Histoire de Lyon

 

Population :
Au 16ème siècle,

Lyon est une ville importante située sur la route de l’Italie qui fascine monarques,

artistes et commerçants français.

Peuplé de 60 000habitants la ville accueille en permanences de nombreux marchands

qui restent souvent après le temps des grandes foires. 
Cité cosmopolite, elle accueille aussi bien Allemands et Flamands dans le commerce des draps et l'imprimerie

que des Italiens (Florentins, Lucquois, Milanais...) qui s'occupent plus particulièrement de la banque et de l'orfèvrerie.

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Vie économique :
Avantagé depuis longtemps parsa situation sur l’axe commercial Paris-Orient

via l’Italie et proche de Genève, à la fin du siècle précédent la ville a reçu le privilège royal

de 4 foires annuelles de 15 jours attirant des marchandsvenu de toute l’Europe. 
Lyon est une sorte de zone franche où s’invente le capitalisme de par l’exemption des droits commerciaux

et de certains impôts pour les marchands étrangers résidants à Lyon.

La prospérité commerciale permet aux banques de se développer.

L'imprimerie est florissante, Lyon est le deuxième centre français après Paris. 
Dépendante des Flamands pour les toiles de chanvre etde coton et des Italiens pour les velours et les soieries,

Lyon va se doter, sous François Ier d'une industrie textile qui fera sa fortune et sa célébrité jusqu'à une période récente.

On considère quevers 1550 plusieurs milliers de personnes de la région se consacrent déjà au travail de la soie.

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La guerre de Cent Ans s'achève enfin. Les Anglais sont repoussés hors de France en 1453, le traité de paix est signé en 1475, c'est la fin du Moyen-Âge. Le pays sort épuisé de ces années de guerre, commerce et vie intellectuelle sont ralentis. 
L'époque de la Renaissance à Lyon va se traduire par une intense activité, commerciale, financière, urbaine, intellectuelle.

La ville de Lyon a été relativement épargnée par les conflits de la Guerre de Cent Ans, jamais pillée ni assiégée, elle a au contraire bénéficié de la clémence royale. 
En 1320, elle a obtenu le privilège de s'auto-gérer, au travers d'un Consulat, prémices de notre conseil municipal. L'administration de la ville est gérée par douze Consuls, élus par les maîtres des métiers.
De plus, en mars 1462, Louis XI accorde le privilège des quatre foires annuelles d’une durée de quinze jours, libres de taxes. 
La ville reçoit puis exporte des épices, des draps de soie, du velours, du taffetas, du damas, des aciers fins et des armes de qualité, mais aussi des couteaux, des produits métallurgiques. 
Pour les paiements, on utilise les lettres de change créées à la fin du XIIIe siècle en Italie : c'est un instrument de crédit et de paiement, payable à terme. Le paiement se fait sur la Place du Change qui devient le haut lieu de la banque à Lyon. 

Comme dans l'Antiquité, la situation géographique de Lyon en fait une plaque tournante du commerce de marchandises, entre les pays du Sud et les pays du Nord, comme l’Angleterre ou les territoires de l'Empire. Elle devient une ville « où il faut faire des affaires », carrefour commercial, haut lieu du négoce et de la banque.

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Lyon, ville de négoce

 

De grandes familles de banquiers et commerçants italiens, florentins, lucquois, vénitiens, attirées par cet important trafic d’argent, s’établissent à Lyon et se font construire dans les quartiers St Jean et St Paul de somptueuses demeures. Certaines de ces maisons conservent encore leurs noms : le musée Gadagne était l'hôtel particulier de cette famillle florentine, enrichie par le très lucratif commerce international. 

Lyon bénéficie des influences de divers pays limitrophes. L’Italie apporte les idées nouvelles de la Renaissance, ces idées sont véhiculées grâce à l'imprimerie, invention allemande de 1450, qui se développe en Europe à partir de 1470. 
Lyon va devenir un grand centre européen de l’imprimerie. C'est en 1473 que Barthélémy Buyer, un riche bourgeois lyonnais, installe des typographes dans la rue Mercière. C'est là que vont se réunir de nombreux ateliers d'imprimeurs et de libraires pour fonder en 1519 la Grande Compagnie des Libraires de Lyon.
Nombre d'imprimeurs lyonnais sont devenus célèbres : Sébastien Gryphe, Etienne Dolet, ou encore Claude Nourry qui publia en 1532 la première édition de Pantagruel. 

La pensée humaniste se développe, avec notamment la création du Collège de la Trinité en 1527 ; celui-ci se place rapidement comme un collège humaniste d’importance dans le pays, regroupant de grands professeurs. 

Des médecins de renom s’établissent à Lyon, comme Symphorien Champier, Michel Servet et Rabelais, qui exerça à l’Hôtel-Dieu. 
Des collectionneurs, à l'image de Pierre Sala à l’Antiquaille, créent des lieux de culture, pour entreposer des Antiquités ou accueillir des bibliothèques. 
Enfin, des écrivains séjournent dans la capitale des Gaules : ce sont Clément Marot, Etienne Dolet ou encore Bonaventure Des Périers. Une Ecole lyonnaise de la poésie s’établit avec Maurice Scève, Pernette du Guillet, Louise Labé (La Belle Cordière), Pontus de Tyard et Paradin de Cuyseaux.

Les rois de France mènent grand train et il est de tradition que les rois, à leur arrivée au trône, fassent une entrée dans chaque ville importante du royaume. 
A Lyon, les entrées royales de Charles VIII en 1494, Louis XII en 1507, François 1er en 1515, Henri II et Catherine de Medicis en 1548, Charles IX en 1564 donnent lieu à toutes sortes de réjouissances et festivités. 
Cela coûte cher aux finances du Consulat, mais le séjour des rois bénéficie toujours à la ville : c’est ainsi que le monastère des Célestins est restauré par Louis XII à la suite d’un incendie.

Mais les monarques lancent surtout de coûteuses campagnes militaires qui leur demandent de lourds emprunts. La ville est riche, les souverains prennent donc l'habitude de la ponctionner, créant ainsi, une imposition régulière. 
Pour alimenter les finances de la ville, le Consulat met en place des droits d’octroi sur les denrées entrant dans la ville.

 

L'influence italienne

Lyon est, depuis 1494, le point de départ des guerres d'Italie menées par les rois de France. A chaque retour des monarques, l'influence italienne grandit et s'infiltre dans la cité. 
Mais c'est avec le roi François Ier, lorsque la cité devient la capitale provisoire de la France, que la Renaissance va réellement modifier l'aspect architectural de la ville. 
Base arrière des expéditions militaires en Italie, Lyon accueille la cour presque chaque année. Les milliers de chevaux et d'hommes s'installent alors sur les nbords de Saône, autour de l'Ile Barbe, dans des châteaux et campements. On organise des fêtes et des tournois, le Roi légifère, organise des soirées littéraires. 

En octobre 1536, François Ier autorise la ville à fabriquer de la soie. Vingt ans plus tard, cette activité devient prépondérante et permet à 12 000 personnes de travailler et de vivre. 

Pour toutes ces raisons, la ville de Lyon est une ville attirante: en cinquante ans, la population de la ville augmente de cinquante pour cent. Elle va passer de 40 000 à 60 000 personnes.

Lyon, ville de conflits

Néanmoins, la ville est mise à mal par d'importantes tensions sociales. En 1528, la population doit faire face à une augmentation du prix des grains : c'est l'origine de la révolte appelée la Grande Rebeyne, le 25 avril 1529. Emeutes et mise à sac de quelques riches demeures (notamment celle du médecin Symphorien Champier) sont réprimées dans la violence. 

Pour ramener le calme et répondre aux besoins des plus pauvres, le Consulat baisse les prix du froment et crée l'Aumône générale avec, entre autres, l'aide de Cléberger, le Bon Allemand, prêteur attitré du roi François Ier.

En 1531, puis en 1572-1573, la ville traverse des périodes de grande famine. L'entassement de la population dans des logements insalubres favorise le développement de nombreuses épidémies, comme en 1481 et en 1581. 
Enfin, les habitants de Lyon doivent faire face à des inondations, notamment celle de 1570, qui fut très meurtrière.

Largement influencée par les idées nouvelles, la ville de Lyon constitue une Eglise protestante en 1546. Mais le roi Henri II, fervent catholique, décide de prendre de sévères mesures à l'égard de cette nouvelle religion. Entre 1547 et 1595, la ville va être la proie des guerres de religion. 

Après la mort d'Henri II en 1559, le climat est à la tolérance et le nombre des Réformés augmente. Dès 1560, ils tentent, sans succès, de s'emparer de la ville. Les Edits de juillet 1561 et janvier 1562 qui donnent la liberté de culte et de conscience (dans les faubourgs et les campagnes...), permettent à la Réforme de se développer, avec notamment la construction d'un lieu de culte.

Un premier conflit marque la cité. Dans la nuit du 29 au 30 avril 1562, les Réformés, organisés en force armée, s'emparent par surprise de la ville. Le Baron des Adrets les accompagne et est même l'instigateur de destructions importantes, comme celles des cloîtres de St Jean et d'Ainay, ou encore des églises collégiales de St Just et St Irénée. 
Pour une année, Lyon est gouvernée par un consulat à majorité protestante et un Conseil de l'Eglise Réformée. Le traité d'Ambroise de mars 1563 marque la fin de l'occupation des Protestants à Lyon. 

La deuxième guerre voit la revanche des catholiques : les Jésuites obtiennent la direction du Collège de la Trinité le 30 avril 1565. De nombreux protestants seront alors expulsés ou fuiront la ville. 

En 1572, le gouverneur François Mandelot, ayant appris le massacre de la Saint Barthélémy, fait emprisonner 700 protestants dans le but de les protéger. Malgré tous ses efforts, la population prise d'une folie sanguinaire, les massacre et les jette dans la Saône le 31 août 1572. 
Alors que les luttes pour le pouvoir entre le roi catholique Henri III et le protestant Henri roi de Navarre (futur Henri IV) font rage, la ville connaît un moment de paix, jusqu'en 1588. 

En décembre 1588, le roi fait assassiner le duc de Guise, chef de la Ligue catholique, qui lui fait de l'ombre. Lyon, à l'image de toutes les villes de province, prend immédiatement le parti de la Ligue, qui fait assassiner le monarque le 2 août 1589. Henri IV roi de Navarre, premier roi de la branche Bourbon des Capétiens, protestant, lui succède. 

Ce n'est que le 8 février 1594, que la cité se soumet enfin à l'autorité royale d'Henri IV. Le souverain fait alors son entrée solennelle à Lyon le 4 septembre 1594.

En savoir plus sur la Renaissance...

 

 

 

Apre?s le Moyen A?ge, Tribune de Lyon s’inte?resse a? la vie quotidienne des Lyonnais a? l’e?poque de la Renaissance, qui commence officiellement a? la fin du XVe sie?cle, apre?s la de?couverte de l’Ame?rique. Lyon est alors une petite ville, coince?e entre les mare?cages, les collines et un fleuve en cole?re, en plein essor commercial et intellectuel. Quand on pense qu’a? peu de choses pre?s, on aurait pu devenir la capitale de la France......

On imagine souvent une rupture extraordinaire entre l’e?poque me?die?vale et la Renaissance. Le Moyen A?ge serait une pe?riode sombre ou? les gens vivaient comme des gueux, sous la coupe de seigneurs qui maniaient aussi bien l’impo?t direct que le droit de cuissage. Lui succe?derait une pe?riode be?nie, sentant bon la fleurette, durant laquelle chacun s’e?panouirait dans la cre?ation artistique et s’habillerait selon son bon plaisir de ve?tements colore?s avec des dentelles. Ce cliche?, qui pourrait e?ventuellement s’appliquer a? la cour de Franc?ois 1er, est e?videmment faux. La pe?riode me?die?vale et la Renaissance se chevauchent de fac?on diffe?rente suivant les pays. La Renaissance lyonnaise, en avance sur le reste de la France, commence a? la fin du XVe sie?cle, soit plus d’un sie?cle apre?s le de?but de la Renaissance italienne. Elle n’est pas le produit d’une sorte de ge?nie lyonnais inne?, ami des arts et des ide?es humanistes, mais d’une conjonction de causes, dont la plus importante est son emplacement ge?ographique. C’est parce que Lyon, on l’a oublie? aujourd’hui, fut une ville frontie?re et qu’elle se situe au milieu d’une voie navigable qui la relie a? la Me?diterrane?e, que tout a? coup, des bonnes fe?es se sont penche?es sur elle.    


Comment Lyon est devenu riche puis a tout perdu
Pour rentrer dans les de?tails d’une histoire complexe, me?lant a? la fois conflits de territoires et guerres de religion, il faudrait un livre. Mais, pour re?sumer, Lyon a be?ne?ficie? de beaucoup de chance, avant d’avoir la scoumoune. Gra?ce a? Charles VIII, elle obtient le droit d’organiser quatre foires annuelles avec des conditions fiscales de?fiant toute concurrence. Pour le roi, il s’agit de remplacer les grandes foires de Bourgogne ane?anties par la guerre de Cent Ans (alors que le conflit n’a pas touche? Lyon) et de de?fier la foire de Gene?ve. A? coup de de?fiscalisation et de liberte? des monnaies (Lyon est le seul endroit en France ou? l’on peut e?changer toutes les monnaies europe?ennes, c’est un peu l’euro avant l’heure), la ville attire les riches marchands-banquiers de Florence et de Lucques qui y ouvrent des comptoirs comme n’importe quelle multinationale. Lyon, c’est aussi Madelin avant l’heure : les 218 professions artisanales recense?es sont libres, contrairement a? Paris ou? les corporations sont tre?s re?glemente?es. La richesse culturelle suit la richesse e?conomique. Les intellectuels affluent a? Lyon, qui re?ussit dans l’imprimerie, encore une fois gra?ce a? sa situation ge?ographique : les e?diteurs de textes “de?rangeants” ou “he?re?tiques” savent qu’ils peuvent passer la frontie?re a? tout moment (la Savoie commenc?ant de l’autre co?te? du Rho?ne). Des cercles humanistes apparaissent. Nostradamus et Rabelais sont e?dite?s, tout ce qui est publie? en Europe passe par Lyon.
Mais voila?, apre?s 1555, c’est la mondialisation, un ensemble e?conomique europe?en qui e?chappe aux marchands. La marchandise et la finance sont de?connecte?es. Il se passe l’e?quivalent d’une bulle boursie?re. Les faillites se multiplient a? Lyon comme dans toute l’Europe. De plus, a? cause de Christophe Colomb, l’influence de la Me?diterrane?e baisse au profit de l’Atlantique. En 1575, les guerres de religion reprennent, ce qui fait refluer les marchands italiens qui retournent dans leur re?gion d’origine. A? cela s’ajoute la peste : hausse des impo?ts, monte?e de la xe?nophobie, demande de protectionnisme... Cela pourrait faire e?cho au monde actuel. Lyon se remettra de sa seconde partie de Renaissance rate?e gra?ce a? l’industrie de la soie voulue par Franc?ois 1er et vite de?veloppe?e a? bas cou?t... gra?ce au travail des enfants de l’assistance publique. La Renaissance franc?aise s’ache?ve environ au moment de la signature de l’e?dit de Nantes, en 1598. Lyon aura alors perdu la moitie? de sa population par rapport au Moyen A?ge.


Lyon, une toute petite ville pour un si grand destin
AuXVIe sie?cle, malgre? une pointe de population s’e?levant a? pre?s de 60 000 habitants, Lyon e?tait une petite ville. Le plateau et les pentes de la Croix-Rousse e?taient occupe?s par des congre?gations religieuses qui plantaient de la vigne et des arbres fruitiers. Le grand public ne passait pas par la?. Les Brotteaux e?taient compose?s de mare?cages et les rives du Rho?ne e?taient peu habite?es a? cause des caprices d’un fleuve tre?s puissant et sauvage. Au sud, les Lyonnais n’allaient pas plus loin que la place Bellecour. Le Confluent actuel n’existait pas, et les domaines de l’abbaye d’Ainay e?taient dans des terrains humides. On dit me?me que le chevalier Bayard, lorsqu’il allait rendre visite a? son oncle, le prieur de l’abbaye, avait parfois besoin d’emprunter une barque. Ainay e?tait avant tout une prairie humide entourant des e?difices religieux. La Presqu’i?le abritait le Lyon populaire et toutes les activite?s polluantes. Le quartier des Terreaux e?tait appele? la “Grande boucherie”, car c’est dans cet espace, peu habite?, que l’on de?pec?ait les carcasses d’animaux avec les odeurs et les de?sagre?ments que l’on imagine. Rue Mercie?re (a? l’e?poque beaucoup plus longue qu’aujourd’hui car elle traversait toute une partie de la Presqu’i?le) se regroupaient les imprimeurs, me?tier polluant et salissant. Seule la place d’Albon, sur les quais de Sao?ne, avait un certain prestige : elle abritait le consulat, centre de pouvoir que l’on pourrait comparer aujourd’hui a? la mairie et au conseil municipal. En face, Lyon commenc?ait en amont de la Sao?ne a? la porte de Bourneuf (aujourd’hui le milieu du quai Pierre-Scize), se prolongeait en habitat resserre? jusqu’au bout de la place du Change (actuellement au niveau du glacier Nardonne). A? partir de la?, on se cognait aux murs clos du Vatican lyonnais, fief du pouvoir religieux domine? par la cathe?drale, qui allait jusqu’a? la rue de la Bombarde. Ensuite, commenc?ait le quartier Saint- Georges, pauvre et peu habite?. Il se terminait par des champs et, au niveau de l’actuel tunnel de Fourvie?re, par un ba?timent de quarantaine pour tenter d’e?viter les e?pide?mies, fre?quentes a? l’e?poque. Au milieu de cette ville finalement re?duite a? une petite surface, il ne faut pas oublier la Sao?ne qui repre?sente l’arte?re principale de la ville, traverse?e par un seul pont, le pont du Change qui ne de?semplit pas. Il y avait de?ja? des bouchons que l’on pouvait contourner par l’eau. Certains e?te?s, on pouvait passer a? gue?. Le reste du temps, ce sont des batelie?res qui faisaient traverser les habitants sur de longues barques, comme a? Venise.


Quand les Lyonnais ont invente? Wall street, la poste, la douane et la CCI
Au milieu du XVIe sie?cle, le centre de Lyon est le quartier Saint-Paul, le?ge?rement plus vaste qu’aujourd’hui puisqu’il va jusqu’a? la place du Change. Ce petit territoire tre?s dense comporte plusieurs quartiers. Au Nord, se regroupe l’artisanat haut de gamme. Ce n’est pas exactement un quartier de luxe, mais c’est la? que l’on trouve les e?choppes des artisans de qualite? travaillant la ferronnerie, le cuir ou la poterie, ou exerc?ant une activite? qui de nos jours peut sembler e?trange, mais qui pourtant e?tait re?pute?e a? l’e?poque : la profession d’e?pinglier. Au niveau de la place Saint-Paul, deux types de professions sont fortement repre?sente?es, les cabaretiers et les notaires. Le plus dro?le est que la profession de notaire, tre?s re?pandue – quasiment tous les actes de la vie civile, me?me pour les classes modestes, passaient devant notaire – pouvait se doubler de la profession d’aubergiste. On ne sait pas si les contrats et les registres se signaient au bar, mais on remarque que l’administration et le vin ne sont pas des inventions re?centes. Et que le double me?tier n’e?tait pas une rarete? a? la Renaissance. Ensuite, au niveau de la place du Change, vivaient les grandes familles de marchands banquiers, les riches immigre?s italiens qui tenaient a? la fois le commerce et la finance. C’e?tait en quelque sorte le Wall Street lyonnais, qui fut un temps la premie?re place e?conomique d’Europe et faisait vivre une grande partie de la population de la ville. Pre?s de l’e?ve?che?, se regroupaient les professions juridiques e?leve?es, ne?cessitant un haut niveau d’e?tude, comme le me?tier d’avocat. C’est dans ce petit carre? que sont ne?es presque simultane?ment plusieurs grandes institutions.

En accordant des droits importants et une franchise d’impo?ts pour les foires, Louis XI a aussi donne? leur inde?pendance aux marchands organisateurs. Ceux-ci se regroupent par professions en chambres et e?dictent des re?gles de commerce. Colbert, qui a fait une partie de ses e?tudes a? Lyon, s’est inspire? de cette expe?rience pour cre?er les chambres de commerce. C’est cette le?gislation qui servira de re?gle commerciale pour toute la France jusqu’a? la Re?volution. Dans le me?me quartier, pre?s de la place Gerson, est aussi ne?e la poste. Jusque-la?, chacun organisait la livraison du courrier de fac?on prive?e, par coursier. Les chevaucheurs de l’e?curie du Roy mettaient en relation les e?chevins, la cour royale installe?e dans les cha?teaux de la Loire et l’Archeve?que. Prenant exemple sur le syste?me des E?tats italiens, Louis XI de?cide en 1593 de cre?er la premie?re poste, rue Lainerie. Ensuite, les diffe?rents bureaux de postes seront installe?s dans des auberges qui en avaient de?ja? vu d’autres. Puisqu’on pouvait e?tre a? la fois aubergiste et notaire, rien n’empe?chait de devenir aussi fonctionnaire des postes. Enfin, tre?s logiquement, comme Lyon e?tait une frontie?re par laquelle passait une bonne part de la marchandise me?diterrane?enne, c’est dans le petit port au pied de la place Saint-Paul que nai?tra la premie?re douane.


Un vivier d’écrivains et d’humanistes
A? partir de 1530, Lyon peut se conside?rer comme la capitale intellectuelle de l’Europe, notamment gra?ce a? quelques pre?curseurs comme Symphorien Champier. Il y eut aussi E?tienne Diolet, la poe?sie savante de Maurice Sce?ve et de Louise Labe?. Ainsi Rabelais a probablement e?te? attire? a? Lyon par la re?putation de l’imprimerie. A? peine arrive?, en 1532, il travaille d’ailleurs comme correcteur chez Se?bastien Gryphe dont les ateliers sont a? l’angle de la rue Mercie?re et de la rue Thomassin. La me?me anne?e, il fait e?diter ses premiers textes chez cet imprimeur, dont Pantagruel. Clin d’œil a? la ville, son papa le ge?ant Gargantua fait attacher le nouveau ne?, ge?ant lui aussi, a? des chai?nes relie?es a? La Rochelle, au Havre, a? Angers et a? Lyon. Toujours en 1532, il est embauche? comme me?decin a? l’Ho?tel-Dieu avec un simple diplo?me de bachelier. Certains voient du piston : il e?tait a? l’e?cole avec le fils de l’humaniste, me?decin, e?chevin et recteur de l’Ho?tel-Dieu, un certain... Symphorien Champier... Rabelais, quoiqu’apparemment bon me?decin, se re?ve?le comme un champion de l’absente?isme. Fin 1533, il quitte son poste sans pre?venir pour partir a? Rome avec Joachim du Bellay. Il ne reprend le travail qu’en avril de l’anne?e suivante, comme si de rien n’e?tait. En 1534, il publie cette fois Gargantua, la suite non chronologique de Pantagruel. Quand on voit le comportement a? table de ce ge?ant vorace, on soupc?onne Rabelais de s’e?tre inspire? de la de?ja? re?pute?e gourmandise lyonnaise. Mais Rabelais finit par de?serter de?finitivement l’ho?pital, pour s’e?tablir a? Montpellier, toujours “Lyonnais de cœur”, selon ses dires.
 

Un habitat de style « rustique » avec presque l’eau courante
A? part chez les gens aise?s (visitez le muse?e Gadagne, vous aurez une ide?e du luxe auquel peu de personnes acce?daient a? l’e?poque), le logement n’e?tait pas diffe?rent du logement me?die?val. On vivait dans de petites pie?ces sombres, dans des immeubles tre?s resserre?s sur des rues e?troites donnant sur des cours inte?rieures. Derrie?re les lourdes portes en bois, il y avait le mobilier ne?cessaire, mais gue?re d’ornements et peu de placards, puisque la garde-robe et la vaisselle e?taient limite?es. On comptait quelques re?cipients en e?tain et des pichets en terre. En revanche, chaque pie?ce avait en principe sa chemine?e. Comme on n’avait pas encore invente? le re?chauffement climatique, les hivers e?taient rudes, d’autant plus que seuls les gens riches pouvaient se payer des tapis et que les parquets n’avaient pas encore e?te? cre?e?s. Le sol e?tait ge?ne?ralement fait de tomettes de 15 cm sur 15, dites “dalles de Verdun” (Verdun-sous-le-Doubs). Le verre pour fene?tres e?tait aussi re?serve? aux classes supe?rieures a? cause de son cou?t e?leve?. A? la place, sur un cha?ssis fixe, on tendait du papier ou du tissu huile? pour le rendre translucide. On ne voyait pas ce qui se passait de l’autre co?te?, mais au moins un peu de lumie?re passait. Un peu seulement, parce que les rues e?taient non seulement e?troites, mais aussi quasiment rendues aveugles par des toits de?bordant loin des murs (pour se prote?ger des intempe?ries).

De fait, a? l’e?poque, la plupart des immeubles, hormis ceux en pierre de taille, e?taient couverts de chaux pour apporter de la luminosite?. Si bien que Lyon a e?te? surnomme? la “ville blanche”. Les couleurs pastel que nous connaissons aujourd’hui ne datent que des anne?es soixante-dix. Elles ont e?te? inspire?es par des couleurs de l’habitat du Sud de l’Allemagne et de la Toscane. La nuit ? La ville e?tait noire, car e?videmment l’e?lectricite? n’apparai?tra que bien plus tard et les chandelles cou?taient cher. Si bien que les Lyonnais vivaient au rythme du soleil, et pour bon nombre, se couchaient en famille dans le me?me lit pour se tenir chaud. A? propos, pourquoi les lits e?taient-ils si petits, notamment dans leur longueur ? Ce n’est pas lie? a? la taille des gens. Si la population e?tait globalement moins grande qu’aujourd’hui, des individus comme Franc?ois 1er mesuraient pre?s de deux me?tres. La raison est ailleurs. Les gens dormaient diffe?remment, presque assis comme dans une chaise-longue, par superstition, parce que la position couche?e e?tait celle des morts. Quant a? l’eau courante, on y e?tait presque : la plupart des immeubles e?taient e?quipe?s d’un puits dans la cour. Et quand il n’y en avait pas, on pouvait acce?der librement aux fontaines des places. Seul proble?me, les e?gouts n’e?taient pas loin non plus puisque l’on de?versait tout dans la rivie?re, notamment aux Terreaux, quartier des bouchers et des carcasses.

 

Les joies du mariage
Si le mariage e?tait une solide institution religieuse, les actes civils n’e?taient pas oublie?s. Pour se marier, on passait devant le notaire. La femme devait apporter une dot, mais elle n’e?tait pas totalement le?se?e puisqu’au de?ce?s de son mari, elle avait le droit de toucher une partie de l’he?ritage. Comme le montre l’exemple ci-dessous (que l’on a re?sume?), le mari s’est engage? de son co?te? a? la couvrir de bijoux. 1553 : la dot accorde?e a? Andre? Bourset de Saint- Cyr-au-Mont-d’Or, imprimeur a? Lyon, qui se marie avec Pernette, orpheline d’un certain Lancelot Manissier se compose de 20 livres, une be?che (a priori, ce n’est pas un instrument de jardinage dont on parle, mais d’une barque). Une robe en drap “de couleur nuptiale, plus cinq linceuls” (on parle ici de draps de lit, pas de draps mortuaires), 12 aunes de toile (soit environ 1,20 me?tre), trois foulards en toile de chanvre (mantils). C’est Antoinette, la me?re de la marie?e, qui a constitue? cette dot. En e?change “ledit Bourset a promis et promet enjoiller ladite Pernette de bons et suffisants joyaux, lesquels il lui a donne? et donne par donation dite entre vifs”.


La fête des maris cocus
Me?me en pleine crise, le petit peuple savait rire. Les fe?tes les plus dro?les, he?rite?es de l’Italie me?die?vale, sont les “chevauche?es de l’a?ne”. Elles consistent a? organiser des de?file?s, qui le plus souvent passaient rue Mercie?re, tournant en ridicule les maris soumis a? leur e?pouse, mais aussi cocus, ou pire, battus par leur femme. On les faisait de?filer en personne, si on les avait sous la main, ou on les remplac?ait par un come?dien de?guise? de fac?on grotesque, chevauchant un a?ne a? l’envers. Le tout au son de trompettes, fifres, tambourins et quolibets du public. Car le pouvoir du mari sur la femme e?tait inscrit dans les mœurs. Un manuel de 1584 expliquait que le mari pouvait souffleter sa femme “avec mode?ration” s’il avait autorite? sur elle. Le livret de la fe?te de?nonce “les hommes, qui contre l’ordonnance de Dieu et devoir de la Nature, se laissent ainsi battre, mutiler et subjuguer par leurs femmes”. Ce de?file? d’apparence rigolarde servait aussi en filigrane a? protes- ter contre les huguenots.

Un faux mariage people
Mauvaise nouvelle pour les Lyonnais fans de te?tes couronne?es. Si Henri II et Catherine de Me?dicis se sont bien marie?s a? Marseille, Henri IV et Marie de Me?dicis ne se sont pas vraiment marie?s a? Lyon comme on le croit souvent. En fait, le mariage a eu lieu le 5 octobre 1600 a? Florence, mais pour des raisons juridiques, le roi n’e?tait pas pre?sent. Il s’est fait repre?senter par son grand e?cuyer. Ce n’est que le 9 de?cembre qu’Henri rencontre pour la premie?re fois Marie (qui n’a qu’un lointain lien de parente? avec Catherine) et passe sa nuit de noce, on espe?re dans une certaine intimite? puisqu’elle se de?plac?ait avec rien moins que deux mille personnes. La ce?re?monie, qui a eu lieu a? la cathe?drale Saint-Jean, n’e?tait qu’un hommage aux marie?s. Tous les rois de la Renaissance sont passe?s a? Lyon. On dit que Louis XI aimait bien les Lyonnaises. Mais s’il vient a? Lyon, comme d’ailleurs Charles VIII et Franc?ois 1er, c’est surtout pour le climat bancaire particulie?rement favorable. Il faut bien financer les diffe?rents conflits en cours, dont l’annexion, conside?re?e comme le?gitime pour de sombres histoires de succession, de Florence et de Naples. Co?te? people, toute la cour est passe?e dans le quartier Saint-Jean ou? elle restait plusieurs mois, faisant un temps de Lyon la capitale de la France. On peut penser que Le?onard de Vinci et la Joconde ont passe? quelques jours a? Lyon, tandis que Franc?ois 1er en est parti a? pied afin de fe?ter une victoire pour rejoindre le Saint Suaire d’Annecy (qui est aujourd’hui a? Turin).


Quand Lyon est sur le chemin d’un Attila protestant
La richesse des Lyonnais a aussi pa?ti des guerres de religion. En 1562, le terrible baron des Adrets, a? la te?te d’une arme?e protestante enrage?e, parcourait le Dauphine? et la Valle?e du Rho?ne, y semant la terreur. On raconte que le baron e?tait tellement cruel qu’il avait invente? une nouvelle forme d’exe?cution. Il demandait a? ses victimes de sauter des remparts pour s’empaler sur des piques fixe?es en bas. Le 30 avril, il forc?ait les portes de Lyon. Le pillage qui s’en suivit constitue une des pages les plus noires de l’histoire lyonnaise. Si les e?glises Saint-Paul et Saint-Nizier furent miraculeusement e?pargne?es, la colle?giale Saint-Just fut rase?e. Les abbayes d’Ainay et de l’Ile-Barbe furent de?vaste?es, de me?me que celle des Ce?lestins et la Commanderie des Antonins. Les soldats pille?rent les maisons des chanoines et jete?rent a? bas le grand cloi?tre de Saint-Jean. Des tombes furent profane?es comme celle de saint Bonaventure au couvent des Cordeliers, dont la de?pouille fut re?duite en cendres et jete?e au fleuve. Les protestants tiendront Lyon pendant plusieurs mois, contribuant a? modifier de fac?on non ne?gligeable l’urbanisme de la ville... Le pire est que sur la fin de sa carrie?re, Franc?ois de Beaumont, le baron des Adrets, se convertira au catholicisme. Il mourra tranquillement dans son lit en 1587. 


LES LYONNAIS EN 1564
Le texte O? Lyon du poe?te Charles Fontaine datant de 1564 est particulie?rement louangeur envers Lyon. Il faut savoir que ce rimailleur, disciple de Cle?ment Marot, n’a pas re?ussi a? s’introduire a? la cour. Passe? a? Lyon comme “pre?lecteur” dans une imprimerie, il y retourne pour chercher du travail, d’ou? un certain emballement. Pourtant, il re?sume bien les pre?occupations de Lyon a? l’e?poque: les pe?riodes de foires et de fe?tes, la gastronomie, des Lyonnaises sages (que surveille le clerge?), un rayonnement europe?en, le gou?t pour le travail mais aussi pour la radinerie. Bref, ce qui pouvait apparai?tre il y a quelques anne?es encore comme de vieux cliche?s de?crivant Lyon et ses habitants, date donc de l’e?poque de la Renaissance. 

LES GADAGNE
Les Gadagne, ou Guadani, sont aujourd’hui les plus notoires de ces riches commerc?ants et banquiers florentins qui quitte?rent leur pays a? la fin du
XVe sie?cle. Une partie de la famille vint vivre et exercer a? Lyon, attire?e par les fameuses foires. Il en avait e?te? de me?me pour d'autres financiers tels que les Pazzi et les Capponi, qui amassaient des fortunes en cumulant les me?tiers du commerce, de la banque et me?me de l’assurance maritime. Aujourd’hui, l’ho?tel particulier des Gadagne, re?nove?, abrite, dans le Vieux-Lyon, le muse?e de l’Histoire de Lyon et le muse?e de la Marionnette.

On n'en est pas certain, mais Giovanni da Verrazzano, dit Jean de Verazane, serait lyonnais, membre de la puissante famille des Gadagne. En tout cas, ce commerc?ant passionne? de voyages est souvent a? Lyon et fait financer ses expe?ditions par des banquiers lyonnais. En 1522, Franc?ois 1er l'envoie en expe?dition vers le Nouveau Monde, que l'on pense toujours e?tre l'Inde, pour trouver une voie directe vers la Chine et rapporter des richesses. Il ne trouvera pas la Chine, mais le site de la future New-York, qu'il nomme Angoule?me. Des indige?nes emplume?s se moquent de lui en lui montrant leur cul. En 1528, les rapports avec la population locale sont moins dro?les : il est mange? par des cannibales dans les Antilles

À la fin du xve siècle, les deux parties les plus densément peuplées sont la rive droite de la Saône et, sur la presqu'île, un centre urbain et bourgeois correspondant à la rue Mercière (via mercatoria) de l'époque, qui courait du pont sur la Saône à celui sur le Rhône, en une longue transversale. Les corporations, métiers et nations étrangères sont fortement regroupées au sein de quartiers ou de rues, signe d'une solide organisation du corps social lyonnais.

Saint-Georges, Saint-Jean et le quartier du palais de Roanne[modifier | modifier le code]

Plan ancien du Vieux Lyon, au bord de la Saône (située dans la partie basse), détaillant l'architecture des bâtiments. Une cathédrale est située au centre du plan.

Plan du groupe cathédral de Lyon, à l'époque de la Renaissance. Gravure extraite de l’Histoire des églises et chapelles de Lyon de Jean-Baptiste Martin, 1908.

Le bas des pentes de Fourvière, quant à lui, est très étroit, contraint par la topographie. Les rues principales suivent le cours de la rivière et les autres voies sont très limitées. Les coteaux au-dessus sont quasi-vides d'habitants, et occupés par des bois, des jardins et des vignesaq 1.

Le quartier Saint-Georges est à la Renaissance un quartier pauvre, peuplé d'affaneurs, de pêcheurs, maçons, tisserands et reveyransN 8. Ce quartier populaire est néanmoins habité par la riche famille des Bellièvre et comprend la commanderie de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusaleman 1. Son hôtel est bâti en 1492 par Humbert de Beauvoir, qui en profite pour remettre en état l'église Saint-Georgesak 1.

L'hôtel de RoanneN 9 étant le siège de la sénéchaussée depuis 1435, les rues alentours sont peuplées d'hommes du roi, d'officiers. Durant les guerres d'Italie, ce quartier accueille le roi et sa couraq 2. Le long de la rue du Palais, la population est composée au début de la Renaissance d'une solide moyenne bourgeoisie, avec des merciers, pelletiers, apothicaires, notaires, changeurs et docteurs en lois. Cette zone, avec la montée en puissance du pouvoir royal sur la ville représenté par l'hôtel de Roanne, repousse les habitants les plus pauvres vers le sud, autour de Saint-Jean et Saint-Georgesan 1. En 1538, le consulat, avec l'accord de François Ier, démolit le clos du palais de Roanne pour établir une place, qui hérite du même nomz 1.

Gravure en noir et blanc ; vue cavalière de Saint-Jean et du groupe cathédral, bordé par la Saône et encerclé de murs. Les pentes de Fourvière sont vierges d'habitations.

Groupe cathédral sur le plan de 1550. Archives municipales de Lyon.

C'est autour du quartier canonial, au niveau de la rue de la Bombarde, puis la rue Tramassac, le Gourguillon que l'on retrouve des pauvres gens, affaneurs, pêcheurs, reveyransan 1. Ce quartier canonial coupe en deux la rive droite de la Saône, et pour en contourner la muraille, les voyageurs ne peuvent qu'emprunter une voie, la rue de la Bombarde suivie de la rue Tramassac. Ce cloître dispose de plusieurs portes, une vers le palais de Roanne, la porte FrocN 10, ouverte sur la rue Saint-JeanN 11, une autre sur la rue Tramassacaq 1 et une vers le sud vers l'église Saint-Pierre-le-Vieux. Cette dernière est une église paroissiale dont de nombreuses chapelles sont entretenues par la bourgeoisie lyonnaise, qui s'y fait enterrer ; il s'y retrouve notamment les Bellièvre, les Bullioud et les Laurencinz 7,4.

À la Renaissance, lorsque le roi de France Louis XI s'empare définitivement du château de Pierre Scize, l'archevêque Charles de Bourbon décide de reprendre place dans la palais intra-murosam 1,al 1. Il fait alors lourdement rénover l'édifice pour le mettre au goût du jour autour de l'an 1466, ceci même s'il ne reste que peu de temps sur Lyonam 2,al 1.

C'est à cette même époque, durant les dernières décennies du xve siècle que la cathédrale saint-Jean est achevée avec l'édification des chapelles latérales5.

Saint-Paul, Pierre-Scize et Bourgneuf[modifier | modifier le code]

Gravure en noir et blanc, montrant la Saône ; au second plan, à gauche, une église ; à droite, les fortifications de Pierre-Scize.

Porte nord de Lyon et église Saint-Épipode. Gravure extraite de l’Histoire des églises et chapelles de Lyon de Jean-Baptiste Martin, 1908.

« Passé ce pontN 12, il vous semble entrer soudain dans une ville italienne, eu égard tant à la manière des constructions qu'aux façons de s'habiller et de parler des habitants6. »

Entre Saint-Paul et Saint-ChristopheN 13, prospèrent des armuriers, des imprimeurs et des libraires. Le sud de la place Saint-Paul voit également s'installer un bon nombre de changeurs, orfèvres et marchands d'origine piémontaise, florentine ou espagnole. La population de ce quartier, qui était encore pauvre au sortir de la Guerre de Cent Ans, s'enrichit tout au long du xve siècle et évolue, les activités subalternes disparaissant en grande partiean 2.

Entre la rue Juiverie, la place du Change et Notre-Dame du Palais se situe le cœur des activités bancaires lyonnaises, et un centre commercial très actif, dirigé par les Italiens et où logent les commis de toutes les nations européennesan 2. Certaines rues étaient, au milieu du xve siècle, encore habitées par des gens du peuple, qui se trouvent progressivement chassés du quartier. Symbole de cette évolution, la rue Juiverie « d'abord rue pauvre, « large, mal peuplée de juifs et pauvres gens », elle se transforme avec l'afflux de marchands et banquiers italiens ; « habitée par plusieurs et honorables personnes qui avaient fait édifier plusieurs grandes et belles maisons ... », elle devient « l'une des plus belles de la ville » »z 1.

Les quartiers de Pierre-Scize et BourgneufN 14 concentrent de longue date des activités de textile ; ils restent des quartiers pauvres durant toute la période. En 1561, le consulat abat une porte, quatre maisons et une tour pour réaliser une grande place : la place de BourgneufN 15,z 1.

Le plateau de Fourvière, Saint-Just et Pierre scize[modifier | modifier le code]

Vue du château de Pierre Scize au xviiie siècle, tableau de William Marlow ; National galleries of Scotland, Acc. No. NG 431.

Le plateau de Fourvière est très peu dense, encore majoritairement rural. Les pentes de la colline ne sont loties que le long des rues qui montent au plateau, comme la montée du Gourguillon, ou celle du Chemin-Neuf créée à cette époque.

Au sud, la localité de Saint-Just, juridiquement séparée de la ville de Lyon et dirigée par les chanoines est également séparée par des murailles qui l'isolent du reste de l'agglomération. Mais sa proximité l'intègre de fait dans la vie urbaine globale, comme lorsque le marché aux bestiaux du quartier Saint-Paul est transféré à Saint-Justan 2. Cette séparation disparait durant la municipalité protestante, où l'élite huguenote détruit les murailles du cloître.

Au nord, le château de Pierre Scize, d'abord possession de l'archevêque puis du roi via le gouverneur, surmonte la ville.

La presqu'île : de Bellecour aux pentes Saint-Vincent[modifier | modifier le code]

Gravure en noir et blanc montrant un monastère, bordé au second plan par la Saône couverte de barques.

Le couvent des Célestins, reconstitution du xixe siècle. Gravure extraite de l’Histoire des églises et chapelles de Lyon de Jean-Baptiste Martin, 1908.

L'urbanisme du côté de l'Empire est plus discontinu que celui du RoyaumeN 16. Sa densité plus faible est due à une urbanisation plus récente. Il est composé de trois vicianciens, datant du ixe siècle : Saint-Vincent au nord, le vieux bourg (autour de Saint-Nizier) et bourg Chanin au sudaq 3.

Le quartier Saint-Nizier est le centre commerçant de ce côté de la cité. Face au quartier du Change, ce quartier regroupe essentiellement des personnes aisées. En son centre, l'église Saint-Nizier est achevée fin xvie sièclef 2. Tout autour de l'église, on retrouve pelletiers, merciers, drapiers, marchands et notaires, entre les rues Vendrant, Longue et Mercière. Les grandes familles bourgeoises y résident, telles les Humbert, Aynard de Varey et Humbert de Villeneuve ; la rue Mercière a elle seule concentre les Le Maistre, Syvrieu et Thomassin. Au passage entre le xve et le xvie siècle, ce quartier regroupe le commerce du drap et des fourrures, et des parcheminiersan 3 ; plus tard, de nombreux imprimeurs s'y installent. Cette bourgeoisie s’agglomère à la noblesse, par l'achat de seigneurie ou le service du roi. On y trouve également des Milanais et des Allemandsan 1.

Tout autour du cœur du quartier, on rencontre des rues où les artisans et le menu peuple vit mieux qu'ailleurs, profitant des richesses des foires. Ainsi, les rues de la Pêcherie et de l'Erberie, majoritairement habitées de pêcheurs, préparateurs et vendeurs de poissons, ne connaît plus de pauvretéan 1.

En s'éloignant encore, en allant vers le Rhône, ou en descendant vers Bellecour, se trouvent des quartiers habitées de gens de conditions modestesan 3.

Plan scénographique de Lyon ; vue de la fortification des Terreaux, avec l'abbaie Saint-Pierre. Archives municipales de Lyon.

Les pentes de l'actuelle Croix-Rousse, appelées pentes Saint-Vincent sont peu peuplées. Elles se densifient à cette période, tout comme la rive gauche du Rhône. Des habitations sont construites le long des fortifications des Terreaux, et progressivement se constitue le quartier de la Déserte, au pied des pentesaq 3. Pour protéger ce nouveau quartier, Louis XII ordonne la construction d'un rempart en haut des pentes en 1512. Les plans sont faits et les travaux sont dirigés par Jean Perréalbg 1.

La presqu'île : de Bellecour à Ainay[modifier | modifier le code]

Au sud de Bellecour, et surtout à partir de la basilique d'Ainay, se trouvent surtout des prés, des vergers, puis des marécages et des îles. Ce quartier est sanctuarisé par des couvents qui possèdent de vastes surfaces, destinées à la production agricole. L'urbanisation ne touche pas cette partie de la ville durant la Renaissanceaq 3. Le pont de pierre sur le Rhône, long de 270 mètres, est transformé à la Renaissance. Construit alors pour moitié en pierre et pour moitié en bois, le consulat décide à la suite de nombreux effondrements et dégradations de le reconstruire entièrement en pierre. L’œuvre, réalisée en 1559 - 15607.

Démographie et immigration[modifier | modifier le code]

enluminure sur parchemin d'une charte de mariage de 1572

Charte de mariage de Jehan de Rivery et Fluvie de la Rivyre - 1572. Enluminure sur parchemin. Lyon, Musées Gadagne, Inv. 37.65.

Article détaillé : Pour l'étude des communautés étrangères, voir le chapitre "Nations étrangères".

Il est difficile d'estimer correctement la population en l'absence de recensement. Richard Gascon essaie d'établir une tendance à l'aide des nommées et des impôts sur les maisons. Selon lui, la population double entre les années 1450 et 1500, et double à nouveau durant la première moitié du xvie siècle. Lyon suit en cela la tendance générale en France où la population des villes gagnent entre la fin du xve siècle et le milieu du siècle suivant entre 10 et 100 %bc 1.

À partir du nadir démographique des années 1430-1440, la population de Lyon progresse régulièrement. Kleinclausz estime que la ville contient 25 000 habitants au milieu du siècleb 1. La croissance est ensuite forte, pour arriver à environ 35 000 habitants vers 1520a 4 et entre 50 000v 1 et 60 000, voire 75 000 au milieu du sièclee 1,z 6,bc 1. Cette augmentation est essentiellement due à l'immigration, issue de la Savoie, du Dauphiné et de la Bourgogne.

Le consulat a régulièrement des difficultés pour gérer convenablement le besoin en nourriture que l'augmentation de la population imposea 5. Rapidement, les bassins de production habituels ne suffisent plus, demandant des importations toujours plus importantes, venant essentiellement de Bourgogne. C'est l'une des causes de la Grande Rebeyne en 1529. Les épisodes de peste fauchent de larges parts de la population durant le siècle, mais l'immigration permet de reconstituer la population antérieure assez rapidement. Ce n'est qu'avec les guerres de religion que la population diminue très nettement. Zeller l'estime à autour de 30 000 - 35 000 habitants à la fin du xvie sièclebb 1.

Si Lyon durant toute la Renaissance est une ville cosmopolite, ce sont pour l'essentiel des personnes de passage, ou qui résident quelques années au plus. Peu d'étrangers de langue se fixent réellement. Au milieu du xvie siècle, la majorité des migrants installés par le mariage sont issus de la Savoie, de la Comté et du Dauphiné. Un peu moins viennent du Lyonnais même et de la proche Auvergne. Une petite minorité provient du reste de la France et à peine 5 % de régions parlant une autre langue que le françaisv 2.

Les institutions[modifier | modifier le code]

Gravure en noir et blanc montrant Lyon vue depuis la Croix-Rousse, au-delà des remparts.

Lyon vers 1570, gravure anonyme conservée à la bibliothèque universitaire de Salzbourg.

Dans le Lyon de la Renaissance, de nombreuses institutions se chevauchent, s'entremêlent, se repoussent ou s'opposent. Ces institutions, civiles, militaires, juridiques ou religieuses n'ont souvent pas de limites précises8.

L'institution essentielle est le consulat, qui dirige la cité et veille à assurer autant que possible son calme et sa prospérité. Il est aidé au sein de rapports complexes par de multiples institutions civiles qu'il contrôle plus ou moins aisément, Aumône générale, Pennons, Confréries, pouvoirs royaux. Il ne dispose pas du pouvoir judiciaire qui est, au début de la période, entre les mains des autorités religieuses avant d'être repris en main par le pouvoir royal. Celui-ci est très présent, au travers le gouverneur ou le bureau des finances. Enfin, les puissants marchands étrangers voient leur influence s'exercer au travers des Nations, institutions officielles qui leur permet de soulever des doléances et de les défendre efficacement.

Le consulat[modifier | modifier le code]

Miniature dans le Garbeau de l'Épicerie, manuscrit de 1519, représentant le consulat en assemblée octroyant la charge de receveur des taxes sur les épices à l'apothicaire Guillaume Gautheret. Archives municipales de Lyon (CC 4292).

Lyon est dirigée par le consulat, dont les membres sont de riches marchands des plus importantes familles de la ville. Charles VIII octroie en 1495 aux bourgeois le privilège de la noblesse pour les membres du consulatw 1,b 2.

L'origine sociologique des membres du consulat évolue au cours de la Renaissance. À la fin du xve siècle les hommes de loi, dont les familles sont liées aux fonctions royales, composent la majorité du consulat. Progressivement, avec l'enrichissement de la ville, les familles marchandes prennent de l'importance. Aux alentours des années 1520-1530, il n'y a plus qu'un quart de consuls issus des milieux des offices, les lignées marchandes ayant ainsi conquis le pouvoir à Lyon. Cette proportion tombe à moins d'un cinquième durant les décennies 1540-1550, et remonte progressivement ensuite pour arriver à une majorité d'hommes de loi sous Henri IVa 6. Quelle que soit l'origine de leur position sociale, le consulat est peuplé de personnes appartenant à un nombre limité de lignages. Durant le xvie siècle, seules quelques familles monopolisent les places consulaires : Regnault, Faure, Henry, Fenoyl, La Porte, et une quinzaine d'autres. Ainsi, malgré un renouvellement théorique de ses membres tous les deux ans, il y a bien une forte continuité de fait des personnes au pouvoira 7.

Le renouvellement des membres du consulat, comptant douze consuls à la Renaissance, se fait chaque année pour moitié, en décembre. Il s'opère en deux temps. Tout d'abord, les conseillers en exercice choisissent les maîtres des métiers en exercice à raison de deux par corps. La semaine suivante, cette assemblée se réunit pour choisir six conseillers parmi les notables lyonnais, qui rejoignent les six autres élus l'année précédente. Ce système favorise ainsi la cooptation et exclut de fait une grande partie de la population lyonnaise. Il n'y a ainsi jamais de membre du clergé, de nobles et de personne du menu peuplea 8.

Fonctionnement quotidien[modifier | modifier le code]

Au Moyen Âge et jusqu'en 1461, le consulat traite les affaires courantes chez l'un des conseillers, et réunit les assemblées dans la chapelle Saint-Jacques de l'église Saint-Nizier, voire dans la nef lorsqu'il y a trop de monde. Puis, après de longues hésitations, le consulat emménage rue Longue dans la maison Charnay, pour une cinquantaine d'années. En 1512, le feu ravage les étages supérieurs et le consulat reste un long moment sans lieu de réunion officiel. En 1564, il acquiert l'hôtel de Milan rue Grenette, au coin de la place des Cordeliers. Il n'y reste que jusqu'en 1576, date à laquelle il retourne rue Longue jusqu'en 1604. À cette date, il achète l'enseigne de la Couronne, au 13 rue de la Poulailleriea 9.

Pour prendre ces décisions, le consulat ne réunit généralement que quelques-uns de ses membres, l'assemblée étant rarement complète pour les affaires courantes. Pour les affaires plus importantes, généralement des levées de fonds, le consulat peut convoquer soit l'assemblée générale, soit celle des métiers. La première comprend les anciens conseillers et les personnages les plus importants de la ville, soit entre vingt et vingt-cinq personnes. La seconde permet de réunir théoriquement l'ensemble des forces économiques de la cité. Le reste du peuple en est donc également exclu. De plus, les métiers nouveaux ne sont pas ou peu représentés. Ainsi, les imprimeurs n'y apparaissent qu'en 1568. À choisir, le consulat réunit préférentiellement l'assemblée des notables, et passe quelquefois outre les décisions qu'elle prenda 8.

Pouvoirs consulaires[modifier | modifier le code]

Les pouvoirs du consulat, même limités par ceux du roi et des autres puissances temporelles locales, restent importants. « Ils nomment les maîtres des métiers et terriers (échevins et prévôts sortant de charge), réunissent l'assemblée des notables, choisissent tous les officiers employés par la cité, désignent les députés de la ville aux États généraux et à la cour, recrutent les commis ». Ils disposent des pouvoirs de police, nommant les capitaines pennons et pouvant emprisonner ou exiler les contrevenantsa 10.

Dans le domaine économique, ils contrôlent les cinquante-et-un métiers de la cité, enregistrant leurs règlements et nommant les maîtresa 10. Ils enregistrent et taxent toutes les entrées de marchandises. Ils surveillent les conformités des poids et mesures, assurent l'entretien de la voirie pour la circulation des personnes et des biens dans la villea 11.

Le personnel administratif[modifier | modifier le code]

Le personnel au service du consulat ne cesse de s'accroitre et de se spécialiser. La rédaction des actes officiels et les actions dans le domaine juridique concernent à partir de 1506 une personne particulière : le procureur général, toujours gradué en droita 12.

Le domaine financier, que ce soit la gestion des biens, des octrois, des dons et taxes sont depuis la fin du xive siècle l'affaire du trésorier et du receveur général. Le titre de cette dernière personne devient receveur des deniers communs en 1543a 12.

La milice municipale[modifier | modifier le code]

Article détaillé : Pennon (Lyon).

Dessin en couleurs montrant Lyon vue depuis la Croix-Rousse, au-delà des remparts. Les différentes églises et les deux ponts de la ville sont bien visibles.

Vue de Lyon en 1555, par Nicolas Le Febvre, BNF.

La milice est constituée de l'ensemble des hommes adultes valides, regroupés par quartiers, auxquels s'ajoutent des militaires de carrière payés par le consulat. La milice dans son ensemble comprend sept bannières elles-mêmes divisées en une trentaine de pennons. Les pennons sont enfin divisés en groupes d'une dizaine de personnes, commandés par un dizenier. Les gens du commun de la milice servent sur le guet, aux remparts ; les professionnels sont au guet, aux portes et l'élite bourgeoise à cheval et en villez 1,9.

Les compagnies royales de Lyon[modifier | modifier le code]

En 1430, la compagnie issue de la milice bourgeoise lyonnaise s'illustre à la bataille d'Anthon contre le prince d'Orange. Cela décide Charles VII à élever les archers lyonnais au rang de Compagnie Royale en 1431ac 1. Cette compagnie comprend les Francs-archers et les Arbalétriers.

La compagnie est placée sous le vocable de Saint Sébastien. En 1486, ils prennent place dans la chapelle Saint-Germain de l'église Saint-Nizier. De nouveaux statuts sont établis en 1498, instituant une deuxième compagnie. Les archers s'entraînent initialement sur un terrain entre les rues Grôlée et de l'Hôpital. En 1513, ils déménagent sur une butte leur appartenant dénommée le tènement des Auges, placée entre la rue des Augustins et la place Sathonayac 1.

Leur rôle est largement dévalué lorsque apparaît en 1498 la compagnie des Couleuvriniers-Arquebusiers, mais elles ne sont formellement dissoutes qu'en 1591. Les arquebusiers obtiennent officiellement la garde de la ville en 1561. Ils sont alors deux cents et leur capitaine est directement nommé par le consulatz 1.

Les confréries[modifier | modifier le code]

Apparues lors de la première partie du xive siècle, les confréries territoriales, placées sous le vocable du Saint-Esprit, sont les relais entre le peuple et le consulat. Regroupées sous la confrérie de la Trinité, ces societates, ou frairies encadrent la population de chaque quartier par les fêtes, rituels, et les élections des responsables de chacune, les courriers. Ils interviennent pour les fonctions hospitalières, funéraires ou festives. Souvent socialement homogènes, par quartier, les confréries jouent un grand rôle de régulation socialev 3.

« Au cours du xvie siècle, ces groupements territoriaux ne sont plus au cœur des structures de la sociabilité urbaine. L'expansion leur a été défavorable : ils se sont trouvés battus en brèche par des concurrences multiples et ont abandonné bon nombre de leur fonction, soit à la municipalité (les fonctions hospitalières par exemple), soit aux religieux Mendiants (les fonctions funéraires), soit à des groupements concurrents »v 3.

Les groupements concurrents les plus importants sont les confréries professionnelles. En 1530, sur les quarante-huit reconnues, les deux tiers sont professionnelles. Celles-ci sont organisées en réseau, et non en fonction d'un territoire ; elles sont difficiles à situer dans l'espace urbain, sauf leur siège spirituel toujours identifié au sein d'un édifice religieux. Nouvelles venues, organisées pour la protection de leurs membres, elles « font bannière », « font monstre », pour intimider et montrer leur puissance. Cela débouche régulièrement sur des accès de violence, dont les autorités se plaignent sans pouvoir les jugulerv 4.

Les institutions hospitalières et d'assistance[modifier | modifier le code]

Il existe à la Renaissance de nombreux lieux pour recueillir les malades et les miséreux. Liés pour la plupart d'entre elles à une institution ecclésiastique, soutenus très souvent par de riches donateurs, ils sont progressivement placés sous l'autorité du consulat, qui établit la grande structure de l'Aumône générale en 1534.

L'Aumône générale[modifier | modifier le code]

Gravure montrant de nombreux miséreux faisant la queue pour obtenir une aumône distribuée par quatre magistrats.

Frontispice de l'ouvrage La police de l'aulmosne de Lyon publié chez Sébastien Gryphe, 1539. Université de Virginie.

Avec la croissance démographique, Lyon voit le nombre de pauvres et nécessiteux augmenter, dépassant les capacités de la charité traditionnelle, gérée par les autorités ecclésiastiques. Le consulat décide donc de fonder une aumône publique pour pallier l'afflux des personnes dans le besoin, et secourir la population lyonnaise paupérisée elle-même. En effet, à l'instar d'autres villes du royaume telles ParisRouen ou Dijon, Lyon voit l'inflation des prix des denrées alimentaires placer en situation de précarité une partie de sa population laborieuse. Autant par souci de charité chrétienne que pour conjurer des soulèvements, les autorités locales mettent donc en place des institutions de secours. À Lyon, la rebeyne de 1529 tout comme le tric des ouvriers typographes de 1539 marquent les esprits des élites urbaines, les poussant à organiser la charité publiqueav 1.

L'Aumône générale est constituée en 1534 à la suite d'une décision de 1531, année de terrible disettebd 1. Elle fonctionne par des contributions régulières de bourgeois aisés, est gérée par huit puis neuf membres du consulat et son action principale est de faire fabriquer et vendre du pain en dessous de son prix de revient. Si les membres de l'aumône générale prennent des risques, car ils peuvent devoir avancer les fonds, ce poste devient en retour une des voies vers celui d'échevind 1.

« La première tâche de l’Aumône est l’assistance ; elle a son moulin et sa boulangerie, et elle distribue du pain à tous les pauvres en temps de disette et, en temps ordinaire, seulement aux invalides, aux malades, aux veuves et aux orphelins. Le deuxième devoir est de procurer du travail : les enfants sont placés en apprentissage chez les marchands-drapiers ou comme domestiques dans les foyers des notables ; quant aux adultes, on les emploie à curer les fossés ou à nettoyer les rues. Mais la chose n’est pas facile ; bien des mendiants valides renâclent devant ces travaux forcés, et il n’est pas rare qu’il faille les enchaîner pour les contraindre, voire les emprisonner en cas de rébellion. Inévitablement, la police en vient à être associée à l’assistance. Alléchés par ces distributions, les pauvres accourent de tous côtés à Lyon, qui ne peut faire face : on affecte donc à l’Aumône des bedeaux, familièrement appelés « chasse-coquins », chargés d’expulser les indésirables. On comprend l’ambivalence des sentiments des secourus devant ces aspects coercitifs »bc 2.

L'établissement de cette institution est plutôt en avance sur les autres cités en France, et se situe dans un contexte général européen de laïcisation et de professionnalisation de l'organisation des secours aux pauvres10. Elle montre également une évolution sociale où la nature du pauvre se transforme en Occident. Il n'est plus seulement le nécessiteux incapable de subvenir à ses besoins et qu'il faut aider par charité chrétienne, mais il devient l'homme valide sans ressource qu'il faut soutenir pour garantir la paix sociale. Cette institution est également une œuvre humaniste pour qui la pauvreté avilit l'homme et le rabaisse au rang de l'animalbc 3.

En 1560, l'Aumône générale est une institution si importante qu'elle se sépare du consulat lui-même pour devenir un corps indépendant. Cette séparation est officialisée par des lettres patentes de Charles IXbd 1. Le rectorat fonctionne à partir de cette date par cooptation, même si le consulat ratifie ces nominations, et qu'il garde la main sur les décisions importantesd 1.

Les hôpitaux[modifier | modifier le code]

La durée d'existence de ces plus petites institutions est très variable, certains subsistant de nombreux siècles tandis que d'autres ne survivent pas à la mort de leur premier donateur. Il est difficile de faire une liste précise du nombre d'hôpitaux lyonnais, d'autant que les sources qui les évoquent sont souvent partielles, indirectes et imprécisesan 4 ; voici les plus notables.

L'« hôpital du Pont du Rhône » est probablement le plus ancien de la presqu'île. Nommé pendant le Moyen Âge « Aumônerie du Saint-Esprit », « hôpital des pauvres » ou « maison de l'Aumône », il est fondé en 1129 par la confrérie du Saint-esprit. Il est confié en 1335 aux abbés de Chassagne en Dombes en prenant alors le nom d'hôpital du Pont du Rhône. En 1478, il est donné au consulat lyonnais. Il est situé au sud du quartier Boucharnin, près du fleuvean 5.

Entre la rue Mercière et la Saône se trouve l'« hôpital Saint-Antoine », qui a eu une grande importance durant le xve siècle. Il en est de même pour l'établissement Sainte-Catherine, situé sur l'actuelle rue d'Algérie, et qui dépend des dames de Saint-Pierre ; de nombreux lyonnais testent en sa faveur. Plus modeste, l'hôpital des veuves, nommé également l'Hôtel-Dieu des femmes, recueille surtout des pestiférées sur la rue Mercière, entre les rues Raisin et Thomassinan 5.

Sur la rive droite de la Saône, les établissements d'assistance sont souvent de très anciennes fondations et sont liées aux églises Saint-Georges et Saint-Paul.

De cette dernière dépendent l'« hôpital des Deux-Amants », à l'extrémité de la rue Bourgneuf, remplacé par l'établissement de « la Chana » et l'« hôpital Saint-Eloi » tout proche de l'église, qui disparait en 1503 suite à un procès entre le chapitre Saint-Paul et le consulatan 5.

L'église Saint-Georges, quant à elle, surveille l'établissement des « hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem », qui a vocation a accueillir des pèlerins. Tout proche de l'église Sainte-Marie se trouve le petit hôpital du même nom. Ces deux établissements ne sont guère actifs. Enfin en 1474, Jacques Caille, riche marchand lyonnais, et sa femme Huguette Balarin, décident de fonder l'« hôpital Saint-Laurent »N 17 pour les pestiférés et acquièrent du chapitre de Saint-Irénée la chapelle de Saint-Laurent des vignes ainsi que des terrains et bâtiments attenants, situés au-dessous de la paroisse Saint-Irénée. Une fois les aménagements réalisés, l'institution est confiée au consulat. Cette église devient rapidement trop petite et la confrérie de la Trinité l'agrandit à ses frais en 1509. En 1533, Thomas II de Gadagne, sous l'impulsion du dominicain Sante Pagnini demande à l'architecte Salvator Salvatori11 de construire un troisième bâtiment12,au 1,13.

Tous ces hôpitaux sont des établissements de petites dimensions, qui disposent de peu de lits pour les malades et qui servent essentiellement de point de ralliement pour les pauvres qui viennent recevoir une distribution de nourriture. Les religieux qui gèrent ces hôpitaux ne disposent le plus souvent pas de fonds suffisants, entre possessions foncières et legs, pour subvenir aux besoins de tous les nécessiteux. Ils doivent donc souvent quêter auprès de la population pour compléter leurs ressourcesan 6.

Les maladeries[modifier | modifier le code]

Au xve siècle, quatre établissements sont constitués en dehors de la ville pour y tenir les pestiférés et les malades dont on refuse la présence au sein de la cité, par peur de la contagion.

Il y en a une vers Saint-Irénée, nommée la maladerie du Griffon ; Une vers Saint-Foy nomme Saint-Martin ; une à Vaise sous le nom de Saint-Pierre ou Balmont et une de l'autre côté du pont du Rhône qui remplace peut être l'ancien hôpital du Béchevelin, la maladerie de Sainte-Madeleinean 7.

La justice[modifier | modifier le code]

Depuis une décision de Philippe V, l'archevêque seul dispense la justice séculière depuis 1320. Elle est toutefois grignotée progressivement par le bailli du roi, vers qui se tournent le plus souvent possible les bourgeois lyonnais soucieux de se soustraire à l'influence trop proche de leur seigneur ecclésiastique. François Ier prend totalement possession de ce pouvoir en 1531, qui est rendue en 1547 par Henri II. Lors de la prise de pouvoir protestante de la ville en 1562, le roi en profite pour accaparer illégalement l'ensemble des pouvoirs judiciaires, en l'absence de l'archevêque. Cette situation devient définitive. Les derniers pouvoirs judiciaires seigneuriaux des autorités ecclésiastiques après cette date sont ceux détenu sur le château de Pierre Scize par l'archevêque et sur le cloitre Saint-Jean par le chapitre cathédra

La justice à Lyon est composée de la cour séculière, dirigée par l'archevêque pour toutes les causes temporelles, de l’official, dirigé également par l'archevêque et qui a compétence pour tous les délits spirituels. Le chapitre Saint-Jean peut également juger des faits répréhensibles en usant de son pouvoir spirituel (excommunicationinterditanathème) au sein d'une cour du glaiveax 2.

Le consulat n'a jamais reçu de pouvoirs judiciaires de la part du roi. Ainsi, la justice des foires leur échappe également dès les origines, le roi se réservant un officier pour cela nommé conservateur et gardien des foires. Les bourgeois réussissent toutefois à obtenir le droit de nommer des arbitres qui peuvent régler des conflits liés aux foires avant d'en appeler à l'officier royal. Cette instance, préfiguration des tribunaux du commerce, existe également à Rouen et Toulouse, et a été copiée à Paris en 1536 par édit royaml

Le gouverneur

 Gouverneur de Lyon.

Le gouvernement des provinces est une institution créée par les Capétiens pour administrer en leur absence tout ce qui concerne les affaires militaires, et essentiellement prendre toutes les mesures nécessaires pour défendre leur territoire. Le gouverneur du Lyonnais contrôle un espace comprenant les actuels départements du Rhône et de la Loire, avec en plus des zones du Velay et de la Dombes. Il règne sur trois petites provinces : le comté du Lyonnais, la seigneurie du Beaujolais et le comté de Forez.

Cette fonction apparaît après celles de bailli et de sénéchal, sans qu'il y ait immédiatement suppression des précédentes institutions, qui tombent le plus souvent progressivement en désuétude. Ainsi, le premier gouverneur de Lyon est Tanneguy IV du Chastel en place de 1462 à 1468 qui succède à des sénéchaux. Il reçoit une délégation de pouvoirs très large de la part du roi, qui en fait un véritable vice-roi dans sa province. Il a, pour cela, le titre de lieutenant-généralo 1.

Fonctions et pouvoirs[

Carte couleur de la France en 1477, montrant les possessions royales, bourguignonnes, anglaises et autres, ainsi que la frontière avec le Saint-Empire.

Le royaume de France

et ses voisins

en 1477.

Ces fonctions militaires principales, qui lui donnent le commandement sur toutes les troupes de sa province, s'amenuisent avec le temps, surtout à partir du moment où son territoire n'est plus sur une frontière stratégique. Il conserve, par contre, toute autorité sur les places fortes, fortifications, munitions ou déplacements de troupes. L'une de ses prérogatives les plus importantes est la discipline des gens d'armes. En effet, faute de baraquements propres, les garnisons logent chez les civils, et se livrent souvent à des exactions.

Responsable du calme et de l'ordre public, il voit ses pouvoirs civils augmenter pour réprimer tous les troubles, des bagarres et rixes en passant par les révoltes. Il a également autorité pour s'occuper des sujets d'intérêt général tels les disettes ou épidémies, mais aussi des problèmes plus ponctuels comme la voirie, la circulation ou la régulation de l'alimentation.

Pour agir, il peut mobiliser et mettre sous ses ordres tous les organismes royaux et municipaux, dont la milice ; et même lever le ban et l'arrière-bano 1.

Position et soutien

Très souvent, les personnages choisis pour être gouverneurs sont issus de la bonne noblesse, fidèle au roi et sont des militaires aguerris. Comme le gouverneur cumule très souvent de nombreuses fonctions, et qu'il remplit régulièrement des missions pour le roi en dehors de son territoire, il nomme un lieutenant qui le supplée lorsqu'il est absent et le seconde s'il est présento 1.

Rôle à la Renaissance

Durant la Renaissance, Lyon est une ville frontière dont les voisins sont quelquefois menaçants. Le duché de Savoie possède la Bresse, le Bugey et le pays de Gex, et mène une politique ambiguë. De même, le duché de Bourgogne est un ennemi direct durant la guerre de Cent Ans, et tout autant du temps de Charles le Téméraire. Celui-ci attaque et occupe le Mâconnais. Enfin, la Franche-Comté est aux mains des Habsbourg, amenant l'Empire non loin de la citéo 2.

Le bureau des finances

Franc d'Henri III, créateur des bureaux des finances. 1

582.

Le bureau des finances de Lyon est créé en 1578, en même temps que tous les autres du royaume. Issu d'une réforme actée en 1577, il répond à une volonté de rationalisation de la perception de l'impôt et, de manière plus pragmatique, à la création de nouveaux offices pour générer de nouveaux revenus Le bureau des finances de Lyon a pour cadre de compétence la généralité de Lyon Il comprend alors cinq membres qui se réunissent pour la séance inaugurale au Palais de Roanne le . Il comprend quatre anciens trésoriers de France : les frères Camus, M. Groslier et M. de l'Aulbe. Le cinquième, nouveau venu dans l'institution, est M. Garrault, trésorier de l’Épargne.

Les premières années, le bureau se tient chez l'un ou l'autre des trésoriers, puis, en 1582, ils louent une maison rue Saint-Jean

Les nations étrangères

Lyon à la Renaissance voit arriver de fortes communautés étrangères, artisans, marchands, banquiers. Au début du xvie siècle, elles sont si nombreuses que Lyon est vue comme cosmopolite par les Lyonnais de souche, comme le dit Symphorien Champier :

« là où habitent gens de toutes nations, comme Italiens, Florentins, Génois, Luquois, Allobroges, Allemans, Espagnols et autres nations »

.

Lorsqu'ils sont suffisamment peuplés et structurés, ces groupes créent des « nations ». Cet afflux est dû aux lettres patentes de Charles VII conférées en 1420 et continuellement reconduites par la suite qui exemptent de taxes les marchands français et étrangers1. Ces organismes leur permettent de s'organiser, de réguler leurs propres membres et d'être représentés vis-à-vis des autorités, que ce soit le consulat lyonnais, le roi de France ou l'autorité de leur lieu d'origine.

Les nations constituées sont des interlocutrices régulières du consulat, qui défend leurs privilèges avec fermeté. Les représentants des nations prennent part à toutes les solennités, et en particulier les entrées royales et celles de grands personnages. Sûrs de leur richesse et de leur puissance, ils montrent lors de ces occasions l'étendue de leur fortune avec de riches équipages et de beaux habits de soie, de velours et d'argent

 

Les foires et le grand commerce

 Foires de Lyon.

Lyon acquiert une immense prospérité et entre pleinement dans la Renaissance grâce à ses foires, qui attirent rapidement de nombreux marchands et banquiers.

 

Création et premières difficultés

Marchands de laine.

 Tacuinum sanitatis.

 

Les deux foires annuelles créées en 1422, qui avaient cessé en 1429 en raison de la maraude des écorcheurs, reprennent en 1444. Dès l'année suivante, Charles VII en ajoute une troisième, et interdit aux marchands du royaume d'aller commercer à Genève, pour favoriser l'essor économique de Lyon. Aussitôt sacré, le roi Louis XI confirme ces foires le j Depuis 1420 déjà, les marchands étrangers tout comme les français sont exempts de taxes lors de ces foires

Lettres patentes de Louis XI du , autorisant leur quatrième foire de 15 jours, accompagnent l'immense croissance des foires45. Elles comptent désormais 60 jours par an, au lieu de 9 jours.

Toutefois, les foires de Lyon sont paradoxalement menacées par les marchandises françaises. En effet, Louis XI réunit à Tours, le , les représentants des villes marchandises du royaume de France, afin de diminuer la fuite des devises, car les foires lyonnaises voient un grand nombre de marchandises étrangères entrer dans le royaume. Faute de réussite à Caen, puis à Rouen, l'assemblée des marchands demande au roi de supprimer les foires de Lyon, pour assurer le succès des foires normandes. Cependant, Louis XI n'est pas convaincu et maintient les droits des Lyonnaisj 3.

D'ailleurs, d'autres duchés aussi tentent d'affaiblir les foires de Lyon. D'une part, il s'agit des foires de Chalon-sur-Saône, autorisées par Philippe III de Bourgogne. D'autre part, en Savoie, interdiction est faite aux marchande de se rendre aux foires de Lyon, ordonnée par Amédée IX de Savoie le , pour contrer celle de Louis XI concernant les foires de Genève. En 1467, les conférences entre deux50, tenues à Montluel, concluent deux foires par an dans chacune des villes, à des dates relativement éloignées les unes des autres. Bien entendu, cela provoque un gros mécontentement des Lyonnais. Finalement, le roi déclare le  par ses lettres patentes, les décisions nulles, en rétablissant ces quatre foires51,52, sans que la ville de Lyon se dépeuplej.

La mort du duc Charles le Téméraire en 1477 bouleverse cette concurrence. À mesure que les foires de Genève voient leur fréquentation diminuer, pour payer un gros montant d'amende aux Suisses, celles de Lyon connaissent une progression considérable, devenant l'un des plus grands centre commercial et financier européen.

Les foires sont définitivement établies et ne sont plus remises en question après 1494.

Organisation

Marchands de soie,

Tacuinum sanitatis.

 

Les quatre foires se tiennent le premier lundi après la fête des rois, celle de Quasimodo, le 4 août et le 3 novembre. On nomme alors les foires : foire des rois, foire de Pâques, foire d'août et foire de la Toussaint. Lors de chacune, les transactions durent quinze jours. Durant cette période, personne ne pait physiquement personne. Les transactions se négocient et chacun note sur des carnet ce qu'il a accepté, de qui et à quel prix.

Après les foires proprement dites, vient la période des paiements. Elle se déroule en trois étapes. En premier lieu, les marchands se réunissent et sous la direction du consul de la nation florentine, ils acceptent ou refusent les transactions auparavant négociées par eux ou leur représentant. Ils peuvent les accepter sous protêt. De deux à quatre jours après, vient la période du change. Les marchands, toujours assemblés, fixent les dates de paiements, les taux d'intérêt s'il y a de l'argent prêté et le cours du change pour les transactions dans des monnaies étrangères. Trois jours après a lieu le paiement proprement dit, au comptant, en espèces ou par virements avec des lettres de change. Beaucoup de marchands « virent partie », c'est-à-dire qu'il proposent à leurs créanciers d'autres lettres de débit venant d'autres personnes présentes à cette foire. Ainsi, un certain nombre de dettes et créances s'éteignent par un cycle de remboursement croisés proche de la Compensation

Localisation

Durant les premières années, le consulat réglemente la localisation des foires, essayant d'alterner selon l'année pour qu'elles se tiennent soit du côté de l'empire, soit du côté du royaume53. Après plusieurs décennies de tâtonnements et de conflits, le roi Louis XI tranche en demandant au consulat de laisser les marchands se regrouper selon leurs besoins. Le consulat s'exécute et la ville dans son ensemble est alors un grand marché européen, où les commerçants se regroupent par affinités librement.

Les foires ont lieu autant dans les boutiques, que dans les rues sur des tréteaux ou sur le sol. Elles sont centrées sur le pont sur la Saône ; du côté du royaume cela va du quartier de la Juiverie à la place de Roanne et côté empire, de la place de l'Herberie, par la rue Saint-Éloi, la rue Mercière, les quartiers de la Platière, de la Grenette, Saint-Antoine, des Cordeliers jusqu'au Rhône. Avec le temps les foires s'étendent jusqu'à la place Confort et les Terreaux.

Les commerçants exercent également quand ils le peuvent dans des boutiques ouvertes à la rue. De la même manière, le consulat voulu réglementer les locations, mais Louis XI libère également cette partie du commerce. Les marchands étrangers louent donc des boutiques, qui, lorsqu'ils ont trop de marchandises invendues, sert de dépôts jusqu'à la foire suivante. Une fois libres, les marchands tiennent boutiques dans tous les quartiers actifs et progressivement, certains se regroupent par types de marchandises. Ainsi, les pelletiers s'installent d'abord rue Juiverie avant d'aller au xvie siècle à la Grenette et aux Cordeliers ; la mercerie est présente le long de l'église Saint-Nizier, et sur le pont sur la Saône ; la quincaillerie sur la place Confortao 7.

Produits échangés

Lyon, lors de la plénitude de son âge d'or économique, connait un grand brassage d'œuvre d'art. La cité rhodanienne « est le contre le plus important pour la commercialisation des œuvres d'art, précisément en raison de la nombreuse présence de compagnie commerciales italiennes ». Parmi les compagnies qui se spécialisent sur ce marché, les Capponi lyonnais vendent des statues de marbres au connétable de Montmorency, des sculptures pour le villa de Beauregard ou une fontaine de marbre pour Anne de Beaujeu. Ces marchands ont pour principaux clients les monarques, à de riches bourgeois ou à la noblesse française.

 

Marchands Lyonnais

Les marchands Lyonnais participent pleinement à ses échanges en se rendant dans les villes étrangères pour commercer. Ainsi, plusieurs familles envoient à Gênesdes représentants pour vendre là-bas des toiles anglaises ou flamandes, ou de la production lyonnaise, et pour importer des soieries. Les Lyonnais ne jugent pas utile de fonder une Nation dans la République génoise à l'instar des étrangers à Lyon. Ils subissent ainsi les contrecoup de la décision des rois de France d'expulser du royaume les Génois lorsqu'il est en conflit avec eux. Les marchands parviennent toutefois à se défendre efficacement lorsque les autorités génoises tentent de les imposer, comme lors de l'épisode de la Drictus SabaudieN 27, en 1508-1511bh 7.

 

Les possessions terriennes des Lyonnais

Binage de la vigne

. Gravures sur bois du recueil

"Petra de Crescentia commodorum ruralium Opus libri XII". Speyer, 1493.

Les bourgeois lyonnais s'enrichissent

et deviennent de solides propriétaires terriens 

; renforçant ainsi leur position sociale au détriment

des seigneurs traditionnels qui sont les archevêques et les chanoines.

 

La géographie de leurs possessions nous est connue grâce aux « nommées » de 1493. Elles indiquent que 849 contribuables possèdent, hors de Lyon, 1 900 hectares de terres. Ces propriétés sont concentrées à l'ouest de Lyon, le long des fleuves, principalement entre Vaise et Millery. On peut également noter des placements importants dans les monts de Tarare, de Jarez, sur les pentes du Pilat. Ce document ne recensant que soixante dix paroisses, manquant les Monts d'Or et entre Irigny et Vernaison, où les élites lyonnaises sont fortement implantées depuis le xive siècle, ces chiffres sont nécessairement largement en dessous de la réalité.

Une bonne part de ces investissements concernent des vignobles (55 % de leur patrimoine rural), les plus riches concentrant avant tout leur argent dans l'élevage. Lors des crises, les bourgeois soutiennent le redressement des communautés villageoises de la région en prêtant de l'argent, achetant les productions, faisant des commandes et des investissements (moulins, irrigation, maisons et granges), surtout durant la seconde moitié du xve siècle

Si les bourgeois lyonnais investissent souvent dans la terre, beaucoup achètent de simples pensions, des rentes en nature, que le paysan vend contre une somme d'argent destinée à investir. Ces rentes deviennent courantes à la Renaissance, qu'elles se vendent ou s'échangent aussi bien que des biens physiques.

La soie à Lyon

Histoire de la soierie à Lyon.

La fabrication de la soie à Lyon apparaît à la Renaissance. Profitant d'un environnement très favorable avec les foires, une grande liberté entrepreneuriale et la présence régulière de monarques, l'industrie soyeuse se développe rapidement, pour atteindre un premier âge d'or sous le règne d'Henri II avant de subir une crise sévère durant les guerres de religion.

Une première tentative avortée

Louis XI,

qui tente d'implanter l'industrie

de la soie à Lyon.

 Brooklyn Museum,

 New York

 

L'origine de cette implantation vient de la volonté du roi Louis XI de limiter la fuite de l'or du royaume car la noblesse de France, friande de ce tissu, l'achète très cher à des marchands étrangers, principalement italiens Par ailleurs, lors de son exil en Brabant, auprès de son oncle Philippe III de Bourgogne, il s'aperçoit que les états de Bourgognes bénéficient des industries de luxe pour leurs finances. Il décide d'accroître ces industries dans le royaume de France, afin de rétablir le pays détruit et affaibli par la guerre de Cent Ans.

Le roi demande donc d'implanter la fabrication de soieries dans sa ville. Il promulgue pour cela des lettres patentes en date d'Orléans le 57 et soutient l'opération en demandant par une lettre du  destinée « A noz chiers et bien amez les conseilliers, bourgois et habitans de nostre ville de Lion » de fournir 2 000 livres tournois pour financer l'installation des ouvriers58. Deux ans plus tard, le roi ordonne encore aux Lyonnais de fournir à un officier lyonnais Jean Grant, docteur en droit et lieutenant, et à un certain Perroquet des subsides pour mettre en branle une industrie soyeuse. Le lieu est propice, avec les foires annuelles qui attirent de nombreux marchands européens. Jean Grant fait venir quelques artisans et fait tisser et teindre plusieurs piècesj 6. En parallèle, Louis XI n'hésite pas à taxer toutes les importations de velours, de satins, de damas et de taffetas

Le , Louis XI accueille à la Bouille le comte de Warwick, ambassadeur d'Édouard IV d'Angleterre. En lui présentant les soieries françaises à Rouen, le roi lui propose des privilèges commerciaux, avec un objectif clair : exporter vers l'Angleterre la production française pour faire entrer du métal précieux. La qualité des soieries françaises est assez bonne, car Warwick les adore

Toutefois, cette première tentative tourne court. Les bourgeois lyonnais, soucieux de ne pas froisser leurs partenaires italiens, et de ne pas les voir partir dans la cité concurrente de Genève, tergiversèrent et finir par accepter de payer l'argent demandé, pour que les ateliers, après quelque temps d'activités à Lyon, soient envoyés à Tours, au château de Plessis-lèz-Tours, en 1470. Ce refus des marchands lyonnais vient d'une conjoncture qui ne semble alors pas favorable à cette industrie. La main d'œuvre n'est pas assez abondante en ville pour permettre une production bon marché, les gains du simple commerce de la soie sont certains et réguliers, et l'argent des marchands soyeux italiens est alors indispensable à la bonne marche de foires naissante. Et c'est la modification de cette conjoncture qui permet une cinquantaine d'années plus tard la véritable naissance de la soie lyonnaise.

Entretemps, un marchand lucquois, Nicolas de Guide tente de tisser de la soie à Lyon en 1514, mais il est violemment pris à partie par des compatriotes, qui l'accusent de faire concurrence à sa propre cité. Non soutenu par le consulat, il abandonne

Étienne Turquet et le véritable démarrage de la soierie lyonnaise

marchands de soie,

 Tacuinum sanitatis.

 

Le véritable démarrage se produit avec Étienne Turquet et Bartholomé Naris, qui obtiennent le privilège de la fabrication des étoffes d'or, d'argent et de soie par lettres patentes d'octobre 1536 de François Ierg 2. Tous deux originaires du Piémont, ils sont invités par des marchands lyonnais à fabriquer à Lyon de précieux tissus. Car cette fois-ci, les autorités lyonnaises sont demandeuses, et sollicitent le roi pour obtenir des privilèges. Ce dernier soutient l'initiative, souhaitant répondre à la trahison des Génois qui ont rompu leur alliance avec lui pour se liguer à l'Empereur. François Ier engage des représailles commerciales, dont l'interdiction de l'importation des soieries génoises. En plus de l'exclusivité de production, les deux promoteurs obtiennent du roi et de la ville l'exemption aux charges communes pour les ouvriers étrangers qui viennent travailler à Lyon. Mais la principale mesure est la levée des taxes sur les soies grèges qui permet d'avoir une matière première à un prix intéressant. Ils fondent une première société en 1536, qui accepte progressivement d'autres marchands pour augmenter les capitaux.

Le consulat lyonnais soutenant l'initiative, il prête une maison pour installer les premiers ateliers, et met à la disposition des entrepreneurs les pauvres et les orphelins présents dans les institutions de charité pour leur donner du travail. Parmi cette main d'œuvre bon marché, il y a les filles de l'Aumône générale, des couvents de Sainte-Catherine, de la Chana, de Bourgneuf, de Saint-Georges, à qui l'on apprend le dévidage. Les garçons pauvres, quant à eux, sont mis au tissage. Les ateliers ne sont pas concentrés, mais présents dans toute la ville, leur plus grand nombre étant sur la presqu'île. Des mouliniers sont établis également, ainsi qu'à Saint-Chamond, mais dans les premiers temps, leur manque d'expérience et leur faible équipement les rend peu productif ; les soyeux envoient alors les soies grèges à Avignon pour qu'ils les préparent pour le tissage.

Turquet fait donc venir des tisserands d'Avignon et de Gênes. Dès l'année suivante, trois métiers sont en marche, et il est rejoint par un autre entrepreneur, Rollet Viard, lyonnais maître soyeux à Avignon. Progressivement, des investisseurs les rejoignent, étrangers ou lyonnais (les Senneton et les Camus). En 1540, la première structure disparait, probablement pour libérer le métier et que d'autres entrepreneurs puissent tisser également de la soie et des matières précieuses. En 1545, une autre société de la Fabrique lyonnaise est fondée, avec un capital de 8 000 livres, composée de Turquet, de plusieurs initiateurs lyonnais du mouvement et de banquiers.

Le premier âge d'or de la soierie lyonnaise

Marchands de tissu

 à la Renaissance,

 Tacuinum sanitatis.

 

Le succès est immédiat et immense, Roger Doucet considérant la période du règne d'Henri II comme le premier apogée de la soie lyonnaiseb 32. En 1548, lors du défilé pour l'entrée de Henri II, 459 maîtres tisserands défilent ; entre 800 et 1 000 personnes vivent de la soierie à Lyon. La réussite de cette industrie a pour cause un contexte commercial très favorable, une main d'œuvre disponible abondante et la grande liberté pour les artisans, garantie par les lettres patentes du  et du b 30. Les premiers soyeux ont pu ainsi organiser leur entreprise a leur guise et les premiers règlements arrivent, en 1554, pour structurer une industrie alors florissante. Ces règlements, rédigés par les membres du consulat et les maîtres tisserands sont acceptés par le roi par lettres patentesb 33.

Toutefois, cette réussite ne doit pas cacher que pendant toute cette période, Lyon ne fabrique que des tissus unis, satintaffetasvelours, draps d'or ou d'argent. Tout juste les maîtres tisserands tentent-ils de faire de petits motifs à l'aide de ligatures ou de baguettes. Les Italiens restent seuls maîtres de la fabrication des façonnés Il faut attendre les années 1600 pour que Lyon y parvienne, avec les évolutions techniques apportées par Claude Dangon, très probablement importées d'Italie Par ailleurs, les chiffres fournis par le consulat sont difficiles à exploiter, car souvent grossis par les intéressés et mélangeant dans un même groupe les travailleurs de la soie et de la laine. Toutefois, cette première production a réussi à s'imposer aux côtés des importations de soieries italiennes dans le royaume de France, en étant moins chères que les productions d'entrée de gamme de ces dernièrese 4. La croissance de la production de la soierie du royaume (et donc de Lyon) est difficile à estimer. Richard gascon prend appui sur l'entrée des balles de soie non-ouvrée ou semi-ouvrée, et donc destinée à la production de tissu en soie, pour proposer qu'entre 1522 et 1544, le volume est multiplié par 2.5, et qu'entre 1544 et 1569, il l'est encore par 8.

Le commerce de la soie est le plus important trafic des foires lyonnaises, loin devant tous les autres, épices comprises. Ainsi, pour l'année 1569, la valeur des échanges de soie sur la place lyonnaise lors des quatre foires représente plus de la moitié de la valeur totale de toutes les marchandises achetées et vendues. Et de fait, la quasi-totalité de la soie entrant dans le royaume de France passe par Lyon

1560 - 1590 : la première crise de la soie à Lyon

Charles IX,

roi de France

qui précipite la crise de la soie lyonnaise,

tableau de François Clouet,

 Kunsthistorisches Museum.

L'occupation par les forces protestantes de la ville en 1562 et 1563 provoque une crise qui pourrait être passagère, mais qui, suivi d'autres évènements négatifs, entraînent la soierie lyonnaise dans la première crise cyclique de son histoire.

La prise du pouvoir de Lyon par les protestants en 1562 entraîne le départ de nombreux grands marchands qui sont aussi de grands fabricants. Les métiers manquent brutalement de matière première, et les circuits commerciaux pour vendre la soie s'affaiblissent fortement. La peste s'invite les années qui suivent et accentue la dépression ; les maîtres soyeux qui restent évoquent le chiffre des deux tiers des ouvriers qui ont disparu

À ces catastrophes ponctuelles s'ajoute un évènement qui affaiblit la soie lyonnaise dans un environnement concurrentiel. Charles IX, alors âgé de treize ans et qui vient de prendre possession de son royaume ravagé par les divisions religieuses, décide pour trouver de l'argent de taxer l'entrée de la soie dans le royaume à hauteur de 50 %. Cela entraîne une perte importante de compétitivité pour les tisseurs lyonnais, qui voient les productions étrangères (qui entrent souvent en France frauduleusement) devenir moins chères. Les cités concurrentes de GenèveBesançonTurinMilanModène ou Reggio se mettent à fabriquer des unis et rayés de basse qualité, vendus peu cher. Ils attirent une partie de la main d'œuvre établie à Lyon, qui se trouve en manque de travail dans la cité rhodanienne.

La chute des effectifs et de la production est difficile à établir. Richard Gascon estime que d'environ 3 000 métiers à tisser à la fin des années 1550, on tombe à environ 200 dans les années 1570.

L'art du livre à Lyon

Histoire de l'imprimerie à Lyon.

 

Lyon est, à la Renaissance, une des principales villes du livre en Europe. Elle produit avec Paris 90 % des ouvrages imprimés en 1530ab 3. Issue des typographes allemands62, les artisans locaux prennent vite le relais, soutenus par des commerçants exploitant rapidement cette nouvelle activité. Riche lors de sa plus haute période de prospérité de très nombreux libraires et imprimeurs, elle participe pleinement aux grands mouvements intellectuels de son temps. Si le monde des imprimeurs souffre grandement de la crise économique du deuxième xvie siècle, les familles de libraires, eux, tirent leur épingle du jeu.

Origines de l'imprimerie lyonnaise

Carte

des principaux foyers de développement de l'imprimerie,

par ordre chronologique et d'importance.

 

La première édition réalisée à Lyon est l'œuvre de Wilhem König, dont le nom est francisé en Guillaume Le Roy, sur l'imprimerie de Barthélemy Buyer, bourgeois lyonnais qui l'a fait venir de Liègep 1. Buyer est un commerçant qui développe rapidement cette nouvelle activité. Il édite des ouvrages en orientant sa production vers deux types de public : les juristes, avec de lourds opus de droit, et les élites cultivées, avec des livres religieux, de chevalerie, de médecine usuelle et de pièces en langue vulgaire. Il implante des succursales dans plusieurs villes françaises et vend sa production en Italie et en Espagne. Son succès et ses premières actions ouvrent la voie à la prospérité de l'imprimerie lyonnaisep 2.

Dès les premières années, le milieu des imprimeurs lyonnais est très cosmopolite. L'attrait des foires et le fait que jusqu'en 1495 la profession échappe à l'impôt incite de nombreux étrangers à venir travailler entre Saône et Rhône. Surtout d'origine germanique ou française, les imprimeurs viennent de nombreuses régions d'Europe. Il y a peu de lyonnais de souche dans les premiers tempsr 1,63.

Caractéristiques de l'édition lyonnaise

Apophthegmatum ex optimis utriusque linguae scriptoribus

d'Érasme,

édition de Lyon

par Sébastien Gryphe.

 

Lyon devient rapidement un grand centre de l'impression en Europe. Les foires permettent de trouver des capitaux et des débouchés rapidement. À ses débuts, la faible organisation de la profession permet de trouver aisément des ouvriers travaillant pour des salaires raisonnables. Très tôt, la cité est rejointe par des imprimeurs allemands, vénitiens ou florentins, qui s'installent surtout rue Mercière et dans le quartier Saint-Nizier.

Le monde de l'édition lyonnaise est influencée par son homologue de la cité des doges, et surtout par Alde Manucep 3. L'humanisme italien et les nouveautés typographiques, dont l'italique se diffusent très rapidement à Lyon. De nombreux imprimeurs s'emparent des thèmes et ouvrages humanistes et en tirent de nombreux exemplaires. Parmi ceux-ci, il y a Sébastien GrypheFrançois JusteÉtienne Dolet ou Jean de Tournesp 4. Plusieurs imprimeurs italiens s'établissent également à Lyon : Giacomo GiuntiVincenzo Portinari ou Barthassard de Gabiano. Ils éditent surtout des compatriotesau 6.

Dans le royaume de France, seules deux villes ont une importante production de livre : Lyon et Paris. Paris œuvre davantage dans le domaine des ouvrages liturgiques et notamment des livres d'heures. Toutefois, les milieux éditoriaux des deux cités sont intimement liés, dès le début de l'imprimerie, et aucune n'est réellement spécialisée dans un type d'édition, au détriment de l'autre. Un exemple des liens entre les deux villes est Josse Bade. D'abord correcteur et conseiller littéraire chez les Lyonnais Gaspard TrechselÉtienne Gueynard et Simon Vincent, il fonde ensuite à Paris pour monter son entreprise et diffuser les textes de l'Antiquitéq 1.

Portée par les foires, l'industrie de l'imprimerie se développe rapidement à Lyon à partir du dernier quart du xve siècle. D'une douzaine d'ateliers en 1480, la ville passe à une centaine au milieu du xvie siècle. Ces imprimeurs alimentant un commerce international, destiné principalement à l'Espagne et l'Italie. Plus que de simples artisans, ce sont des érudits, qui n'hésitent pas à éditer des ouvrages de médecine, des romans, des ouvrages humanistes, en plus des habituelles commandes de livres religieux et de piété, telle La Légende dorée imprimée en français dès 1476a 23.

La plupart des marchands-libraires ne possèdent pas leurs presses, mais demandent à des imprimeurs de leur fabriquer leurs ouvrages. Au début de l'essor du secteur du livre à Lyon, la majorité des libraires sont italiens, et la majorité des imprimeurs sont allemands. Mais contrairement aux familles italiennes de banquiers, ces groupes se fondent pour la plupart dans la population locale, devenant lyonnais à part entière

L'un des plus célèbres est Sébastien Gryphe, venu de Souabe. Très pointu dans ses réalisations, il produit plus de mille éditions, fondant une dynastie d'imprimeurs. Il initie Étienne Dolet et l'aide à fonder son atelier. Il édite les classiques de l'Antiquité, les ouvrages de Guillaume BudéJules César ScaligerAnge Politien

 

L'édition musicale

Page de titre

de la tablature de luth

de Francesco Bianchini

éditée par Jacques Moderne

en 1547.

 

À partir de 1525-1528 jusque dans les années 1580, Lyon est un grand centre d'édition musicale, avec une production diversifiée (musique sacrée, spirituelle - notamment protestante - et profane)64.

Les imprimeurs de musique ne travaillent jamais uniquement ce domaine. Le plus important est Jacques Moderne. Il imprime des collections très célèbres, tels les Motetti del Fiore ou le Parangon des chansons, largement diffusées en Europe. Ses continuateurs les plus notables sont les frères Marcelin et Godefroy Beringen, qui éditent dans les années 1540, Simon Gorlier(qui édite surtout de la musique instrumentale entre 1551 et 1584), Robert Granjon (essentiellement tailleur de caractères et accessoirement imprimeur), Jean II de Tournes et Thomas de Stratony 1.

Ces imprimeurs-libraires publient tant des compositeurs de stature internationale ou nationale, tels Pierre Colin, Pierre MouluJean RichafortJean MoutonRoland de LassusClaude GoudimelValentin BakfarkFrançois RousselDominique PhinotPierre de Villiers, que des compositeurs d'origine régionale ou dont la célébrité s'étend moins loin, tels Giovanni Paolo PaladinoAntoine de HauvilleLoys BourgeoisNicolas Martin ou Corneille de Blockland.

Cependant, l'édition musicale lyonnaise s'éteint à la fin du xvie siècle pour disparaître complètement après 1615, laissant totalement la place à la production parisienne.

Les métiers du livre

L'imprimerie, à la Renaissance, est un secteur nécessitant un grand nombre de métiers très spécialisés. Le développement de ce secteur à Lyon permet la multiplication de ces professions. Il y a plusieurs fondeurs de caractères d'imprimerie, désignés sous le terme de « fondeurs de lettres ». Il y a quelques papetiers à Lyon, mais l'essentiel du papier utilisé provient d'Auvergne ou du Dauphiné. Parmi les métiers plus pointus, il y a des faiseurs d'eau-forte, des faiseurs d'encre, des graveurs, des relieurs. Le nombre d'enlumineurs se réduit à cette époque, indiquant l'évolution de la décoration des ouvrages. Enfin, à la périphérie du métier d'imprimeur, un grand nombre de cartiers (22 en 1545, pour une soixantaine d'imprimeurs et 29 libraires), indique bien l'essor de ce loisir à la Renaissance.

L'enluminure, la fin d'une époque

La Renaissance voit la fin de l'art de l'enluminure en tant que métier à part entière, après que le secteur, à la fin du xve siècle, ait connu une période dorée. L'imprimerie prend le pas et éteint cette activité lentement ; elle disparait aux alentours des années 1530.

Le développement de la population et son enrichissement augmentent la demande en ouvrage richement illustré, venant essentiellement d'une clientèle religieuse, mais pas uniquement.

Le premier enlumineur lyonnais identifié est connu sous le nom de Maitre de la Rose. Actif de 1435 à 1470, il travaille essentiellement sur des manuscrits liturgiques. Ses œuvres marquantes sont un livre de Boccace, enluminé à la demande d'un receveur du roi de France, Jean Paumier, un ouvrage d'Alain Chartier, portant les armes de la famille Thomassin et un Virgile pour un bibliophile lyonnais, Louis du Périer.

À sa suite se forme un ensemble d'enlumineurs connut sous la désignation « d'Atelier de Guillaume Lambert ». Cet atelier réalise la majorité des enluminures sur Lyon entre 1470 et 1490. Leur chef-d'œuvre est la Chronique de la Bouquechardière, de Jean de Courcy, copié pour Louis du Périer. Cet atelier a un style inspiré d'artistes de la région de la Loire et du réalisme flamand.

La génération suivante apparait dans les années 1490 et comprend principalement trois personnes : le Maître des Alarmes de Mars, le Maître de l'entrée de François Ieret Guillaume II Le Roy, probablement fils de l'imprimeur du même nom. Le Roy est le dernier enlumineur important lyonnais. Vivant rue Mercière, à l'angle de la rue Thomassin, il travaille entre 1493 et 1528 ; et réalise également en tant que peintre l'entrée de Louis XII à Dijon, celle de François Ier à Lyon en 1515 et de la Reine Claude en 1516. Travaillant à la gouache épaisse, son style est caractérisé par des personnages aux proportions enfantines, aux mains effilées. Ses bordures florales sont peuplées d'animaux et de grotesques. En tant qu'enlumineur, il a pour client prestigieux Jean D'Autun, historien royal, Jean Lemaire de Belges, poètes de cour et pour François Demoulins, aumônier royal. À la fin de sa vie, il travaille pour Pierre Sala.

Les guerres de religion et la crise du secteur

Les conflits religieux entament largement l'économie lyonnaise, qui ne retrouve pas son prestige par la suite, et le monde du livre n'est pas épargné. Suivant les grandes familles bancaires qui fuient Lyon pour n'y jamais revenir, de nombreux imprimeurs ou libraires partent, souvent pour Genève.

Les grandes vagues de départ des années 1551 et surtout 1567, sont dues aux persécutions religieuses, mais également aux avantages économiques genevois. En effet, la cité helvétique dispose d'un approvisionnement en vivre meilleur marché, alors que Lyon est constamment alourdie de taxes. La main d'œuvre y est également mieux encadréee

Si le monde des libraires résiste mieux à la concurrence de sa rivale, c'est que plusieurs maisons font imprimer leurs ouvrages là-bas. Les imprimeurs, par contre, souffrent terriblement ; de 63 maîtres imprimeurs sur les nommées de 1545, on passe à 13 pour celles de 1571e 9, à l'exemple de Jean II de Tournes qui s'exile parce que protestant.

La banque

Avec l'essor des foires commerciales, Lyon devient une capitale bancaire européenne. En effet, pour faire fonctionner des échanges toujours plus importants, une activité bancaire de même ampleur se met en place. Dès 1466, la famille de banquiers des Médicis quitte Genève pour la cité rhodanienne. D'autres suivent bientôt, tels les Bonvisi, les Bene les Gondi, les Capponi, les Salviati, les Guadagni. Ces marchands viennent de FlorenceLucquesGênesMilan ou de Savoie

Durant la première moitié du xvie siècle, la banque la plus importante de Lyon est la Gadagne, établie par Thomas Ier de Gadagne, prêtant régulièrement de l'argent à François Ier pour ses guerres en Italieaj 1. Elle est absorbée en 1556 par la banque Capponi

À la fin de la Renaissance, de nombreuses familles bancaires italiennes quittent Lyon, leur nombre passant de 75 en 1568 à 21 en 1597

Outre les princes, les grandes familles marchandes lyonnaises prêtent également à des entrepreneurs du premier capitalisme européen. Ainsi, l'essor brusque de l'exploitation du pastel à Toulouse est financé en partie par les prêts réalisés sur la place lyonnaise.

Autres secteurs de l'économie lyonnaise

De nombreux métiers, plus communs, font également vivre la cité au quotidien.

Les métiers de bouche

La problématique de l'alimentation d'une population qui a largement augmenté pousse le consulat à intervenir largement. Il réglemente le commerce du grain, en achète lui-même où il peut et crée des réserves publiques en 1549. Dans une volonté d'hygiène, il déplace les marchés aux bestiaux et les abattoirs, les éloignant du centre pour les placer dans les quartiers neufs. La population s'enrichissant, ce secteur économique s'étoffe, un chasse-marée s'installant en 1507 pour fournir à la ville un convoi de poissons de mer hebdomadaire. Le commerce du vin, activité économique essentiellement locale, abreuve la ville d'environ 150 000 hectolitres de vin par an

La fin de la prospérité lyonnaise

À Lyon, la Renaissance finissante emporte avec elle l'âge d'or de l'économie lyonnaise. L'effondrement du grand commerce et de l'activité bancaire à Lyon s'amorce dans les années 1570, et s'achève dans les années 1590. Les foires de Lyon, déjà frappées par la faillite du Grand Parti en 1557, ont été déplacées à Chalon-sur-Saône pendant l’occupation protestante de 1562. À peine revenues, elles sont atteintes par la peste de 1564 et par l’insécurité des chemins. Les difficultés sont accentuées par les malheurs d’Anvers, plaque tournante du circuit européen de l’argent, touchée par la banqueroute de Philippe II en 1557 puis saccagée en 1576 par les troupes espagnoles

Le symptôme majeur de ces difficultés est le départ des marchands-banquiers italiens. Plus que les conflits religieux internes à la cité lyonnaise, ce sont des mouvements dans les courants commerciaux continentaux qui expliquent ce déclin. Au cours du xvie siècle, les centres d'activités des principaux marchands européens glisse vers le nord, en direction de l'Angleterre et des Provinces-Unies. Les familles de commerçants italiens voient leur importance relative diminuer. Ce déplacement s'explique en grande partie par les nouveaux liens, directs, entre les nations septentrionales et les terres du Levant. Le commerce continental passe à présent majoritairement par l'Atlantique, et Lyon n'est plus alors sur les trajets des flux commerciaux

Face à ce déclin, et surtout au départ des marchands-banquiers italiens, les familles commerçantes lyonnaises ne parviennent pas à trouver de ressorts pour lutter contre la spirale négative. Plusieurs font faillites, d'autres se tournent vers les offices ou les rentes. Outre les facteurs extérieurs, des causes internes au pays expliquent cette désaffection. L'État royal n'a pas de politique fiscale soutenant sérieusement le commerce. Les foires, constamment soutenues et préservées de taxes excessives durant la Renaissance voient leurs avantages rongés à partir du milieu du xvie siècle. La société française, par ailleurs, ne valorise pas le statut de marchands. Pour tous, être marchands est un moyen d'arriver à la noblesse, et non un but en soi. Les familles commerçantes lyonnaises ne font donc pas une exception à cette tendance, et la relève des marchands-banquiers italiens ne vient pas

De cette Renaissance, il subsiste toutefois deux éléments positifs. En premier lieu, les foires elles-mêmes, si elles n'ont plus l'attrait pour le grand commerce, restent une place importante pour le commerce intérieur français. Et plus important pour le futur de l'économie locale, l'introduction de la soie. Cette activité, dès le début du xviie siècle, se développe et apporte un relais de croissance à la ville.

Savoirs et culture

Lyon, durant la première moitié du xvie siècle bénéficie de plusieurs facteurs qui s'associent pour en faire un centre de l'humanisme européen.

À cette époque, Lyon devient la seconde capitale du royaume, les rois de France y résidant régulièrement, occupés par les affaires d'Italie. Cette présence royale attise le développement du milieu de lettrés et de poètes qui préexistait, et qui compte Symphorien ChampierMaurice Scève ou Louise Labé. Elle attire également les courtisans et les savants, tel Cornelius Agrippa, savant allemand devenu à Lyon médecin personnel de Louise de Savoie.

L'activité économique, florissante, assure plus aisément des revenus aux érudits de passage. L'absence de parlement ou d'université laisse la porte ouverte à de nombreuses libertés. Il est plus facile pour des porteurs d'idées nouvelles de les proposer et les propager dans cette ville frontière, riche de nombreux libraires. C'est d'ailleurs la librairie qui porte l'essentiel de la culture lyonnaise à la Renaissance.

La production artistique, contrairement à la littéraire, a laissé subsister peu de traces, victime de l'iconoclasme protestant. Mais si les étrangers attirèrent les artistes et commandèrent quelques réalisations, il ressort également que « la bourgeoisie lyonnaise, traditionaliste, volontiers puritaine et très attirée par le protestantisme, n'a pas recherché le faste »

Les bases de la culture lyonnaise

Lyon, ville frontière, connait un essor culturel forgé par sa position géographique entre plusieurs mondes.

Lyon est à la limite de deux langues, le francoprovençal et la langue d'oïl. Durant tout le xve siècle, les élites lyonnaises cherchent à s'approprier la culture de leur roi, tout en parlant au quotidien la langue du peuple. Ce n'est qu'aux alentours de 1460 que l'on voit les actes officiels être enfin rédigés entièrement dans une langue du nord maîtrisée. Toutefois, si les élites, par l'éducation reçue, s'appliquent à s'unifier linguistiquement au royaume de France, elles restent marquées par leur appartenance à une aire culturelle locale, surtout lorsque les échanges avec Genève se font plus importants.

Enseignement

Les sources pour l'étude de l'enseignement à Lyon à la Renaissance sont très maigres pour le début de la Renaissance, au moins jusqu'au début du xvie siècle. Les délibérations consulaires sur ce sujet sont rarissimes, les rôles fiscaux muets et les registres notariés inexistants avant 1530. Pour reconstituer ce que furent les écoles lyonnaises durant la première Renaissance lyonnaise, on en est réduit donc à comparer les maigres bribes disponibles avec la situation des villes proches, telles Bourg-en-BresseGrenoble ou Vienne.

Autant lors de la première moitié du xve siècle, l'instruction des fils de l'élite patricienne se limitent à savoir lire, compter et des rudiments de rhétorique ; autant à partir de 1460, les choses évoluent. Ceci pour plusieurs raisons. La progressive richesse de Lyon et son réseau de libraires attirent bientôt des personnes capables de prodiguer un enseignement de qualité : Henri Valluphin67, Jean Delorme, Guillaume Ramène ou Josse Bade sont professeurs à Lyon autour des années 1500. L'aisance d'une partie toujours plus grande de la bourgeoisie lyonnaise permet le fonctionnement d'écoles plus stables. Les corps des villes, soucieux du prestige de leur cité souhaitent et peuvent aider au financement d'un enseignement plus large. « L'école fait désormais partie des honneurs de la ville au même titre que l'horloge et la maison commune ». Enfin, le changement des mentalités issues de l'humanisme puis des réformateurs encourage l'instruction, seule capable de « régénérer la société chrétienne »

Au cœur de la Renaissance, pour leur éducation, les édiles lyonnais disposent de toutes les écoles dignes des grandes villes européennes, hormis une université, telle celle ouverte par la Confrérie de la Trinité en 1519. Cette école s'installe alors Rue Neuve.

L'instruction initiale est fournie par les églises, paroissiales ou collégiales, telle la manécanterie de Saint-Jean. Les bourgeois envoient ensuite leurs enfants dans des écoles grammaticales, de droit, ou leur fournissent des précepteurs. Les plus aisés envoient enfin leur progéniture dans des universités prestigieuses.

Festivités et entrées royales

À la Renaissance, les élites urbaines cherchent davantage à se distinguer du peuple, tout en se mettant toujours plus en scène, dans une volonté d'auto-glorification. C'est à cette époque, par exemple, que les fêtes collectives évoluent en spectacle, donnés par les bourgeois agissant pour un peuple passif. Ainsi, au milieu du xvie siècle, les grandes familles bourgeoises lyonnaises, souvent italiennes, organisent lors du Mardi gras des mommeryes, défilé de personnages très richement costumés tirant de nombreux symboles de l'Antiquité, suivi d'une course de bague entre différents notables de haut rang. Le peuple assiste là à un spectacle dont les codes ne lui sont pas destinés, mais auquel il est convié pour acclamer ceux qui le gouvernent

 

Entrées solennelles

 Entrées solennelles à Lyon.

Photographie d'un ouvrage de Maurice Scève

Page de titre

de "

l'Entrée d'Henri IIà Lyon"

pa

Maurice Scève,

édité

par Guillaume Rouillé 

en 1548.

Il en est de même pour les entrées solennelles où les membres du consulat et les grandes familles en profitent pour rivaliser de fastes et de prouesses artistiques69. Ces cérémonies servent également aux élites urbaines pour montrer aux illustres personnages la richesse et la culture de la ville. Ces entrées sont également l'occasion de déterminer l'importance de chaque groupe social par la place qu'il occupe dans le défilé

À l'orée de la Renaissance, les festivités accueillant un grand personnage (nouvel archevêque, gouverneur, noble de haut rang ou personnalité royale) sont encore de simples déambulations dans la ville, en ordre défini, les maisons étant ornées de tapisseries pendues aux fenêtres. Sous l'influence de l'Italie et de l'humanisme, une véritable scénographie fait jour, se développe et intègre toujours davantage de références savantes, principalement à la culture antique. Sous le règne de Catherine de Médicis, des éléments ésotériques et astrologiques s'ajoutent, au point de prendre une grande place La préparation par le consulat devient minutieuse, et de plus en plus d'artistes et de savants sont mobilisés pour ces occasions, tels Jean Perréal ou Bernard Salomon

Lors de la Renaissance, Lyon, de par sa position privilégiée en rapport avec les guerres d'Italie est fréquemment visitée par les différents souverains. Le premier sur cette période est Louis XI le .

C'est pour le suivant le Charles VIII que pour la première fois, un artiste, Jean Perréal est mandaté pour préparer les décors de l'entrée. Il y déploie une iconographie religieuse avec la décollation de Saint-Paul près de l'église dédiée et un combat du diable et de Saint-Michel sur la place du Change. Charles VIII fait deux autres entrées en mars 1494 et novembre 1495, lors de son aller et son retour pour sa première campagne des guerres d'Italie. Son retour triomphal est fêté par des décorations à l'italienne, et une joute rue Juiverie où Bayard s'illustred

Le  se déroule l'entrée solennelle de Louis XII qui revient fêter à Lyon plusieurs de ses victoires, et notamment celle contre Ludovic Sforza, ramené à Lyon en mai 1500 et enfermé un temps dans la château de Pierre Scize. Ce retour est également l'occasion pour la reine Anne de Bretagne de faire son entréeau 8. Pour le même monarque, le , l'entrée suivant sa victoire contre les troupes génoises voit la construction de quatre estrades sur lesquelles des histoires glorifiant le monarque sont jouées. Sur la première, à la porte du pont du Rhône, six jeunes gens personnifiant Force, Prudence, Diligence, Vaillance, Noble Vouloir et Ardent Désir remettent des lauriers au roi, dont les exploits sont comparés à ceux de ThéséeHercule et Jason. Sur la dernière, Place du Change, la saynète délivre un message politique incitant Louis XII à être un prince juste. Lors de son passage suivant, le roi demande expressément pour marquer sa victoire sur les vénitiens l'édification d'une colonne sur le pont du Rhône. Cette entrée est organisée par Symphorien Champier

François Ier fait son entrée solennelle avec la reine Claude et sa mère Louise de Savoie le  avant de se rendre en Italie où il remporte la victoire de Marignan. Cette festivité est illustrée de références dynastiques et religieuses, avec notamment le rappel du baptême de Clovis et est organisée par Jean YvonnetJean Richier et Guillaume II Le Roy. C'est à cette occasion que la scénographie n'est plus exclusivement d'inspiration gothique, mais est un mélange d'art médiéval et classique

Navire construit

pour l'entrée d'Henri II en

1548.

L'entrée suivante est organisée en l'honneur de la reine Éléonore le . Il s'agit de la première entrée dont les organisateurs, Jean de Vauzelles et Salvatore Salvatori, fixent la trace dans deux publications imprimées. La reine, comparée à une nouvelle Esther, assiste à Vaise aux défilés et à de nombreuses saynètes célébrant son rôle de gage de paix entre la France et l'Empire En cette occasion, les décors sont pleinement d'inspiration italienne et humaniste, les organisateurs s'inspirant des Triomphes de Mantegna, de l’Hypnerotomachia Poliphili et des Triomphes de Pétrarque.

L'entrée de l'archevêque italien de Lyon, le cardinal d'Este le  est également l'occasion de faire une fête à l'italienne.

« L'entrée royale de 1548 pour Henri II et Catherine de Médicis marque l'apothéose du genre et une date majeure de l'humanisme à Lyon ». Durant plus d'une semaine, les festivités sont décrites par de nombreux témoins, ambassadeurs italiens, journaux de bourgeois et surtout publication officielle dirigée par Maurice Scève. Celui-ci est l'organisateur des cérémonies avec Guillaume du Choul et Barthélémy Aneau. Les spectacles les plus marquants sont une naumachie, un combat de gladiateur et une représentation théâtrale d'une comédie italienne La Calandria organisée par les florentins dans l'abbaye d'Ainay, la première comédie moderne jouée en France. Les organisateurs profitent de l'occasion pour multiplier les références à l'histoire antique de la ville, mettant en scène sa fondation mythique par le héros celte légendaire Lugdus.

Gravure de

 Jean Perrissin

représentant l’entrée du roi

dans l'ouvrage d

e Pierre Matthieu : 

L'entrée d'Henri IIII

, Lyon. Archives municipales.

 

Catherine de Médicis revient à Lyon pour l'entrée solennelle de son fils Charles IX le , à l'occasion du Grand Voyage qu'elle a organisé pour tenter de rétablir la paix dans le royaume après la première guerre de religion. Plus modeste qu'en 1548, la cérémonie connait un de ses moments forts lors du défilé ensemble d'enfants catholiques et protestants.

Henri III entre dans la ville le , où l'attendent sa mère et sa sœur Marguerite de Navarre avec son époux Henri IV. Parmi les artistes réalisant les décors il y a Pierre Eskrich, qui réalise un bucentaure à l'imitation du navire vénitien dans lequel le monarque franchit la Saône

Enfin, les dernières entrées royales de la Renaissance sont celle d'Henri IV les  et . La première est organisée par Pierre MathieuJean Maignan et Jean Perrissin

L'humanisme lyonnais et la vie intellectuelle

La vie intellectuelle lyonnaise est constituée de plusieurs groupes qui interagissent pour former une ambiance propre à la ville. Lyon à cette époque est riche de nombreux imprimeurs, de nombreux voyageurs venant de toute l'Europe à l'occasion des foires ou de la présence des cours royales.

Le terreau de l'essor de l'humanisme lyonnais

Étienne Dolet. gravure du xvie siècle.

 

Lyon, ville lointaine pour le pouvoir, a la chance de ne pas posséder d'université. Cela permet aux imprimeurs et aux lettrés d'œuvrer sans contrôle doctrinal et sans procès tatillons. La surveillance des officiers royaux devient vite irréaliste, tant la quantité d'ouvrages publiés dépasse les capacités des autorités manquant en permanence d'auxiliaires. Par ailleurs, le prélat des débuts de la Renaissance lyonnaise, Charles II de Bourbon est un érudit ouvert qui sait se montrer mécène et qui aime les livres Lyon voit ainsi passer de nombreux savants qui peuvent ici travailler et publier plus librement qu'ailleurs. Les plus connus sont François RabelaisClément Marot ou Étienne Dolet, mais peuvent être également cités Jean VisagierNicolas BourbonChristophe de Longueil ou Simon de Villeneuve.

Les foires de Lyon drainent de nombreux étrangers, notamment des Italiens et des Allemands, qui amènent avec eux leur culture, et leurs propres connaissances, qu'ils échangent largement De nombreux ouvrages italiens ou allemands sont traduits, apportant des idées nouvelles ; parmi lesquelles l'esprit sceptique de Giambattista Gelli ou la tradition utopiste italienne avec l’Alector de Barthélemy Aneau.

Enfin, le passage des différents rois de France, et de toute leur cour, est un puissant ferment de rencontres pour les érudits, poètes et philosophes de l'époque. Ainsi, le long séjour de l'ouverte d'esprit Marguerite de Navarre entraîne un moment de vif essor humaniste, que ce soit dans les domaines religieux ou littéraires.

La vie culturelle lyonnaise

La vie culturelle lyonnaise s'organise autour de plusieurs groupes organisés par de riches érudits, tels Pierre SalaSymphorien ChampierGuillaume du ChoulGuillaume Scève ou de Marie-Catherine Pierrevive, dans les ateliers d'imprimeurs comme Sébastien Gryphe ou Jean de Tournes et dans les institutions ouvertes aux idées nouvelles tel le collège de la Trinité Ce groupe informel, dénommé sodalitium, comprend également des personnalités de passage qui enrichissent les notables proprement lyonnais, tels François RabelaisÉtienne DoletClément MarotJean VisagierNicolas BourbonAntoine du Saix72 et les frères Jean et Mathieu de Vauzelles.

Salons et académies

Le premier lieu de rencontres d'humanistes lyonnais est organisé par Pierre Sala et Symphorien Champier, à l'Antiquaille, dans la maison de Sala. Symphorien Champier fait connaître la pensée de Lefèvre d'Étaples et Clichtove. Fin connaisseur des néoplatoniciens, il est le premier à propager les idées de Marsile Ficin en France. Sala connaît aussi une riche carrière à la cour de Charles VIII, de son fils Charles-Orland et de Louis XII. Son action est moins d'écrire que de compiler (romans, suites chevaleresques, notes historiques ou archéologiques) sans soucis de publication. Il entreprend après sa riche carrière de bâtir une demeure qu'il ouvre largement pour des réunions de lettrés (tel Champier, les Bellièvre). Cette « académie de Fourvière » est fondée sur le modèle de l'Académie néoplatonicienne, située dans la villa des Médicis de Careggi. À l'Antiquaille Sala réunit un grand nombre de pièces antiques retrouvées pour la plupart dans Lyon. Cette collection et les animateurs de l'Académie de Fourvière est suffisamment renommée pour que des personnages comme François Ier lui rendent visite à leur passage à Lyon.

Marie-Catherine Pierrevive, la Dame du Perron, tient ainsi salon lors de la période la plus foisonnante de l'humanisme lyonnais, durant les décennies 1520 et 1530. Elle invite Étienne DoletBonaventure Des PériersPapire MassonMaurice ScèveOrtensio LandoEustorg de Beaulieu et de nombreux autres.

Un autre centre humaniste important est le collège de la Trinité, tenu par Barthélémy Aneau, jusqu'aux affres de la Réforme. En son sein les poètes Sébastien Castellion et Bonaventure Des Périers rédigent plusieurs œuvres.

Les prémices de l'archéologie à Lyon

Des lettrés passionnés d'antiquités rassemblent des collections archéologiques et épigraphiques, parmi lesquels on peut citer Pierre SalaClaude de BellièvreNicolas de Lange ou Guillaume Paradin.

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La littérature

Symphorien Champier.

Littérature française du xvie siècle.

 

À la Renaissance, Lyon connait un courant littéraire original. Issu de cercles poétiques réunis autour de figures locales, il bénéficie de la circulation des idées que connait la ville, et de l'éloignement de toute censure officielle tels les parlements ou la Sorbonne. Cette œuvre est baignée des influences de l'Italie, de l'Antiquité et de la tradition médiévale.

La vie littéraire lyonnaise à la Renaissance connait deux générations. Une première, située aux alentours des années 1500, est portée par Symphorien Champier et Pierre Sala et dénommée plus tard l'Académie de Fourvière La seconde, dont l'apogée est centrée sur les années 1530, comprend entre autres Maurice ScèveLouise Labé ou l'auteur anonyme des Contes amoureux de Madame Jeanne Flore Elle est connue sous la dénomination d'École lyonnaise de poésie.

La naissance du mouvement littéraire lyonnais : l'Académie de Fourvière

La « Première Renaissance littéraire lyonnaise », selon les termes de Jacques Rossiaud, est initiée par François Garin et sa Complainte, imprimée pour la première fois à Lyon en 1480 et ensuite reprise dans d'autres villes dont Paris. Ce long poème à la structure traditionnelle est une leçon de bien-vivre, gorgé de mépris du monde et poussant aux plus hautes vertus. Cet ouvrage érudit est encore ancré dans le Moyen Âge et montre une voie que suivent Champier et Sala, malgré des évolutions. Symphorien Champier, doté d'une très grande culture, écrit de très nombreux ouvrages sur tous les domaines. L'œuvre de Pierre Sala est moins d'écrire que de compiler (romans, suites chevaleresques, notes historiques ou archéologiques) sans soucis de publicationa 28.

Cette première Renaissance lyonnaise est vigoureuse, mais traditionnelle, en témoigne l'entrée de François Ier en 1515, très gothiquea.

L'École lyonnaise de poésie

École de Lyon (littérature).

Louise Labé.

Cela change progressivement, avec les séjours nombreux d'artistes, de poètes et d'écrivains. L'influence de l'humanisme, avec notamment le néo-platonisme, fait éclore de nouveaux styles littéraires, portés à Lyon au plus haut par Maurice Scève et Louise Labé, au sein de l'école littéraire lyonnaise. Dans cette école il faut également compter Pernette du Guillet et Olivier de Magny. Caractérisée par une poésie avant tout amoureuse et collective, ce mouvement modeste joue avec la Pléiade le rôle « d'initiateur d'une renaissance littéraire en France »t 2.

Maurice Scève.

Maurice Scève écrit plusieurs ouvrages majeurs (La SaulsayeMicrocosme, et surtout Délie), immédiatement célébrés par de nombreux confrères tels Du BellayPontus de Tyard ou Guillaume Des Autels. Continuateur du pétrarquisme, il l'associe au platonisme pour chanter l'amour de Pernette du Guillet. Louise Labbé réunit de nombreux amis chez elle pour faire de la poésie et écouter de la musique. Elle vit et entretient un climat humaniste et écrit sous l'influence d'Ovide, ou d'Érasme. Elle publie des poèmes d'une étonnante liberté où elle chante de manière très directe l'amour. Son style s'éloigne autant des conceptions médiévales de l'amour que de celui tout platonique des membres de la Pléiade.

Parmi les nombreux poètes et écrivains qui gravitent autour de cette école, demeurant et produisant à Lyon quelques années avant d'aller sous d'autres cieux, il y a Nicolas Bourbon l'Ancien, présent entre 1536 et 1540, et qui publie une deuxième édition de ses Nugae, dédié à Thomas II de Gadagne. On trouve aussi Jean VisagierEustorg de BeaulieuGilbert Ducher, ou François Rabelais. De nombreux italiens, membres ou visiteurs des nations lyonnaises publient leurs œuvres dans la cité rhodanienne. Ainsi, Luigi Alamanni dédie à François Ier ses œuvres toscanes en 1533 et Barthélémy Del Bene vient à partir des mêmes années et compose de nombreuses odes pour les grands personnages de la cour française Gabriel Simeoni publie à la fin des années 1540 et durant les années 1550 plusieurs ouvrages

Le groupe d'écrivains et poètes lyonnais de cette période travaillent pour la très grande majorité en français. Seul Guillaume Scève, frère de Maurice Scève, rédige des vers amoureux en latin et, significativement, il ne se fera jamais publié, même si sa production lui vaut un grand prestige au sein des humanistes de la ville. Tous les autres emploient le français, encore en cours de formation, et qu'ils contribuent à prendre forme poétique et littéraireLa musique

Francesco de Layolle,

portrait présumé

par Jacopo da Pontormo

(1518).

musique de la Renaissance.

 

« La vie musicale lyonnaise, à cette époque, reste difficile à quantifier ». Elle semble toutefois plus limitée que la vie littéraire ou que l'activité musicale à Paris ou dans les principales cités italiennesy 2. Frank Dobbins retrouve environ 150 musiciens à Lyon durant tout le xvie siècle, mais beaucoup ne sont pas professionnels et très peu publient des œuvres musicales76. Certains sont également facteurs d'instruments. Parmi les musiciens les plus célèbres, on peut citer Guillaume de La MœulleLoys BourgeoisPierre de VilliersPhilibert Jambe de ferFrancesco Layolle et son fils Alamanno LayolleEustorg de BeaulieuFrançois RousselSimon GorlierDidier Lupi Second.

Ces musiciens sont rétribués pour animer des fêtes par le Consulat ou de riches marchands, mais aussi pour donner des cours à des familles aisées ; ils remercient la plupart du temps leurs protecteurs en dédicace de leurs ouvragesy 3. Les entrées royales organisées par le Consulat, dont on a parfois des comptes ou des relations, sont aussi l'occasion de réunir de grands ensembles et de composer des œuvres particulières (Jambe de fer, par exemple, a travaillé à de telles occasions).

Page de titre

des Dicts et complaintes du trop tard marié,

édité par Jacques Moderne.

Nombre des musiciens qui ont exercé à Lyon n'y ont pas passé toute leur carrière, et parfois seule l'édition d'un ou plusieurs livres de musique témoigne de leur passagey 4. C'est le cas par exemple de Dominique Phinot pour ses livres de motets et de chansons, de Jean de Castro ou encore de Didier Lupi Second.

Il ne semble pas y avoir eu d'importante activité musicale dans les églises de Lyon, et les archives sont quasi-muettes sur ce point. Les chanoines de la primatiale Saint-Jean refusent toute évolution de leur manière de conduire les offices, veillant à en rester au plain-chant. Il en est de même pour les chapelles soumises à leur autorité, dans lesquelles on n'identifie aucun maître de chapelle. Il n'y a presque que dans l'église Notre-Dame de Confort, paroisse de la communauté florentine lyonnaise, qu'on suppose une réelle activité musicale, due à l'organiste florentin Francesco Layolle, très impliqué dans l'édition musicale aux côtés de l'imprimeur Jacques Moderne, mais les archives de cette église sont perduesy 5.

Lyon est également un centre important de facture instrumentale, avec notamment Claude Rafi (flutier) et Gaspard Duiffoproucard (Gaspard Tieffenbrücker, luthier dont la famille originaire du Tyrol a produit d'autres facteurs célèbres). Ce dernier établit un atelier qui lui a survécu et dans lequel travaillaient entre autres Pierre Lejeune, Philippe Flac, Pierre Le Camus ou Maître Simon77.

La peinture et la gravure

Paysage lyonnais

avec la demeure de Pierre Sala.

Enluminure frontispice des Prouesses de plusieurs Roys

, vers 1523, 

Bibliothèque nationale de France

 

La production picturale lyonnaise de cette époque est encore très mal connue. Visiblement abondante, il n'en reste à l'heure actuelle plus grand-chose, entre les dommages causés par l'iconoclasme des Huguenots en 1562, les dispersions ultérieures à la suite des changements de goût des élites et les déprédations dues à la Révolution française. Centre commerçant, bancaire, intellectuel et politique important tout au long de la Renaissance, la ville est un axe de diffusion et de confrontation entre les artistes et les courants picturaux européens. Dès la seconde moitié du xve siècle, la cité et les artistes qui y résident connaissent les influences flamandes et italiennes tout en conservant un lien avec la tradition française gothique développée par la cour de Charles VIII et Louis XIIar 1. Les deux genres les plus représentés au sein de la production picturale et gravée lyonnaise sont l'illustration d'ouvrages, avec par exemple Bernard Salomon et le portrait avec essentiellement Corneille de Lyon

Les institutions officielles

Il n'existe que deux institution qui encadrent ces métiers, le poste de peintre officiel de la cathédrale et la guilde des peintres de Lyon ; mais ils ne regroupent pas tous les artistes présent en ville.

Le peintre officiel de la cathédrale[

Il n'existe à la Renaissance qu'un seul poste officiel de peintre dans la cité rhodanienne, celui attaché à la cathédrale Saint-Jean. Le consulat ne nomme jamais personne à un poste équivalentba 2. Le premier de ses titulaires pour la période de la Renaissance est connu notamment pour ses réalisations dans la cathédrale : Laurent Girardin (1441-1471)79. Il a réalisé les vitraux de la chapelle du Sacré-Cœur, aujourd'hui en partie manquant, où l'on voit l'archange Gabriel et la Vierge de l'annonciation, entourés de dix-huit figures d'anges. Ses figures énergiquement représentées sont quelquefois disproportionnées. On attribue également à Laurent Girardin une Trinité1460?) conservée au musée d'Arts de Cleveland. Ces deux œuvres sont rapprochées d'autres commandées par Charles de Bourbon, dont une Annonciation actuellement dans la chapelle de L'Arbresle.

Laurent Girardin cède son office à son gendre Jean Prévost en septembre 1471. Celui-ci exécute de nombreux travaux, assez divers. En 1476, il réalise les décors pour l'entrée solennelle de Louis XI, en 1478, une Pietà sur le manteau des quêteurs pour les pauvres, en 1482, de la dorure sur une sculpture de Hugonin de Navarre, la peinture de l'horloge de la cathédrale en 1488. Il semble que Jean Prévost se soit perfectionné dans les Flandres, participant par exemple aux préparatifs du mariage de Charles le Téméraire en 1468, ce qui explique une influence flamande dans ses œuvres. Jean Prévost travaille également au chantier de l'église de la collégiale de Moulins au début des années 1470. Il y réalise plusieurs vitraux, dont un arbre de Jessé et une Nativité de la Vierge

La corporation des peintres, sculpteurs, graveurs et verriers

En 1496, les statuts de la corporation des peintres, graveurs d'images (sculpteurs) et verriers de Lyon sont approuvés par le roi Charles VIII. Le texte cite quinze noms, le premier d'entre eux, qui est alors peintre à la cour de Charles VIII, est Jean Perréal Les autres peintres n'ont laissé aucune trace ou presque, notamment en raison des destructions des iconoclastes protestants. La seule œuvre conservée est la Sainte Catherine d'Alexandrie, que Natalis Rondot a attribué à Claude Guinet.

Parmi eux, douze sont désignés comme capables de travailler aussi bien sur panneaux de bois que sur verre. La peinture sur verre est d'ailleurs une spécificité de la production lyonnaise. La création de peinture sur verre répond à la demande des couvents de la cité, mais également à un marché tourné vers l'extérieur. Ainsi, le peintre en titre de René d'Anjou Nicolas Froment vient à sa demande chercher des peinture sur verre à Lyon.

Leurs statuts indiquent qu'ils travaillent aussi bien à produire des tableaux, enluminer des manuscrits, décorer des statues, des écussons, des bannières, des façades. Ils sont également mandatés pour effectuer les préparatifs des entrées solennelles, ou même des relevés pour des travaux de voiries

La fin du xve siècle

Durant le xve siècle, de nombreux couvents se développent, dont les Cordeliers en 1467, suivis des Franciscains. Ces établissements sont demandeurs d'œuvres religieuses vis-à-vis des artistes de la ville, qui trouvent ainsi une clientèle en plein essor. De nombreux grands personnages visitent également la ville ou y restent de longues périodes, et peuvent ainsi faire l'acquisition d'œuvres proposées ou commandées à des peintres. Parmi ceux-ci, il y a René d'Anjou qui, en 1476, acquiert plusieurs tableaux dont une Vierge, un Christ au jardin des oliviers, sans que l'on ai le nom des peintres.

Un artiste important de cette période est Jean Hey, identifié comme étant le Maître de Moulins, actif sous le règne de Louis XI. Protégé par Charles de Bourbon, de qui il obtient un office rémunérateur, il peint son portraitd 8.

Le premier xvie siècle

Page 6

de L'Amour de Cupido et de Psiché,

mère de volupté,

Lucius Apuleius,

gravure de Bernard Salomon. 

1re éd. 1546.

 

Les peintres les plus importants de cette époque sont le Maître JG, qui officie durant les années 1520Corneille de Lyon, dont la carrière commence dans les années 1530Bernard Salomonet Jean Perréal Les peintres travaillant à Lyon durant les premières décennies semblent vivre surtout des commandes du consulat ou de confréries, même si l'activité commerciale et intellectuelle de la ville fournit un flot régulier de clients On ignore presque tout de leurs travaux pour des particuliers, surtout liés aux foires. Parmi ces peintres on peut citer : Liévin Van der Meer, Daniel et Jean de Crane, Mathieu Chevrier

Les graveurs et illustrateurs impriment une personnalité particulière à la production imprimée de la ville. « Bernard Salomon a donné une physionomie plus spécifique au livre illustré lyonnais en combinant la finesse et la texture serrée des bois de Holbeintaillés par Hans Lützelburger et certains aspects parisiens, surtout le goût des petites figures élancées, comme celles des vignettes de l’Amour de Cupido et de Psiché mère de Volupté ». L'un des éditeurs les plus actifs est Jean de Tournes. Il fait travailler Bernard Salomon entre autres graveur et diffuse sa production dans toutes l'Europe, répandant ainsi l'art des graveurs lyonnais

Les verriers lyonnais semblent disposer à cette époque d'une renommée assez large, suffisante pour être mandatés par le duc Charles II de Savoie pour embellir plusieurs lieux symboliques de son pouvoir et en particulier la Sainte-Chapelle de Chambéry, où travaillent successivement Blaise de Lyon, Jean Baudichon et Jean de l'Arpe.

Le second xvie siècle

Les peintres les plus marquants de cette époque sont Maignan et Perrissin. Dans le domaine de l'estampe, l'œuvre de Pierre Eskrich est caractéristique de cette période et de l'impact des conflits religieux sur l'art.

Comme pour les entrées solennelles précédentes, celles de cette époque sont l'occasion pour les marchands italiens faire venir des artistes italiens. Pour celle d'Henri II sont actifs le peintre Nannoccio dela Costa da San Giorgio et le sculpteur Zanobi, qui œuvrent aux décors théâtraux du palais archiépiscopal.

Les autres arts

Cour intérieure

de l'Hôtel de Bullioud 

construit par Philibert Delorme

(1536)

 

Lyon à cette époque est un lieu de croisement et de rencontres entre de nombreux artistes dans tous les domaines. Les riches marchands et banquiers attirent de nombreux artistes par leur mécénat. Les rois et grands personnages qui passent par la ville ont dans leur suite des artistes qui peuvent rencontrer en ville de nombreux confrères. Par ailleurs, Lyon est à cette époque l'un des plus grands centres du commerce d'art, permettant aux artistes locaux de voir des œuvres variées

Architecture

Dans le domaine de l'architecture, l'influence de la Renaissance est très peu perceptible dans les murs de la ville. En effet, les étrangers, italiens surtout, qui ont fait fortune à Lyon ont, pour la plupart, rapatrié l'essentiel dans leur patrie d'origine, et les grandes familles étrangères font bâtir des villas et palais chez eux, et non à Lyon qui n'est pour eux qu'un lieu de séjour temporaire. Les élites lyonnaises, elles, restent attachées à un décor gothique classique et souvent sobre.

Les seules réalisations architecturales liées à la Renaissance artistiques sont l'église Notre-Dame de Confort, les villas du Grand et Petit Perron des Gondi, la villa de Beauregard et l'hôpital de la quarantaine au sein de l'institution Saint-Laurent des Gadagne, et les réalisations de Delorme dans l'hôtel de Bullioud.

Philibert Delorme, revenant d'un voyage d'études en Italie, fait ses premières armes en travaillant sur l'hôtel de Bullioud. Mais bien plus tôt, des architectes venus d'Italie ont déjà fréquenté la ville. De retour de sa campagne militaire, Charles VIIIramène dans sa suite deux architectes florentins : Giuliano da Sangallo et son élève Domenico Bernabei da Cortona. Le premier reste un an à Lyon pour établir un plan de rénovation du château d'Amboise avant de retourner en Italie, tandis que le second termine sa carrière en France. De même, sans avoir réalisé quoi que ce soit à Lyon, Sebastiano Serlio réside entre 1545 et 1550 dans la ville pour rédiger et publier plusieurs volumes de son traité d'architectureau 17. S'il ne participe à aucun chantier lyonnais lors de son séjour sur les bords de Saône, son ouvrage l’Extraordinario Libro a une grande influence sur les choix des notables lyonnais durant les siècles suivants

Sculpture

Nymphée de la villa de Beauregard.

Les nations étrangères et notamment italiennes sont friandes d'œuvres sculptées, que ce soit pour leur agrément ou pour orner les lieux de culte où ils se retrouvent. Ainsi, la nation florentine comprend plusieurs personnes qui font venir ou font sculpter à Lyon statues et monuments. Plusieurs mausolées sont ainsi présents à Notre-Dame de Confort, sculptés par des artistes italiens, notamment Antonio Rossellino Thomas Ier de Gadagne, quant à lui, décore sa villa d'un nymphée rustique.

Faïence

Dès 1512, des faïenciers italiens sont à Lyon et produisent pour le commerce. À cette époque, ils conservent un style propre à leur homologues restés dans la péninsule. Il est ainsi impossible de distinguer la production issues d'ateliers italiens de celui de français à cette époque. En effet, le style français dans la faïence ne se forme que lentement

Les sciences

L'humanisme est, à Lyon comme partout où il se déploie, un mouvement intellectuel qui influence largement les sciences. Ainsi, Lyon voit circuler des hommes touchant à toutes les disciplines scientifiques.

Ainsi, le mathématicien et théologien Francesco Giuntini vient à Lyon pour se convertir à la religion réformée. Il y demeure un long moment et y publie notamment son Discours sur l'état de la magnifique ville de Lyon, et le Speculum astrologiae

La religion à la Renaissance, entre affaiblissement et renouveau

Lyon, à la Renaissance, est un carrefour européen où la plupart des influences spirituelles se croisent. De la reconstruction de la fin du xve siècle à l'humanisme chrétien du début du xvie siècle, de la montée des tendances réformées à l'explosion des guerres de religion pour finir par la ligue catholique et la réconciliation, la cité connait tous les bouleversements religieux majeurs de son temps.

Le second xve siècle : Reconstruction et développement

Charles II de Bourbon,

vitrail de

la cathédrale de Moulins.

 

À Lyon, la fin du xve siècle, comme le début du xvie siècle, est une période sans relief du point de vue religieux. Les hautes autorités s'occupent moins de pastorales que des choses de la cour, dont ils sont le plus souvent issus. En effet, même avant la confirmation par le concordat de Bologne (1516) passé avec François Ier du monopole de la nomination des évêques par le roi de France, ce dernier impose ses candidats depuis longtemps. Les archevêques sont donc avant tout des nobles, courtisans et diplomates, choisis pour être utiles au roi, et non pour leurs capacités à administrer un diocèse. De fait, les archevêques lyonnais résident peu dans leur diocèse, qui n'est, souvent, qu'un parmi plusieurs.

Cet éloignement impose un développement conséquent de l'administration religieuse. L'archevêque s'appuie sur un homme de confiance, l'official, choisi le plus souvent dans le monde des juristes, préside en son absence le conseil archiépiscopal. Il dirige la justice de l'archevêque qui s'occupe de moins en moins des affaires temporelles, mais qui reste le maître pour tout ce qui concerne les testaments et successions. Parmi les officiaux les plus marquants, il faut citer Antoine Bertrand, en fonction plus de trente ans jusqu'en 1489

Durant cette période, sous l'épiscopat de Charles II de Bourbon, une visite pastorale est organisée en 1469 et 1470. Dirigée par Étienne de la Chassagne, l'abbé de Belleville, qui est évêque in partibus et qui dirige le diocèse en l'absence de l'archevêque, elle parcourt l'ensemble du territoire archiépiscopal et permet d'avoir une vue générale de l'état des paroisses. Celui-ci est correct, à la fois du point de vue de l'état des bâtiments, de la tenue des objets religieux que du niveau moral et intellectuel des desservants. Par ailleurs, l'église Notre-dame de Confort du couvent des Jacobins est rénovée à grand frais de marchands florentins qui souhaitent en faire leur lieu de sépulture. De même, Simon de Pavie finance en 1471 la construction d'une chapelle de l'annonciation dans l'église Saint-Bonaventure des Cordeliers.

C'est également sous Charles de Bourbon qu'est achevé la cathédrale Saint-Jean, dans laquelle il s'est fait enterrer dans une chapelle gothique flamboyant dite : « Chapelle des Bourbons ». Il rebaptise en 1484 l'église des Cordeliers en Saint-Bonaventure, en l'honneur de celui qui y est enterré et que Sixte IV vient de canoniser

Durant cette période plusieurs ordres religieux s'installent à Lyon : les Cordeliers, en 1467, et les Franciscains, quelque temps plus tard

Par ailleurs, l'archevêque de Lyon et la primatiale Saint-Jean de Lyon conservent la tradion de son propre jubilé, à condition que le pape autorise chaque fois son droit d'indulgence à l'archevêque. Ce Grand Pardon de Lyon, lié à saint Jean Le Baptiste, patron de la ville de Lyon, remonte 1451 après que l'établissement de Rocamadour obtint cette indulgence en 1428, également en faveur de la fête de saint Jean Le Baptise.

Le premier xvie siècle : humanisme et réforme

La religion réformée prend appui à Lyon à cette époque, même si pour la plupart de ceux qui sont sensibles aux idées nouvelles, il n'y a pas de volonté de rupture avec l'église officielle. Pour la majorité d'entre eux, c'est un désir de réforme des mœurs du clergé et de retour à la pureté supposée de la foi qui les anime. Profondément baignée par l'humanisme, la population lyonnaise reste bien plus longtemps qu'ailleurs, dans un entre-deux confessionnel qui limite les crispations et évite les conflits majeurs. Jusqu'aux années 1560, la situation reste floue, et nombre de croyants sont dans l'indécision religieuse

Les archevêques[

L'archevêque Jean de Lorraine

(1537-1539)

 

À Lyon, la fin du xve siècle, comme le début du xvie siècle, sont des périodes sans relief du point de vue religieux. Une des raisons en est que les archevêques sont le plus souvent éloignés de leurs obligations spirituelles, comme de leurs paroissiens.

L'archevêque François de Rohan (1501-1536), « le meilleur de son époque » selon Henri Hours, marque le premier siècle de l'époque moderne de son empreinte. Il réside souvent dans son diocèse, en prend soin et ne manque pas, lors du concile provincial de 1528, de condamner les doctrines de Luther et tenter de réformer son clergé pour faire revenir les plus détachés d'entre eux de leur rôle à plus de sérieux.

Son zèle s'explique avant tout par la lutte contre les pratiques abusives des catholiques, avec une large pratique de la commende, notamment par les grandes familles lyonnaises Semur, Talaru ou Albon. Des prêcheurs sont invités à venir, souvent d'Italie, pour inciter les religieux de la ville à de meilleures pratiques ; parmi lesquels on peut citer l'inquisiteur Valentin Liévin le florentin Sante Pagnini, disciple de Savonarole ou les dominicains Jean Maheu ou Ambroise Catharin89. Ils sont soutenus à Lyon par plusieurs religieux dont l'écrivain et humaniste Jean de Vauzelles90

Après 1537, avec les arrivées de Jean de Lorraine (1537-1539), puis d'Hippolyte d'Este (1539-1551), le diocèse est bien davantage délaissé. Les archevêques ne font plus venir de prédicateurs notables. Les commandes de livres pieux baissent, alors qu'au même moment monte la concurrence d'ouvrages profanes, d'esprit humaniste ou déjà réformateurs. Des groupes de lettrés osent rédiger des textes nettement éloignés de la morale purement chrétienne, tel François RabelaisLouise Labé ou l'auteur anonyme des "Contes amoureux de Madame Jeanne Flore" C'est le moment où nait ce qui est appelé "l'École lyonnaise de poésie"

Les premiers signes des idées nouvelles

Portrait de Marguerite d’Angoulême,

qui contribue à l'arrivée des idées nouvelles à Lyon en 1524 et 1525

. tableau de Jean Clouet conservé à la

 Walker Art Gallery à Liverpool.

 

Les premiers signes de la Réforme sont visibles dès les années 1520, mais ils restent longtemps isolés. La première trace est une lettre de 1520 d'un libraire sensible aux idées religieuses nouvelles : Jean Vaugris, dans laquelle il demande à un confrère bâlois de lui envoyer un texte de Luther. Sensible à l'humanisme, il vend des ouvrages d'Érasme ou de Lefèvre d'Étaples, étant un des premiers diffuseurs de ce mouvement d'idées à Lyon. Il est toutefois impossible de faire de lui et de ses amis des protestantsv 40.

Une première étape dans la sensibilisation de la population lyonnaise aux thèses réformatrices est visible avec la présence de Marguerite d’Angoulême à Lyon entre octobre 1524 et août 1525. Attiré par l'évangélisme, elle a autour d'elle une cour gagnée à ces idées d'un retour à l'Église primitive, de retrouver le Christ ou de ne prêcher que l'Évangile. Se trouvent parmi eux Antoine Papillon, correspondant de Zwingli, le bailli d'Orléans Jacques Groslot ou Michel d'Arande. Elle fait venir et tente de protéger des prédicateurs de sa sensibilité : Aimé Meigret et de Pierre de Sibiville. Le premier, dominicain connaissant et approuvant au moins en partie les idées luthériennes, et le second, franciscain lié à Zwingli et Œcolampade sont appelés par Marguerite d’Angoulême alors à Lyon, et prêchent le salut par la foi, s'élèvent contre les lois ecclésiastiques abusives et font scandale. Aimé Meigret est arrêté par l'inquisiteur Liévin, et transféré à Paris Après le départ de Marguerite d'Angoulème, l'archevêque de Lyon François de Rohan juge les progrès des idées hétérodoxes suffisamment inquiétantes pour convoquer un concile provincial en 1528 afin de rappeler les principes de la doctrines officielles.

Des religieux humanistes s'installent et travaillent à Lyon, essentiellement à Notre-Dame de Confort, l'église dominicaine utilisée par les nations italiennes. Ainsi, Sancte Pagnini s'y installe en 1526 et y travaille durant quinze ans à la nouvelle traduction de la Bible en retournant aux sources grecques et hébraïques. Soutenu par François Ier qui le dote pour cette entreprise d'une rente de 1000 écus, Même si cette bible en latin à le patronage des papes Adrien VI et Clément VII, elle fait partie du mouvement philologique qui aboutit aux versions réformées de la bible. Non achevée par Sancte Pagnini, elle l'est par Ambrogio Catarini et Sisto da Siena92, toujours à Notre-Dame de Confort, pour être publiée par Giacomo Giunti

Les premières condamnations pour déviances doctrinales ont lieu en 1534 avec l'exécution, place Maubert à Paris, du moine Jacobin Alexandre Canu, dit Laurent de la Croixx 1, et la tentative contre le marchand Baudichon de la Maisonneuve. Ce dernier en réchappe grâce à son statut de bourgeois de la ville de Berne et l'intervention du consulat, qui souhaite avant tout éviter tout ce qui pourrait gêner le commercev 42. Le retour de Marguerite d'Angoulème en 1536 permet le regroupement des porteurs des idées humanistes et religieuses nouvelles sous sa protection, dont Clément Marot, mais temporairement. Cette répression, bien que plus légère que ce que connaissent les autres villes françaises, se poursuit durant les années 1540. Imposant la discrétion aux réformés, elle n'empêche pas la formation d'une première église regroupant une cinquantaine de personnes en 1546 sous un premier ministre, Pierre Fournelet

Toutefois, jusqu'aux années 1560, il n'y a pas de ruptures entre la majorité des catholiques fidèles au pape et les « erasmiens », « luthériens » et autres « libertins spirituels »

Conversion d'une partie de la population lyonnaise

Hippolyte d'Este,

archevêque de Lyon souvent absent de son diocèse

Biblioteca Comunale Arioste

La première église est dressée en 1546, mais le développement du mouvement dans l'ensemble de la société lyonnaise est antérieur. Toutes les couches de la société sont touchées par les conversions, dans des proportions impossibles à évaluer. Seules les populations d'origine italienne restent à l'écart de ce mouvement. Cette expansion, importante, peut s'expliquer de plusieurs manières.

Les foires créent à intervalle régulier un très grand brassage de population et d'idées Le consulat, soucieux de ne pas gêner la bonne marche des affaires, fait tout pour éviter tout problème aux marchands étrangers, même soupçonnés d'hérésies. Par ailleurs, leurs membres sont traditionnellement opposés au clergé pour des raisons politiques, juridiques et financières. L'éloignement de la Sorbonne, et l'absence de faculté de théologie empêche l'existence d'un noyau de théologiens capable de répondre aux arguments adverses, et de mener des actions contre les réformésv 44. Les archevêques après François de Rohan sont souvent absents et ne sont pas des relais efficaces pour les catholiques lyonnais. Le soutien de quelques imprimeurs est enfin un élément important. Les premiers sont Pierre de Vingle et Claude Nourry, dès 1525, lors de la présence de Marguerite d'Angoulème. Cette production est stoppée par la faculté de théologie de Paris, puis reprend à partir de 1529 avec des imprimeurs à la limite de l'orthodoxie tels les frères FrellonJean de TournesGuillaume Rouillé et Antoine Vincent. Cette production, qui comprend tous les courants hétérodoxes naissants reste mineure par rapport à la production globale de livres religieuxv 46.

Le second xvie siècle : conflits religieux

photo couleur de tableau

Portrait de François de Tournon

 archevêque de Lyon, d'après

 Jean Clouet

musée Condé.

Après une montée des hostilités dans les années 1550, la décennie 1560 sonne le temps du déchirement religieux de la capitale rhodanienne, s’achevant dans le sang des "vêpres lyonnaises" (septembre 1572).

Montée en puissance du parti réformé 1550 - 1561

La croissance des effectifs des réformés a lieu dans les années 1550 ; malgré la persécution, l'exil vers Genève ou ailleurs de nombreux tenants de la nouvelle religion. En 1551, un pasteur originaire d'Auvergne, Claude Monier, est conduit sur le bucher. Durant toute la décennie, des exécutions ont lieu, souvent appliquées sur des étrangers.

À cette époque, le mouvement réformé devient à Lyon un parti politique, qui gagne en hardiesse devant les tergiversations du pouvoir royal de la régente Catherine de Médicis, puis de Charles IX. En 1560, ils tentent de prendre la ville mais échouent à cause de l'action du lieutenant général Antoine d'Albon, qui conduit une sévère répression. Malgré cela, Catherine de Médicis jugeant d'Albon trop dur, elle l'écarte en le faisant nommer archevêque d'Arles l'année suivante.

L'année suivante, l'édit de juillet 1561 leur octroie la liberté de conscience. Des travaux s'engagent pour établir un lieu de culte en ville, mais le consulat renvoie les réformés en dehors, à la Guillotière. L'édit du  qui garantie la liberté de culte ouvre de nouvelles perspectives au mouvement. Ceci d'autant plus que deux de leurs membres entrent au consulat, signe de leur force politique nouvelle : Henri de Gabiano, libraire, et Guillaume Henri, marchand de soie. À cette époque, plus de 4 000 personnes participent au prêche. À la veille des guerres de religion, Lyon, est une des villes du royaume où la présence protestante est importante avec ParisOrléans ou Rouen.

Lyon, capitale protestante 1562 - 1563

L'action religieuse contre la religion catholique la plus forte des protestants au moment de leur prise du pouvoir est la vague iconoclaste. Toutes les églises sont pillées puis fermées au culte catholique. Les statues de la cathédrale Saint-Jean sont systématiquement détruites ou décapitées et l'église comme le cloître Saint-Just entièrement rasés dès le 23 maiv 9. Cette action s'inscrit dans une vague touchant plusieurs endroits du royaume. Au même moment, des destructions similaires se produisent dans les villes du Val de Loire, de Normandie, de la vallée du Rhône telles Le Mans, Poitiers ou Angoulème

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La guerre religieuse 1563 - 1572

La restauration catholique se fait à Lyon moins par l'action des archevêques que celui de prêtres résolus, au premier rang desquels il faut citer le père Edmond Auger, arrivé en ville en 1563. Il déploie une énergie considérable durant quinze ans, faisant un grand nombre de prédications, montrant un grand dévouement lors de l'épisode de peste de 1564, soutenant des controverses avec les pasteurs et faisant publier un catéchisme largement diffusé Il est aidé par ce qui est le pilier catholique de la ville à cette époque : le collège de la Trinité, confiés aux jésuites en 1567.

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La ligue et la restauration catholique 1572 - 1595

La restauration catholique est, enfin, parachevée par l'archevêque Pierre d'Épinac. Rigoureux et sérieux, il réforme l'administration du diocèse avec énergie, mais surtout montre l'exemple auprès de la population.

 

Sources wilkipedia

 

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http://www.mba-lyon.fr/

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