique) 

Les marins parcourent le monde, les géographes l’explorent, l’inventorient, d’autres, le domestiquent, les poètes l’inventent. Et parmi ceux-ci, les plus grands disent poliment leur dette, comme Julien Gracq : « Loti est pour moi une lecture de jeunesse qui a peut-être aidé – mais certainement moins que Jules Verne – à développer mon goût pour les paysages. Il m’arrive de temps en temps de relire quelques passages, qui ont gardé pour moi leur charme d’autrefois. La défaveur où il est tombé après sa mort, et dont il commence, il me semble, à se relever, est certainement trop grande. »   https://fr.wikipedia.org/wiki/Julien_Gracq

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Les voyages qui ont inspirés Pierre Loti

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Lectures de Loti


 

( Revue )
Kailash
Collection

 Carnets de l’exotisme
2003,

283 p.,

16 euros
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On ne cesse aujourd'hui de redécouvrir l'œuvre et la personnalité de Pierre Loti (1850-1923). De Shanghaï à Moscou, d'Athènes ou de Séoul, du Sénégal comme de l'Espagne nous parviennent, ici réunies, une vingtaine d'études inédites proposant de nouvelles lectures de ses romans, de ses récits de voyages, et centrées sur leur réception internationale : en Chine, en Russie, au Japon, en Turquie, mais aussi au Pays basque ou sous la plume de Henry James, voire de Henry Miller.

Autant de perspectives nouvelles, qui sont accompagnées de visites à sa maison (notamment sous la plume d'Enis Batur) et d'un dossier d'exposition ayant pour thème Les escales du temps.

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Oeuvre choisie

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Pêcheur d'Islande par Loti

LIRE UN EXTRAIT


Alain Buisine (Éditeur scientifique)
Éditeur :

 LE LIVRE DE POCHE

 (01/02/1973)
   Existe en édition audio

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Résumé :

Pêcheur d'Islande a sans doute souffert de son succès, considérable, et l'on ne relit plus beaucoup cette histoire d'amour qui fit tant pleurer nos grands-mères. Le chef-d'oeuvre de Loti n'en recèle pas moins de nombreuses qualités. Avec une construction savante, soigneusement équilibrée, un style sobre, à la limite de l'épure ("La mer, la mer grise"), des phrases ciselées, polies comme des galets, Loti accomplit un véritable travail d'artiste et de peintre pour évoquer ces horizons blancs, immensément vides, qui déchirent le ciel d'Islande.

Lumières polaires irisées, brumes blafardes, soleils sans chaleur, impassibles et cruels, répondent aux tourments des coeurs, annoncent les amours brisées par la mort, les noces du marin et de la mer. Artisan scrupuleux, Loti trouve ici le chemin d'une poésie à la fois simple et profonde, où son chant s'épanouit en toute plénitude. --Scarbo

La Marie, navigue vers l'Islande emmenant à son bord les pêcheurs bretons qu'on appelle les "Islandais". Pourtant, la mer du Nord est dangereuse, et chaque année, certains équipiers ne reviennent pas. Après avoir vécu à Paris, Gaud, une belle et douce jeune femme, revient vivre en Bretagne. Elle tombe alors éperdument
amoureuse de Yann, marin sur La Marie. Mais, lui, n'aime que la mer...

 

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Un classique que j'avais envie de lire depuis longtemps. J'en ressors avec un petit pincement au coeur.
Un récit qui nous immerge au cœur du 19ème siècle, dans une immuable ronde des saisons, celle de marins bretons partant chaque printemps pêcher la morue au large des côtes islandaises, ne revenant qu'à l'automne retrouver leur foyer.
Le fil conducteur : une histoire d'amour, celle qui se tisse lentement entre Gaud et Yann, d'un romantisme suranné mais irrésistible...
Des hommes qui partent, des femmes qui attendent. Une puissante intimité des sentiments : promiscuité, pudeur, fierté, courage, dignité, solidarité, générosité, partage, simplicité... Face à cette mer-nourricière, cette mer-tombeau parfois, belle, envahissante, hypnotisante, égoïste, fière, impitoyable.
Une plume à la fois extrêmement figurative, sensuelle, réaliste, intimiste et universelle.
Un roman envoûtant !

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A Paimpol au XIXème siècle la pêche dans les mers Islandaises est une institution. On appelle ces marins "les Islandais". Embarquant au début du printemps, ils ne sont de retour qu'à la fin de l'été. le pays vit donc au rythme des allées et venues des navires. Laissant leurs familles à terre dans l'interminable et angoissante attente du retour, les marins vivent les plus grands dangers dans les eaux tourmentées du Nord, là où le soleil ne se couche jamais.
Yann est de ceux-ci, Force de la nature, honnête gaillard peu loquace il a voué sa vie à la mer lui ayant promis son coeur excluant toute autre prétendante. C'était sans compter sur sa rencontre avec Gaud, fière et élégante jeune femme.
Passant au delà des conventions, la passion qui l'anime l'amène à forcer des rencontres avec Yann pour lui dire son amour. Mais malgré ses efforts, soit elles ne se produiront jamais soit elles le laisseront en apparence indifférent. Il faudra plusieurs saisons de pêche avant qu'un évènement les rapproche...
C'est un peu une oeuvre picturale, chatoyante et ondoyante que nous livre Pierre Loti. La mer dans tous ses états y est somptueusement décrite et souvent semble nous submerger. Son style parfois désuet est pourtant entrainant et suscite l'émotion ainsi qu'une tension permanente. Une belle fresque sur la vie des marins Bretons, de la société de cette époque et une touchante histoire passionnelle.

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Après ma visite fort instructive du musée maritime du Old Harbour de Reykjavik , cette lecture m'a parue évidente dans la continuité de l'émotion de la découverte ( ou redécouverte ) de ces pêcheurs de morue, hommes courageux à la vie si dure .
Dans l'ouvrage de Pierre Loti, les Islandais , comme ils étaient surnommés , sont les pêcheurs bretons qui partaient sur les côtes d'Islande pendant plusieurs mois pour cette fameuse pêche à la morue .
Et parce que leurs pères avant eux prenaient la mer, Yann et Sylvestre, presque beaux-frères par les liens qui unissent Sylvestre à la soeur de Yann sont deux de ces marins qui quittent les côtes bretonnes pour affronter la Mer du Nord .
Roman sur la mer, parce que c'est elle qui décide de la vie et de la mort, elle donne et elle reprend , elle est amante, elle est cercueil .
Roman sur l'amour, pudique toujours, impossible parfois, parce que les conventions sociales sont tenaces dans la Bretagne de la fin du XIX ème siècle mais Gaud aime Yann même s'il ne le montre pas mais qu'il l'attend aussi .
Roman sur les femmes, les mères , les épouses et les fiancées, celles qui attendent le retour des bateaux , fières et courageuses bretonnes .
Roman sur l'amitié comme celle qui unit Yann et Sylvestre, pas besoin de beaucoup de mots ni d'effusions, ce sont des taiseux mais les sentiments sont forts et beaux.
J' ai trouvé autre chose dans ce roman que ce que j'y étais venue chercher mais peu importe , l'écriture de Pierre Loti est admirable .

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A Paimpol au XIXème siècle la pêche dans les mers Islandaises est une institution. On appelle ces marins "les Islandais". Embarquant au début du printemps, ils ne sont de retour qu'à la fin de l'été. le pays vit donc au rythme des allées et venues des navires. Laissant leurs familles à terre dans l'interminable et angoissante attente du retour, les marins vivent les plus grands dangers dans les eaux tourmentées du Nord, là où le soleil ne se couche jamais.
Yann est de ceux-ci, Force de la nature, honnête gaillard peu loquace il a voué sa vie à la mer lui ayant promis son coeur excluant toute autre prétendante. C'était sans compter sur sa rencontre avec Gaud, fière et élégante jeune femme.
Passant au delà des conventions, la passion qui l'anime l'amène à forcer des rencontres avec Yann pour lui dire son amour. Mais malgré ses efforts, soit elles ne se produiront jamais soit elles le laisseront en apparence indifférent. Il faudra plusieurs saisons de pêche avant qu'un évènement les rapproche...
C'est un peu une oeuvre picturale, chatoyante et ondoyante que nous livre Pierre Loti. La mer dans tous ses états y est somptueusement décrite et souvent semble nous submerger. Son style parfois désuet est pourtant entrainant et suscite l'émotion ainsi qu'une tension permanente. Une belle fresque sur la vie des marins Bretons, de la société de cette époque et une touchante histoire passionnelle.

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Istanbul.

Le regard de Pierre Loti
Renaissance du Livre
Collection Esprit des lieux
1997, 22.71 euros
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Une soixantaine de photographies de Pierre Loti et des extraits inédits de son journal font de cet ouvrage « un classique de l’exotisme »

« Marin et académicien français, Pierre Loti (1850-1923) fut de la Turquie l'ami passionné, le citoyen, le reporter, le dessinateur, le poète, le romancier, le défenseur même. On sait rarement qu'il en fut aussi le photographe avisé. C'est au cours d'un long séjour de vingt mois, de 1903 à 1905, que Loti réalisa un reportage exceptionnel sur celle qui fut à ses yeux "la ville unique au monde", la Constantinople chargée d'Orient et de mystères.

Pour lui, photographie et journal intime expriment la même nécessité d'amarrer la réalité au rêve, de retenir - par-delà la "permanence" des monuments - le fugitif, l'éphémère, la fêlure, la vibration, le souffle. Réunis pour la première fois dans ce livre, journal inédit et photographies inconnues se rejoignent en un rare témoignage qui privilégie, entre Bosphore et Corne d'Or, l'univers des mosquées et des quartiers humbles, comme un hommage sensible d'esthète et d'amoureux. Un document historique. » (présentation de l'éditeur)
 


Textes rassemblés par Alain Quella-Villegier

 

 

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Co-auteurs :

Jean-Pierre Mélot,

Gabrielle Scaon

et Johannes von Saurma

- Collection :

Itinéraires du patrimoine 

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Un petit guide pour découvrir la maison de l’écrivain

Un historique permet d'articuler chaque étape de la création de cette maison à la vie et à la personnalité de Pierre Loti ; le propos est illustré de nombreux documents d'époque dont une partie, inédite, provient de la famille ou des amis de la famille de l'écrivain.

L'itinéraire proprement dit fournit ensuite pour chaque pièce des « clés » de lecture, essentielles pour qu'au plaisir de regarder s'ajoute celui de comprendre l'intention créatrice de Loti. Dans sa catégorie, l'ouvrage est donc le premier à rendre compte non seulement d'un lieu, mais aussi d'une démarche artistique fondamentalement originale.

Sur la Toile

Sur le site de la ville de Rochefort

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